B. QUEL IMPACT DES FACTEURS STRUCTURELS ?

Un récent rapport du Conseil d'analyse économique (CAE) 65 ( * ) souligne l'impact des facteurs microéconomiques dans l'évolution récente du commerce extérieur français. D'après ces travaux, les écarts de spécialisation en termes sectoriels et géographiques n'expliquent qu'une fraction des écarts de performance entre la France et l'Allemagne 66 ( * ) :

- entre 1998 et 2003, 9 % seulement de l'écart de croissance entre les exportations allemandes et françaises proviendraient d'un effet de structure sectorielle, c'est-à-dire du fait que la France serait spécialisée dans des secteurs économiques relativement moins dynamiques ;

- quant à l'orientation géographique des exportations françaises, elle serait certes relativement défavorable, mais ce facteur n'expliquerait que 6 % de l'écart de performance entre la France et l'Allemagne.

Par conséquent, le rapport du CAE estime qu'il faut s'interroger principalement sur la performance de nos entreprises, celles-ci perdant régulièrement des parts de marché par rapport à l'Allemagne, notamment lorsque la croissance s'accélère dans les pays importateurs.

De fait , la France a un peu reculé sur son marché de prédilection, l'Europe (qui représente les deux tiers de ses ventes à l'étranger) , tout en enregistrant un déficit important avec les pays d'Asie émergents, qui constituent le principal moteur de la croissance du commerce mondial et dans lesquels elle n'a pas effectué de percée significative. Le tableau suivant illustre ce propos :

ÉVOLUTION ET SITUATION DES PARTS DE MARCHÉ DE LA FRANCE

PART DANS LES EXPORTATIONS FRANÇAISES EN 2006

PART DU MARCHÉ DE LA FRANCE

SOLDE EN 2006

(milliards d'€)

2001

2006

Union européenne

65,8

10,5

10,0

-  7,6

PECO

5,2

7,9

7,9

+  1,6 (1)

Asie émergente

5,7

3,8

3,9

-  18,2

Proche Orient

3,1

8,6

8,7

+  1,3

(1) En ce qui concerne seulement les nouveaux membres de l'Union européenne (République tchèque, Slovaquie, Pologne, Slovénie, Pays baltes, Roumanie, Bulgarie).

Source : Rapport économique, social et financier - PLF 2008

La question se pose alors de la compétitivité de la France. Votre rapporteur relève que, depuis la deuxième moitié des années quatre-vingt dix, l'augmentation de la productivité en France compense presque intégralement la hausse des coûts salariaux, pour aboutir à une quasi stabilité des coûts salariaux unitaires . Sur cette période, le graphique suivant montre que l'évolution de la compétitivité-coût de la France est, certes, moins favorable que celle d'une Allemagne qui tire ici les bénéfices d'une longue période de rigueur salariale, mais qu'elle se trouve en revanche plus favorable que celles de l'Espagne et l'Italie.

GRAPHIQUE N° 8

COÛTS SALARIAUX UNITAIRES RELATIFS DANS LE SECTEUR PRIVÉ

Ces données sont confirmées par le tableau suivant, qui montre les efforts de marge réalisés par les entreprises françaises pour maintenir leurs situations de marché :

ÉVOLUTION DES INDICES DE COMPÉTITIVITÉ

1995 = 100

Compétitivité prix (1)

Compétitivité coût (1)

Effort de marge relatif (2)

2000

110,3

112,9

97,1

2004

105,4

101,1

104,2

2005

106,9

100,9

105,9

2006

108,0

99,6

108,4

(1) rapport entre les prix et les coûts (principalement salariaux) des exportations de la France et celles des 24 principaux pays de l'OCDE.

(2) Compétitivité prix/compétitivité coût.

Source : Rapport économique, social et financier - PLF 2008

Les causes structurelles de la dégradation du commerce extérieur de la France seraient donc plutôt d'ordre microéconomique et liées à la compétitivité hors-prix des entreprises françaises : variété et positionnement en gamme des produits, comportements de prix, taille des entreprises.

Votre rapporteur observe toutefois, à partir du graphique n° 9 ci-dessous, que si la France connaît depuis 2002 d'importantes pertes de parts de marché, cette évolution succède à quinze années de stabilisation . Sur la période 1986-2002, les parts de marché de la France ont fluctué autour d'une moyenne relativement stable.

GRAPHIQUE N° 9

PART DE MARCHÉ MONDIAL EN VOLUME DE LA FRANCE

Source : INSEE, comptes nationaux trimestriels, calculs DGTPE

Or, les pertes constatées au cours de la période 1992-1997 coïncident avec des mouvements de parité entre le dollar et l'euro.

Au total, il est vraisemblable que la part des facteurs conjoncturels dans la dégradation du commerce extérieur français l'emporte sur la part structurelle et qu'en conséquence, l'évolution de la contribution du commerce extérieur à la croissance soit principalement suspendue aux variables macroéconomiques ci-dessus identifiés.

Cette analyse ne remet toutefois pas en cause le diagnostic sur la recherche, l'innovation et l'investissement en France, qui sont le gage d'une meilleure compétitivité hors-prix et apparaissent donc susceptibles d'amoindrir la sensibilité du commerce extérieur aux différents risques conjoncturels ( cf. chapitre III ).

* 65 « Évolution récente du commerce extérieur français », Rapport de MM. Patrick Artus et Lionel Fontagné, Conseil d'analyse économique (2006).

* 66 « Analyse descriptive du décrochage récent des exportations françaises », Hervé Boulhol et Laure Maillard (Ixis CIB), complément D du rapport précité du CAE.

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