II. ÉTAT DES LIEUX DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE ET FRANÇAISE

A. UN PAYS DÉPENDANT DE L'AIDE INTERNATIONALE

1. Une APD équivalente à plus de 10 % du PIB

Le FMI et le Laos ont conclu en avril 2001 un accord sur une Facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance (FRPC), ouvrant la voie à une reprise de l'assistance apportée par le Fonds et la Banque mondiale, qui était suspendue depuis 1997. Le Laos a en revanche refusé de se voir appliquer l'initiative PPTE , perçue comme une mise sous tutelle des recettes budgétaires par les institutions financières internationales.

Les bailleurs internationaux sont aujourd'hui nombreux au Laos 98 ( * ) , ce qui en fait un des pays les plus aidés de la région en part du PIB (11,2 % en 2005). L'aide internationale au développement a toutefois diminué au début de l'actuelle décennie du fait de la baisse de 30 % de l'aide du Japon, qui demeure cependant de loin le premier bailleur . Selon le CAD de l'OCDE, l'aide totale nette atteignait néanmoins 272 millions de dollars en 2004 et 296 millions de dollars en 2005 (hors Chine), répartis de la manière suivante :

Ventilation des décaissements d'aide internationale au Laos en 2005 (hors ONU)

(en millions de dollars)

Bailleurs

Institutions financières

Commission européenne

Bilatéraux européens

Japon

Autres bilatéraux

Montant

100 (dont AID 42 ; BAsD 58)

10

74 (dont Suède 19 ; France 21 ; Allemagne 15)

65 (hors JBIC)

47 (dont Corée 7 ; Australie 10)

Part

33,8 %

3,4 %

25 %

22 %

15,9 %

Source : site Internet de l'OCDE, aide par récipiendaire

L'assistance des institutions financières multilatérales est conditionnée à la mise en oeuvre des réformes structurelles indispensables, dont le rythme est ralenti par le manque de volonté politique du gouvernement , malgré quelques progrès depuis un an (cf. supra ).

Parmi les bailleurs, on peut en particulier relever :

- la BAsD , qui intervient au Laos depuis 1966 et a distribué 710 millions de dollars de prêts entre 1995 et 2005, essentiellement dans les secteurs des transports, de l'assainissement et de l'approvisionnement en eau, et de l'énergie. La BAsD cherche à promouvoir une coopération sous-régionale et à développer des partenariats avec les autres bailleurs de fonds, notamment l'AFD. La stratégie pour 2007-2011 marque une concentration accentuée sur quatre secteurs (approvisionnement en eau, santé, éducation, développement urbain) mais se traduit également par une réduction significative de l'enveloppe-pays , en partie compensée par les programmes régionaux ;

- la Banque mondiale a apporté 711 millions de dollars de prêts et 31 millions de dollars de subventions (non compris l'assistance technique) depuis 1977. Les projets en cours s'élèvent à 107,6 millions de dollars. Votre rapporteur spécial déplore le faible montant des dons octroyés par la Banque dans un des pays les plus pauvres d'Asie . La stratégie d'assistance pays (CAS), approuvée en mars 2005, est centrée sur l'intégration régionale et le développement du secteur privé, la fiabilisation du système de dépenses publiques, le renforcement des capacités nationales de lutte contre la pauvreté, et la mise en oeuvre du projet Nam Theun 2. Le programme de réduction de la pauvreté (PRSC), sous forme d'aide budgétaire , est l'outil privilégié de la Banque pour soutenir le programme national NGPES, et les quatre tranches du PRSC seront décaissées au cours de la période 2005/2008 ;

- le Programme des Nations unies pour le développement ( PNUD ) poursuit des objectifs de développement d'instruments harmonisés de lutte contre la pauvreté, d'intégration régionale et de développement économique équitable, de gestion durable des ressources naturelles et d'action humanitaire. Le PNUD joue un rôle central dans le processus de coordination des bailleurs (cf. infra ) par l'organisation de « tables rondes » sectorielles ;

- la Commission européenne (cf. infra ), qui dans le cadre de sa stratégie d'assistance pays 2006-2010 (approuvée tardivement, en février 2007) se désengage de l'aide-projet dans les secteurs « traditionnels » (développement rural, éducation, santé), considérés comme suffisamment couverts par les autres bailleurs, et privilégie désormais l'appui budgétaire. Le caractère affecté ( à un secteur spécifique) ou non de ce soutien n'était pas connu en mars 2007. Les autres domaines d'intervention de la Commission sont les programmes de délocalisation des populations et l'environnement ;

- parmi les principaux bailleurs bilatéraux figurent l'Australie, le Japon (premier bailleur bilatéral depuis 1991 99 ( * ) via la JICA - Japan International Cooperation Agency - et la JBIC - Japanese Bank for International Coooperation ) et la Suède (environ 20 millions de dollars de subventions annuelles 100 ( * ) ). En 2005, la France était le premier bailleur européen et le deuxième donateur bilatéral derrière le Japon.

Votre rapporteur spécial relève que la coopération française (ministères ou AFD) ne figure pas dans la liste - établie par la Banque mondiale - des bailleurs qui organisent des ateliers, séminaires et études sectorielles à vocation juridique et économique (commerce, développement du secteur privé, gouvernance) en 2006-2007. Des bailleurs tels que la BAsD, la JICA, l'Australie et l'Union européenne (généralement par l'intermédiaire de consultants) sont en revanche bien répertoriés. Cette absence de la France illustre une implication insuffisante dans la formation des cadres locaux et une insertion tardive ou insuffisante dans le dispositif de concertation et d'information inter-bailleurs 101 ( * ) .

Les stratégies pluriannuelles d'intervention des bailleurs mettent en exergue des priorités souvent communes, ce qui dénote des progrès insuffisants en matière de concertation et de complémentarité . Comme au Cambodge, un document (cf. tableau ci-après) permet néanmoins d'identifier l'articulation des interventions des bailleurs dans les différents secteurs prioritaires.

La France se positionne comme un bailleur de taille moyenne, mais dont les contributions apparaissent mieux ciblées qu'au Cambodge , quoique de façon moins affirmée que les autres bailleurs bilatéraux, qui en général n'interviennent pas dans plus de 4 secteurs.

2. Une coordination internationale plus poussée que celle des Etats européens

Le Laos a choisi le mécanisme des « Tables rondes » pour la mobilisation et la coordination de l'aide internationale. Neuf réunions se sont ainsi tenues depuis le lancement du processus à la fin des années 80, la dernière à Vientiane fin novembre 2006. Lors de cette table ronde, le VI e plan quinquennal, le programme d'investissement public et le nouveau plan stratégique de bonne gouvernance ont été présentés et discutés pour la période 2006-2010. Une version locale de la déclaration de Paris , la « déclaration de Vientiane », a également fait l'objet de 23 signatures, dont celle de la France. Des réunions annuelles de suivi sont organisées et permettent un dialogue continu entre l'ensemble de la communauté des donateurs et les autorités lao.

Par ailleurs, les bailleurs de fonds ont constitué des « groupes de travail informels sectoriels » qui permettent d'échanger des informations et d'harmoniser les politiques et les pratiques d'aide, et doivent désormais travailler étroitement avec les groupes sectoriels mis en place par les autorités (« groupes miroirs »). Les réunions conjointes s'organisent progressivement. La France ( via l'AFD) assure la co-présidence du groupe de travail sur le développement rural.

Elle a ainsi organisé, en février 2006, la première rencontre de ce groupe, réunissant le groupe des bailleurs et le groupe miroir, et proposé un programme de travail et un calendrier. Cette prise en main, bien avant les autres bailleurs de fonds pour les autres secteurs, illustre l'intérêt de ce secteur prioritaire pour la coopération française et la place reconnue par les autorités laotiennes, à la France, dans ce domaine.

La coordination européenne est quant à elle entretenue sur une base non régulière . Des réunions thématiques sont fréquentes entre les ambassades des pays représentés à Vientiane, mais leur participation se révèle aléatoire (cf. infra ).

Articulation des interventions de la France avec celles des autres bailleurs de fonds (2007-2010) - DCP France - Laos 2007-2011

Secteurs prioritaires

Banque mondiale

Nations-unies

BAsD

Union Européenne

Allemagne

Australie

Belgique

Canada

Japon

Luxembourg

Suède

Suisse

France (montants indicatifs du DCP)

1. Développement rural

Agriculture

XX

X

XX

X

X

X

X

X

X

X

Développement rural

XX

XX

X

X

X

X

X

X

X

Environnement / ressources naturelles

XX

XX

XX

X

X

Forêt

XX

X

X

Sécurité alimentaire

X

2. Accroissement de l'accès de la population à l'éducation

Education

XX

XX

XX

X

X

X

3. Amélioration et extension de la qualité des soins de santé

Santé

XX

X

XX

X

X

4. Développement des infrastructures

Transport

XX

XX

X

Energie

XX

Développement urbain

XX

X

X

Eau et assainissement

X

XX

X

5. Autres

Bonne gouvernance

XX

X

X

XX

X

X

X

X

Actions de prévention (mines)

X

Macroéconomie et secteur privé

X

X

XX

X

X

Renforcement des capacités

X

X

Sécurité sociale

X

Réduction des risques naturels

X

Total décaissements prévus 2007-2011

XXX

XXXX

XXXX

XX

X

XXX

XX

X

X

X

XX

XX

XX

Source: matrice des bailleurs de fonds (données 2006)

XXXX

> 100 M€

XXX

50-100 M€

XX

10-50 M€

X

< 10 M€

* 98 La question des droits de l'homme et du traitement de la minorité hmong demeure cependant un obstacle majeur dans les relations avec les Etats-Unis (qui ont refusé d'accorder au Laos le bénéfice de la clause de la nation la plus favorisée), devenus un partenaire économique important mais dont l'aide publique est très modeste.

* 99 Dont le cadre d'intervention pays pour 2007-2010 est similaire à celui des autres bailleurs (atteinte des ODM, renforcement des capacités nationales...).

* 100 Principalement dans les secteurs de l'éducation, des infrastructures, de la santé, de la gouvernance et des droits de l'homme.

* 101 De fait, le site Internet de l'ambassade - qui se révèle riche en informations - ne fait guère mention du rôle de la France dans ce dispositif de concertation.

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