B. UNE DES SOCIÉTÉS LES PLUS INÉGALITAIRES AU MONDE

La société brésilienne est l'une des plus inégalitaires au monde, qu'il s'agisse de la répartition des revenus ou de celle du patrimoine. L'indice de Gini 37 ( * ) se situait ainsi à plus de 57 en 2003, celui-ci oscillant autour de 30 en France. La moitié de la population la plus pauvre recevait, en 2000, 14,5 % du revenu total (contre 13 % en 1991), alors que les 10 % les plus riches bénéficiaient de 46 % du revenu total (contre 49 % en 1991). Plus de 20 % de la population, soit 50 millions d'habitants, vivent avec moins de 2 dollars par jour et plus du tiers se situe sous le seuil de pauvreté. En outre, la classe moyenne (25 % des Brésiliens) est particulièrement vulnérable. Selon le Rapport mondial sur le développement humain 2007-2008 , le Brésil se situait au 70 ème rang mondial, la France occupant par exemple la dixième place.

Ces inégalités sociales se conjuguent à des déséquilibres régionaux eux aussi très importants, quel que soit l'indicateur socio-économique retenu. A titre d'illustration, la mortalité infantile reste deux fois plus élevée dans les régions du nord-est du pays que dans celles du sud-est. Les taux d'équipements en biens durables sont quant à eux deux à trois fois plus élevés dans les régions sud du pays. Dans les zones rurales, plus de la moitié de la population a un salaire inférieur au revenu minimum, alors que ce taux est de 25 % en zone urbaine.

Manifestation de ces inégalités croissantes, l'urbanisation est galopante au Brésil, pays qui compte désormais quinze villes de plus d'un million d'habitants . Les grandes cités exercent un puissant effet d'attraction sur les travailleurs des zones rurales à la recherche d'un emploi qui se regroupent bien souvent dans les bidonvilles (« favelas »). Alors que la société brésilienne était rurale à 60 % dans les années 1950, 80 % des Brésiliens vivent désormais dans les zones urbaines. Or, selon le ministère des villes, il manquerait au moins huit millions de logements sociaux . Entre 2001 et 2010, le pays devrait voir la population des favelas grossir de deux millions d'habitants, ce qui porterait le nombre d'habitants dans ces aires urbaines à 53 millions (sur une population totale prévisible de 200 millions d'habitants à cette date).

Cette concentration de la pauvreté dans de véritables ghettos urbains, mal desservis en transports et dont les habitations sont souvent dépourvues des éléments de confort de base, a par ailleurs aggravé les phénomènes de criminalité (trafic de drogue) et de violence (trafic d'armes) qui ont n'ont pas leur équivalent dans d'autres pays d'Amérique latine. De nombreuses organisations criminelles liées au trafic de drogue contrôlent les quartiers pauvres des grands foyers urbains 38 ( * ) . Les forces de police se révèlent incapables d'endiguer la délinquance et l'insécurité, qui frappent les bidonvilles comme les centres-villes. Ainsi, le Brésil est l'un des pays d'Amérique latine où le taux d'homicide est le plus élevé (vingt fois supérieur à celui de la France).

Face à l'ampleur de ces difficultés, le gouvernement de Lula da Silva a décidé de faire de la résorption des problèmes urbains l'une des priorités de son deuxième mandat, annonçant par exemple le déblocage, en juillet 2007, de 1,25 milliard d'euros pour la viabilité des bidonvilles de l'Etat de Rio de Janeiro.

* 37 Notion statistique fréquemment utilisée pour la mesure des inégalités (notamment par le Programme des nations unies pour le développement ), l'indice de Gini mesure les inégalités de revenus au sein d'un ensemble donné. Un indice se situant à 0 correspond à l'égalité parfaite et à 100 à l'inégalité absolue.

* 38 A tous les niveaux de la société, comme est venu le rappeler le récent scandale ayant touché une des écoles de samba les plus prestigieuses de Rio de Janeiro (voir Le Monde du 3 février 2008 - Crime et drogue au carnaval de Rio ).

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