B. UN SECTEUR QUI SOULÈVE CERTAINES INTERROGATIONS

Les exemples précédents ont montré dans quelle mesure les technologies associées au secteur des semiconducteurs peuvent contribuer à relever les défis sociétaux des prochaines années. Néanmoins, ces mêmes technologies ne sont pas sans poser de réels problèmes en matière d'environnement et de protection des données à caractère privé.

1. Le coût écologique de l'industrie de la microélectronique

a) Une industrie très consommatrice en ressources naturelles

Non seulement la fabrication des circuits intégrés est très consommatrice en ressources naturelles, mais les applications liées à la microélectronique représentent une part non négligeable de la consommation globale d'électricité.

L'image des salles blanches aux taux d'impureté très contrôlés pourrait faire croire que l'industrie des semiconducteurs est une industrie « propre ». En réalité, les produits utilisés l'apparentent davantage à l'industrie lourde et elle s'avère très consommatrice en ressources naturelles.

Ainsi, la fab d'IBM à Fishkill qui fabrique 12.600 plaquettes par mois en 300 mm consomme 3,2 millions de m3 d'eau par an.

La fab d'Altis à Corbeil-Essonnes, qui produit 33.000 plaquettes par mois en 200 mm consomme 217 Gigawatt/h par an.

Selon la déléguée générale de l'association Vivagora 21 ( * ) , une puce requiert 630 fois son poids en énergie fossile et en substances chimiques tandis que la fabrication d'une clé USB exige 250 litres d'eau.

La recherche de performances toujours accrues et la multiplication des applications de la microélectronique conduisent également à utiliser un nombre croissant de matériaux, dont certains sont parfois rares.

C'est le cas de l'indium dont 50 % de la consommation est accaparée par la production d'écrans à cristaux liquides pour les écrans plats, mais également les écrans d'ordinateurs, de téléphones, d'agendas électroniques, d'appareils photos numériques, de montres, de GPS etc. La production annuelle s'élève à 480 tonnes pour des réserves mondiales estimées à 6.000 tonnes.

Par ailleurs, les applications de la microélectronique sont très consommatrices d'énergie. Actuellement, elles représentent 13 % de la consommation d'électricité globale, soit autant que l'éclairage des villes et les prévisions à moyen terme sont alarmantes au regard des objectifs de développement durable.

Le moteur de recherche Google qui gère le plus grand parc de serveurs 22 ( * ) au monde avec environ 500.000 machines réparties sur plus de 32 sites de par le monde consomme 55 gigawatts/h par an, ce qui équivaut au besoin en électricité d'une ville de 45.000 habitants.

Selon les estimations d'un responsable du centre de recherche d'IBM à Almaden, la demande de stockage de données pour chaque serveur croît de 90 % par an. En outre, les fonctions des serveurs évoluent : outre la résolution d'équations différentielles, ils sont amenés à analyser une multitude de données. En conséquence, si aucune amélioration sensible n'intervenait à la fois dans le domaine des microprocesseurs, des mémoires et du stockage des données, en 2020, chaque serveur devrait posséder l'équivalent de 21 millions de disques durs pour la sauvegarde des données, occuperait une surface de près de 7.000 m2 et consommerait 93 megawatts par an !

Le schéma suivant montre l'impact de l'explosion de la consommation d'énergie des serveurs (à la fois pour leur alimentation et pour leur refroidissement) dans le coût global de ces derniers. Depuis 2008, les sommes annuelles consacrées à leur consommation électrique sont plus importantes que le coût du serveur lui-même.

Part de la consommation énergétique dans le coût total
des centres de données (marché américain)

Source : IBM

Une étude de Jonathan G. Kooney de l'université de Standford de 2005 a ainsi montré que les centres de données aux Etats-Unis consommaient 45 milliards de kilowatts/h par an, soit 1,2 % de la consommation totale de l'énergie aux Etats-Unis. Cela correspond à la capacité de 5 centrales de 1.000 Megawatts.

En outre, une proportion non négligeable de l'énergie consommée par les appareils électroniques est utilisée en position de veille, ce qui constitue un gaspillage énorme. Aux Etats-Unis, la proportion d'électricité servant à alimenter la veille des appareils est estimée à 24 % de l'électricité globale consommée par les appareils électroniques, essentiellement les télévisions, les magnétoscopes et les ordinateurs.

Par ailleurs, le développement des mondes virtuels a un coût énergétique bien réel. Ainsi, un avatar de Second Life 23 ( * ) consomme plus qu'un habitant du Brésil !

* 21 Fondée en 2003, l'association Vivagora a pour but de développer une "démocratie participative" et de promouvoir une culture du débat sur les questions scientifiques et technologiques.

* 22 Les serveurs offrent des services qui permettent, par exemple, de stocker des fichiers , transférer le courrier électronique , héberger un site Web , etc.

* 23 Second Life est un monde virtuel en 3 D créé par ses résidents. Les internautes intéressés de participer à ce monde virtuel se créent un personnage (appelé avatar) dont ils organisent la vie, les rencontres etc.

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