B. LES MODALITÉS D'EXERCICE DE LA TUTELLE FINANCIÈRE

1. Une tutelle administrative et financière efficiente...

Comme tout établissement public, le musée du Louvre fait l'objet d'un suivi financier précis de la part de sa tutelle, soit en l'occurrence la DAG du ministère de la culture et la direction du budget du ministère de l'économie. Sont ainsi suivis l'équilibre général des recettes par rapport aux dépenses, l'adéquation des moyens et des objectifs mais aussi des ratios plus précis relatifs aux dépenses de personnel, à la marche du musée où encore aux dépenses scientifiques et culturelles. L'évolution de la masse salariale , l'état du compte d'exploitation de l'auditorium ainsi que celui du fonds de roulement font l'objet d'une attention particulière également.

Les rencontres avec les tutelles précitées se font soit dans le cadre institutionnel de la préparation de chaque conseil d'administration , soit dans le cadre de réunions ad hoc sur un sujet précis tel que la discussion sur le tableau des emplois de l'établissement, l'examen d'un grand projet à l'instar du département des Arts de l'Islam, ou encore des problématiques thématiques telles que les réserves d'oeuvres.

Le dialogue de gestion avec les tutelles a été placé sous le sceau d'un contrat d'objectifs et de moyens établis pour la période 2003 à 2005. Ce contrat signé entre le musée du Louvre, le ministère de la culture et de la communication et le ministère de l'économie des finances et de l'industrie, avait été analysé par votre rapporteur spécial dans le cadre de l'examen de la loi de finances pour 2005, comme le rappelle l'encadré suivant.

Les répercussions de la LOLF sur les relations entre le ministère
et ses établissements publics : l'exemple du Louvre

Le ministère de la culture et l'établissement public du musée du Louvre ont mis en place en 2003 un contrat triennal d'objectifs et de moyens basé sur trois principes de gestion :

- une visibilité stratégique et financière pluriannuelle ;

- un engagement réciproque des partenaires : engagement du musée sur l'atteinte des objectifs définis et engagement des institutions de tutelles sur l' allocation des moyens humains et financiers nécessaires à l'atteinte des objectifs ;

- une évaluation des résultats .

Les objectifs du musée du Louvre sont ordonnés autour de trois grands axes :

- intensifier le développement culturel ;

- développer la protection et la mise en valeur du patrimoine ;

- renforcer les fonctions administratives et techniques .

Les objectifs sont assortis d' indicateurs qualitatifs et quantitatifs de résultat . Sur la période du contrat (2003-2005), le musée s'est engagé à établir un compte rendu annuel d'exécution comprenant notamment un chiffrage des indicateurs définis, lesquels feront l'objet d'une certification par un auditeur externe.

Il a, dans ce cadre, établi un rapport annuel de performances à l'issue de l'année 2003. Les tableaux suivants présentent lesdits indicateurs, et figurent en annexe 1.

Source : extrait du fascicule budgétaire relatif à la culture, annexe n° 6 - rapport général n° 74 (2004-2005) de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances, sur le projet de loi de finances pour 2005

Des objectifs ambitieux avaient été fixés au Louvre dans le cadre de ce contrat d'objectifs et de moyens, notamment en termes de ressources propres . Il convient de noter qu'en contrepartie, le Louvre s'est vu garantir sur cette période un niveau de subventions budgétaires confortable . Grâce au contrat, l'État et le musée disposait d'une visibilité pluriannuelle sur la stratégie et les moyens du Louvre avec des objectifs clairs dont la réalisation était mesurée tous les ans par une batterie d'indicateurs, puis certifiée par l'inspection générale de l'administration et des affaires culturelles du ministère de la culture. Les modalités d'exercice de la tutelle semblaient tout à fait satisfaisantes, comme en témoignent les très bons résultats du musée sur cette période.

Le contrat d'objectifs et de performances tendait également à responsabiliser les gestionnaires du musée du Louvre. Celui-ci avait obtenu une grande autonomie de gestion , instrument indispensable pour une meilleure efficacité dans l'accomplissement de ses missions. Etait ainsi prévu le transfert de la gestion des personnels du musée du Louvre à l'établissement public. Cette déconcentration représentait un réel progrès dans la modernisation de la gestion de l'établissement public. Il a pu négocier avec les syndicats un accord social pluriannuel portant des engagements réciproques en matière de relations sociales.

L'établissement public, comme la tutelle, ont jugé favorablement l'expérience menée sur les années 2003 à 2005. La DAG et la direction du budget ont développé avec le musée du Louvre un dialogue de gestion globalement constructif, appuyé sur une connaissance approfondie de l'établissement et un pilotage par le biais des indicateurs du contrat de performances.

2. ... qui devrait se poursuivre au terme du contrat de performances 2006-2008

Le contrat de performances pour les années 2006 à 2008 a été signé par le président du Louvre et le ministre de la culture, le 11 juillet 2006 . Il intègre, par rapport au contrat précédent, un axe dédié à la politique scientifique de l'établissement.

Le contrat de performances comprend les trois parties qui sont les suivantes :

- la première partie définit les objectifs stratégiques fixés au musée du Louvre pour la période de 2006 à 2008 ;

- la deuxième présente le cadrage budgétaire ;

- et la troisième traite des questions relatives aux effectifs .

Les objectifs stratégiques du musée sont ordonnés autour de quatre grands axes :

- améliorer l'accessibilité pour les publics . Il s'agit de placer le public au coeur des préoccupations du musée. Votre rapporteur spécial note par exemple qu'il est prévu de faire passer le taux d'ouverture des salles de 86 % à 95 % sur la période du contrat. Ceci lui semble être un objectif clair et ambitieux ;

- développer la politique scientifique du Louvre et assurer son rayonnement scientifique et culturel. Le Louvre doit mettre en oeuvre un programme pluriannuel de recherche , dont l'inscription au sein du contrat de performances est une nouveauté. Ce programme doit favoriser le travail transversal, en développant au sein du musée des pôles scientifiques pour mettre en commun les compétences, favoriser une politique d'acquisition concertée et mieux couvrir certains secteurs peu ou mal explorés. Le renforcement des liens du musée avec les institutions nationales, telles que l'Institut national d'histoire de l'art, l'institut national du patrimoine, le centre de recherche et de restauration des musées de France, le centre national de la recherche scientifique et les universités, est également prévu. Le Louvre doit renforcer sa présence dans la création, l'animation et la participation à des réseaux de recherche en région. Enfin les relations internationales avec les musées et les chercheurs doivent être développées et mieux formalisées. Les indicateurs retenus visent l'augmentation du nombre des colloques et conférences tenus à l'auditorium, le développement du nombre de projets portant sur les domaines prioritaires du champ scientifique tel que l'Espagne, les pays nordiques, les pays de l'Est, le continent américain, le Soudan, etc. ;

- développer la protection et la mise en valeur du patrimoine . Afin de protéger les oeuvres et le palais, la mise en oeuvre du schéma directeur incendie est prévue, ainsi que la poursuite de la mise en oeuvre du plan de prévention contre l'inondation ou encore l'achèvement du schéma directeur de sûreté ;

- et poursuivre la modernisation de la gestion des ressources humaines et l'optimisation des moyens. Votre rapporteur spécial note qu'une batterie d' indicateurs précis permettant de mesurer le taux d'absentéisme, la validation des définitions de fonctions, la formation des effectifs, ou encore l'effort financier consenti en faveur de la formation est prévue. Il suivra avec attention l'évolution de ces indicateurs.

Le musée s'est engagé à établir un compte rendu annuel d'exécution comprenant notamment un chiffrage des indicateurs définis, lesquels feront l'objet d'une certification par un auditeur externe .

3. L'inscription de projets stratégiques au contrat de performances

Le contrat présente également les trois grands projets stratégiques du Louvre : la création du département des arts de l'Islam, l'accompagnement du projet Louvre-Lens et le projet Pyramide.

Il est prévu de créer un nouvel espace muséographique dédié aux arts de l'Islam au sein du musée du Louvre afin de mettre en valeur les collections sur ce thème, composées de 10.000 pièces, auxquelles s'ajouteront des dépôts substantiels de l'UCAD 11 ( * ) de 3.000 pièces environ. Cet espace, dont l'inauguration interviendra au début de l'année 2009, réservera aux collections permanentes une surface totale de 3.500 m², à laquelle s'ajouteront 1.000 m² de locaux techniques. Trois espaces pédagogiques seront également intégrés ainsi qu'un lieu d'exposition temporaire sur une surface complémentaire de 300 m². Pour cela un chantier d'aménagement de la Cour Visconti et des façades a été lancé. Le coût estimatif de l'ensemble des travaux est de 68,78 millions d'euros . Le ministère de la culture s'est engagé à financer 20 millions d'euros sur la période, ce qui porte l'effort du musée du Louvre à 30 millions d'euros en recherche de mécénat . Votre rapporteur spécial estime qu'il s'agit là d'un projet ambitieux.

L'implantation d'une antenne permanente du musée du Louvre à Lens constitue un aspect essentiel de la politique conduite par le ministère de la culture en faveur de la décentralisation culturelle . Ce projet, qui sera inauguré en 2009, vise à présenter, sur une surface de 5.000 m², des oeuvres importantes du musée, dans le cadre des collections semi-permanentes et d'expositions temporaires. Le Louvre s'engage à programmer la présentation des collections et les expositions dans un souci de transversalité, à mettre en oeuvre une politique des publics adaptée au concept de l'antenne, à proposer une pédagogie innovante, à définir et suivre la mise en oeuvre de la programmation de manifestations culturelles, notamment au sein du futur auditorium, et à développer les partenariats avec les réseaux locaux en concertation avec la DRAC. L'enveloppe financière est de l'ordre de 117 millions d'euros , à la charge des collectivités territoriales et en particulier du conseil régional, qui assure la maîtrise d'ouvrage du projet. Aux termes d'un protocole d'accord signé en mai 2005, le Louvre et le ministère de la culture se sont engagés à consacrer un minimum de quatre agents à temps pleins au projet d'antenne à Lens.

Le projet Pyramide consiste à redonner au hall Napoléon une vocation strictement d'accueil, d'information et de documentation en le libérant des principales fonctions logistiques, que sont les caisses et les vestiaires, réimplantées en amont, aux abords internes de la pyramide. Le dispositif prévu mettrait la fonction accueil à une échelle cohérente par rapport à l'ampleur du site, des collections et du public, tout en permettant aux fonctions de médiation, d'éducation et de transmission des savoirs de se développer. L'achèvement complet du projet serait prévu pour juillet 2011 . Son coût global s'élèverait à 70 millions d'euros . La montée en puissance financière du projet interviendrait à partir de 2008, tant en autorisation d'engagement qu'en crédits de paiement, selon l'échéancier prévu par le contrat de performances.

4. La responsabilisation de l'établissement public

Le ministère de la culture s'engage à ne pas effectuer de régulation sur les montants de subventions prévus sur la période du contrat de performances. En contrepartie, le musée du Louvre appliquera deux principes de gestion étroitement complémentaires :

- la libre utilisation de ses ressources ;

- et la « gestion autonome et responsable », c'est-à-dire sans recours à des crédits budgétaires supplémentaires, d'un éventuel déficit d'exploitation .

Le Louvre sera ainsi libre d'affecter des excédents de ressources dégagés en cours de gestion, en les employant en totalité ou en partie pour financer des besoins émergents, ou en décidant de les virer au fonds de roulement pour se prémunir de pertes ultérieures éventuelles. La contrepartie de cette liberté laissée à l'établissement est l'absence de recours automatique auprès de l'État en cas de déficit , sauf si l'importance des pertes excédait les possibilités d'économie ou de prélèvement sur le fonds de roulement.

L'État s'engage dans ce cadre, à verser les subventions de fonctionnement et d'investissement, par quart, au début de chaque trimestre à l'établissement public.

Votre rapporteur spécial estime que le contrat de performances pour la période 2006 à 2008, signé entre le Louvre et sa tutelle, comporte des engagements forts des deux parties et permet une définition précise des priorités de politique culturelle assignées à l'établissement public.

Une question se pose toutefois, qui a déterminé ces priorités, l'établissement public ou sa tutelle ?

* 11 Union centrale des arts décoratifs.

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