Déplacement en Pologne - (21 et 22 mai 2008)

COMPTE-RENDU DU DÉPLACEMENT EN POLOGNE

(21 ET 22 MAI 2008)

Composition de la délégation :

MM. Bernard Seillier, rapporteur, Jean-François Humbert, Jean Desessard, Alain Gournac, Mme Jacqueline Panis

Programme

Jeudi 22 mai

- vol Paris-Katowice (via Francfort) ; transfert en bus de Katowice vers Cracovie, capitale de la Voïvodie de Petite Pologne

Vendredi 23 mai

- 2 h 00 Installation à l'hôtel Francuski

- 6 h 30 Petit déjeuner de travail avec M. Pascal Vagogne, Consul général de France à Cracovie, accompagné de Mme Anna Pawlowska, adjointe du conseiller pour les affaires sociales de l'ambassade de France ;

- 7 h 00 Départ en bus pour Jankowice, située à 200 km, dans la Voïvodie de Sainte Croix ;

- 9 h 45 Rencontre avec Soeur Magorzata Chmielewska et ses collaborateurs et visite des différents sites de l'association caritative « Chleb ycia » (Pain de vie) ;

- 12 h 00 Déjeuner de travail sur place avec les responsables et des membres de l'association ;

- 18 h 25 Départ de Cracovie Balice pour Roissy, via Munich.

I. Le système polonais de lutte contre la pauvreté et l'exclusion

A. Le dispositif polonais d'aide : critères, minima, prestations en nature

Dans le système polonais d'aide sociale, le terme de minimum social n'est pas employé. Le dispositif n'a pas pour objectif d'élever tous les revenus inférieurs au niveau d'un minimum social défini. En revanche, le système utilise le concept de « critère de revenu », c'est-à-dire le seuil d'intervention sociale, donnant accès aux allocations et aux prestations en nature de l'aide sociale.

1. L'aide sociale

Actuellement, conformément à l'article 8 alinéa 1 point 1 et 2 de la loi du 12 mars 2004 relative à l'aide sociale (J.O. de 2004 No 64, pos. 593 avec amendements ultérieurs), le critère de revenu a été fixé à la somme de 477 zloty (134 euros) pour les personnes seules et de 351 zloty (99 euros) par personne dans un foyer (montant net après impôt).

Les personnes dont les revenus sont supérieurs aux seuils cités ci-dessus peuvent se voir refuser l'octroi de l'aide sociale. Elles peuvent cependant bénéficier d'une aide financière remboursable, si l'aide permet de répondre aux objectifs de l'aide sociale. Enfin, dans des situations particulièrement difficiles, le remboursement ne sera pas demandé.

Conformément l'article 9 alinéa 1 de la loi précitée, les critères de revenus sont revalorisés tous les 3 ans et tiennent compte de l'analyse du seuil de l'intervention sociale effectuée par l'Institut du Travail et des affaires sociales, conformément à un arrêté du ministre de la politique sociale du 7 octobre 2005 (J.O. 05.11.1762). Suivant cette disposition, le seuil de l'intervention sociale est défini sur la base d'un panier de biens et de services, élaboré en fonction de normes minimales de consommation et d'usage de biens et services, exprimé en prix de marché durant la période analysée, puis corrigé en fonction de comportements réels de consommation de foyers types à faible revenus. Le champ de besoins indispensables à l'existence dont on tient compte pour définir le seuil de l'intervention sociale comprend: les dépenses de nourriture, le loyer, les vêtements et chaussures, l'éducation, la protection de la santé et l'hygiène, le transport, les dépenses de culture, de sport et de loisir. Les dépenses minimales dans ces catégories devraient couvrir les besoins indispensables à l'existence d'individus ou de familles. Les résultats d'analyses du seuil de l'intervention sociale sont transmis au ministre compétent en matière de protection sociale au 15 février de l'année de la revalorisation.

Tous les ans, au 15 avril date limite, le ministre présente à la « Commission tripartite des affaires sociales et économiques » (Commission tripartite de dialogue social de partenaires sociaux) l'information sur le minimum d'existence défini par l'Institut du Travail et de la Politique sociale. Si durant l'année le montant du critère de revenu d'une personne seule et celui du critère de revenu par personne au foyer est égal ou inférieur au minimum d'existence, la Commission peut demander au Conseil des Ministres de revaloriser les montants de critères de revenus.

La dernière modification revalorisation a eu lieu le 1er octobre 2006 et a été publiée par arrêté du Conseil des ministres du 24 juillet 2006 (J.O. de 2006 N° 135, pos., 950). Ainsi, les montants actuels précités sont en vigueur depuis le 1er octobre 2006 (477 zloty et 351 zloty) contre 461 et 316 auparavant.

2. Les allocations familiales

Les prestations familiales (loi du 28 novembre 2003 sur les prestations familiales, J.O. No 139, pos. 992, avec amendements ultérieurs) et l'acompte de la pension alimentaire (loi du 22 avril 2005, sur les procédures à l'encontre de débiteurs alimentaires et sur l'acompte alimentaire, J.O. N° 86, pos. 732 avec amendements ultérieurs), ne sont attribués qu'aux familles qui répondent aux critères de revenus strictement définis. Ils sont définis à partir de résultats de l'analyse du seuil de soutien aux revenus de familles, réalisée par l'Institut de travail et des affaires sociales.

Les modalités de détermination du seuil sont définies par l'arrêté du ministre du travail et de la politique sociale du 25 avril 2005 (J.O. N°80, pos 70). L'analyse tient compte de biens et de services dans les catégories suivantes : dépenses (nourriture, loyer, vêtements, chaussures, éducation, protection de la santé et hygiène, transport, culture, sport et récréation), normes de consommation de biens et de services définies par les experts et confirmées par l'analyse du niveau des dépenses des ménages, ainsi que le niveau des prix.

Actuellement, une famille peut bénéficier des prestations familiales, si son revenu moyen mensuel net par personne ne dépasse pas 504 zloty (142 euros), et pour une famille avec un enfant handicapé, 583 zloty (164 euros) par personne. Le critère de revenu donnant droit à l'acompte de la pension alimentaire est également de 583 zloty par personne, indépendamment du fait si l'enfant est handicapé ou non (montant net après impôt).

Les deux premiers critères sont revalorisés tous les 3 ans et tiennent compte des analyses de l'Institut du Travail et des affaires sociales, la prochaine revalorisation interviendra en 2009. En revanche, le critère donnant droit à l'acompte de la pension alimentaire, a été porté à compter du 1er octobre 2008 à 725 zloty (204 euros) par personne, en vertu de la loi du 7 septembre 2007 relative à l'aide aux personnes bénéficiaires de pensions alimentaires (J.O. N° 192 pos. 1378)

3. Les minima garantis par l'Etat :

- salaire minimum : défini au cours de la programmation budgétaire pour l'année suivante. Son augmentation est négociée au sein de la Commission tripartite du dialogue social.

- retraite et pension minimales financées par le Fonds des assurances sociales garanti par l'Etat : soumises à revalorisation annuelle basée sur l'indice de croissance des prix de biens et services, augmenté d'au moins 20 % du taux réel de hausse de rémunérations.

- allocations chômage : un montant unique, variant en fonction de l'ancienneté (trois catégories) et du taux de chômage dans la région de résidence (trois catégories qui déterminent la durée de versement de l'allocation). Les allocations sont revalorisées au 1er juin de chaque année en fonction de l'indice de croissance de prix de biens et services de l'année précédente. Elles ne sont pas revalorisées lorsque l'indice est resté au même niveau ou lorsqu'il était négatif.

4. Soutien aux familles en difficulté

Dans le cadre de l'aide sociale, l'accent est mis dans un premier temps sur la satisfaction de besoins vitaux de bénéficiaires (nourriture, hébergement, vêtements), surtout lorsqu'il s'agit de personnes âgées et d'enfants. Ensuite, les travailleurs sociaux entreprennent de travailler avec les personnes et les familles, afin de les aider à surmonter la précarité de leur situation. Ce travail consiste principalement à insérer et motiver ces personnes à changer leurs habitudes (par exemple, apprendre à maîtriser et optimiser les dépenses, à devenir actif dans la vie sociale et publique), ainsi qu'à retrouver sa place sur le marché de l'emploi, notamment en s'appuyant sur les offices locaux de l'administration de travail ou les employeurs.

Trois outils sont mis en oeuvre :

- Le contrat social

Conformément à l'article 108 alinéa 1 de la loi du 12 mars 2004 précitée sur l'aide sociale, dans la perspective de définir les modalités de l'aide apportée à la personne ou à la famille en difficulté, le travailleur social peut conclure un contrat social avec la personne ou la famille. Il s'agit d'un document écrit, signé avec le demandeur d'aide, définissant les droits et les obligations des deux parties, dans le cadre d'actions communes visant à surmonter les difficultés de la situation actuelle du (des) bénéficiaire(s).

Les conditions du contrat doivent être négociées afin de fixer des objectifs réalistes, dans le cadre d'un partenariat entre le client et le travailleur social. Des financements peuvent être accordés pour la réalisation des objectifs et notamment pour la formation professionnelle, le remboursement de frais de voyage pour les entretiens d'embauche, ou encore un financement complémentaire des dépenses quotidiennes, par exemple de nourriture.

- Le soutien psychologique et spécialisé

Les personnes et les familles en difficulté peuvent bénéficier gratuitement d'un soutien psychologique pour la solution de problèmes familiaux, d'autorité parentale, ou de troubles émotionnels sur le plan professionnel et social. De même, une aide des pédagogues ou de juristes est prévue.

- L'aide alimentaire

Dans le cadre du programme pluriannuel « Aide alimentaire de l'Etat », introduit par une loi du 29 décembre 2005, entré en vigueur le 31 décembre 2005 et prévu jusqu'en 2009, il existe la possibilité d'accorder une aide en nourriture aux personnes nécessiteuses.

Le programme est adressé avant tout aux enfants et adolescents mais peuvent aussi en bénéficier les familles en difficulté, en particulier les personnes seules, âgées, malades ou handicapées - lorsque, conformément à la loi, leur revenu ne dépasse pas 150 % du montant de revenus précités d'octroi de l'aide sociale. Cela signifie en pratique qu'une personne seule peut bénéficier de l'aide alimentaire lorsque son revenu est inférieur à 715,50 zoty (201 euros) et à 526,50 zoty (148 euros) au foyer. Le programme prévoit soit les prestations en nature (fourniture de repas, de produits alimentaires), soit une allocation pour l'achat de repas ou de nourriture. Enfin, les personnes bénéficiaires peuvent aussi profiter de l'aide alimentaire en provenance de l'UE, distribuée par les Centres d'aide sociale ou par le réseau de Banques alimentaires, du Comité polonais de l'Aide sociale, de la Croix Rouge polonaise et de Caritas Polska.

B. Les observatoires et la méthode ouverte de coordination (moc)

La Pologne va bénéficier dans les années 2008-2013 de programmes du FSE pour la réalisation de projets systémiques dont l'objectif serait de mettre en place des solutions modèles, notamment dans le cadre de la création de réseaux d'observatoires d'exclusion sociale dont l'objectif serait d'informer « à l'avance » de tous les changements dans les régions relevant du champ de la politique sociale. Un observatoire national ou un réseau d'observatoires seraient susceptibles d'aider en amont à entreprendre les actions à caractère stratégique face aux évolutions du marché local (par ex. marché du travail).

Tout en soutenant la méthode ouverte de coordination (MOC) comme un outil efficace de coopération européenne, dans le cadre de réflexions en cours sur sa modification, le ministère retient particulièrement la proposition de renforcer les actions visant à éliminer les barrières dans l'accès au marché du travail, en mettant l'accent sur l'adaptation d'instruments du marché du travail aux besoins individuels. On notera que cet aspect est déjà pris en compte dans les amendements préparés à la loi de 2004 « sur l'emploi et la promotion d'institutions de travail » (cf. infra), notamment en matière de standards uniformes de services dispensés sur le territoire national.

La Pologne soutient les initiatives de l'Union européenne concernant la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale qui s'inscrivent dans les priorités nationales de la politique sociale. Dans le cadre de l'initiative d'instaurer l'année 2010 « Année de la Lutte contre la Pauvreté et l'Exclusion sociale ».

Durant les années 2007-2013, il est prévu de mettre en oeuvre en Pologne de nombreuses actions visant à réduire les zones d'exclusion sociale et d'aider à la réinsertion professionnelle des personnes en danger d'exclusion. Dans ce but, nombre d'initiatives seront développées pour favoriser une coopération plus étroite entre les institutions du marché du travail et les institutions d'aide sociale et d'intégration sociale. Il est important de mettre en place de nouveaux mécanismes, et d'améliorer ceux qui existent déjà, permettant ainsi de rationaliser le système d'insertion professionnelle de chômeurs et de personnes en danger d'exclusion sociale. Cela exige un élargissement du champ de la politique active du marché du travail, en assurant notamment un niveau élevé de coordination et de cohésion d'actions entreprises, ainsi que le développement du système d'échanges d'information et d'expériences entre les institutions qui assurent cet aide. Il est aussi important d'introduire les standards uniformisés de services de l'aide sociale, ainsi que de mettre en place les programmes intégrés de formation tendant à élaborer des méthodes communes d'action dans le domaine de l'emploi et de l'intégration sociale.

C. Le soutien au retour sur le marché du travail des personnes qui en avaient été exclues

L'insertion professionnelle de chômeurs et des personnes inactives est le principal défi de la politique de l'emploi de l'Etat. Une politique efficace de lutte contre l'exclusion durable du marché du travail devrait identifier de manière précoce les besoins de clients des institutions du marché du travail et d'identifier leur potentiel professionnel. Il est aussi important de faciliter l'accès aux services des intermédiaires du marché du travail et au conseil professionnel, déterminants dans la première phase après la perte de l'emploi, ainsi qu'à une aide plus personnalisée aux travailleurs les plus en difficulté sur le marché de travail.

La Pologne a introduit durant les dernières années de nombreux instruments et mécanismes qui facilitant la réadaptation de personnes et de groupes sociaux. Les principales dispositions relatives au marché du travail sont portées par la loi relative à « la promotion de l'emploi et les institutions du marché du travail » du 20 avril 2004 (J.O. n° 99 de 2004 avec amendements ultérieurs).

1. Les jeunes et les plus de 50 ans

La loi met un accent particulier sur les problèmes de l'exclusion sociale et de la marginalisation de jeunes sur le marché du travail. L'ensemble des questions relatives à l'emploi et la réinsertion de mineurs et de jeunes travailleurs a été confié à OHP (Ochotnicze Hufce Pracy - des Groupes Volontaires du Travail, institution dépendant du ministère du travail), par ailleurs responsables de la formation et de l'éducation de jeunes. Les principales missions d'OHP sont orientées sur l'emploi pour les jeunes de plus de 15 ans qui n'ont pas terminé l'école primaire ou le collège ou qui ont cessé leur scolarité après le collège, ainsi que l'emploi de jeunes chômeurs de moins de 25 ans.

Pour faciliter l'accès de certaines personnes et familles aux services éliminant les barrières d'accès au marché du travail, les Offices de travail tant de la voïvodie (région) que des « powiats » (districts de communes), sur la base de la loi précitée offrent un large éventail de services gratuits et notamment de conseil d'orientation professionnelle. Tous les intéressés peuvent compter une aide dans le choix du métier et de l'employeur, notamment grâce à l'information sur les métiers, le marché du travail ou les possibilités de formation. Des examens psychologiques ou médicaux spécialisés sont aussi proposés permettant d'émettre une opinion sur l'aptitude professionnelle ou la formation à suivre.

Les catégories d'âge principalement concernées par ces programmes sont les jeunes de moins de 25 ans, les personnes de plus de 50 ans et les anciens détenus chômeurs - groupes les plus fragilisés sur le marché du travail. La loi précitée prévoit donc des instruments complémentaires afin d'accroître l'efficacité de l'aide dispensée. Les Offices de travail de « powiats » sont notamment tenus de proposer dans les six mois suivant l'enregistrement du chômeur, un emploi, un autre travail assurant un revenu à l'intéressé, un stage ou une formation professionnelle, ou bien un travail dans le cadre des travaux d'intervention ou de travaux publics.

2. Les femmes et l'égalité de traitement

Par ailleurs, au centre des préoccupations du ministère du travail et de la politique sociale demeurent toutes les actions visant à diminuer le niveau de pauvreté de femmes, due principalement à taux inférieur d'activité professionnelle, aux arrêts de travail notamment liées à la maternité, à la discrimination sur le marché du travail, au différentiel de salaire avec les hommes, et à l'exercice de métiers à faible revenu ou à temps partiel, ce qui influe directement sur le niveau de salaire.

La Pologne s'est dotée d'un système de suivi d'égalité de sexes - le « Système national de suivi de l'égalité de traitement des femmes et des hommes ». Les rapports sont disponibles en version électronique et papier. L'un des chapitres présente le rapport d'experts « Conditions de vie et pauvreté » qui outre les conclusions, comporte aussi les informations sur la méthodologie appliquée, les données sur le revenu des ménages, la relation entre la pauvreté et les niveaux des salaires, ainsi que l'influence de transferts sociaux sur la pauvreté. Toutes les données sont chiffrées pour les hommes et les femmes, et tiennent comptent des indices proposés par la présidence portugaise. Ce projet est mené en Pologne depuis 2005, il a d'abord été financé par sur fonds PHARE, et il est poursuivi actuellement dans le cadre du FSE.

Dans le cadre des campagnes médiatiques nationales le ministère du travail et de la politique sociale encourageait les femmes à devenir actives professionnellement (programme TV « Le femme débrouillarde » réalisé dans le cadre du projet « Femme, Famille, Travail - campagne médiatique »). Pour les femmes plus âgées, discriminées à double titre - en raison de l'âge et du sexe - une campagne a été lancée intitulée : « 45 ans et plus recherchées : engagement, fiabilité, expérience » (3 spots TV et panneaux publicitaires). Une autre forme de soutien était réalisée dans le cadre de la campagne dont l'objectif était d'informer les femmes sur leurs droits sur le lieu de travail (« Mes droits au travail »).

Par ailleurs, le ministère du travail et de la politique sociale offre aux femmes souhaitant devenir entrepreneur une aide complète sous le sigle « Réalisée en entreprenariat » (ligne verte, site interactif, deux spots TV et radio, films d'information et documentaires présentés par la télévision publique) dans le cadre du projet « Qu'il est bien d'être une femme entrepreneur ! ». Pour les personnes qui souhaitent concilier vie professionnelle-vie familiale, des campagnes de soutien et d'information ont été réalisées : « Entre famille et travail - formes souples d'emploi » (trois spots TV et panneaux publicitaires) et « Partenariat dans la famille - une chance pour les femmes actives professionnellement ». Les deux derniers projets font indirectement la promotion de la loi sur le télétravail votée par le parlement en 2007.

Le ministère a préparé par ailleurs un projet de loi « sur la famille », dont l'objectif est de modifier les textes existants faisant obstacle aux femmes dans l'accès au marché du travail. Il s'agit principalement de questions relatives à la conciliation vie professionnelle-vie familiale. Le ministère mène également aussi de nombreux projets anti-discriminatoires dont l'objectif est de sensibiliser la société aux stéréotypes fondés sur le sexe et de renforcer le rôle social des femmes, avec objectif de contribuer à l'élimination de la pauvreté parmi les femmes.

II. Présentation de la fondation Chleb ycia

Afin d'appréhender de façon plus concrète le système polonais de soutien aux plus démunis, la mission commune d'information a décidé de se rendre auprès de la fondation Chleb ycia. Créée à l'automne 2002, elle doit son existence à Soeur Magorzata Chmielewska, directrice de la branche polonaise de la communauté du Pain de vie, fondée en 1976 par un couple de jeunes Français, Pascal et Marie-Annick Pingault.

Ses activités sont les suivantes :

- participer à l'éducation des enfants et des jeunes issus de familles rurales en difficulté. Des bourses sont attribuées et des cours du soir sont offerts aux élèves de collèges et de lycées ;

- organiser des formations professionnelles et créer des emplois, aussi bien pour les habitants des maisons de la fondation que pour ceux des villages alentour ;

- participer à la vie quotidienne des maisons et de leurs habitants. Les membres de cette communauté ouvrent en effet des maisons pour les personnes sans abri, où ils vivent à leurs côtés.

La fondation travaille très activement dans la voïvodie de Sainte-Croix, à 200 km de Cracovie, en Pologne, où la communauté a ouvert trois maisons -quatre autres ont été crées à Varsovie- fréquentées par des populations provenant de l'ensemble du pays.

Cette région de Voïvodie est particulièrement pauvre. 54 % de sa population est issue d'un milieu rural, le taux de chômage y est l'un des plus élevés de Pologne et le niveau d'études un des plus bas. Plus de 1.000 personnes ont été accueillies dans ces structures en 2007.

Soeur Magorzata Chmielewska est une personne très populaire en Pologne, où elle est souvent comparée à l'abbé Pierre, pour son caractère chaleureux et très direct. Reconnue par tous pour la force de son engagement et son courage, elle a reçu de nombreuses récompenses, dont le prix Totus, sorte de prix Nobel de l'Eglise polonaise.

III. Visite de la fondation par la délégation

La délégation s'est d'abord entretenue avec Soeur Malgorzata Chmielewska, qui a présenté l'organisation et l'activité de sa fondation, ainsi que les difficultés auxquelles elle devait faire face.

Elle a, en premier lieu, décrit l'état de précarité des populations en milieu rural. Si le climat et la qualité des sols sont favorables à un développement de l'agriculture, de nombreuses limites continuent de le freiner, comme l'importance des contraintes sanitaires, le manque d'investissements ou la relative faiblesse des subventions européennes. Cinq hectares sont nécessaires à une même personne pour vivre correctement de l'agriculture ; or, c'est la surface moyenne de chaque unité économique -regroupant la femme et les enfants de l'exploitant-. Le secteur primaire, s'il offre beaucoup de travail, ne permet donc pas de nourrir correctement les familles.

Puis Soeur Malgorzata Chmielewska a fait état des difficultés de financement de sa fondation. Son budget est composé à 40 % de subventions de l'Etat, le reste provenant de ressources propres constituées notamment de la commercialisation des produits issus des ateliers, ainsi que de la vente de vêtements de seconde main. Elle a souligné l'ambivalence des objectifs de la fondation, dont le but n'est évidemment pas le profit, mais qui doit cependant réunir assez de ressources pour être pérennisée. Le taux de couverture des différents ateliers est variable, à ce titre : si le produit des ventes de celui de confiture et de conserverie permet de couvrir plus de 100 % des dépenses occasionnées par leur fabrication, ce taux tombe à 60 % pour l'atelier de couture, et même à 30 % pour celui de menuiserie, en raison du coût élevé des matières premières.

Elle a insisté sur l'importance de la formation dans la démarche de la fondation. En Pologne, a-t-elle expliqué, les écoles -même celles débouchant sur des diplômes à visée professionnelle- ne proposent pas de formations de nature technique. Une très grande majorité des personnes accueillies par la fondation sont donc dépourvues de toute formation de ce type. A travers l'activité qu'elles vont exercer dans l'un des divers ateliers, va leur être procurée une formation qualifiante, à la fois théorique et pratique, leur permettant d'obtenir, à terme, un certificat de travail et d'être ensuite bien accueillies sur le marché du travail. En amont, la fondation subventionne les études de 500 élèves dont les familles sont trop pauvres pour les scolariser ; elle espère à terme doubler ce chiffre.

La délégation a ensuite entendu le témoignage d'une jeune femme qui, grâce à la rémunération de son travail au sein de l'atelier de couture, a pu scolariser ses enfants depuis cinq ans.

Puis la délégation a visité les différents sites, bâtiments et ateliers d'activité de la fondation.

Sur le site principal, elle s'est d'abord rendue dans l'atelier de menuiserie. Utilisant des machines-outils chinoises ainsi, comme matière première, que des planches de bois sec achetées à des prix élevés dans des scieries locales, l'atelier cherche à travailler en collaboration avec les agences pour l'emploi. Il produit divers meubles, crucifix et objets en bois de qualité, qui sont revendus à un prix relativement élevé pour le marché local.

La visite de l'atelier de couture a permis d'observer la vétusté des machines utilisées, provenant de dons. L'absence de matière première à proximité impose à la fondation de l'acheter par correspondance, via Internet. La délégation a pu relever la grande qualité des pièces de broderie produites, fabriquées selon des méthodes traditionnelles et soumises à un contrôle qualité. Toute concurrence avec les produits textiles chinois étant exclue, la fondation s'est orientée vers des marchés de niche, les broderies étant revendues pour la plupart dans des boutiques haut de gamme de la capitale polonaise.

La visite de l'atelier confiture et de conserverie a été l'occasion pour Soeur Malgorzata Chmielewska de souligner les importantes contraintes sanitaires que la fondation a rencontrées avant de pouvoir commencer son activité. Fabriquées selon des recettes artisanales, à partir de fruits et légumes cultivés sur place ou achetés à l'extérieur, les confitures et conserves sont également commercialisées dans des boutiques de luxe des grandes villes.

Enfin, la délégation a visité les bâtiments d'habitation, où sont hébergées les personnes sans domicile fixe, âgées ou malades accueillies par la fondation.

Puis elle a été conviée à un déjeuner de travail préparé par des membres de la fondation, qui a été l'occasion de poursuivre les échanges avec Soeur Malgorzata Chmielewska et ses principaux collaborateurs.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page