B. LE MAINTIEN DE FORTES COMPÉTENCES DE L'ETAT ET LA QUESTION RÉCURRENTE DU FINANCEMENT DES COMPÉTENCES DÉCENTRALISÉES

1. L'Etat conserve de nombreuses compétences en matière d'action sociale

a) La législation, la réglementation et la programmation budgétaire

Au sein des ministères ayant en charge les affaires sociales, la direction générale de l'action sociale (DGAS) , qui s'appuie notamment sur les travaux du conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (CNLE) et du comiteì interministériel de lutte contre l'exclusion (CILE), continue à avoir en charge la législation et la réglementation concernant le taux minimum des prestations d'aide sociale et les conditions d'accès à celle-ci et à piloter la politique de lutte contre l'exclusion de l'Etat . Elle apporte également un soutien financier aux grandes associations et réseaux d'associations intervenant dans le champ social.

Le conseil national des politiques de lutte contre la pauvretéì et l'exclusion sociale (CNLE)

Créé en 1992, Le CNLE est l'outil partenarial principal entre l'Etat et les autres acteurs des politiques d'inclusion sociale. Il a vu ses attributions renforcées par la loi du 29 juillet 1998. Le CNLE :

-donne un avis au gouvernement sur toutes les questions de portée générale qui concernent la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale ;

-assure une concertation entre les pouvoirs publics et les associations, organisations et personnalités qualifiées qui agissent dans le domaine de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale ;

-peut être consulté par le Premier ministre sur les projets de texte législatif ou réglementaire et sur les programmes d'action relatifs à l'insertion et à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale ;

-peut être saisi pour avis par les membres du Gouvernement dans les domaines qui relèvent de leur compétence ;

-peut, de sa propre initiative, proposer aux pouvoirs publics les mesures qui lui paraissent de nature à améliorer la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

Le CNLE est un lieu d'échanges et de dialogue entre ses différentes composantes et joue un rôle de conseil et d'initiateur. Il participe à la réflexion et à l'organisation de tous les documents et évènements relatifs à l'inclusion sociale dont l'élaboration des plans nationaux d'actions, du DPT (document de politique transversale) « inclusion sociale » et les conférences de prévention et de lutte contre l'exclusion.

Par ailleurs, la programmation budgétaire des politiques de lutte contre l'exclusion révèle l'importance persistante du rôle de l'Etat dans ce domaine, malgré la décentralisation.

Ainsi, dans le cadre de la nouvelle présentation budgétaire issue de la loi organique sur les lois de finances LOLF, les interventions sociales de l'Etat sont-elles regroupées dans une mission « solidarité, insertion et égalité des chances » qui comprend sept programmes pour environ 12 milliards d'euros (projet de loi de finances pour 2008). Trois de ces programmes concernent plus directement la lutte contre la pauvreté et l'exclusion et représentent environ 2,3 milliards d'euros :

- le programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » ; les axes stratégiques de ce programme répondent aux priorités définies par le Comité interministériel de lutte contre l'exclusion du 12 mai 2006 qui complètent la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale ;

- le programme « Lutte contre la pauvreté : expérimentation » (qui correspond à l'expérimentation du revenu de solidarité active) ;

- le programme « Actions en faveurs des familles vulnérables ».

A titre de comparaison, les dépenses de RMI représentent quant à elles environ 7 milliards d'euros et l'ensemble des dépenses d'aide sociale des départements, RMI compris, environ 27,75 milliards d'euros en 2006.

Il existe en outre un document de politique transversale (DPT) « inclusion sociale » regroupant tous les programmes de l'Etat concourant à cet objectif (santé publique et prévention, aide à l'accès au logement, accès et retour à l'emploi, enseignement scolaire...). En cohérence avec les exercices européens, le périmètre du DPT « inclusion sociale » reprend celui du plan national d'action pour l'inclusion sociale (PNAI), rédigé par la DGAS et soumis à la Commission européenne.

Chacun des programmes liés à la lutte contre l'exclusion ainsi que le DPT comportent un projet annuel de performance assorti d'objectifs et d'indicateurs.

La politique d'action sociale de l'Etat représente ainsi toujours un volume budgétaire considérable comparé aux dépenses sociales des départements, et son pilotage est totalement autonome par rapport aux orientations stratégiques déterminées par les conseils généraux.

Les politiques de l'Etat en matière de lutte contre l'exclusion

1-Dans le programme « prévention de l'exclusion et insertion des personnes les plus vulnérables » :

-l'amélioration de l'accès aux droits sociaux avec la création des Pôles d`accueil en réseau pour l`accès aux droits sociaux (PARADS) ;

-l'insertion des jeunes avec les points accueil écoute jeunes (PAEJ) ;

-la mise en oeuvre du droit au logement ;

-les mesures d'appui social individualisé (ASI) ;

-l'insertion par l'activité économique (IAE) ;

-l'hébergement d'urgence, les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), les maisons-relais ;

-l'aide aux rapatriés.

2-Dans le programme « lutte contre la pauvreté : expérimentations » : le RSA.

3-Dans le programme « action en faveur des familles vulnérables » :

-l'allocation de parent isolé (API);

-les 250 établissements d'information, de conseil conjugal et familial (EICCF) ;

-les réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents (REEAP) ;

-les actions d'accompagnement à la scolarité.

4-Dans le programme handicap et dépendance :

-l'AAH ;

-l'aide aux personnes âgées.

5-Enfin dans le programme protection maladie :

-la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC);

-l'aide médicale d'Etat (AME).

b) La déclinaison au niveau local des politiques de l'Etat

Malgré la décentralisation, l'Etat dispose toujours de ses services déconcentrés chargés de l'aide sociale et de la lutte contre l'exclusion, ainsi que d'institutions de coordination locale des acteurs de l'insertion :

- les directions régionales des affaires sanitaires et sociales (DRASS) sont responsables de la mise en oeuvre des politiques sanitaire, médico-sociale et sociale au niveau régional, comprenant notamment le contrôle de l'application de la législation et de la gestion des organismes de protection sociale et l'évaluation de ces politiques;

- l'échelon opérationnel est constitué par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDAS) . Le décret du 6 décembre 1994 210 ( * ) prévoit que les DDASS assurent, sous l'autorité du préfet, la responsabilité de la mise en oeuvre des politiques sanitaire, médico-sociale et sociale définies par les pouvoirs publics. Cependant, cet échelon a vu ses compétences se réduire considérablement par suite des transferts au conseil général ;

- le pilotage ainsi que l'animation sur les territoires des politiques de prévention et de lutte contre l'exclusion s'appuient depuis 2007 sur les commissions départementales de la cohésion sociale (CDCS) , dont le rôle est défini par une circulaire de 2007 211 ( * ) . Cette circulaire rappelle aux services de l'Etat que le département est bien le chef de file de l'aide sociale et que l'Etat doit laisser aux autorités locales « le maximum de marge de manoeuvre ». L'Etat doit en outre « mieux associer les collectivités à l'élaboration des politiques qui les concernent ». Parallèlement cependant, l'Etat garde, par le biais des CDCS, un rôle d'impulsion et de coordination locale qui semble à première vue concurrencer le rôle de chef de file du conseil général, d'autant qu'il existe deux autres commissions sociales de l'Etat dites « proches » de la CDCS : la CDEI (commission départementale de l'emploi et de l'insertion) et la commission départementale pour la promotion de l'égalité des chances et la citoyenneté (COPEC).

Ainsi, bien que le département soit désormais, dans les textes, le chef de file de l'insertion, l'Etat pilote toujours une politique de lutte contre la pauvreté avec ses propres objectif et indicateurs , en s'appuyant sur ses propres services centraux et déconcentrés, avec des organes de coordination locaux parallèles à ceux des départements.

* 210 Décret n° 94-1046 du 6 décembre 1994 relatif aux missions et attributions des directions régionales et des directions départementales des affaires sanitaires et sociales.

* 211 Circulaire DGAS/PILE/PIA/2007/125 du 3 avril 2007 relative aÌ la mise en place des commissions départementales de la cohésion sociale.

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