Rapport d'information n° 47 (2008-2009) de Mme Monique PAPON et M. Pierre MARTIN , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 22 octobre 2008

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N° 47

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 octobre 2008

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) par le groupe de travail (2) sur la scolarisation des jeunes enfants ,

Par Mme Monique PAPON et M. Pierre MARTIN,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Legendre , président ; MM. Ambroise Dupont, Michel Thiollière, Serge Lagauche, David Assouline, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Ivan Renar, Mme Colette Mélot, M. Jean-Pierre Plancade , vice-présidents ; M. Pierre Martin, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Christian Demuynck, Yannick Bodin, Mme Béatrice Descamps , secrétaires ; MM. Jean-Paul Amoudry, Jean-Pierre Bel, Claude Bérit-Débat, Mme Maryvonne Blondin, M. Pierre Bordier, Mmes Bernadette Bourzai, Marie-Thérèse Bruguière, M. Jean-Claude Carle, Mme Françoise Cartron, MM. Jean-Pierre Chauveau, Gérard Collomb, Yves Dauge, Claude Domeizel, Alain Dufaut, Mme Catherine Dumas, MM. Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Jean-Claude Etienne, Mme Françoise Férat, MM. Jean-Luc Fichet, Bernard Fournier, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Jean-François Humbert, Soibahadine Ibrahim Ramadani, Mlle Sophie Joissains, M. Philippe Labeyrie, Mmes Françoise Laborde, Françoise Laurent-Perrigot, M. Jean-Pierre Leleux, Mme Claudine Lepage, MM. Alain Le Vern, Jean-Jacques Lozach, Mme Lucienne Malovry, MM. Jean Louis Masson, Michel Mercier, Philippe Nachbar, Mme Monique Papon, MM. Daniel Percheron, Jack Ralite, Philippe Richert, René-Pierre Signé, Jean-François Voguet.

(2) Ce groupe de travail est composé de : Mme Monique Papon, MM. Pierre Martin, Pierre Bordier, Mmes Béatrice Descamps, Françoise Férat, Brigitte Gonthier-Maurin, M. Serge Lagauche, Mme Colette Mélot, MM. Philippe Richert, Michel Thiollière, Robert Tropeano.

INTRODUCTION

« Quand on dit 2 ans et 3 ans, c'est comme si on disait 12 ans et 25 ans. A deux ans, de trois mois en trois mois, les enfants évoluent énormément ; leurs intérêts, leur mode de langage au sens large du terme sont en continuelle mutation. »

Françoise Dolto - La cause des enfants

Mesdames, Messieurs,

La commission des affaires culturelles a souhaité dresser un état des lieux de la scolarisation des jeunes enfants, plus précisément des moins de trois ans, pour mieux comprendre les enjeux du débat actuel. Elle en a confié la charge à un groupe de travail animé par Mme Monique Papon et M. Pierre Martin.

Au cours du XX e siècle, l'école maternelle s'est progressivement affirmée dans sa singularité et a été reconnue comme le fleuron du système éducatif français. Son développement a contribué à faire de la scolarisation précoce et massive des enfants dès leur plus jeune âge une des spécificités de notre pays.

En France, depuis les années 1990, la quasi-totalité des enfants est ainsi scolarisée à l'école maternelle dès l'âge de trois ans, ainsi qu'une fraction importante des enfants de deux ans, en l'absence de toute obligation légale. Toutefois, l'accueil des enfants de moins de trois ans se fait dans la limite des places disponibles, ce qui lui vaut souvent le vocable de variable d'ajustement des effectifs.

Le débat que le groupe de travail a engagé avec les différents partenaires concernés n'a pas pour finalité de remettre en cause le principe de l'école maternelle, qui relève d'un choix culturel et politique fait par notre pays dès la fin du XIX e siècle. Ce questionnement porte sur le bien-fondé d'une entrée aussi précoce dans un cadre scolaire.

Partisans et détracteurs de la scolarisation des moins de trois ans s'affrontent ainsi sur deux logiques, une scolarisation précoce comme facteur de réduction des inégalités sociales et de prévention de l'échec scolaire, ou une inadaptation de l'institution scolaire à la prise en compte du développement et du bien-être du jeune enfant.

En fait, les enjeux posés par la réflexion du groupe de travail sont larges et divers. Ils touchent à l'organisation même de notre société tant à la nécessaire conciliation d'une vie professionnelle et familiale qu'à la prise en compte d'un égal accès aux différents modes d'accueil du jeune enfant. A la frontière de deux politiques, entre branche famille et éducation nationale, la question de l'entrée à l'école maternelle dès deux ans renvoie notamment à la structuration actuelle de l'offre de garde en France.

Au nom de son excellence ou de son moindre coût, l'école maternelle est souvent mise en demeure de résoudre des problèmes auxquels notre société est aujourd'hui confrontée. Or le rôle de l'école maternelle est de permettre à chaque enfant de devenir élève. Le passage du temps de l'enfant au temps de l'élève renvoie à une question essentielle qui est celle de l'attention portée au « temps du bébé »

I. DE LA PRÉSCOLARISATION À LA SCOLARISATION PRÉ COCE : L'HISTOIRE D'UNE EXCEPTION FRANÇAISE

La singularité de notre système éducatif à l'égard de la scolarisation des jeunes enfants trouve son explication dans une approche historique de la politique éducative française . Dès le début du XIX e siècle, la France a fait le choix d'une structure éducative collective placée à la fois sous le contrôle de l'Etat et sous l'égide du ministère en charge de l'instruction.

Ce choix qui s'est imposé dans nos modes de pensée à l'égard des organismes relevant du secteur de la petite enfance a profondément conditionné l'ensemble de la politique d'accueil des jeunes enfants et le rôle particulier joué par l'institution scolaire. Force est de constater par ailleurs que l'école maternelle s'est construite en France en marge de la famille.

A. L'ÉMERGENCE D'UNE POLITIQUE D'ACCUEIL EN FAVEUR DES ENFANTS DES CLASSES POPULAIRES

Apparue au début du XIX e siècle, et reposant sur une conception sociale de l'institution, la préscolarisation est à l'origine une oeuvre en faveur des enfants d'ouvriers et des catégories urbaines les plus pauvres .

1. Les salles d'asile : des premiers essais de garde collective à une éducation collective des jeunes enfants

a) La création des salles d'asile

Influencées par les « Infant school » , créées en Angleterre dans le souci d'améliorer le sort des enfants de deux à sept ans les plus démunis par l'assistance et le travail, les salles d'asile doivent leur création en France à des initiatives d'origines diverses -dames patronnesses, philanthropes, responsables religieux, municipalités...-.

Ces lieux ont pour mission d'accueillir et d'assister les enfants pauvres dont la mère ne peut s'occuper, dans un contexte d'industrialisation et de développement des ateliers. Il s'agit de suppléer l'absence des parents en créant des moments d'éducation hors de la famille pour des enfants qui en raison de leur jeune âge ne relèvent pas de l'école.

Cette vocation de gardiennage et de sauvegarde du jeune enfant domine le fonctionnement des premières salles d'asile placées sous la tutelle des hospices ; elles sont ouvertes tous les jours de la semaine et tous les mois de l'année à raison de dix à onze heures par jour. Sous la monarchie de Juillet, on dénombre environ trois cents salles d'asile.

b) Les bases d'une éducation institutionnalisée dès l'âge de deux ans

Le développement des salles d'asile ouvre la voie d'une éducation institutionnalisée. En effet, dès 1833, une circulaire du ministre de l'instruction publique Guizot fait d'elles la base de l'enseignement primaire. « Il ne peut être que fort utile de commencer l'instruction dès l'âge le plus tendre : et tel semble devoir être le but principal des salles d'asile, qui formeraient le premier degré de l'enseignement élémentaire, et que, par cette raison, on pourrait appeler plus justement petites écoles ou écoles de l'enfance » . 1 ( * ) Progressivement se dessinent les premiers fondements d'une préscolarisation à la française .

Dans les textes officiels émaillant l'histoire des salles d'asile de 1829 à 1881, l'âge réglementaire minimum d'admission est toujours fixé à deux ans , l'âge maximum variant entre six et sept ans.

Extrait de la circulaire adressée à MM. les préfets et à MM. les recteurs
concernant la loi du 28 juin 1833 sur l'instruction primaire

...en première ligne se présentent les plus élémentaires de toutes, celles qui sont connues sous le nom de salles d'asile et où sont reçus les petits enfants de l'âge de deux ans à l'âge de six ou sept ans, trop jeunes encore pour fréquenter les écoles primaires proprement dites, et que leurs parents, pauvres et occupés, ne savent comment garder chez eux...

L'État prend en charge l'éducation collective des jeunes enfants placés dans les salles d'asile dans un souci d'organisation et de contrôle. Des instructions officielles en fixent alors le rôle et le programme. Il s'agit de « leur faire contracter dès l'entrée dans la vie des habitudes d'ordre, de discipline, d'occupation régulière qui sont un commencement de moralité » 2 ( * ) .

En 1836, les salles d'asile sont classées parmi les écoles relevant du ministère de l'instruction publique et, à partir de 1848, deviennent des établissements d'instruction publique, soit le premier niveau de l'enseignement primaire. La mission « propédeutique » des salles d'asile tend à s'affirmer : elles ambitionnent de transmettre des savoirs de base, avant de rejoindre le monde du travail.

En 1843, on compte déjà mille cinq cents salles d'asile accueillant 100 000 enfants, essentiellement dans les villes. A la veille de leur remplacement par le terme d'école maternelle, vers 1881, 644 000 enfants y suivent une forme d'instruction.

La création des salles d'asile manifeste l'intérêt porté progressivement à la spécificité de ce temps de l'enfance qui s'étend de l'âge de deux ans à sept ans environ. Nées d'une préoccupation d'assistance et de protection de l'enfance, elles exercent une influence déterminante sur le modèle éducatif français .

2. La naissance de l'école maternelle et l'oeuvre de Pauline Kergomard

La personnalité et l'oeuvre de Pauline Kergomard, nommée en 1879 inspectrice générale des salles d'asile, marquent profondément la naissance de l'école maternelle dans l'historiographie du XX e siècle.

a) Les recommandations formulées par Pauline Kergomard

En rupture avec les méthodes anciennes, Pauline Kergomard affirme que l'école maternelle « n'est pas une école au sens ordinaire du mot » . Elle promeut un modèle éducatif, celui « d'une mère intelligente et dévouée » . Il s'agit de reconnaitre l'enfant comme individu, tout en maintenant des exigences scolaires.

Sous son autorité, les contenus et les pratiques pédagogiques sont modifiés pour que l'école maternelle ne soit ni « la petite caserne » , ni « la petite Sorbonne » que constitue à ses yeux la salle d'asile. Des disciplines nouvelles apparaissent, liées au langage, à l'observation, aux exercices sensoriels, aux jeux, sans faire disparaître les contenus d'enseignement. « Le but de l'école maternelle est de donner à l'enfant le bien être qui lui manque chez lui et les bonnes habitudes que ses parents ignorent » 3 ( * ) . L'approche novatrice de Pauline Kergomard influence durablement et profondément le développement de l'école maternelle française.

b) La reconnaissance officielle de la préscolarisation
(1) Des dispositions réglementaires pour une nouvelle organisation

L'organisation des écoles maternelles est mise en oeuvre par le décret du 2 août 1881. Il supprime officiellement les salles d'asile en les remplaçant par le terme d'école maternelle, qui devient alors une école non obligatoire mais gratuite et laïque . Un arrêté publié en juillet 1882 réglemente l'organisation pédagogique des écoles maternelles publiques, selon des instructions qui s'inspirent des recommandations de Pauline Kergormard.

Extrait de l'arrêté du 28 juillet 1882 réglant l'organisation pédagogique
des écoles maternelles publiques

...1° OBJET DE L'ÉCOLE MATERNELLE

L'école maternelle a pour but de donner aux enfants au-dessous de l'âge scolaire « les soins que réclame leur développement physique, intellectuel et moral » (décret du 2 août 1881), et de les préparer ainsi à recevoir avec fruit l'instruction primaire.

L'école maternelle n'est pas une école au sens ordinaire du mot : elle forme le passage de la famille à l'école, elle garde la douceur affectueuse et indulgente de la famille, en même temps qu'elle initie au travail et à la régularité de l'école.

Le succès de la directrice d'école maternelle ne se juge donc pas essentiellement par la somme des connaissances communiquées, par le niveau qu'atteint l'enseignement, par le nombre et la durée des leçons, mais plutôt par l'ensemble des bonnes influences auxquelles l'enfant est soumis, par le plaisir qu'on lui fait prendre à l'école, par les habitudes d'ordre, de propreté, de politesse, d'attention, d'obéissance, d'activité intellectuelle qu'il doit y contracter pour ainsi dire en jouant.

En conséquence, les directrices devront se préoccuper beaucoup moins de livrer à l'école primaire des enfants déjà fort avancés dans leur instruction, que des enfants bien préparés à s'instruire. Tous les exercices de l'école maternelle seront réglés d'après ce principe général : ils doivent aider au développement des diverses facultés de l'enfant sans fatigue, sans contrainte, sans excès d'application ; ils sont destinés à lui faire aimer l'école et à lui donner de bonne heure le goût du travail, en ne lui imposant jamais un genre de travail incompatible avec la faiblesse et la mobilité du premier âge.

Le but à atteindre, en tenant compte des diversités de tempérament, de la précocité des uns, de la lenteur des autres, ce n'est pas de les faire tous parvenir à tel ou tel degré de savoir en lecture, en écriture, en calcul, c'est qu'ils sachent bien le peu qu'ils sauront, c'est qu'ils aiment leurs tâches, leurs jeux, leurs leçons de toute sorte, c'est surtout qu'ils n'aient pas pris en dégoût ces premiers exercices scolaires qui seraient si vite rebutants, si la patience, l'enjouement, l'affection ingénieuse de la maîtresse ne trouvaient le moyen de les varier, de les égayer, d'en tirer ou d'y attacher quelque plaisir pour l'enfant.

Une bonne santé ; l'ouïe, la vue, le toucher déjà exercés par une suite graduée de ces petits jeux et de ces petites expériences propres à faire l'éducation des sens : des idées enfantines mais nettes et claires sur les premiers éléments de ce qui sera plus tard l'instruction primaire ; un commencement d'habitudes et de dispositions sur lesquelles l'école puisse s'appuyer pour donner plus tard un enseignement régulier ; le goût de la gymnastique, du chant, du dessin, des images, des récits ; l'empressement à écouter, à voir, à observer, à imiter, à questionner, à répondre ; une certaine faculté d'attention entretenue par la docilité, la confiance et la bonne humeur ; l'intelligence éveillée enfin et l'âme ouverte à toutes les bonnes impressions morales.

Tels doivent être les effets et les résultats de ces premières années passées à l'école maternelle, et si l'enfant qui en sort arrive à l'école primaire avec une telle préparation, il importe peu qu'il y joigne quelques pages de plus ou de moins du syllabaire.

La loi du 30 octobre 1886 sur l'organisation de l'enseignement primaire fait ainsi de l'école maternelle une de ses composantes.

Par ailleurs, en 1884, la formation des enseignantes de maternelle est confiée aux écoles normales d'institutrices et en 1921, le statut des personnels des écoles maternelles est aligné sur celui des écoles primaires.

Loi du 30 octobre 1886 sur l'organisation de l'enseignement primaire

Article premier - L'enseignement primaire est donné :

1° Dans les écoles maternelles et les classes enfantines ;

2° Dans les écoles primaires élémentaires ;

3° Dans les écoles primaires supérieures et dans les classes d'enseignement primaire supérieur annexées aux écoles élémentaires et dites « cours complémentaires » ;

4° Dans les écoles manuelles d'apprentissage, telles que les définit la loi du 11 décembre 1880.

(2) Un critère d'admission fondé sur l'âge

Les conditions d'admission des élèves dans les diverses catégories d'écoles ou de classes sont d'abord fondées sur le critère de l'âge. Ainsi, le décret du 18 janvier 1887, dans son article premier, stipule que dans les écoles maternelles, les enfants peuvent être reçus dès l'âge de deux ans révolus et rester jusqu'à l'âge de six ans.

Les classes enfantines, degré intermédiaire entre l'école maternelle et l'école primaire, sont réservées aux enfants de quatre ans au moins à sept ans au plus. Ils y reçoivent un commencement d'instruction primaire.

Décret du 18 janvier 1887 portant organisation et fonctionnement
des écoles maternelles et des classes enfantines

Article premier - Les écoles maternelles sont des établissements de première éducation où les enfants des deux sexes reçoivent en commun les soins que réclame leur développement physique, moral et intellectuel.

Dans les communes comptant moins de 2 000 habitants, dont 1 200 agglomérés, l'école maternelle peut être remplacée par une classe enfantine annexée à une école élémentaire.

Dans les écoles maternelles et les classes enfantines, les enfants peuvent être admis dès l'âge de deux ans révolus et restent jusqu'à l'âge de six ans.

Les enfants ne passeront de l'école maternelle ou de la classe enfantine à l'école primaire qu'à la rentrée d'octobre ou à la rentrée de Pâques, suivant les modalités établies par le règlement départemental.

Les élèves des écoles maternelles sont répartis en deux sections : la section des petits (deux à cinq ans) et la section des grands (cinq à sept ans), les effectifs baissent (théoriquement, ils sont limités à cinquante élèves par section), ce qui entraîne alors un ajustement des contenus en fonction de l'âge des enfants.

Cependant, il semble que l'école maternelle ne réussit que difficilement et assez partiellement à imposer une méthode éducative distincte de celle de l'enseignement primaire.

(3) Une préscolarisation qui fait déjà l'objet de critiques

Force est constater que les critiques formulées actuellement à l'égard de la scolarisation des très jeunes enfants trouvent une résonance dans le passé. Elles sont au coeur de l'ambivalence qui existe entre le terme d'école et celui de maternelle, tout en posant la question de la forme ainsi que des objectifs d'un enseignement préscolaire.

« Mais il y a une autre manière de sectionner que je trouve aussi mauvaise que celle dont j'ai parlé tout d'abord; elle est ainsi pratiquée :

1° Les tout petits qui savent à peine parler, à peine marcher;

2° Ceux de trois à quatre ou cinq ans dans la salle d'exercices, meublée de gradins et de tables, et y recevant des leçons sur toutes les parties du programme ;

3° Les grands, ceux de cinq et six ans, dans la troisième salle, que nous appellerons la classe, parce que, malheureusement, c'est une classe et pas autre chose.

Donc, avec ces trois sections, nous nous trouvons en présence d'un établissement comprenant la crèche très mauvaise crèche, parce qu'elle n'est pas installée en crèche - et une école à deux classes. Le coeur et la raison protestent contre cet ordre de choses, contre cette éducation de l'enfant (élevage eût été un mot plus juste) en dehors des conditions normales, et je me sens, chaque jour, plus invinciblement entraînée à le placer ou à le laisser dans son milieu, où il se développe, au lieu d'aider à lui créer un milieu factice où il s'étiole. »

Pauline Kergomard - L'éducation maternelle dans l'école (1886)

c) Des instructions pour plus de cinquante ans

Le fonctionnement de l'école maternelle et les grandes lignes de son orientation sont fixés au début du XX e siècle et perdurent pendant plus de cinquante ans. Les instructions de 1921 , qui modifient les textes de 1887, constituent la seule référence officielle jusqu'en 1977 .

Ces instructions sont en quelque sorte l'aboutissement du projet de Pauline Kergomard : prééminence du développement corporel, intérêt pédagogique du jeu et valeur exemplaire de la « mère intelligente » . L'école maternelle n'est toutefois encore destinée qu'à une fraction de la population .

L'école maternelle n'est pas une école au sens ordinaire du mot, c'est un abri destiné à sauvegarder l'enfant des dangers de la rue, comme des dangers de la solitude dans un logis malsain. Elle doit donc encourager la fréquentation quotidienne des enfants errants et de ceux dont la mère travaille tous les jours et toute la journée hors de la maison; elle recevra les autres aux heures où leur mère ne peut pas s'en occuper; elle donnera également l'hospitalité pendant les récréations aux enfants privés de camarades de leur âge.

Programmes et instructions du 16 mars 1908

Les textes officiels ébauchent un cadre pédagogique à destination des enseignantes d'école maternelle . L'emploi du temps des enfants s'articule autour :

-  des exercices physiques : exercices respiratoires, jeux, mouvements gradués et accompagnés de chants ;

- des exercices sensoriels, des exercices manuels, des exercices de dessin ;

- des exercices de langage et de récitation, des récits et des contes ;

- des exercices d'observation sur les objets et sur les êtres familiers à l'enfant ;

- des exercices ayant pour but la formation des premières habitudes morales ;

- pour les enfants de la première section, des exercices d'initiation à la lecture, à l'écriture et au calcul.

Paradoxalement, cette période vide de textes est celle où l'école maternelle connaît ses évolutions majeures. Cette transformation est attribuée à l'influence des inspectrices générales de l'école maternelle et à la diffusion de la recherche pédagogique par différentes canaux tels que les conférences, les revues spécialisées, ou l'Association générale des institutrices et des instituteurs des écoles et classes maternelles publiques (AGIEM), créée en 1921.

B. LES TRENTE GLORIEUSES DE L'ÉCOLE MATERNELLE OU LA PRÉSCOLARISATION POUR TOUS

Au lendemain de la seconde guerre mondiale, la France connait une profonde mutation de son école maternelle . L'ensemble des couches sociales de la population scolarisent désormais leurs enfants dans les écoles maternelles. La généralisation de la préscolarisation qui s'amorce à partir de la fin des années 1950 constitue un fait majeur dans l'histoire de notre système éducatif .

L'évolution se produit également au niveau des structures matérielles, les locaux sont de plus en plus accueillants et fonctionnels. Les pratiques pédagogiques évoluent sous l'influence notamment des recherches sur le développement du jeune enfant. L'école maternelle entre dans sa phase d'« école heureuse » .

Par sa continuité dans sa définition institutionnelle, dans son cadre et dans sa liberté pédagogique, l'école maternelle apparait comme une réussite exemplaire, qui s'affranchit alors de toutes critiques, au contraire des autres niveaux d'enseignement. Tout au long de ces années, il s'agit de la développer et non de la réformer. Elle intègre aussi progressivement une population infantile de plus en plus jeune.

1. La reconnaissance sociale du rôle de l'école maternelle

L'entrée des classes moyennes et supérieures dans l'école maternelle impulse un mouvement décisif en faveur de ce niveau d'enseignement. La diversification du public des maternelles correspond au moment où les Français font de plus en plus souvent appel aux institutions collectives, à l'extérieur de la famille, pour la garde et l'éducation de leurs jeunes enfants. Ils se tournent alors vers l'école maternelle, alors même que cette dernière s'affirme dans sa spécificité.

Se met ainsi en place une des singularités du système éducatif français, la préscolarisation du jeune enfant. L'école maternelle devient à la fois un milieu éducatif pour tous et le modèle de l'excellence éducative . L'école élémentaire constitue de moins en moins la première école.

La précocité de la scolarisation est alors perçue comme un facteur essentiel de développement de l'enfant dans les domaines de la socialisation, de la communication, de l'acquisition du langage ou de l'autonomie. On assiste à l'émergence de l'école maternelle comme lieu de socialisation personnalisée de l'enfant. La fréquentation précoce de l'école est aussi conçue comme un gage de réussite ultérieure . Son expansion résulte ainsi d'une modification des modes de vie et d'un changement de statut de l'enfant au sein de la société et de la sphère familiale.

2. La préscolarisation comme phénomène de société

Les années d'après-guerre sont marquées par une hausse continue et forte du nombre d'enfants scolarisés dans l'enseignement préscolaire . La croissance spectaculaire du taux de scolarisation en maternelle apparaît relativement indépendante des données démographiques, même si notre pays doit alors scolariser des générations plus nombreuses.

a) Une hausse spectaculaire des effectifs

De 400 000 élèves entre 1930 et 1940, les effectifs des écoles maternelles s'élèvent à 800 000 en 1958, pour atteindre 1 344 000 en 1968 et 1 860 000 dix ans plus tard en 1978 .

En revanche, l'évolution des effectifs des classes enfantines, dont les fluctuations ne suivent pas la croissance régulière des maternelles, tend en quelque sorte à les marginaliser ou à les limiter au milieu rural.

Source : d'après A. Prost

Entre 1945 et 1980, le nombre d'enfants scolarisés dans les écoles maternelles est multiplié par 4,65 . Environ 40 % des enfants de 2 à 5 ans vont à l'école vers 1950, surtout dans les villes et les gros bourgs et dans la France industrielle. Le taux de 50 % est atteint au début des années 1960, et dépasse celui de 60 % dans les années 1970. Ils sont 75 % en 1975 avant d'atteindre le taux de 82 % au début des années 1980 . La scolarisation des jeunes enfants est alors mieux répartie sur l'ensemble du territoire, après l'essor des écoles maternelles en ville et des classes enfantines en campagne.

b) La France se couvre de maternelles

Le développement des écoles maternelles, notamment au détriment des sections enfantines des écoles élémentaires dans les zones urbaines, engage la France dans un mouvement massif de préscolarisation .

Par ailleurs, se dessine un mouvement de reprise des classes enfantines qui s'explique par un phénomène nouveau, l'engagement du milieu rural dans la préscolarisation . On peut désormais parler d'une maternelle pour tous . « La croissance de l'enseignement préscolaire est le fruit d'une politique délibérée, menée avec persévérance, en réponse à une demande soutenue » . 4 ( * )

En quarante ans, le nombre d'écoles maternelles a été multiplié par quatre . Sachant que le nombre de classes par école peut désormais atteindre le chiffre de cinq, l'augmentation du nombre de classes maternelles est encore plus importante. Ce sont ainsi les communes qui ont permis le développement de ce mouvement, par un effort d'équipement et de construction considérable.

NOMBRE DE CLASSES ET D'ÉCOLES MATERNELLES 1938-1976

1938-1939

1948-1949

1958--1959

1968-1969

1976-1977

Écoles

-

3 653

5 395

8 224

13 639

Classes

8 745

-

18 641

31 880

51 830

Source : A. Prost

3. L'abaissement continu de l'âge d'entrée à l'école maternelle

Le développement de la fréquentation de l'école maternelle au sein de l'ensemble des couches sociales de notre pays s'accompagne d'un autre mouvement, l'abaissement progressif et définitif de l'âge d'entrée dans l'institution scolaire.

a) La révolution silencieuse de la maternelle

La scolarisation en école maternelle pour l'ensemble d'une classe d'âge s'est effectuée en plusieurs étapes : 1970 pour les enfants de cinq ans, 1980 pour les quatre ans et 1990 pour les trois ans.

ÉVOLUTION DES POURCENTAGES D'ENFANTS SCOLARISÉS PAR ÂGE
(France métropolitaine, France métropolitaine + DOM, public et privé)

1960-1961

1970-1971

1975-1976

1980-1981

1985-1986

1990-1991

2 ans

9,9

17,9

26,6

35,7

31,9

35,2

3 ans

36,0

61,1

80,4

89,9

93,3

98,2

4 ans

62,6

87,3

97,3

100,0

100,0

100,0

5 ans

91,4

100,0

100,0

100,0

99,7

99,4

Ensemble 2-5 ans

50,0

65,4

75,9

82,1

82,6

83,6

Source : MEN

L'évolution de la scolarisation des enfants de trois ans est à cet égard particulièrement frappante : de l'ordre de 36 % au début des années 1960, ce taux croît considérablement pour atteindre les deux tiers autour de 1971-1972 (66,3 %) avant de devenir un phénomène de masse dix ans plus tard, puisque près de 90 % d'entre-eux fréquentent l'école en 1980.

Cette « révolution éducative » , comme la nomme Antoine Prost, est d'autant plus exceptionnelle qu'elle est propre à notre pays et touche toutes les catégories de population . Elle s'est également réalisée dans un cadre législatif non contraignant , puisque la fréquentation massive et de plus en plus précoce de l'école maternelle s'est accomplie en l'absence de toute obligation légale. Elle procède d'un choix des familles, encouragé par l'action des communes en faveur de l'ouverture d'écoles maternelles ou de classes enfantines.

b) L'école maternelle a laissé venir à elle les enfants de deux ans

La scolarisation des enfants de deux ans n'échappe pas à ce mouvement. On assiste à une accélération de l'accueil des enfants de deux à trois ans au sein des écoles maternelles à partir des années 1970 pour atteindre un plancher dix ans plus tard. Le taux de scolarisation des enfants de moins de trois ans augmente ainsi régulièrement depuis les années 1960 : 10 % en 1960-1961, 18 % en 1970-1971, 36 % en 1980-1981. C'est la décennie 1970-1980 qui connait la plus forte progression du pourcentage d'enfants scolarisés à deux ans.

La croissance accélérée du taux de scolarisation à deux ans à partir de la fin des années 1970 coïncide avec la chute de la natalité qui intervient alors. Le nombre de naissances le plus bas se situe dans notre pays en 1975, ce qui se traduit deux ans plus tard par une diminution du rationnement de la demande.

c) Un objectif du Plan peu réaliste

Le développement de la préscolarisation avait cependant été prévu dans le cadre des différents Plans successifs.

Les objectifs du V e Plan (1966-1970) étaient respectivement un taux de scolarisation de 95 % à quatre ans et de 80 % à trois ans. Très ambitieux, ils n'ont été atteints que dans les années 1975-1976 en raison de la chute du taux de natalité.

S'agissant des enfants de deux ans, l'objectif était d'en scolariser 50 %, le VII e Plan ramène ce taux pour 1980 à 45% ! Les objectifs des plans répondent ainsi à une demande sociale insistante qui a été prise en compte par les communes qui se sont lancées dans une politique de construction d'écoles maternelles.

C. LA SCOLARISATION PRÉCOCE ET LA FIN D'UN MYTHE

1. Le retour à l'ordre scolaire

De la fin des années 1970 au début des années 1990, se met progressivement en place l'idée que l'école maternelle constitue le premier niveau de l'école primaire. Elle doit également contribuer « à prévenir les difficultés scolaires, à dépister les handicaps et à compenser les inégalités » , selon les dispositions de l'article 2 de la loi n° 75-620 du 11 juillet 1975 relative à l'éducation, dite loi Haby.

a) L'école maternelle, désormais la première école

De nouvelles dispositions réglementaires confirment progressivement l'insertion de l'école maternelle au sein d'une organisation scolaire qui couvre l'ensemble de l'enseignement primaire.

En 1977, une circulaire ministérielle assigne à l'école maternelle un rôle « éducatif, propédeutique et de gardiennage » . Ces nouvelles orientations tendent à organiser les grandes fonctions dont l'éducation nationale doit accompagner l'épanouissement : affectivité, motricité, langage, développement cognitif. Les programmes de 1977 sont ainsi construit sur le même modèle que ceux de l'élémentaire et du secondaire avec la mise en oeuvre d'objectifs. En même temps, apparaissent de nouvelles exigences au sein de la société française pour une contribution précoce aux apprentissages scolaires.

Les orientations pour l'école maternelle de 1986 accentuent le recentrage de l'école maternelle sur sa mission de scolarisation. La circulaire du 30 janvier 1986 fixe ainsi plusieurs objectifs : « scolariser, socialiser, apprendre et exercer » , en affirmant que l'école maternelle est une école à part entière . Le terme « école » l'emporte sur celui de « maternelle ». « La scolarité à l'école maternelle est certes particulière, mais c'est bien une scolarité. Elle met en place les premiers apprentissages (...). L'école maternelle française est bien une école. C'est la première école. »

La loi d'orientation du 10 juillet 1989 parachève cette politique par la mise en place des cycles d'apprentissage qui intègre définitivement l'école maternelle à l'ensemble du système éducatif français. La classe de grande section de maternelle est appelée à devenir la première année du cycle II des apprentissages fondamentaux.

De nouveaux textes publiés en 1995 rappellent que l'école maternelle doit mettre en oeuvre un certain nombre d'apprentissages. Il lui est attribué une mission « préparatoire à la scolarité obligatoire » en lui conférant une réelle dimension propédeutique.

La recherche d'une continuité des apprentissages s'effectue dans un contexte où prédomine d'une part, l'aspiration à une scolarité longue et à une réussite scolaire ultérieure, et d'autre part, la volonté de concourir à la prévention des inégalités et à la lutte contre l'échec scolaire. Parallèlement, se multiplient les études pour mesurer les effets de la fréquentation de la maternelle sur la réussite scolaire et les acquisitions ultérieures.

b) Le choix législatif d'un principe ciblé

La loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989 consacre ainsi un droit à la scolarisation pour tout enfant dès l'âge de trois ans, principe qui est étendu prioritairement aux enfants de deux ans vivant dans un milieu social défavorisé , pour répondre plus particulièrement à cette préoccupation de compensation des inégalités dans un contexte d'échec scolaire.

Loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989

Article 2 -  Tout enfant doit pouvoir être accueilli, à l'âge de trois ans, dans une école maternelle ou une classe enfantine, le plus près possible de son domicile, si sa famille en fait la demande.

L'accueil des enfants de deux ans est étendu en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne.

Cette reconnaissance officielle ne doit pas laisser penser que l'ouverture de l'enseignement préscolaire aux enfants de deux ans est une nouveauté éducative comme en attestent les données statistiques. Cette loi confère une validation législative à des évolutions déjà engagées au sein du modèle éducatif français .

Elle traduit une prise de conscience chez certaines élites politiques et intellectuelles d'une nécessaire préscolarité comme phase décisive pour la prévention de l'échec scolaire : « l'école maternelle constitue une étape fondamentale dans la scolarisation d'un enfant. L'influence particulièrement bénéfique d'une scolarisation précoce sur la réussite ultérieure des enfants, notamment à l'école primaire, est aujourd'hui unanimement reconnue. L'école maternelle joue un rôle manifeste en faveur des enfants les moins favorisés devant l'accès au savoir. L'accueil des ces derniers en école maternelle dès l'âge de deux ans et de tous les enfants dès l'âge de trois ans constitue donc un objectif de la politique éducative et les efforts nécessaires doivent être entrepris pour y parvenir » . 5 ( * )

Les travaux préparatoires à l'élaboration de cette loi d'orientation ont en effet rejeté le principe d'une scolarisation généralisée dès deux ans pour s'assurer d'une action ciblée en faveur des milieux défavorisés . L'école maternelle devient progressivement la première étape de la réussite scolaire, comme l'indique l'instruction du 8 octobre 1999 : « En matière de prévention de l'échec et de démocratisation des conditions de la réussite scolaire, la responsabilité de l'école maternelle est à la mesure de sa place éminente et fondatrice. École de tous les possibles, l'ambition est à sa portée » .

Cette mesure législative qui s'inscrit notamment à la suite des recommandations du Conseil économique et social participe d'une politique de relance des zones d'éducation prioritaire (ZEP), créées en 1981, afin d'apporter à des populations scolaires issues de catégories sociales défavorisées « un soin pédagogique particulier où la scolarisation des enfants de deux ans est favorisée » . 6 ( * ) Elle se situe également dans un contexte de fortes inégalités territoriales concernant la scolarisation à deux ans.

2. La controverse autour de la scolarisation des enfants de deux ans

La forte progression de la scolarisation des enfants de moins de trois ans, conjuguée aux recherches sur le développement et l'épanouissement des jeunes enfants, a contribué à l'émergence d'un débat, passionné et controversé, sur ce sujet.

a) Le maintien d'un haut niveau de scolarisation précoce

Il apparaît que la loi du 10 juillet 1989 a consacré une tendance, mais n'a pas impulsé un nouveau mouvement de croissance du niveau de la scolarisation des jeunes enfants. Les années 1990 marquent une stabilisation , à un haut niveau, des effectifs d'enfants de deux ans scolarisés, comme en témoigne le tableau ci-après.

En effet, ce taux se maintient autour de 35 % pendant plus de dix ans . Le plafond historique a été atteint dès la rentrée de 1980 avec un taux de 35,7%. Sa signification est d'autant plus forte que si l'on ne comptabilise que les enfants ayant deux ans révolus à la rentrée scolaire, ce sont en fait autour de 55 % des enfants nés entre le 1er janvier et le 31 août qui sont scolarisés alors. Plus de la moitié des enfants de deux à trois ans fréquentent donc l'école maternelle ou les classes enfantines durant cette décennie .

ÉVOLUTION DES POURCENTAGES D'ENFANTS SCOLARISÉS PAR ÂGE (1) (2)
(France métropolitaine, public et privé)

1991-1992

1992-1993

1993-1994

1994-1995

1997-1998

1998-1999

1999-2000

2001-2001

2 ans

34,5

34,9

35,4

35,5

35,0

35,4

35,2

35,3

3 ans

99,1

99,4

99,7

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

4 ans

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

5 ans

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

99,9

100,0

Ensemble 2-5 ans

84,0

84,2

84,5

84,8

84,4

84,3

84,4

84,9

(1) Y compris les effectifs des écoles spécialisées Source : MEN

(2) Les données du secteur public n'étant pas disponibles pour les années 1995-1996 et 1996-1997, les pourcentages ne peuvent être calculés.

Au cours de la décennie 1990-1999, l'évolution démographique de notre pays, marquée par une diminution sensible de la natalité , influence fortement le niveau des effectifs de l'école élémentaire qui enregistrent ainsi une baisse progressive et continue. Conjuguée au maintien du nombre de postes d'enseignants, qui a également permis de diminuer sensiblement le nombre d'élèves par classe, il est possible de qualifier ce phénomène de scolarisation précoce d'effet d'aubaine , le développement du travail féminin et l'insuffisance du nombre de places en crèche renforçant alors ce besoin d'un accueil précoce. Compte tenu de la demande sociale, les familles ont pu en quelque sorte profiter des marges de manoeuvres existantes.

b) Une démographie qui contribue aux disparités territoriales

La politique de scolarisation précoce est déjà fortement territorialisée, et extrêmement sensible aux variations démographiques locales . Ce sont essentiellement les régions en perte de vitesse démographique au cours des années 1990, comme le Nord de la France, le Centre ou le Massif central qui connaissent une progression de la scolarisation à deux ans , même si elle était déjà fréquente et souvent supérieure à la moyenne nationale.

Ainsi, dans l'académie de Lille, dont la population âgée de deux à cinq ans a diminué de 15 % de 1987 à 1997, le taux de scolarisation à deux ans, déjà supérieur à 50 %, s'est accru de 10 points. En revanche, les académies qui enregistrent une croissance démographique comme celles du Sud-Est montrent une régression de ce même taux de scolarisation.

L'évolution du taux d'accueil des jeunes enfants ne semble pas liée à la mise en oeuvre d'une politique globale et concertée en la matière. L'application de l'article 2 de la loi d'orientation du 10 juillet 1989 n'a pas pu éventuellement se faire que dans la mesure où les données démographiques locales ont oeuvré en sa faveur. Ainsi, dans le département de la Seine-Saint-Denis, le taux de scolarisation à deux ans n'est que de 21,2 % à la rentrée 1999, soit une baisse de l'ordre d'un point dix ans après le vote de la loi 7 ( * ) .

c) L'émergence d'un débat public

Dans un contexte politique et social plutôt favorable à la scolarisation précoce, cette situation quasi-unique en Europe a fait l'objet de vives controverses dès le début des années 1980 et plus récemment en 2003 avec la parution du rapport d'activité du défenseur des enfants, Mme Claire Brisset, qui y consacre un dossier particulier dans le cadre d'une réflexion plus large sur le thème du droit à l'éducation.

Toutefois, cette inclinaison à scolariser des enfants de manière relativement précoce s'impose en France comme une évidence, au point que le débat sur ce sujet porte non sur la légitimité de la forme scolaire retenue, mais sur l'âge.

Ainsi, dès le début des années 1980, plusieurs rapports remettent en question la scolarisation des très jeunes enfants, notamment celui d'Evelyne Sullerot . Il s'agit d'une analyse, menée pour la première fois, de l'ensemble du système d'accueil des enfants de la naissance à six ans, accompagnée de recommandations et de propositions. « La scolarité des deux à trois ans pose de sérieux problèmes... et il existe de nombreuses raisons valables de ne pas la considérer comme une norme et de ne pas l'encourager mais d'offrir alors des solutions alternatives. » 8 ( * ) Y figure ainsi un projet de « crèche scolaire » , qui procède d'une structure intermédiaire entre la crèche et l'école, plus adaptée aux enfants de deux à trois ans. L'idée d'un nouveau mode d'accueil était lancée !

La question est reprise l'année suivante, en 1982, dans le cadre d'un rapport remis au secrétaire d'État à la famille, Mme Georgina Dufoix, intitulé « L'enfant dans la vie, une politique pour la petite enfance » qui procède de la contribution de différents ministères. Ce rapport, en se préoccupant de l'accueil des enfants de deux ans, plaide pour une attention particulière qui repose sur une prise en charge plus individualisée et une souplesse de fonctionnement de l'école maternelle, tout en déplorant déjà le cloisonnement des structures d'accueil de la petite enfance .

La réflexion engagée en 2003 par Mme Claire Brisset , alors défenseur des enfants, fédère autour d'elle des pédopsychiatres et des psychologues opposés à la scolarisation précoce à deux ans telle qu'elle est actuellement mise en oeuvre. Un ouvrage intitulé « L'école à 2 ans : est-ce bon pour l'enfant ? » sous sa direction et celle de M. Bernard Golse, professeur de pédopsychiatrie est ainsi publié en 2006 pour rappeler que l'école n'est pas un mode de garde et n'est pas adapté aux besoins des jeunes enfants.

La polémique se poursuit depuis au cours de colloques et au sein de publications ou revues spécialisées, à l'initiative de professionnels de la petite enfance, de chercheurs, d'enseignants... Très récemment, des ouvrages fort polémiques ont contribué à relancer le débat, dans un contexte de baisse des effectifs des enfants de deux ans scolarisés.

3. Sur la voie d'une réduction durable

a) La scolarisation précoce à l'épreuve de la démographie
(1) Des effectifs sensibles à la courbe des naissances

A partir de la rentrée 2002, les éléments statistiques relatifs à l'évolution des effectifs des enfants de deux ans scolarisés illustrent un retournement de situation , en valeur absolue et relative. La rentrée 2002-2003 amorce un mouvement qui remet en question le principe d'une scolarisation aussi précoce des enfants.

La baisse des effectifs des enfants de deux ans est particulièrement importante , de l'ordre de 34 % à partir de 2001 et tout particulièrement aux rentrées 2003 et 2004 qui correspondent à l'entrée en maternelle des enfants nés en 2000, respectivement -8,78 % et -11,54 %. Les enfants de deux ans ne représentent plus, à la rentrée 2007, que 6,7 % des effectifs du préélémentaire contre plus de 10 % en 2001-2002.

Le « baby boom » de l'an 2000 conduit à une réorientation forcée de la politique de scolarisation précoce. La priorité doit d'abord être accordée à l'accueil des enfants de trois à cinq ans . Cette évolution illustre le fait que l'entrée en école maternelle des jeunes enfants est une faculté offerte aux familles et aux enfants, qui relève plus d'une variable d'ajustement que d'une action concertée et anticipée. Elle ne relève pas non plus d'une compétence obligatoire de l'éducation nationale.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DES ENFANTS DE 2 ANS SCOLARISÉS DEPUIS 2001
(France métropolitaine)

2001-2002

2002-2003

2003-2004

2004-2005

2005-2006

2006-2007

2007-2008

Public

213 455

205 401

184 205

164 713

154 141

143 808

130 641

Privé

40 706

41 217

40 770

36 991

36 158

34 520

33 367

TOTAL

254 161

246 618

224 975

201 704

190 299

178 328

164 008

Évolution en %

+ 1,27

- 3

- 8,78

-11,54

- 5,99

- 6,71

- 8,73

En % des effectifs préélémentaires

10,3

10,0

9,0

8,0

7,6

7,2

6,7

Source : d'après MEN

La proportion d'enfants de deux ans dans l'enseignement préélémentaire public décroît par conséquent : de 9,9 % en 2001-2002, ils ne représentent plus que 6,1 % des enfants scolarisés en maternelle en 2007-2008 . L'enseignement privé connaît une évolution semblable, même s'il conserve une certaine tradition de scolarisation précoce : de 13,2 % à la rentrée 2001, ce pourcentage chute à 10,7 % à la rentrée 2007 .

Ainsi, l'écart entre la population scolarisable et les enfants scolarisés pour la tranche d'âge des deux-cinq ans après s'être fortement réduit puis stabilisé au cours des deux décennies 1980-1990 tend à s'accroître à partir de la rentrée 2003.

(2) La relativité du taux de scolarisation

L'effet de la reprise démographique, sensible depuis l'an 2000 et marquée depuis 2003, a ainsi fortement pesé sur le taux de scolarisation. Les effectifs du préélémentaire sont étroitement liés au nombre de naissances. On assiste à une baisse régulière du taux de scolarisation des enfants de deux à cinq ans qui s'explique par le fait que le nombre d'enfants scolarisés est resté relativement stable sur la période 2001-2007 alors que le nombre d'enfants scolarisables a augmenté.

Le taux de scolarisation diminue de manière continue et régulière : de 32 % en 2002-2003, il n'est plus que de 26,1 % en 2004-2005, de 23,4 en 2006-2007 et de 20,9 % en 2007-2008. Le taux de scolarisation des deux ans a diminué de 34 % entre 2002 et 2007.

ÉVOLUTION DU TAUX DE SCOLARISATION A DEUX ANS (1)
France métropolitaine et DOM, secteurs public et privé

2002-2003

2003-2004

2004-2005

2005-2006

2006-2007

2007-2008

32 %

28,8 %

26,1 %

24,5 %

23,4 %

20,9 %

(1) Repères et références statistiques sur les enseignements, la formation et la recherche RERS 2007

Il convient cependant de préciser que le taux ne tient compte que des enfants ayant deux ans révolus à la rentrée scolaire, condition requise pour être admis à l'école maternelle. Si l'on rapporte les effectifs des enfants scolarisés à ceux des scolarisables, c'est-à-dire des seuls enfants nés entre le 1 er janvier et le 31 août de l'année donnée, la proportion est nettement plus favorable. Ainsi environ 40 % des enfants de deux ans susceptibles d'entrer à l'école ont été scolarisés en 2006-2007.

b) L'entrée à l'école maternelle reste fixée à trois ans

L'évolution des effectifs des élèves de classes maternelles tend à recentrer l'accueil des enfants en maternelle sur la tranche d'âge des trois à six ans, l'écart entre la courbe des effectifs totaux de l'enseignement préélémentaire et celle des enfants de trois à six ans scolarisés se resserre progressivement.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE L'ENSEIGNEMENT PRÉÉLÉMENTAIRE 9 ( * ) ET DES ENFANTS DE 3/6 ANS SCOLARISÉS

Source : d'après données MEN et INSEE

En ce début de XXI e siècle, les ministres successifs en charge de l'éducation nationale ont rappelé que la scolarisation des enfants de deux ans ne saurait être considérée comme une obligation pour le système éducatif .

La loi n° 2005-380 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école promulguée le 23 avril 2005 n'a nullement remis en cause les dispositions définies par la loi d'orientation de juillet 1989. Elle étend même aux régions d'outre-mer le principe d'un accueil privilégié avant l'âge de trois ans si les parents en font la demande. Les débats législatifs ont toutefois confirmé le refus de tout principe de généralisation de la scolarisation des enfants de moins de trois ans .

Dans la majorité des pays de l'OCDE et des économies partenaires, la scolarisation universelle (soit des taux de scolarisation supérieurs à 90 %) commence à l'âge de cinq ou six ans. Toutefois, en Allemagne, en Belgique, au Danemark, en Espagne, en France, en Hongrie, en Islande, en Italie, au Japon, au Luxembourg, en Norvège, en Nouvelle-Zélande, au Portugal, en République slovaque, en République tchèque, au Royaume-Uni et en Suède et, dans les économies partenaires, en Estonie, en Israël et en Slovénie, 70 % au moins des enfants sont accueillis dès l'âge de trois ou quatre ans dans des structures préprimaires ou des établissements primaires. Le taux de préscolarisation est inférieur à 25 % en Corée et en Turquie, mais supérieur à 90 % en Belgique, au Danemark, en Espagne, en France, en Islande, en Italie, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni et, dans les économies partenaires, en Estonie.

Regards sur l'éducation 2007 - Les indicateurs de l'OCDE

Les nouveaux programmes de l'école primaire, élaborés par le ministère de l'éducation nationale en 2008 et soumis à consultation, n'intègrent pas la classe des deux ans ou la toute petite section. En revanche, ils actent une école maternelle en trois ans : « Le programme de l'école maternelle, sans horaire contraignant, présente les grands domaines d'activité à aborder sur les trois années qui précèdent l'entrée dans la scolarité obligatoire » .

Votre commission des affaires culturelles a, au cours de sa réunion du 16 avril 2008, approuvé cette orientation.

II. L'ÉCOLE À DEUX ANS : UNE QUESTION DE SOCIÉTÉ

L'enjeu d'une scolarisation précoce en France dépasse le seul questionnement autour du bien-être du jeune enfant ; il participe d'un débat de société qui s'inscrit dans une dimension d'ordre social, économique et territorial. S'interroger sur l'entrée à l'école maternelle à deux ans renvoie à la question de ses modalités et de ses objectifs. Deux questions doivent être abordées : où sont les enfants de deux ans aujourd'hui dans notre pays ? Pourquoi ce débat surgit-il avec autant d'acuité ?

L'école maternelle offre à l'heure actuelle un espace entre éducation familiale et éducation scolaire . Elle est d'ailleurs en situation de quasi monopole pour l'accueil spécifique des enfants de deux à cinq ans. La découverte de la vie en société dans une structure collective s'effectue pour le plus grand nombre d'enfants lors de l'entrée à l'école maternelle.

A. L'ÉCOLE MATERNELLE, UNE OPPORTUNITÉ DANS UN CONTEXTE DE PÉNURIE

Dans les deux décennies précédentes, l'éducation nationale a pu répondre à une demande sociale et l'école maternelle a représenté une opportunité nouvelle. Ce rôle joué par l'institution scolaire est d'autant plus prégnant aujourd'hui que les données socio-démographiques pèsent fortement sur les capacités d'accueil des différents modes de garde des enfants de moins de trois ans .

On peut considérer que l'école maternelle fournit un service aux parents avec la prise en charge des jeunes enfants. Elle est en quelque sorte d'un point de vue social et économique un mode d'accueil particulier à destination des deux-trois ans, âge de transition pour lequel des structures innovantes ou spécifiques sont quasi-inexistantes . Il convient de noter que les différents rapports, récemment parus, sur les modes de garde de la petite enfance intègrent effectivement l'école maternelle.

1. La conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle

En France, le dynamisme démographique et le taux d'activité féminine élevé influent fortement sur la politique de la petite enfance et conditionnent les besoins en mode de garde. Cette politique familiale mobilise des moyens financiers importants et de nombreux acteurs publics et privés, même si elle ne permet pas de satisfaire l'ensemble des besoins.

a) Le dynamisme de la natalité

Au 1 er janvier 2007, la France compte un peu plus de 4,8 millions d'enfants de moins de six ans, qui se répartissent selon le graphique ci-après. La répartition par âge des enfants de moins de six ans montre une forte progression des moins de trois ans , désormais plus nombreux que les trois-cinq ans et témoigne d'une vitalité démographique propre à notre pays . En 2007, 783 500 naissances ont été comptabilisées en France métropolitaine et 33 000 dans les départements d'outre-mer, soit un total de 816 500. En 2006, on a atteint un niveau très élevé avec 830 900 naissances.

En effet, la France est un des pays les plus féconds de l'Union européenne avec un nombre de naissances actuellement inégalé depuis vingt-cinq ans. Certes, le nombre de femmes de 20 à 40 ans continue de diminuer, mais les femmes ont plus d'enfants qu'auparavant : l'indicateur conjoncturel de fécondité augmente. Il atteint deux enfants par femme en 2006, niveau le plus haut depuis trente ans.

Après une décroissance constante durant les années 1980, le nombre d'enfants de moins de six ans augmente chaque année depuis 2000 .

Un tel dynamisme démographique a un effet d'impact substantiel et pose avec acuité pour les années à venir la question de l'offre d'accueil en termes de modes de garde. La pression démographique sur les modes de garde se combine avec le travail des femmes de plus en plus développé.

b) Un fort taux d'activité féminine

Aujourd'hui, dans notre pays, la situation de bi-activité au sein d'un même foyer est la plus fréquente. Près de six enfants de moins de six ans sur dix vivent avec deux parents actifs. Cette proportion est à peine inférieure pour les enfants de moins de trois ans. On peut considérer que près de 60 % des enfants de moins de trois ans ont ainsi besoin d'un mode d'accueil en raison de l'activité professionnelle de leurs parents .

TYPE DE FAMILLE AVEC AU MOINS UN ENFANT DE 0-6 ANS SELON L'ACTIVITÉ DES PARENTS

0 à 3 ans

0 à 6 ans

Famille monoparentale, parent actif

3 %

5 %

Famille monoparentale, parent inactif

3 %

2 %

Couple dont 1 actif

37 %

32 %

Couple dont 2 actifs

56 %

59 %

Couple, 2 inactifs

1 %

1 %

Total

100 %

100 %

Source : INSEE, Enquête emploi 2005 (France métropolitaine)

Par ailleurs, 61 % des enfants de moins de six ans dont les deux parents sont actifs occupés ont une mère qui travaille à temps complet. Selon l'Observatoire national de la petite enfance, parmi les enfants vivant avec leurs deux parents et ayant une mère travaillant à temps partiel, 19 % ont une mère qui souhaiterait travailler davantage . 10 % ont une mère qui travaille à temps partiel par manque de services de garde ou parce que ceux-ci sont trop chers. Par ailleurs, la taille de la fratrie conditionne fortement le taux d'activité des mères.

Selon l'enquête emploi 2005 de l'INSEE, le taux d'activité féminine est de 74,4 % pour les femmes de 15 à 59 ans en couple et sans enfant. Il s'élève à 80,2 % en présence d'un enfant de moins de trois ans, sans doute en prévision d'un surcroît de dépenses, mais il chute à 59,8 % en présence de deux enfants dont au moins un de moins de trois ans et à 37,1 % en présence de trois enfants ou plus dont au moins un de moins de trois ans. Une fois l'âge de trois ans atteint par les enfants, le taux d'activité des femmes en couple se situe à nouveau au-dessus de la moyenne : 81,1 % en présence d'un enfant âgé de trois ans ou plus et 83,9 % en présence de deux enfants âgés de trois ans ou plus.

Plusieurs de nos interlocuteurs nous ont indiqué que les familles confiaient de plus en plus tôt leurs enfants à d'autres. Au cours de son audition par le groupe de travail, M. Alain Bentolila a relevé ainsi un phénomène d'accélération de la « passation » des enfants depuis une quarantaine d'années, indiquant que ces derniers ont progressivement été confiés un an et demi plus tôt à des intervenants extérieurs à la famille, l'âge moyen passant de trois ans et demi à avant deux ans : « impatience éducative et déficit de la médiation familiale sont sans doute à l'origine de la scolarisation de plus en plus précoce des enfants » . C'est ainsi que l'école à deux ans a fait progressivement son entrée parmi les modes de garde liés à la petite enfance .

c) Qui conduisent à des besoins potentiels élevés

L'analyse de ces données socio-démographiques, qui tendent à montrer que le travail féminin n'est pas l'ennemi de l'enfant, permet de comprendre que la question des modes de garde constitue un sujet prégnant pour les familles .

Les besoins sont toujours difficiles à évaluer. Toutefois, on considère ainsi que 59 % des enfants de moins de trois ans ont potentiellement besoin d'un mode d'accueil individuel ou collectif . Il s'agit de proposer une offre large et diversifiée permettant de répondre à une demande des familles croissante et de plus en plus personnalisée.

ESTIMATION DES BESOINS POTENTIELS EN MODES D'ACCUEIL POUR LES MOINS DE TROIS ANS ET OFFRE EFFECTIVE (FRANCE MÉTROPOLITAINE)

SOURCE

SIGNIFICATION

Besoins

Nombre d'enfants de 3 mois à 3 ans*

2 112 167

Calcul Cnaf sur base Insee, début 2007

France métropolitaine

Nombre d'enfants dont le mono-parent ou les deux parents sont actifs (occupés ou non)

1 246 179

Insee enquête emploi 2005 - Enquête emplois Insee 2005

Besoin brut

Nombre d'enfants qui ont un parent inactif en raison de difficultés liées au mode de garde

155 244

Enquête Meda & Wierinck 2003

Besoin non couvert

Total besoins potentiels

1 401 423

France métropolitaine

Offre effective pour les 0-3ans

Places EAJE

319 000

Drees, enquête PMI

Potentiel 0-6 ans (2005)

Bénéficiaires Paje CMG dom (-3 ans)

33 215

CNAF Fileas

2006

Bénéficiaires Paje CMG ass.mat (-3 ans)

473 601

CNAF Fileas

2006

Bénéficiaires Paje CMG struct (-3 ans)

1 326

CNAF Fileas

2006

École maternelle (2-3 ans)

182 000

Éducation Nationale

2006

Total places accueil

1 009 142

France métropolitaine

* Pour les enfants de rang 3 et +, ne sont retenus que les enfants à partir de 4 mois.

Source : CNAF

Les besoins des familles ne sont donc qu'imparfaitement couverts, en dépit du développement de l'offre de garde et des aides financières mises en place. A cette insuffisance quantitative du nombre de places d'accueil offertes -de l'ordre de 390 000 places- se conjuguent de grandes disparités territoriales , qui occasionnent une part d'insatisfaction et de contraintes pour de nombreuses familles.

2. L'école maternelle au regard de l'offre de garde

Le premier mode de garde pour les enfants de moins de trois ans non scolarisés est familial, près des deux tiers des enfants sont gardés à la maison , essentiellement par leur mère. Le deuxième mode de garde est l'assistante maternelle (20 %). La fréquentation d'un établissement d'accueil de jeunes enfants ne concerne que 8 % des enfants. 10 ( * )

L'offre d'accueil en France fait coexister un secteur public et un secteur privé. Le service public est sous l'égide des collectivités territoriales, des caisses d'allocations familiales avec les crèches pour les plus petits, ou de l'État avec la préscolarisation des enfants de deux à trois ans. Le secteur privé comprend les assistantes maternelles, les gardes à domicile et les crèches d'entreprise. Cette offre est hétérogène dans ses caractéristiques, dans sa tarification comme dans sa répartition territoriale.

a) Un positionnement ambigu des familles
(1) Le choix des parents ne se porte pas prioritairement sur l'école maternelle

Le déficit actuel du nombre de places proposées pour l'accueil des enfants de moins de trois ans pèse sur le choix des familles et sur la satisfaction de leurs attentes. Le principe d'une entrée précoce en école maternelle est souvent présenté comme répondant à une demande forte des parents, or leur positionnement à l'égard de cette mesure semble plus nuancé . Il demeure que les parents sont avant tout attachés à une offre diversifiée, alliant structures de garde collective et gardes individuelles.

Une enquête SOFRES 11 ( * ) , menée pour le magazine Parents , en 2006 sur cette question de la scolarisation précoce, réalisée auprès de mères d'enfants de moins de deux ans, indique que seules 35 % des mères sont favorables à une généralisation de l'accueil des enfants de deux ans à l'école . Il convient de reconnaître que ce pourcentage révèle l'absence de consensus autour de cette question et l'ambivalence des familles à l'égard d'une entrée précoce dans l'institution scolaire. Par ailleurs, plus d'une mère sur deux estime que l'école à partir de deux ans devrait s'adresser en priorité aux familles défavorisées.

La première raison invoquée pour scolariser son enfant est le souci de favoriser l'apprentissage de la vie en société. Les raisons relatives aux modes de garde, au travail des femmes, aux aspects financiers ne semblent pas prépondérantes (respectivement 12 %, 11 % et 11 %). La réticence principale de la part des mères provient du sentiment que leur enfant est immature pour faire face à cette scolarisation précoce , et non par exemple en raison d'un manque de places en école maternelle.

Ce sondage corrobore un sondage antérieur réalisé en avril 2004 12 ( * ) à la demande d'une association de parents d'élèves, la PEEP dont les principaux enseignements étaient les suivants :

- 60 % des parents ne sont pas prêts à mettre leur enfant à l'école dès l'âge de deux ans , même s'ils en ont la possibilité, contre 39 % qui y sont favorables ;

- les principales motivations des parents sont liées à la recherche d'un bien-être pour leur enfant ;

- 20 % auraient recours à cette solution pour des raisons de type matériel (manque de structure d'accueil ou coût) : 16 % par manque de structure d'accueil et 4 % en raison du moindre coût.

(2) Des motivations éclatées

Le groupe de travail a tenté de cerner les motivations profondes et souvent diverses qui conduisent une part non négligeable des parents à choisir d'inscrire leur enfant à l'école maternelle avant l'âge de trois ans . Au cours de son audition, Mme Claire Brisset, ancienne défenseure des enfants, en a relevé cinq :

- un nombre de places en crèches insuffisant ;

- les réticences de certaines municipalités à ouvrir des crèches ;

- une forme de stakhanovisme, particulièrement dans les milieux favorisés, afin de « gagner du temps » dans la scolarité des enfants ;

- la gratuité, qui pose la question de l'école comme mode de garde ;

- les « bonnes intentions ».

Cette impatience éducative des parents est particulièrement mise en évidence par M. Alain Bentolila qui la considère en partie comme un facteur d'explication d'une scolarisation de plus en plus précoce des enfants : « Aujourd'hui, le temps est à l'impatience ; aussitôt nés, il faut cultiver activement leurs jeunes intelligences, développer énergiquement leurs capacités logiques, et attiser leurs appétits artistiques. »

b) Les structures d'accueil collectives : un mode minoritaire

Les structures collectives sont fortement sollicitées par les parents, car elles sont notamment considérées comme un mode de socialisation intéressant. Cependant, le recours à ce type de mode de garde reste minoritaire en France, même lorsque les deux parents exercent une activité professionnelle à temps complet.

L'assistante maternelle agréée constitue le mode d'accueil le plus utilisé (34 %), tandis que les établissements d'accueil de jeunes enfants (crèches) sont utilisés par 20 % des enfants de moins de trois ans dont les deux parents travaillent .

La proportion des parents qui recourent à un mode d'accueil payant augmente nettement en fonction des ressources des familles. Le type d'agglomération influe aussi sur le mode de garde.

Différentes études montrent qu'il existe un décalage entre le souhait des parents et les pratiques qu'ils sont contraints d'adopter à l'égard des modes de garde.

(1) L'école maternelle, un mode d'accueil spécifique

Au sens de la recherche internationale, l'école maternelle est un mode d'accueil parmi d'autres, que sont les crèches, les jardins d'enfants, les haltes-garderies et les modes d'accueil individualisés. Cette acception ne recouvre pas la réalité de la situation française dans la mesure où la totalité des enfants de trois ans sont aujourd'hui scolarisés.

Toutefois, en France, elle est une institution singulière parmi les services d'accueil et d'éducation de la petite enfance . Elle a été développée par le pôle de l'instruction et non de l'hygiène et des soins physiques. Elle est ainsi placée sous l'autorité du ministère en charge de l'éducation nationale et se veut un premier lieu de scolarisation.

Cependant, elle fournit également une réponse sociale et subventionnée à un besoin des familles pour la garde et l'éducation de leurs jeunes enfants pour un temps donné, notamment en l'absence de structures innovantes et spécifiques pour la tranche d'âge de transition que constituent les deux-trois ans.

Placer l'école maternelle au regard d'un questionnement sur les modes de garde du jeune enfant souligne le rôle parfois ambigu qu'elle joue actuellement dans notre société, qui tend à osciller entre lieu d'apprentissage et lieu d'accueil et de soins . Force est de rappeler que l'école maternelle doit mettre en oeuvre des objectifs éducatifs et pédagogiques.

Article L. 321-2 du code de l'éducation

« Sans rendre obligatoire l'apprentissage précoce de la lecture ou de l'écriture, la formation qui est dispensée dans les classes enfantines et les écoles maternelles favorise l'éveil de la personnalité des enfants. Elle tend à prévenir des difficultés scolaires, à dépister les handicaps et à compenser les inégalités. La mission éducative de l'école maternelle comporte une première approche des outils de base de la connaissance, prépare les enfants aux apprentissages fondamentaux dispensés à l'école élémentaire et leur apprend les principes de la vie en société.

L'État affecte le personnel enseignant nécessaire à ces activités éducatives. »

Les écoles maternelles sont réparties sur l'ensemble du territoire . Les autres modes d'accueil, même s'il existe une offre diversifiée, ne sont pas aussi accessibles, notamment à l'ensemble des milieux sociaux. Certaines personnes auditionnées par le groupe de travail ont souhaité attirer notre attention sur le fait que les parents de milieu défavorisé sont plus enclins à scolariser leur enfant qu'à l'inscrire dans une autre structure d'accueil collective.

Cette école accueille tous les enfants de deux à six ans, quelles que soient leurs langues, familles et conditions de ressources. Partie prenante de l'école primaire et intégrée dans l'éducation nationale, elle est porteuse pour la Nation de valeurs d'unité et de cohésion sociales.

L'entrée à l'école maternelle ne résout pas généralement les problèmes de garde, les horaires de l'école ne coïncident que rarement avec ceux des parents. Elle ne fonctionne que 140 jours par an, avec un niveau d'accueil périscolaire très variable.

(2) Un taux de couverture des besoins insuffisant

On compte en moyenne 47 places d'accueil pour 100 enfants de moins de trois ans pour l'ensemble des modes de garde, y compris l'école maternelle , sur l'ensemble du territoire (France métropolitaine). Les deux tiers de l'offre sont assurés par les assistants maternels. Les disparités géographiques peuvent être importantes, le potentiel d'accueil pouvant varier de 20 à 81 places pour 100 enfants selon les départements.

COUVERTURE DE LA CAPACITÉ THÉORIQUE D'ACCUEIL DES ENFANTS DE MOINS DE TROIS ANS À FIN 2005

Nombre de places

Pour 100 enfants

Total en nombre de places

Accueil collectif

11

256 800 (265000 fin 2006) (1)

Service d'accueil familial

3

62 100 (63 000 fin 2006)

Assistante maternelle

30

- 689 000 places disponibles estimées auprès de 263 000 assistantes employées,

- 1 million de places théoriques pou 399 000 assistantes agréées

École maternelle (ratio rapporté à l'ensemble des enfants de moins de trois ans)

3

167 500 (rentrée 2007)

Capacité théorique d'accueil totale

47

999 500 (à comparer aux 2,287 millions d'enfants de moins de trois ans au 1 er janvier 2005, dont environ 9 % pris en charge au titre du congé maternité)

Capacité totale, y compris valorisation des places en accueil collectif

51

La place en accueil collectif est occupée en moyenne par 1,3 enfant du fait des gardes à temps partiel.

(1) Source : Études et résultats n° 608 - novembre 2007 - DREES

Sources : chiffres DREES-PMI-2005, l'accueil du jeune enfant en 2006, Observatoire national de la petite enfance - CNAF automne 2007.

Les établissements d'accueil collectif de la petite enfance, regroupent diverses catégories d'établissements qui ont en commun d'être spécialement conçus et aménagés pour recevoir dans la journée, collectivement, de façon régulière ou occasionnelle les enfants de moins de six ans.

PRÉSENTATION DES DIFFÉRENTS MODES D'ACCUEIL COLLECTIF
ET EN CRÈCHES FAMILIALES

Les établissements et les services d'accueil, outre leur fonction d'accueil, ont pour mission de veiller à la santé, à la sécurité, au bien-être des enfants qui leur sont confiés ainsi qu'à leur développement (décret du 1 er août 2000 relatif aux établissements et services d'accueil des enfants de moins de six ans). La création de ces établissements est préalablement soumise à l'autorisation du président du conseil général pour les structures de droit privé, et à avis pour celles créées par les collectivités publiques, notamment les communes. La prise en charge des enfants est assurée par une équipe pluridisciplinaire composée notamment d'éducateurs(trices) de jeunes enfants, d'auxiliaires de puériculture, sous la direction d'un médecin, d'un(e) puériculteur(trice) ou, pour les structures de 40 places au plus, d'un éducateur de jeunes enfants.

Une gestion principalement assurée par les communes

La gestion des établissements d'accueil collectif relève pour l'essentiel des collectivités territoriales (principalement les communes) ou des associations du type loi de 1901. Les caisses d'allocations familiales ou d'autres organismes tels que les organismes privés à but lucratif, les mutuelles et les comités d'entreprise peuvent également intervenir dans ce domaine, mais le font plus rarement. En 2005, les crèches de quartier sont ainsi gérées à 81 % par des collectivités territoriales (72 % par des communes et 9 % par les départements) et, dans 18 % des cas, par des associations. Les communes sont aussi, à plus de 85 %, responsables de la gestion des crèches familiales. Sur 10 haltes-garderies traditionnelles, 5 sont gérées par des communes et 4 par des associations. De leur côté, 52 % des établissements multi-accueil traditionnels relèvent des communes et 41 % des associations. En revanche, les structures parentales adoptent dans leur quasi-totalité un mode de gestion associatif.

Les crèches collectives (établissements d'accueil régulier d'enfants de moins de 3 ans)

Les crèches collectives, conçues pour recevoir dans la journée, de façon régulière, des enfants de moins de 3 ans regroupent :

- les crèches traditionnelles de quartier, implantées à proximité du domicile de l'enfant, ont une capacité d'accueil limitée à 60 places (fermées la nuit, dimanche et jours fériés) ;

- les crèches traditionnelles de personnel implantées sur le lieu de travail des parents adaptent leurs horaires à ceux de l'entreprise ou de l'administration (par exemple l'hôpital). Leur capacité d'accueil est également de 60 places maximum ;

- les crèches à gestion parentale sont administrées par les parents qui, regroupés en association de type loi 1901, s'occupent à tour de rôle des enfants de moins de 3 ans. Leur capacité d'accueil, de 20 places au maximum, peut, à titre exceptionnel, être portée à 25 places par dérogation.

Les haltes-garderies (établissements d'accueil occasionnel)

Les haltes-garderies accueillent ponctuellement des enfants de moins de six ans. Elles permettent d'offrir aux enfants de moins de trois ans des temps de rencontre et d'activité communs avec d'autres enfants, les préparant progressivement à l'entrée à l'école maternelle. On distingue les haltes-garderies traditionnelles pouvant offrir au maximum 60 places et les haltes-garderies à gestion parentale de taille limitée à 20 places (25 places par dérogation).

Les jardins d'enfants (établissements d'accueil régulier d'enfants de 3 à 6 ans)

Conçus comme une alternative à l'école maternelle, ces établissements doivent assurer le développement des capacités physiques et mentales des enfants par des exercices et des jeux. Ils peuvent éventuellement recevoir des enfants dès l'âge de deux ans. Leur capacité d'accueil peut atteindre 80 places.

Les crèches familiales (services d'accueil familial)

Les crèches familiales regroupent des assistantes maternelles agréées qui accueillent les enfants à leur domicile, sans regrouper l'ensemble des enfants dans un même lieu. Elles sont supervisées et gérées comme les crèches collectives. Les assistantes maternelles y travaillant sont rémunérées par la collectivité locale ou l'organisme privé qui les emploie. La capacité d'accueil des crèches familiales ne peut être supérieure à 150 places.

Les établissements «multi-accueil»

Les établissements multi-accueil proposent différents modes d'accueil d'enfants de moins de six ans au sein d'une même structure. Ils offrent fréquemment une combinaison de plusieurs modes d'accueil collectif de type crèche, jardin d'enfants, halte-garderie et/ou des places d'accueil polyvalent (utilisées selon les besoins tantôt à de l'accueil régulier, tantôt à de l'accueil occasionnel). Ces structures peuvent être gérées de façon traditionnelle ou être à gestion parentale, leur capacité d'accueil est, dans le premier cas, de 60 places et dans le second de 20 places (25 par dérogation). Mais certains de ces établissements assurent à la fois de l'accueil collectif et de l'accueil familial et, dans ce cas, leur capacité globale d'accueil est limitée à 100 places.

Source : Bailleau G., 2007, « L'accueil collectif et en crèches familiales des enfants de moins de 6 ans en 2005 », Etudes et résultats, n°548, janvier, Drees.

(3) Le déclin des jardins d'enfants

Le jardin d'enfants est une structure d'éveil ouverte aux enfants, de deux à six ans, avant l'âge de la scolarité obligatoire . L'encadrement est assuré par des éducateurs de jeunes enfants. Il correspond historiquement à l'émergence de courants pédagogiques, de représentations et de pratiques différentes à l'égard des jeunes enfants. Il est parfois conçu comme une structure de transition entre la famille, la crèche et l'école.

Ce type de structure est devenu marginal avec la généralisation de l'école maternelle à trois ans. Selon les données du ministère en charge des affaires sociales, leur nombre a chuté à 187 en 2006 contre 217 en 2002. Ils n'accueillent plus que 7 834 enfants dans quelques départements. Pourtant, ils ont bénéficié d'une adaptation de leur cadre réglementaire.

Le décret n° 2007-230 du 20 février 2007 13 ( * ) a ainsi réservé l'appellation de jardins d'enfants aux « établissements d'accueil collectif qui reçoivent exclusivement des enfants âgés de plus de deux ans non scolarisés ou scolarisés à temps partiel » . Le nombre d'enfants accueillis dans une structure peut atteindre 80 et l'effectif du personnel placé auprès de ces enfants est calculé de manière à assurer la présence d'un professionnel pour quinze enfants en moyenne. Le même décret a par ailleurs ouvert la possibilité de confier la direction d'un jardin d'enfants à une personne ayant exercé comme instituteur ou professeur des écoles justifiant de trois ans d'expérience professionnelle auprès de jeunes enfants.

(4) Un cloisonnement des structures

Au cours des auditions du groupe de travail, de nombreux interlocuteurs ont regretté que la question de l'éducation à la petite enfance soit traitée de manière trop cloisonnée.

L'accueil des enfants de deux à trois ans est ainsi partagé entre des institutions, des structures et des personnels de formations et de cultures différentes . Il est également traversé par un clivage entre deux tutelles - affaires sociales et éducation nationale.

L'école maternelle se pense en référence à l'école élémentaire, mais semble ignorer les autres institutions qui concourent également à l'accueil des enfants. L'école maternelle a sa place au sein du modèle éducatif français, mais ne doit pas prendre toute la place, comme l'indiquent les programmes de 2002 : « Tout en gardant sa liberté d'action et ses spécificités, l'école maternelle joue un rôle pivot dans le réseau des institutions de la petite enfance pour mettre en place les synergies possibles et éviter les incompatibilités et les surcharges » .

c) La comparaison des coûts ou une certaine idée de la gratuité

Quasi-gratuite pour les familles et ouverte à tous les enfants quelque soit le statut professionnel des parents,  l'école maternelle publique peut apparaître comme une solution intéressante pour les parents qui ne trouvent pas de mode de garde ou qui n'en ont pas les moyens. L'aspect financier est souvent mis en avant notamment pour justifier ou analyser le choix des parents, même si cet élément du débat autour de la scolarisation précoce apparaît marginal parmi les opinions recueillies auprès des familles.

(1) Un coût pour la Nation

L'école maternelle représente un coût important pour la Nation qui y consacre des moyens humains et matériels importants. Le financement des écoles maternelles fait intervenir deux acteurs principaux, l'État et les collectivités territoriales . 40 % de la dépense est financée par les collectivités territoriales pour l'ensemble du premier degré, qui prennent en charge la rémunération des personnels non enseignants ainsi que les dépenses de fonctionnement et d'investissement des écoles.

LE COÛT ANNUEL D'UN ÉLÈVE DE MATERNELLE

En 2006, le coût pour un élève de maternelle d'enseignement public ou privé s'élevait à 4 660 euros. Ce coût est financé par :

- le ministère de l'éducation nationale à hauteur de 2 330 euros dont plus de 99 % représentent des dépenses de personnels enseignants ;

- les collectivités locales, essentiellement les communes à hauteur de 2 050 euros dont près de 57 % de dépenses de personnel (Atsem - agent territorial spécialisé des écoles maternelles- et personnels d'entretien) ;

- les ménages à hauteur de 280 euros. Cette dépense des ménages couvre des droits d'inscription (assez faibles) pour les établissements privés mais surtout des frais de cantine et de petit matériel scolaire.

Depuis 1980, les dépenses annuelles moyennes par élève du préélémentaire et de l'élémentaire se sont rapprochées en raison de l'augmentation du nombre d'enseignants par élève et à l'important accroissement des dépenses de personnel des communes en préélémentaire. Par ailleurs, la dépense moyenne par élève du préélémentaire a fortement progressé entre 1980 et 2006, soit plus de 73 % en prix constants , dans un contexte général de baisse des effectifs d'élèves du premier degré, de maintien des postes d'enseignants et de revalorisation de leur carrière.

De 1990 à 2006, le coût d'une scolarité en maternelle , calculé en tenant compte pour chacune de ces deux dates du nombre moyen d'années passées en préélémentaire, s'est accru de plus de 50 % , puisque la dépense pour une scolarité en maternelle est passée de 9 900 euros en 1990 à 14 910 euros en 2006 aux prix de 2006. Cette croissance des coûts est plus forte que pour l'enseignement élémentaire (+35,6 %).

(2) Un élément du débat sur l'offre de garde

La scolarisation des jeunes enfants apparaît cependant comme un des modes de garde les moins coûteux à la fois pour les familles et pour la collectivité dans son ensemble par rapport aux coûts de construction et de fonctionnement d'une crèche. Cette forme d'opportunité financière s'explique par une réglementation différente en termes de normes d'encadrement

De l'ordre de 781 millions d'euros en 2006, les dépenses relatives à la scolarisation des enfants de moins de 3 ans représentent environ 10 % du coût global consacré pour la collectivité à la politique de services d'accueil de la petite enfance qui est estimé autour de 7,5 milliards d'euros. Ces dépenses comprennent les prestations monétaires pour une garde individuelle, les dépenses de fonctionnement et d'investissement des établissements d'accueil du jeune enfant ainsi que les dépenses fiscales, telles que les réductions d'impôt pour frais de garde et pour les emplois familiaux.

Le financement des modes d'accueil de la petite enfance fait intervenir quatre acteurs, la famille, la caisse d'allocations familiales, les collectivités territoriales et l'État.

Ainsi, une des orientations de la révision générale des politiques publiques (RGPP) en matière de politique familiale vise à mieux prendre en compte le coût des différents modes de garde dans l'augmentation de l'offre de garde. Il s'agit d'engager une véritable réflexion autour des normes d'encadrement en matière d'accueil du jeune enfant, qui pèse fortement sur la nomenclature financière des modes de garde et d'envisager leur assouplissement en fonction de l'âge des enfants accueillis. « Or, pour une famille, la participation financière aux frais peut s'avérer plus chère pour une place chez une assistante maternelle agréée que pour une place en crèche. De plus, comment comprendre qu'un enfant de moins de trois ans scolarisé coûte environ deux fois moins cher à la collectivité qu'un enfant du même âge en crèche ? Ces différences de coût entre les différents modes de garde doivent conduire à une réflexion globale sur les normes d'accueil, dans un contexte d'accroissement de l'offre de garde. » 14 ( * )

Le dernier rapport de la Cour des Comptes fait ainsi remarquer que « le coût par enfant est moindre s'il est accueilli en maternelle plutôt qu'en établissement d'accueil du jeune enfant (EAJE) » . Il suggère aussi de clarifier les objectifs de l'Etat dans ce secteur de l'accueil des deux-trois ans et d'apporter une réponse adaptée aux besoins à venir. Certes, se pose la question de l'efficacité des dépenses publiques de l'Etat dans ce domaine, mais au-delà du coût , il importe surtout de prendre en compte sa qualité et ses effets sur les enfants.

STRUCTURE ACTUELLE MOYENNE DU FINANCEMENT DES MODES D'ACCUEIL, À PARTIR DE LEUR COÛT UNITAIRE PAR ENFANT

Coût pour un enfant (en euros)

Part famille
(en %)

Part Etat
(en %)

Part CNAF
(en %)

Part gestionnaire : collectivité locale ou autre
(en %)

Garde à domicile

25 488

48,00

26,00

26,00

-

Garde partagée entre 2 familles

12 966

35,00

35,00

30,00

-

EAJE

10 000

10,00

10,00

30,00

30,00

Assistante maternelle

7 518

10,00

8,00

82,00

-

École maternelle

4 660

6,00

50,00

-

44,00

Garde par un parent (CLCA)

4 359

-

-

-

-

Source : mission de révision générale des politiques publiques relative à la politique familiale (2008)

Note : le coût de revient des différents modes de garde fait appel à des méthodologies complexes et parfois divergentes selon les sources. Une place de crèche peut accueillir plus d'un enfant du fait des placements à temps partiel (1,3 enfants)

3. Un accès sélectif à l'école maternelle pour les deux ans

Les enfants qui accèdent à l'école maternelle dès le plus jeune âge, c'est-à-dire avant trois ans, peuvent faire l'objet d'une typologie. Se dessine en quelque sorte un profil de l'écolier de deux ans .

a) Un ordre de priorité

Plusieurs textes législatifs et réglementaires ont précisé et hiérarchisé en fonction de l'âge de chaque enfant un droit à l'accueil en milieu scolaire. Cet ordre de priorité structure en quelque sorte l'admission dans une politique de scolarisation précoce.

Le principe d'une scolarisation à partir de l'âge de trois ans est ouvert et reconnu par la loi, conformément aux dispositions de l'article L. 113-1 du code de l'éducation, mais il ne s'exerce qu'à la demande expresse des familles.

L'inscription des enfants de deux ans à l'école maternelle procède d'une faculté offerte aux familles en fonction de conditions discriminantes . L'enfant doit avoir atteint l'âge de deux ans révolus le jour de la rentrée aux termes de l'article D. 113-1 de la partie réglementaire du code de l'éducation à condition qu'il soit physiquement et psychologiquement prêt à le fréquenter. Par ailleurs, l'accueil des enfants de deux ans en maternelle est fonction des places disponibles, compte tenu de la priorité accordée aux enfants de trois ans. Le principe d'un accueil prioritaire pour les enfants vivant dans un environnement social défavorisé est également inscrit dans la loi.

b) L'écolier de deux ans : un profil ciblé

Les données recueillies dans le cadre du panel de près de 9 000 élèves entrés en classes préparatoires en 1997, dont 29 % ont été scolarisés à deux ans, et suivis pendant plusieurs années par l'ancienne direction de l'évaluation et de la prospective (DEP), montrent l'existence de fortes disparités en fonction des caractéristiques de l'élève et de sa famille. Réalisé à un moment où la scolarisation précoce était élevée, cet échantillonnage n'en demeure pas moins un élément d'indication du profil de l'écolier de deux ans.

Depuis la rentrée scolaire 1997, la Direction de la programmation et du développement du ministère de l'Éducation nationale suit un échantillon représentatif au niveau national de 9 260 écoliers qui entraient pour la première fois à cette date au cours préparatoire dans une école publique ou privée de France métropolitaine.

La situation scolaire des élèves est actualisée chaque année par une prise d'informations auprès de son école. Les enfants faisant partie de la cohorte ont passé des tests de compétences à l'entrée au cours préparatoire.

Les scores qu'ils ont obtenus aux épreuves nationales d'évaluation de CE2 ont été recueillis. La présente étude porte sur les 8 661 élèves de la cohorte qui, nés en 1991, sont entrés à 6 ans au cours préparatoire et ont pu être suivis au cours de leurs trois premières années de scolarité élémentaire 15 ( * ) .

Le mois de naissance apparaît logiquement comme un facteur déterminant dans l'éventualité d'une scolarisation précoce. Les enfants nés en début d'année sont souvent plus mûrs pour une entrée précoce à l'école maternelle, leurs parents préfèrent ainsi les scolariser avec quelques mois d'avance, plutôt que de les scolariser un an plus tard - dans la perspective également de leur permettre d'accéder au cours préparatoire dans l'année de leurs cinq ans-. Le tableau montre ainsi que 46 % des élèves nés au premier semestre contre seulement 27 % de ceux nés au troisième trimestre et 17 % des enfants nés au cours des trois derniers mois de l'année sont entrés à l'école maternelle à deux ans. Une minorité des enfants de deux ans à deux ans et demi sont donc scolarisés et les moins de trois ans à l'école sont majoritairement des enfants de deux ans et demi à trois ans.

Le mode de garde antérieur semble également jouer un rôle non négligeable. Son caractère individuel apparaît comme un facteur déterminant pour une entrée à l'école maternelle à deux ans. Par ailleurs, l'activité de la mère joue également en ce sens. En effet, 28 % des enfants entrés à l'école à deux ans ont une mère inactive, contre 32,5 % pour ceux ayant une mère active, soit un écart non négligeable de 4,5 points.

Les disparités entre les différents milieux sociaux sont également assez marquées. Les enfants d'agriculteurs se situent en tête de ceux qui fréquentent l'école maternelle à deux ans , 46 % d'entre eux. Les enfants d'enseignants profitent également d'une scolarisation précoce . Les enfants des autres catégories sociales ont une fréquentation proche de la moyenne nationale.

En ce sens, les disparités territoriales influent fortement sur la possibilité d'accès à l'école maternelle dès l'âge de deux ans, comme le font apparaître les données du tableau ci-après.

L'ÂGE D'ENTRÉE EN MATERNELLE SELON LES CARACTÉRISTIQUES DES ÉCOLES FRÉQUENTÉES (EN  %)

Caractéristiques des écoles

Âge d'entrée en maternelle

Deux ans

Trois ans

Quatre ans et plus

Secteur de l'école ou des écoles maternelles fréquentées

Public

29,9

64,7

5,4

Privé

46,8

49,6

3,6

Public et privé

36,6

55,5

7,9

Tranche d'unité urbaine de l'école de CP

Rural

36,9

56,9

6,2

< 20 000 habitants

36,3

58,4

5,3

< 100 000 habitants

30,6

65,3

4,1

> ou = 100 000 habitants

32,6

62,4

5,1

Paris

13,9

79,3

6,8

Classement en ZEP de l'école de CP

Oui

27,7

65,0

7,4

Non

31,6

63,2

5,2

Ensemble

31,1

63,4

5,5

Source : Panel d'élèves du premier degré recruté en 1997

Lecture : 29,9 % des enfants ayant effectué toute leur scolarité maternelle dans une école publique ont été scolarisé à deux ans.

Source : Ministère de l'éducation nationale

La scolarisation avant trois ans concerne 37 % des élèves de milieu rural mais seulement 14 % de ceux qui habitent la région parisienne. Elle touche plus souvent les élèves scolarisés dans l'enseignement privé que ceux des écoles publiques. Le classement en ZEP en revanche semble avoir peu d'influence sur ce phénomène.

Les enfants de nationalité étrangère sont moins souvent scolarisés à deux ans , même s'ils disposent d'une offre scolaire à proximité de leur domicile.

c) Une modulation des rythmes scolaires

Force est de reconnaître que les enfants de moins de trois ans ne sont pas systématiquement scolarisés sur l'ensemble de la journée. Les familles font plutôt le choix d'une modulation des rythmes scolaires , en fonction de leurs disponibilités et des besoins propres à l'enfant. Par ailleurs, cela peut dénoter également de conditions d'accueil pas toujours adaptées à de si jeunes enfants, les parents considérant que le cadre familial est plus propice au respect de leurs besoins de repos.

Selon les informations du ministère de l'éducation nationale, en 2001, 38 % des enfants scolarisés à deux ans fréquentaient l'école à plein temps , 57 % à mi-temps (le matin) et 5 % le matin et quelques après-midis par semaine. A deux ans, la décision des parents porte aussi sur la durée de scolarisation de l'enfant.

TAUX DE SCOLARISATION EN %

Age de l'enfant au
31 décembre 2001

A mi-temps

Le matin et 1 à 3 après-midi

A temps complet

Total

2 ans

21

2

14

37

3 ans

20

6

71

97

4 ans

2

5

92

99

5 ans

1

2

96

99

Source : enquête Modes d'accueil et de garde des jeunes enfants, juin 2002, DRESS

L'école maternelle ne peut être considérée comme un substitut à un mode de garde payant que dans une minorité de cas, compte tenu du fractionnement de la scolarité pour ces enfants de deux ans. Il faut par ailleurs rappeler que pour un grand nombre d'enfants, l'école se substitue à la garde par les parents, qui constitue le mode de garde principal des jeunes enfants. La scolarisation précoce apparaît alors comme une démarche de socialisation de l'enfant.

Une majorité des enfants de deux ans qui fréquentent l'école maternelle à temps complet ou à mi-temps sont gardés par leurs parents en dehors du temps scolaire. Ils fréquentent moins la garderie périscolaire que leurs camarades plus âgés.

B. UN ANCRAGE TERRITORIAL OU DES RÉALITÉS LOCALES

La cartographie de la scolarisation précoce distingue deux approches, soit un accueil de la totalité des enfants demandeurs soit un accueil de type expérimental. En matière d'offre de scolarisation à deux ans, les disparités régionales demeurent fortes.

1. De fortes disparités territoriales qui permettent de s'interroger sur la maîtrise de la politique de scolarisation précoce

Les taux de scolarisation des deux-trois ans présentent de fortes disparités spatiales. Ces disparités sont anciennes et tendent à perdurer malgré la baisse notable du taux de scolarisation depuis les années 2000.

Forte en Bretagne, dans le Nord, dans le Massif central et les Pays de la Loire, la scolarisation des enfants de moins de trois ans est beaucoup plus faible en Île-de-France, en Alsace et dans le Sud-Est . Figure en annexe du présent rapport un tableau récapitulatif des politiques académiques et départementales en matière de scolarisation à deux ans entre 1990 et 2007. Les évolutions récentes n'ont pas beaucoup modifié les écarts : les départements où les taux de scolarisation sont les plus élevés restent pour l'essentiel les mêmes, et inversement.

A la rentrée 2007 , les taux de scolarisation à deux ans les plus élevés sont détenus respectivement par l'académie de Lille : 53,1 % et par celle de Rennes : 50,4 % . A contrario, en France métropolitaine, l'académie de Paris ne scolarise que 5,8 % des enfants de moins de trois ans, celle de Créteil et de Strasbourg 7,8 %. L'accueil préscolaire est plus développé dans les bassins industriels comme le Nord de la France pour des raisons d'ordre historique et culturel.

Certaines académies présentent une homogénéité entre départements , à l'exemple de l'académie de Rennes (50,4 %) : Côtes d'Armor : 51,2 %, Finistère : 62,1 %, Ille-et-Vilaine : 34,6 % et Morbihan : 59,9 %.

D'autres académies connaissent des contrastes extraordinaires entre départements , comme l'académie de Grenoble (13 %) : Haute-Savoie : 2,5 % , Savoie : 8,1 %, Isère : 8,1 %, Drôme : 30,4 %, Ardèche : 40,1 %.

Si on considère les contrastes entre départements, le Finistère avec un taux de 62,1 % et la Haute-Loire (60,9 %) se situent en pointe en matière de scolarisation à deux ans, tandis que cette composante est quasi-inexistante en Haute-Savoie (2,5 %), dans le Haut-Rhin (4,4 %) ou en Guyane (1,2 %) .

Cette répartition géographique ne recouvre en rien ce qui était prévu par le législateur. Paradoxalement, compte tenu des préconisations de la loi d'orientation de 1989, ce n'est pas forcément dans les régions considérées comme défavorisées que les taux de scolarisation précoce sont les plus élevés . L'effort budgétaire de la part des pouvoirs publics semble porter davantage sur les communes rurales que sur les zones urbaines prioritaires. Il convient de préciser que les services du ministère de l'éducation nationale n'ont pas pu fournir à vos rapporteurs de données statistiques sur la scolarisation des enfants de deux ans en ZEP au niveau national.

Lors de leur audition par le groupe de travail, les inspecteurs généraux de l'éducation nationale ont ainsi indiqué que dans l'académie de Lille (53 %), les taux les plus faibles concernaient les villes de Maubeuge, de Roubaix (inférieur à 50 %), alors que les villes de Bondue, Marcq-en-Baroeul et Wasquehal, surnommées le triangle BMW, connaissaient un taux de 80 %. On peut également citer le département de Seine-Saint-Denis qui ne scolarise à la rentrée 2007 que 5 % des enfants entre deux et trois ans . Les classes moyennes sont très en demande d'une scolarisation précoce. Il convient également de noter que ces familles sont capables de s'organiser pour obtenir le maintien des moyens.

2. Des éléments d'explications

Ces disparités territoriales n'ont pas d'explication satisfaisante. Elles peuvent être liées à la concurrence exercée par l'enseignement privé, comme dans l'académie de Rennes, à des effets de rétention dans certains milieux moins intégrés. Elles sont majoritairement le fait de données locales inscrites sur le long terme qui conjuguent plusieurs facteurs.

a) La carte démographique des moins de six ans

C'est en général dans les départements ruraux ou en recul démographique que les enfants de deux ans sont le plus souvent scolarisés . En effet, lorsque la population diminue, la baisse du nombre d'enfants de trois à six ans libère des places dans les classes maternelles, qui peuvent ainsi accueillir les plus petits. En fait, la politique de scolarisation précoce, reflet d'une France disparate, semble d'abord dépendre de contraintes liées aux variations démographiques. Elle constitue également une variable d'ajustement qui permet éventuellement le maintien de classes qui sinon seraient menacées de fermeture.

La répartition des enfants de moins de six ans est inégale selon les départements : la part de ces enfants, par rapport à la population totale varie de 4,8 à 8,7  %, avec une concentration forte dans les départements du Nord de la France, la région du Rhône et l'Île-de-France. Dans le quart Sud-ouest et dans le Centre de notre pays, la proportion d'enfants de moins de six ans est nettement plus faible que dans les autres régions, expliquant en partie pour les départements concernées un taux de scolarisation à deux ans plus élevé que la moyenne nationale.

PART DES ENFANTS DE MOINS DE SIX ANS DANS LA POPULATION TOTALE AU 1 ER JANVIER 2004 (EN %)

Source : INSEE

Les contrastes démographiques reflètent en réalité des évolutions assez différenciées, qui se reflètent dans une approche territoriale de l'âge d'entrée en maternelle des enfants. Depuis les années 1990, la baisse de la part de la population jeune est particulièrement importante dans nombre de départements ruraux du Massif Central et du Nord-est, qui conservent un taux de scolarisation à deux ans élevé. En revanche, on enregistre une vitalité démographique de l'Ile-de-France et du quart Sud-est de l'hexagone, notamment liée aux flux migratoires qui se traduit par un recul de ce taux, alors qu'il était déjà nettement inférieur à la moyenne nationale.

b) Les disparités géographiques en matière d'offre de garde collective

On observe, dans un certain nombre de régions, que le faible taux d'équipement en crèches collectives est corrélé avec un fort taux de scolarisation des enfants de moins de trois ans . Il faut préciser ici que cette corrélation ne renvoie pas à une politique décidée délibérément et conjointement par l'Éducation nationale et les gestionnaires de crèches. Cependant, le développement des crèches a tendance à limiter, de fait, les inscriptions en maternelle.

L'Ile-de-France et la Provence-Alpes-Côte d'Azur, dont les taux d'équipement en crèches sont élevés se caractérisent par de faibles taux de scolarisation des très jeunes enfants. En matière d'accueil collectif, trois départements situés en Ile-de-France (Paris, Hauts-de-Seine, Val-de-Marne) disposent d'un nombre moyen de places supérieur à 20. Il existe néanmoins des régions qui cumulent un faible taux d'équipement en crèches et un faible taux de préscolarisation précoce (Alsace, Haute-Normandie, Corse, Picardie notamment).

A l'inverse, vingt-quatre départements, situés plutôt dans la moitié Nord de la France comptent moins de 6 places pour 100 enfants de moins de trois ans, alors que ces départements sont plutôt dans une situation favorable en matière de scolarisation précoce.

Par ailleurs, depuis une dizaine d'années, avec le repeuplement des zones rurales, la demande des parents pour scolariser leurs enfants avant trois ans est réelle. Compte tenu de l'évolution des modes de vie, les populations non issues du milieu rural sont parfois plus exigeantes vis-à-vis du service public de l'éducation. Les zones rurales sont peu pourvues en établissements d'accueil collectif , dont les contraintes financières et réglementaires freinent leur développement. Ce déficit de structures d'accueil de la petite enfance peut expliquer également cette demande des familles en milieu rural.

c) La concurrence de l'enseignement privé

L'approche d'un point de vue géographique de la répartition de la scolarisation avant trois ans tend à montrer une concordance entre une implantation forte de l'enseignement privé et l'accueil des enfants de deux ans en école maternelle sur le territoire national . La concurrence du secteur privé peut apparaître comme un élément qui a favorisé dans certaines régions le développement de la scolarisation précoce, en exerçant notamment un pouvoir d'attraction à l'égard des familles.

La carte de la scolarisation précoce tend à recouper globalement celle de la part de l'enseignement privé, particulièrement pour les régions où elle est prépondérante. Il faut noter que la part du secteur privé est très variable selon les départements. L'Ouest de la France et le Sud-est du Massif central, même si on constate quelques signes d'érosion dans ces régions depuis quelques années, à l'exception toutefois de la Bretagne, sont marqués à la fois par une forte tradition d'implantation du secteur privé et de scolarisation précoce, notamment dans les espaces ruraux. Par ailleurs, on constate un renforcement sensible du secteur privé dans le Nord du pays.

L'enquête « Modes d'accueil et de garde des jeunes enfants » menée en 2002 par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DRESS) du ministère en charge des affaires sociales montre l'existence de cette prééminence de la scolarisation précoce dans l'enseignement privé : ainsi, 17 % des enfants scolarisés à deux ans fréquentaient une école privée en 2002 contre 13 % des enfants âgés de trois à six ans . Les données relatives à la rentrée 2007 corroborent cette tendance puisque cette tranche d'âge représente plus de 10 % des effectifs scolarisés (33 367 élèves) dans le préélémentaire privé contre 6,1 % pour l'enseignement public (130 641).

3. L'école maternelle en milieu rural

Votre groupe de travail souhaite souligner la problématique particulière de l'école maternelle en milieu rural. Force est de constater qu'elle est bien souvent la seule structure collective d'accueil dans les territoires ruraux et le premier lieu de socialisation. Elle est un lieu fédérateur et emblématique pour les différents partenaires, représentants de l'Etat, élus des collectivités territoriales et familles.

Le secteur rural propose plusieurs types d'accueil des enfants d'âge préscolaire en fonction des structures locales pour ce qui concerne l'école :

- S'il n'y a plus d'école dans la commune, les enfants sont scolarisés dans une commune voisine, suivant le fonctionnement local de la commune concernée ;

- Si la commune dispose d'une école à classe unique, elle accueille les enfants en section enfantine à partir de cinq ans, en fonction des dispositions du règlement départemental. Les familles souhaitant scolariser leur enfant avant cinq ans peuvent le faire dans la commune voisine qui dispose d'une école plus importante, avec l'effet « pervers » que ces élèves ne reviennent pas effectuer leur scolarité élémentaire dans leur commune d'origine, favorisant ainsi la baisse d'effectifs et l'éventuelle fermeture de l'école communale ;

- Si l'école a deux classes, il est rare qu'elle puisse accueillir des élèves avant l'âge de trois ans sauf en s'associant avec d'autres dans des situations de regroupement pédagogique intercommunal (RPI) ;

- A partir de trois classes, l'école peut accueillir les enfants de moins de trois ans en fonction des règles départementales et des enveloppes budgétaires.

Le dernier cas concerne l'école maternelle intercommunale gérée par un SIVU (syndicat intercommunal à vocation unique) qui reprend le modèle classique de l'école maternelle. Il s'agit alors de gérer notamment les questions liées au transport scolaire et à la garderie périscolaire.

Cependant, dans la plupart des cas, les enfants d'âge préscolaire sont scolarisés dans un contexte particulier qui est celui du multi-âge , soit des enfants d'âge élémentaire dans la même école, soit des classes maternelles avec des enfants qui ont entre deux et trois années d'écart. Ces petites structures peuvent être un avantage pour accueillir les enfants de moins de trois ans dans un contexte d'hétérogénéité d'âges. Elles sont cependant souvent peu adaptées aux besoins propres des très jeunes enfants.

4. L'école maternelle, un élément d'adaptation aux territoires

a) La commune, un partenaire essentiel

Les écoles maternelles sont présentes sur l'ensemble du territoire. La scolarisation est alors entendue comme un élément d'adaptation aux territoires. Le fonctionnement de l'école maternelle repose sur un partenariat actif entre l'éducation nationale, les municipalités et d'autres acteurs.

La commune est propriétaire des locaux scolaires et assure :

- la construction, la reconstruction, l'extension des locaux ;

- les grosses réparations et l'entretien des locaux ;

- l'équipement en mobilier et matériels ;

- les dépenses liées au fonctionnement pédagogique de l'école ;

- l'inscription des élèves : le maire délivre le certificat d'inscription et procède à la répartition des élèves dans les écoles de sa commune ;

- la nomination des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM) et autre personnel communal.

L'inspecteur d'académie assure la responsabilité de l'enseignement et de la gestion des enseignants du département, ainsi que l'attribution des postes dans les écoles et l'affectation du personnel enseignant. Il fixe ainsi la capacité d'accueil des écoles en termes d'effectifs moyens et les horaires dans le cadre de la réglementation départementale.

SCOLARISATION DES ÉLÈVES DE MOINS DE 3 ANS

Comme le précise le décret du 6 septembre 1990, « les élèves de moins de trois ans ne sont admis à l'école que dans la mesure des places disponibles », excepté, comme le prévoit la loi du 10 juillet 1989 dans « des écoles situées dans un environnement social défavorisé ».

La circulaire du 6 juin 1991 précise, quant à elle, les principes de l'inscription, réalisée par le maire sur demande des parents (un élève ne peut être systématiquement inscrit sans la démarche volontaire des parents) et de l'admission réalisée par le directeur(trice) d'école. Le règlement départemental explicite ces dispositions.

Période d'inscription

Il appartient donc à la directrice ou au directeur de l'école de prévoir avec le maire les modalités des inscriptions des élèves de moins de trois ans afin que leur admission puisse être prononcée dans la mesure des places disponibles.

Lors des inscriptions, les parents doivent être prévenus par le maire (qui inscrit les élèves) que l'admission sera prononcée par le(la) directeur(trice) de l'école avec qui il conviendra de prendre contact. Dans la plupart des cas, cette admission peut être prévue avant la fin de l'année scolaire en cours. Alors, dès que possible et dans tous les cas avant la rentrée scolaire, il appartient à chaque directeur(trice) d'école de prévenir les familles concernées de la possibilité d'accueil et d'en informer le maire.

Néanmoins, dans certaines circonstances (par exemple, une incertitude du nombre d'élèves de plus de trois ans), le maire pourra, en accord avec le(la) directeur(trice), établir une liste d'attente. Le rang de classement dans cette liste sera établi à partir des âges décroissants et prendre éventuellement en compte des critères particuliers définis en concertation.

A partir de la rentrée scolaire

A partir de la rentrée scolaire, les élèves inscrits sur la liste d'attente pourront être admis à l'école, s'il n'existe aucune contre-indication et si des places restent disponibles. La proposition sera faite aux familles concernées.

Quinze jours après la rentrée

Avant la date de retour de l'enquête lourde, chaque inspecteur de l'éducation nationale (IEN) dressera le bilan école par école, des élèves de moins de trois ans accueillis à cette date, et du nombre d'élèves encore en liste d'attente.

Le (la) directeur(trice) informera alors les familles concernées de la possibilité de scolariser leur(s) enfant(s) et informera l'IEN de circonscription.

b) Une variable d'ajustement ou une aide à la gestion de la carte scolaire ?

Compte tenu du caractère facultatif de l'école maternelle, les établissements scolaires acceptent l'inscription des enfants à partir de l'âge deux ans, en fonction de leurs capacités d'accueil. En effet, les places sont prioritairement attribuées aux enfants âgés de trois à quatre ans. Ceci explique que dans les départements ruraux ou en déclin démographique les enfants soient scolarisés plus précocement.

Depuis la loi de 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat, l'ouverture d'une classe relève de deux décisions :

- la décision de création, c'est-à-dire de construction ou d'aménagement de locaux prise par la commune en application de l'article L. 2121-30 du code général des collectivités territoriales ;

- la décision d'affectation d'un emploi d'enseignant prise par l'Etat.

Enfin, les modalités de décompte des effectifs scolaires sont définies localement dans le cadre de l'élaboration de la carte scolaire du premier degré. Dans les départements, elles sont établies en concertation au sein des conseils départementaux de l'éducation nationale. Les aménagements de la carte scolaire ne tiennent pas compte en principe des élèves de moins de trois ans qui ne sont pas comptabilisés dans les effectifs pour le calcul des créations ou des maintiens de postes d'enseignants.

III. LA SCOLARISATION PRÉCOCE : QUELLE PÉDAGOGIE POUR QUELS BÉNÉFICES ?

Le débat autour de la scolarisation des moins de trois ans ne peut se concevoir sans une approche centrée sur l'enfant . Au-delà des enjeux sociaux et financiers, qui ne doivent pas être minorés car ils participent de la mise en oeuvre de la politique familiale française, la réflexion du groupe de travail a été guidée par une analyse des besoins spécifiques de cette tranche d'âge et des attentes que manifeste l'école maternelle vis-à-vis de ces enfants .

La diffusion auprès d'un large public des connaissances sur le développement du jeune enfant, l'investissement massif des familles et de la société en faveur de l'école maternelle ainsi que la réflexion autour de l'échec scolaire ont contribué à poser comme priorité une entrée précoce dans une culture scolaire commune. Dans le même temps, l'école française a été marquée par un phénomène d'allongement de la scolarité qui a permis d'élever le niveau de connaissances des élèves et de favoriser la scolarisation des enfants issus de milieux modestes.

Au cours de ses auditions, le groupe de travail a porté une attention particulière aux enjeux éducatifs d'une scolarisation précoce . Il est essentiel de s'interroger sur l'impact d'une fréquentation scolaire dès deux ans sur le déroulement de la scolarité ultérieure.

A. L'ACCUEIL DES ENFANTS DE DEUX ANS À L'ÉCOLE PRIMAIRE

1. L'école maternelle s'adresse-t-elle aux enfants de deux ans ?

« Permettre à chaque enfant une première scolarisation réussie est l'objectif majeur de l'école maternelle » . Entrer à l'école maternelle pour le jeune enfant, c'est se mettre progressivement en situation de devenir élève . Ce processus lent, difficile et complexe est ainsi imposé à de très jeunes enfants qui ne disposent pas encore de la maturité nécessaire pour mettre en oeuvre le passage de la socialisation à la scolarisation.

Les auditions réalisées par le groupe de travail ont permis de faire converger les différents points de vue de spécialistes des questions éducatives autour d'un postulat que l'on peut résumer ainsi : tous les deux ans ne sont pas scolarisables et toutes les écoles ne sont pas prêtes à les scolariser .

a) Un enfant de deux ans, ce n'est pas un enfant de trois ans !

Qu'est-ce qu'un enfant de deux ans ? L'enfant de cet âge a ses propres rythmes de vie, il apparaît autonome, mais il peut arriver que la « défusion » avec la mère ne soit pas totalement réalisée. Il a un besoin de relations personnalisées avec un adulte dans un cadre sécurisé. Certains spécialistes émettent des doutes sur la prise en compte de ces besoins dans un cadre scolaire. L'école s'introduit alors en rupture d'un équilibre familial et social .

Les structures d'accueil du jeune enfant doivent permettre une prise en compte des besoins affectifs et physiques ainsi que du rythme individuel de chaque enfant. Le rythme scolaire déjà peu adapté pour certains enfants l'est d'autant moins pour les deux ans.

(1) Le respect des besoins physiologiques de l'enfant

L'enfant doit passer du stade de « grand bébé » à celui de « petit écolier » alors que ses besoins physiologiques nécessitent une grande proximité et une forte intervention de l'adulte.

Ses besoins spécifiques concernent différents aspects :

- l'alimentation

Les temps de collation, ainsi que ceux du déjeuner et du goûter avec de jeunes enfants sont essentiels. Les repas à cet âge représentent des temps forts d'échange et de socialisation, et doivent faire l'objet d'une attention particulière afin de respecter l'équilibre alimentaire nécessaire à leur développement ;

- le rythme éveil-sommeil

Les rythmes sont extrêmement variables d'un enfant à l'autre. Le jeune enfant a besoin de dormir à deux moments de la journée : le matin et l'après-midi. Or l'école maternelle peut difficilement répondre à cette exigence. Souvent ce sont les enfants qui sont contraints de s'adapter aux rythmes de l'école maternelle. Le professeur Hubert Montagner souligne le caractère individuel des rythmes des petits enfants. Se pose enfin le problème du temps de présence dans l'enceinte de l'école, qui peut dans quelques cas aller jusqu'à dix heures si on additionne le temps scolaire et périscolaire ;

- la propreté

A cet âge, l'enfant n'a pas le contrôle véritable des sphincters. Il est encore dans une situation fragile sur ce plan. C'est un élément essentiel à prendre en compte. Devenir « propre » ne résulte pas d'un enseignement de l'adulte et encore moins d'un « conditionnement », mais d'une maturation physiologique qui se situe vers deux ans et demi, trois ans. Cette acquisition de la propreté, qu'il est important de ne pas « forcer », ne doit pas se transformer en contrainte psychologique de la part des parents.

(2) Le cadre du développement psychique et moteur

Les aspects du développement psychique et moteur du jeune enfant sont très liés aux conditions de scolarisation, mais aussi à sa maturité, au lien qu'il entretient avec le monde des adultes. Le développement des moins de trois ans ne correspond pas au temps des apprentissages de type scolaire mais à celui des acquisitions sensorielles.

- les besoins affectifs

Le jeune enfant a besoin pour évoluer dans un cadre extra-familial et accepter les contraintes qui y sont afférentes d'un environnement rassurant. Il doit se sentir en confiance et bénéficier d'une relation privilégiée avec un adulte disponible pour prendre en compte ses besoins. L'enfant de moins de trois ans se socialise progressivement en intégrant des règles et en coopérant avec autrui. Il a besoin d'explication pour éviter une incompréhension et provoquer un sentiment d'insécurité. L'intense besoin de sécurité des petits enfants ne peut se faire avec ses pairs. La qualité de ce lien est conditionnée surtout par la sécurité de l'attachement aux parents. La plupart des enfants sécurisés avec leurs parents le sont aussi avec le professionnel référent du lieu d'accueil.

- les besoins d'isolement

L'enfant a besoin d'un espace individuel pour se mettre à l'écart. La capacité d'être seul est dans l'ordre de l'autonomisation de l'enfant. Par ailleurs, entre deux et trois ans, les enfants sont généralement en situation de juxtaposition durant leur phase de jeux. Les séquences de collaboration entre eux sont peu fréquentes et courtes. Des locaux adaptés doivent permettre de satisfaire le besoin d'isolement mais aussi d'échanges et de motricité spatiale ;

- les besoins moteurs et cognitifs

L'enfant est en pleine possession de son corps, qu'il a appris à connaître et à maîtriser. A cet âge, l'enfant a besoin de se déplacer, de se mouvoir, d'expérimenter sur le plan de la motricité. Il est également très curieux mais sa capacité de concentration est très fragile.

Trop souvent, l'entrée à l'école maternelle est déterminée par des aptitudes essentiellement physiques, centrées sur l'acquisition de la propreté, alors que d'autres éléments devraient être mieux pris en compte, comme l'a indiqué Mme Agnès Florin, professeur de psychologie du développement et de l'éducation, lors de son audition par le groupe de travail. Du point de vue de l'enfant, une scolarisation réussie des plus petits enfants répond à plusieurs exigences :

- pas d'imposition sans préparation ;

- respect des besoins physiologiques ;

- relative autonomie dans les gestes quotidiens ;

- aptitude à se faire comprendre de l'adulte dans un cadre verbal ou non ;

- attachement sécurisé aux parents ;

- respect du bien-être de l'enfant.

b) L'école offre un milieu peu adapté aux enfants de deux ans

Au regard de la spécificité de l'enfant de deux ans, il convient de s'interroger sur la réponse apportée par l'école maternelle en termes d'accueil et d'adaptation.

Or l'ensemble des personnes auditionnées par le groupe de travail ont formulé de nombreuses critiques à l'égard des conditions de scolarisation actuelles. Sensibles à ces critiques, votre groupe de travail s'interroge sur la pertinence de poursuivre une politique de scolarisation précoce compte tenu des spécificités inhérentes à l'institution scolaire .

(1) Une classe de très petite section structurellement peu différenciée

Les classes de très petite section ou de petite section qui accueillent les enfants de moins de trois ans fonctionnent le plus souvent sur le modèle classique de la classe avec les contraintes qui lui sont inhérentes - locaux, effectifs, programmes.

Les écoles maternelles ne disposent pas toujours de locaux adaptés aux aptitudes physiques des jeunes enfants . Il est en effet nécessaire de doter ces classes de locaux en rez-de-chaussée avec des sanitaires et des salles périscolaires destinés aux tout-petits. Les lieux de repos sont rarement organisés pour faciliter la prise en compte des rythmes individuels. Le temps de la sieste se situe dans un cadre horaire relativement fixe. Les enfants sont regroupés dans une salle qui sert parfois de dortoir et de salle de motricité.

Ces classes rassemblent un effectif de 25 à 30 élèves, sous la responsabilité d'un adulte, le professeur des écoles. Généralement, l'enseignant est assisté pour les tâches liées aux soins et à l'hygiène des enfants d'un agent territorial spécialisé des écoles maternelles (ATSEM), soit à temps partiel, soit à temps complet. Dans la pratique, compte tenu des absences et du caractère facultatif de l'école maternelle, l'effectif présent de ces classes est souvent inférieur au nombre d'enfants inscrits. Toutefois, il faut considérer que ce niveau d'encadrement, qui ne fait pas l'objet d'une réglementation particulière, est pratiqué dans l'ensemble de l'école primaire , alors que les sollicitations des jeunes enfants demandent une attention individualisée.

L'école maternelle a une fonction de première socialisation qui se fonde sur des savoirs. Sa vocation est d'ordre pédagogique et éducatif. Elle se positionne sur des ambitions fortes qui relèvent d'objectifs précis, en premier lieu la maîtrise du langage et d'une culture scolaire. La classe de très petite section est également organisée selon les objectifs communs à l'ensemble de l'école primaire.

Les activités de la classe de très petite section s'organisent comme les autres niveaux de l'école maternelle autour de cinq domaines :

- vivre ensemble ;

- apprendre à parler et construire son langage ;

- agir dans le monde ;

- découvrir le monde ;

- imaginer, sentir, créer.

Le cadre relativement rigide et contraignant de la journée scolaire alternant activités individuelles ou collectives, temps d'apprentissage et phase d'attente, n'est pas sans poser des difficultés d'adaptation à nombre de jeunes enfants qui ne disposent pas encore de la maturité nécessaire pour faire face à toutes ses exigences. Une certaine souplesse devrait nécessairement prévaloir à l'organisation de la journée scolaire des plus jeunes.

L'école maternelle impose souvent à l'enfant la participation à des activités définies par l'enseignant et une succession de tâches à accomplir. Or le jeune enfant a besoin de s'isoler du groupe de ses pairs ou des adultes et de s'adonner librement à des jeux. Les jeux libres sont généralement peu présents en maternelle. Les enseignants sont, logiquement, orientés vers l'apprentissage et l'acquisition de connaissances, même si le temps susceptible d'y être consacré par un enfant de deux ans est extrêmement court et que le taux d'apprentissage scolaire est relativement réduit.

Par ailleurs, l'organisation de l'après-midi est parfois réduite à la sieste et à un temps de récréation, en attendant « l'heure des mamans ». « La sieste doit commencer dès la fin du repas, afin de respecter les besoins physiologiques des tout-petits, ce qui permet de proposer ensuite d'autres activités avant la récréation et le temps de regroupement pour revenir sur des événements de la journée et aider les enfants à trouver du sens à leur vie à l'école » . 16 ( * )

(2) Les apprentissages langagiers et le destin linguistique

La période deux-trois ans est l'âge fondamental de l'acquisition du langage . Les travaux de différents linguistes montrent que la parole de l'adulte est fondamentale pour l'acquisition du langage chez le jeune enfant.

Les programmes d'enseignement de l'école primaire, élaborés en 2002, précisent ainsi qu' « en accueillant des enfants de plus en plus jeunes, l'école maternelle a fait du langage oral l'axe majeur de ses activités » . Au sein de l'école maternelle, le langage est au centre des pratiques et des sollicitations. Sa maîtrise est essentielle pour la poursuite d'une scolarité réussie.

Or, la présence d'un nombre réduit d'adultes pour un grand nombre d'enfants ne favorise pas l'acquisition du langage, au risque d'entraver la constitution du stock linguistique, surtout si la langue maternelle est différente de celle de l'école. M. Alain Bentolila, linguiste, affirme ainsi que « scolariser trop tôt, c'est renforcer le ghetto » . Condamnés alors à communiquer avec leurs pairs, ces jeunes enfants sont ainsi privés de la parole bienveillante d'un adulte, disponible et exigeant.

La question de la maîtrise du vocabulaire est essentielle pour apprendre à parler, à écrire et pour prévenir l'échec au collège. La rupture scolaire se situe le plus souvent sur le plan du langage. Le cadre actuel de l'école maternelle qui ne favorise pas une interaction forte avec un adulte référent ne fournit pas, pour les plus jeunes enfants, les marges de manoeuvre nécessaires à la prise en compte et à la progression des enfants en difficulté.

(3) Le temps périscolaire : une nécessaire vigilance

Le respect des rythmes de l'enfant n'est pas circonscrit à la seule entité de l'école maternelle. Lors de l'inscription en école maternelle, il est proposé aux parents un accueil périscolaire, qui précède ou prolonge les horaires habituels de class e.

Certes, les éléments d'enquête dont nous disposons relèvent qu'une scolarisation à plein temps ne constitue pas le mode majoritairement choisi par les familles. Le plus souvent, les enfants scolarisés à deux ans sont pris en charge après l'école par leurs parents qui s'organisent pour être présents dès la fin de la classe.

Cependant, pour certains enfants, le fait d'être scolarisé nécessite des modalités d'accueil plus étendues, de type garderie périscolaire, prolongeant d'autant le temps passé hors de la sphère familiale. Le recours à la garderie périscolaire est davantage un phénomène urbain et même parisien .

D'après l'enquête Modes d'accueil et de garde des jeunes enfants réalisée par la DRESS en juin 2002, 66 % des enfants de deux à six scolarisés à temps plein sont gardés uniquement par leurs parents à la sortie de l'école, 15 % fréquentent la garderie périscolaire, 2 % combinent la garderie périscolaire avec un autre mode de garde et 17 % sont confiés à une tierce personne. Les enfants de deux ans sont davantage que la moyenne accueillis par leurs parents et donc fréquentent moins la garderie périscolaire.

Lorsque les deux parents sont actifs, ils sont encore 52 % à aller chercher leur enfant scolarisé en école maternelle et 22 % ont recours à la garderie périscolaire.

c) La dualité de l'encadrement
(1) Les professeurs de écoles : une formation unique souvent critiquée

L'école maternelle est confiée à des enseignants, les professeurs des écoles, qui ont le même statut, le même niveau de qualification et de rémunération, la même formation, les mêmes perspectives de carrière que leurs homologues de l'école élémentaire.

Les professeurs des écoles travaillent ainsi avec des enfants âgés de deux à onze ans , c'est-à-dire de la première année de l'école maternelle à la dernière année de l'école élémentaire. Ils abordent différents domaines puisque l'enseignement qu'ils dispensent est polyvalent : français, mathématiques, histoire et géographie, sciences expérimentales, langue vivante, musique, arts plastiques, activités manuelles et éducation sportive.

Le recrutement des enseignants , qui s'effectue aujourd'hui au niveau de la licence pour le concours externe, est principalement axé sur les compétences disciplinaires . La France fait là aussi figure d'exception au regard du haut niveau de qualification des enseignants de maternelle .

Les auditions du groupe de travail ont révélé, à de très nombreuses reprises, un questionnement sur la formation à l'école maternelle en IUFM. Cette formation est le plus souvent jugée comme insuffisante ou même inexistante, alors qu'une formation professionnelle spécifique pour les classes maternelles est une composante essentielle du débat autour de la scolarisation des moins de trois ans.

Cette difficulté avait notamment été évoquée lors du débat national sur l'avenir de l'école. Le rapport de la commission présidée par M. Claude Thélot faisait ainsi état d'une formation insuffisante à l'exercice du métier en classe de maternelle : « La prise en charge d'une classe de cycle I requiert des compétences particulières dont l'acquisition ne peut se faire sans une formation » . La dimension « formation à la petite enfance » est peu présente dans la formation initiale et continue des enseignants. Leur cursus ne développe pas l'acquisition de connaissances sur le développement physique, psychologique et psychique du jeune enfant, pourtant indispensables à une meilleure perception de leurs missions en école maternelle . Les stages organisés soit d'observation, soit de pratiques accompagnées, soit en totale responsabilité, sont à cet égard assurément insuffisants.

Le rapport 2007 du Haut Conseil de l'éducation pose d'ailleurs un jugement sévère à l'égard de la prise en compte des particularités de l'enseignement en maternelle dans le cadre de la formation des enseignants du premier degré : « la formation des professeurs des écoles les prépare le plus souvent non à l'école maternelle, mais à la seule école élémentaire, et plutôt au cycle 3 (CE2, CM1, CM2) qu'aux premières années de cette école élémentaire » .

Certains enseignants disposant d'une double formation, éducateur de jeunes enfants devenus professeurs des écoles, ont ainsi indiqué au groupe de travail que cette particularité était précieuse dans l'exercice de leur métier.

Lors de leur audition par le groupe de travail, les représentants de la Conférence des directeurs d'IUFM ont en outre indiqué que les professeurs des écoles stagiaires les plus en difficulté sont actuellement ceux nommés en école maternelle . Force est de constater que le contenu de l'enseignement dans les classes maternelles ne correspond pas aux épreuves du concours de recrutement de professeurs des écoles qui est essentiellement disciplinaire.

Selon une enquête réalisée au sein de l'IUFM de Créteil, à leur entrée, les souhaits d'affectation des futurs enseignants se répartissent ainsi : 40 % en cycle II, 50 % en cycle III et 10 % en école maternelle. La question du recrutement des professeurs des écoles pour les écoles maternelles constitue un élément essentiel de la réflexion du groupe de travail.

(2) La présence de l'ATSEM

Les enseignants en école maternelle sont assistés généralement par un personnel communal. En effet, l'article R.412-127 du code des communes indique que toute classe maternelle doit bénéficier des services d'un agent communal occupant l'emploi d'agent spécialisé des écoles maternelles (ATSEM). Les communes ont donc l'obligation de mettre au moins un ATSEM à disposition de l'école maternelle.

Toutefois, les services de cet agent peuvent éventuellement être répartis sur plusieurs classes, en fonction des moyens mis en oeuvre par les municipalités . Les pratiques des communes sont à cet égard assez diversifiées. Selon une source INSEE, en 2004, l'effectif des ATSEM s'élevait à 60 000 environ, soit un agent pour 42 élèves en école maternelle.

Le maire détient le pouvoir de nomination et de révocation des ATSEM, toutefois ces décisions sont soumises à l'avis préalable du directeur d'école. Pendant son service dans les locaux scolaires, l'ATSEM est placé sous son autorité. Pour leur gestion administrative, les ATSEM relèvent des services communaux. Leur traitement est exclusivement à la charge de la commune.

L'agent territorial spécialisé d'école maternelle est un intervenant qualifié de catégorie C d'une collectivité territoriale, recruté sur concours unique et titulaire du CAP petite enfance. Il faut souligner que le recrutement des ATSEM pouvait s'effectuer jusqu'au 17 décembre 2000 par concours interne ou externe. Les candidats n'étaient pas tenus de justifier du CAP petite enfance.

Il convient de noter qu'une étude réalisée par l'Association nationale des directeurs et directeurs adjoints de centres de gestion (ANDCDG) en juillet 2003 a montré que seulement 17 % des ATSEM sur l'ensemble des départements interrogés (Petite couronne, Grande couronne, Seine-et-Marne, Rhône et Loire) sont en possession du CAP « petite enfance ». Ce pourcentage varie de 8 % en petite couronne à 49 % dans le Rhône. L'étude indique également que 99 % des agents territoriaux spécialisés d'école maternelle sont des femmes et appartiennent à un cadre d'emplois vieillissant.

Ces agents ont une double fonction d'assistance technique à l'enseignant et d'assistance éducative . La classe reste sous l'entière responsabilité de l'enseignant.

Décret n° 92-850 du 28 août 1992 relatif au statut particulier
du cadre d'emplois des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles

Art. 2 - Les agents spécialisés des écoles maternelles sont chargées de l'assistance au personnel enseignant pour la réception, l'animation et l'hygiène des très jeunes enfants ainsi que la préparation et la mise en état de propreté des locaux et du matériel servant directement à ces enfants. Les agents spécialisés des écoles maternelles participent à la communauté éducative.

2. École maternelle ou crèche : plus de similitudes que de différences

La réflexion du groupe de travail l'a conduit à aborder les modalités d'intervention des deux structures collectives que sont la crèche et l'école maternelle . Les travaux réalisés par Mme Agnès Florin 17 ( * ) au sein du laboratoire de psychologie de l'Université de Nantes qu'elle dirige tendent à montrer qu'elles sont d'autant plus similaires que les éléments de divergence sont connexes.

Les similitudes constatées entre crèche et école maternelle qui procèdent d'une forme d'adaptation de la structure à une tranche d'âge spécifique -deux/trois ans- permettent de s'interroger sur les propositions formulées à plusieurs reprises de créer un lieu d'accueil adapté, de type jardin d'éveil ou crèche-école enfantine.

Toutefois, il n'existe pas de modèle unique ; au sein d'un même mode d'accueil, on peut trouver une grande hétérogénéité de fonctionnement. En réalité, ce qui importe, c'est la qualité des modes d'accueil qui garantit, voire favorise le développement cognitif et social de l'enfant. Il apparait ainsi que les critiques faites à l'école maternelle pourraient s'appliquer à d'autres structures collectives.

Les travaux déjà cités ont montré une similitude dans la gestion du temps , liée probablement à des objectifs généraux d'éducation similaire et aussi à la dimension collective de l'accueil, alors que le ratio adulte/enfants est différent (un adulte pour huit enfants à la crèche contre un adulte pour vingt-cinq enfants en moyenne à l'école maternelle). Ainsi, 70 % des activités sont similaires entre école et crèche, pour 30 % de différentes .

Les activités dites pédagogiques sont plus présentes à l'école qu'à la crèche. L'école favorise la préparation à l'écriture. Mais la maîtrise de la langue est prioritaire dans ces deux institutions. Le temps consacré à l'attente est plus fréquent à l'école maternelle : 41 % du temps total en maternelle et 27 % en crèche.

Les activités consacrées aux soins de l'enfant et à la sieste sont plus souvent proposées à la crèche.

L'école maternelle semble effectivement plus tournée vers les activités dites préscolaires ou encore pédagogiques. Cependant, la crèche propose l'ensemble de ces activités même si elles sont moins présentes en termes de durée. Paradoxalement, les enfants réalisent autant d'activités dites pédagogiques à l'école qu'à la crèche, alors qu'on en propose plus à l'école. Les jeux libres sont encouragés à la crèche.

S'agissant de la tutelle de l'adulte sur l'activité de l'enfant, il se révèle que l'éducateur de jeunes enfants fait preuve d'une grande régularité de participation quels que soient l'enfant, la tâche ou les difficultés, tandis que l'enseignant s'ajuste à la tâche, à l'enfant et aux difficultés.

B. UNE FAUSSE BONNE IDÉE POUR LA RÉUSSITE SCOLAIRE

La question de la scolarisation précoce a souvent été posée sous l'angle de la prévention des inégalités sociales et de la réussite scolaire ultérieure, tout particulièrement envers les enfants de milieu social défavorisé . Auparavant, se dessinait la conviction que plus l'entrée dans l'institution scolaire s'effectuait tôt, plus on augmentait les chances de réussite scolaire. Face à l'échec scolaire, la réponse choisie par notre pays a été celle de plus d'école tout au moins dans sa durée de fréquentation, sous couvert de l'idée sous-jacente que les premières années de scolarité sont déterminantes.

Cette orientation de la politique scolaire fait aujourd'hui l'objet d'un constat plus nuancé . En effet, les études et enquêtes menées sous l'égide du ministère de l'éducation nationale montrent assez nettement que la scolarisation à deux ans ne suffit pas à compenser les différences liées à l'appartenance sociale, ni les écarts de réussite liés au trimestre de naissance. Une scolarité maternelle en quatre ans ne constitue que très marginalement un facteur de réduction des inégalités sociales ou de l'échec scolaire.

1. Un bénéfice scolaire très relatif et peu durable pour les enfants scolarisés à deux ans

Les travaux de recherche les plus récents sur les retombées scolaires de la scolarisation à deux ans en école maternelle se fondent sur le panel d'élèves entrés en classes préparatoires en 1997.

La mesure des effets d'une scolarisation précoce sur la scolarité ultérieure de ces enfants porte d'une part, sur le niveau de compétences acquis à un moment donné, et d'autre part, sur la probabilité d'accès à la classe supérieure sans redoublement.

a) Des acquis qui s'estompent au cours de la scolarité élémentaire

Alors que les études réalisées au début des années 1990 tendaient à valoriser en termes d'acquisitions le bénéfice d'une scolarisation à deux ans par rapport à une entrée à trois ans à l'école maternelle au cours de la scolarité élémentaire, tout en considérant le rôle déterminant joué par le milieu social d'origine, l'étude du panel de 1997 nuance fortement ces conclusions.

Le suivi de cette cohorte 18 ( * ) a ainsi montré que même si les enfants entrés à deux ans à l'école maternelle parviennent en CP avec un niveau de compétences supérieur en moyenne à celui des autres élèves, celui-ci ne perdure pas, tout particulièrement à l'entrée en sixième : moins de 4 points en mathématiques et moins de 2 points en français les séparent. Les résultats aux épreuves nationales d'évaluation de sixième ne font pas apparaître aucune différence significative, si on tient compte des paramètres démographiques et sociaux.

NIVEAU DE COMPÉTENCES EN FRANÇAIS ET EN MATHÉMATIQUES SELON LE PASSÉ SCOLAIRE DE L'ÉLÈVE (EN %)

Age d'entrée
à l'école maternelle

Proportion d'élèves

ayant atteint la médiane en français à l'évaluation de 6 e

ayant atteint la médiane en maths à l'évaluation de 6 e

2 ans

51,1

53,8

3 ans

49,5

49,9

4 ans et plus

40,8

39,7

Source : ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche DEPP, panel d'élèves du premier degré recruté en 1997.

Le bénéfice lié à une scolarisation précoce n'apparaît donc guère durable. C'est au cours du cycle III qu'il s'estompe . L'écart de réussite entre les élèves scolarisés à deux ans et ceux entrés à l'école maternelle à trois ans atteint 5 points à l'entrée au CE2, mais plus que 3 points en début de scolarité secondaire. Force est de reconnaitre que le gain entre trois et quatre années passées à l'école maternelle peut être qualifié de minime .

Par ailleurs, l'ensemble des études relève que les quelques effets positifs d'une entrée à l'école maternelle dès deux ans semblent relativement limités par rapport aux autres variables déjà mentionnées que sont le milieu social ou le trimestre de naissance.

b) Un risque de redoublement atténué

Les acquis d'une scolarisation précoce en termes de réussite scolaire semblent se concentrer principalement sur la réduction de la probabilité de redoubler une classe, et notamment le cours préparatoire. Cet élément n'est pas négligeable. En effet, les études sur le suivi de la trajectoire scolaire des élèves ont mis en évidence un lien fort entre la précocité du redoublement et l'échec scolaire .

L'observation du panel d'élèves entrés au CP en 1997 montre que la durée de fréquentation de l'école maternelle influe sur les chances d'accès au CE2 sans redoublement . Ainsi, 91 % des élèves scolarisés à deux ans sont parvenus au CE2 sans redoubler contre 88 % des enfants entrés à trois ans à l'école maternelle. Toutefois, l'écart est faible entre ceux entrés à deux ans et ceux entrés à trois ans , de l'ordre de 3 points, alors qu'il est supérieur à 10 points pour ceux entrés à l'école maternelle à quatre ans et plus. On peut essentiellement parler d'effet protecteur d'une scolarité maternelle en trois années en termes de risque de redoublement que se soit au niveau du CP ou à celui du CE1, une entrée tardive à l'école maternelle étant nettement pénalisante.

IMPACT BRUT DE L'ÂGE D'ENTRÉE À L'ÉCOLE MATERNELLE SUR LA RÉUSSITE DE LA SCOLAIRE À L'ÉCOLE ÉLÉMENTAIRE (EN %)

Age d'entrée en maternelle

Accès sans redoublement au CE2

Redoublement du CP

Redoublement du CE1

Parvenus à l'heure ou en avance en 6 e

2ans

3ans

4ans et +

90.8

87.7

76.6

4.3

5.4

11.1

4.9

6.9

10.9

86,2

82,4

70,8

Ensemble

88.0

5.4

6.5

82,4

Source : MEN - Panel d'élèves du premier degré recruté en 1997

Contrairement au niveau de compétences, cet avantage semble se maintenir au cours de la scolarité élémentaire, puisque 86 % d'entre eux parviennent à l'heure ou en avance en sixième, contre 82 % des enfants scolarisés à trois ans, soit un écart d'un peu moins de 4 points. Cependant, à caractéristiques démographiques et familiales comparables, l'écart n'apparaît pas significatif. « A l'évidence, de toutes les caractéristiques de l'élève prises en compte, c'est ce niveau à l'entrée au CP qui pèse le plus fortement sur les chances de parvenir sans redoublement en sixième. » 19 ( * )

En conclusion, on peut noter que les élèves entrés à l'école à deux ans redoublent moins que ceux entrés un peu plus tard, tout en sachant que l'entrée précoce en maternelle procède d'un certain nombre de discriminants sociaux ou démographiques.

2. Une scolarisation précoce nettement favorable aux enfants de cadres

Compte tenu de ces données, il convient de s'interroger sur la typologie des élèves qui profitent de cette scolarisation précoce dont l'impact sur la carrière scolaire semble devoir être relativisé et dont les effets apparaissent limités par rapport à d'autres facteurs, notamment le milieu d'origine.

Les enfants qui bénéficieraient de manière significative de l'entrée en maternelle à deux ans se situent aux deux extrémités de l'échelle sociale , à savoir ceux des catégories les plus favorisées et ceux de nationalité étrangère ou de parents immigrés.

L'étude de 2001 réalisée par la DEP 20 ( * ) met ainsi en évidence cette ambivalence d'une scolarisation à deux ans, qui avait déjà été constatée lors des premières observations sur le panel d'élèves entrés en CP en 1997 21 ( * ) . En effet, l'examen des résultats sur les différences de réussite observables entre les enfants entrés à l'école maternelle à deux ans et ceux scolarisés à trois ans fait apparaître plusieurs singularités. Le bénéfice d'une scolarisation précoce ne se retrouve pas pour tous les milieux sociaux, notamment les professions intermédiaires. Elle est plus sensible pour les enfants d'ouvriers et d'employés, mais elle est nettement significative pour ceux de cadres , compte tenu de certains paramètres de pondération.

Par ailleurs, les enfants de nationalité étrangère ou d'appartenance à une famille issue de l'immigration tirent bénéfice d'une scolarité en quatre années. Elle permet à ces enfants une adaptation plus précoce à la langue et à la culture du pays d'accueil.

Toutefois, les enfants issus des milieux sociaux les plus défavorisés ne conservent pas à l'entrée dans le secondaire le bénéfice lié à une entrée à deux ans à l'école maternelle . Aux évaluations de compétences à l'entrée au cours préparatoire, 44 % des enfants d'ouvriers ou d'inactifs scolarisés à deux ans atteignaient la médiane contre seulement 34 % des écoliers originaires du même groupe social entrés à l'école à 3 ans. À l'entrée en sixième, cet écart de 10 points n'est plus que de 3 points en français et d'1 point en mathématiques.

Le seul avantage qu'ils conservent a trait à leur parcours scolaire puisque 78 % des enfants d'ouvriers et d'inactifs scolarisés à deux ans parviennent à l'heure ou en avance en sixième, contre 73 % des écoliers entrés à l'école maternelle à trois ans.

La même enquête relativise le bénéfice d'une scolarisation à deux en zone d'éducation prioritaire , puisqu'elle note l'absence d'effet significatif pour ces écoliers de ZEP quelque soit l'âge d'entrée en maternelle.

La scolarisation précoce joue donc de manière très relative le rôle de compensation des inégalités sociales qui a prévalu à sa transcription législative. Les variables de politique éducative ne semblent avoir que peu d'influence sur les parcours scolaires des élèves à long terme.

3. Sans impact sur les indices nationaux et internationaux de réussite scolaire

Bien qu'en France, les élèves bénéficient d'une scolarisation préélémentaire longue et précoce, leurs résultats en termes d'apprentissage scolaire par rapport à nos voisins européens ne s'en trouvent pas améliorés, alors que l'entrée de ces derniers dans le système scolaire est plus tardive. Au contraire, les enquêtes constatent un recul du système éducatif français dans les classements internationaux . L'étude internationale PIRLS menée en mai 2006 qui a évalué les performances en lecture des élèves à la fin de leur quatrième année de scolarité obligatoire ne place la France, parmi les pays de l'Union européenne, qu'en fin de classement, devant la Slovénie, la Pologne, l'Espagne, la Belgique francophone et la Roumanie.

Par ailleurs, force est de noter que les académies qui réussissent le mieux en termes scolaires comme celle de Rennes et de Grenoble connaissent des taux de scolarisation à deux ans fortement divergents . L'académie de Lille qui scolarise autour de 55 % des enfants de deux ans continue d'enregistrer un taux de réussite au baccalauréat inférieur à la moyenne.

TAUX DE SCOLARISATION ET TAUX DE RÉUSSITE AU BACCALAURÉAT POUR TROIS ACADÉMIES REPRÉSENTATIVES (EN %)

Lille

Grenoble

Rennes

Taux de scolarisation des deux ans en 1990

55,5

29,7

66,7

Taux de scolarisation des deux ans en 2007

53,1

13,0

50,4

Taux de réussite au baccalauréat en 2007

80,5

88,9

88,5

D'après données du MEN

C. LES ACTIONS PASSERELLES : UNE MÉDIATION POUR ENTRER À L'ÉCOLE MATERNELLE

Les actions passerelles résultent d'un ensemble d'actions en faveur de la petite enfance, et notamment de la tranche d'âge des deux-trois ans , et prennent appui également autour de la problématique de la scolarisation précoce. L'accueil d'enfants de deux ans au sein de ces structures passerelles se situe entre deux secteurs de compétences clairement circonscrites, petite enfance et éducation nationale.

Il s'agit de réalisations innovantes au sens du décret n° 2000-762 du 1 er août 2000 relatif aux établissements et services d'accueil des enfants de moins de six ans.

« Passerelle » désigne une formule partenariale, interinstitutionnelle et faisant différents professionnels de la petite enfance qui facilite le passage d'un jeune enfant de sa famille à l'école maternelle , en accompagnant ses parents dans cette démarche de première socialisation extrafamiliale ou communautaire. Elle vise prioritairement les enfants qui n'ont pas fréquenté de structure d'accueil collective.

1. Un protocole d'accord signé en 1990

La légitimité des dispositifs passerelles repose sur un protocole d'accord signé entre le ministère de l'éducation nationale et le secrétariat d'Etat auprès du ministère de la solidarité, de la santé et de la protection sociale, chargé de la famille , le 20 septembre 1990, qui tend à assurer la continuité éducative des enfants de zéro à six ans et à sortir du cloisonnement institutionnel qui crée des situations inégales selon les départements. Ce protocole, toujours en vigueur, a été peu appliqué.

Il pose les bases d'une coordination locale des instances et personnels concernés sous la forme de groupes « petite enfance » à l'échelle d'une commune ou d'un quartier, et instaure des structures de concertation départementale.

a) Des objectifs socialement ciblés

Les objectifs poursuivis tendent à favoriser la prévention des inégalités scolaires et une socialisation progressive des enfants. La plupart des dispositifs ont été créés dans le cadre d'une politique d'action en faveur des milieux défavorisés.

Les lieux et classes passerelles sont conçus pour accompagner l'enfant dans sa séparation avec son milieu familial et pour préparer son entrée dans l'institution sociale qu'est l'école.

Un autre objectif de ces lieux passerelles est d'améliorer la communication entre parents et école, et de les accompagner dans l'exercice de la fonction parentale. L'accompagnement des parents et des enfants est d'autant plus nécessaire que les enfants n'ont pas fréquenté de lieux d'accueil collectifs et que leurs parents ne possèdent pas toujours les clefs d'utilisation de l'école.

b) Des actions et un financement qui reposent sur un partenariat

Le protocole signé en 1990 incite à la coordination institutionnelle, à des formations communes et aux articulations entre toutes les structures, actions et professionnels intervenant à quelque titre que ce soit auprès des jeunes enfants. Ces actions visent plus spécifiquement à l'amélioration des transitions entre le milieu familial ou les modes d'accueil individuel et collectif et l'école maternelle et mettent en place des conditions d'accueil destinées aux plus jeunes enfants au sein de l'école maternelle elle-même.

Les initiateurs peuvent être multiples : mairies, équipes enseignantes, médecins de PMI. La mise en oeuvre de ces actions repose sur un diagnostic partagé : Où sont les enfants de moins de trois ans ? Dans quel contexte institutionnel ? Pour quel type de population ? Sur quelles ressources comptées ? Quelles sont les résistances à contourner ou à vaincre ? Pragmatisme et créativité président à ces mesures.

Les lieux et classes passerelles reposent sur un partenariat pluri institutionnel dans l'élaboration, le fonctionnement et le financement, entre l'éducation nationale, la Caisse nationale d'allocations familiales et la commune. Les communes assurent les frais de fonctionnement, la rémunération des personnels n'appartenant pas à l'éducation nationale, mettent des locaux à disposition. Ces actions bénéficient d'une participation des caisses d'allocations familiales par le biais des contrats enfance. Les conseils généraux, les centres communaux d'action sociale, les services de la protection maternelle et infantile, les directions départementales des affaires sanitaires et sociales sont également fréquemment parties prenantes des dispositifs. L'éducation nationale intervient aussi à travers des traitements versés aux enseignants, mais aussi par le versement de crédits émanant de dispositifs ZEP et REP. Les associations contribuent en outre au financement de ces actions.

2. Une mise en oeuvre restée confidentielle

Les formules passerelles sont restées cependant peu nombreuses et reposent sur la bonne volonté des différents partenaires et des professionnels concernés. Elles ont été mises en oeuvre de manière assez dispersée au gré d'initiatives locales.

En 2000, leur nombre était estimé à environ 60 classes réparties dans 25 départements. Selon les informations fournies par le ministère de l'éducation nationale à vos rapporteurs, leur chiffrage actuel est en diminution.

a) Une variété de formules

La mise en oeuvre de ces actions passerelles peut prendre différentes formes :

- les actions convergentes : ce sont des actions légères de collaboration entre enseignants et professionnels de la petite enfance pour préparer la première entrée à l'école maternelle. Ainsi, à Vaulx-en-Velin, les puéricultrices sont mobilisées pour préparer l'enfant à son entrée à l'école ; tous les parents d'enfants de deux ans susceptibles d'être scolarisés en septembre reçoivent une lettre d'invitation à participer à des activités ;

- les lieux passerelles sont de petites structures à côté de l'école, souvent installées dans des appartements de fonction recyclés, qui accueillent à mi-temps ou à plein temps 12 à 15 enfants de dix-huit mois à quatre ans. L'enfant est accueilli avec ses parents par une équipe mixte. La gestion est municipale ou associative ;

- la classe passerelle , à l'intérieur de l'école, est une classe à effectif réduit prise en charge conjointement par un éducateur de jeunes enfants souvent à mi-temps, l'enseignant de la classe et l'ATSEM. Cette forme de structure passerelle a été développée notamment dans la ville de Roubaix. Les classes passerelles sont généralement situées dans des zones d'éducation prioritaires (ZEP) ou des réseaux d'éducation prioritaire (REP).

b) Des compétences professionnelles associées

Les enseignants d'école maternelle forment le personnel référent de ces classes passerelles. Interviennent également des éducateurs de jeunes enfants, des agents territoriaux spécialisés d'école maternelle (ATSEM), des auxiliaires de puériculture.

Les rapports d'activité des classes passerelles montrent à la fois la variété des activités proposées aux enfants mais aussi partagées avec les parents, sous la forme d'échanges réciproques de savoirs et la construction de connaissances communes.

Ce dispositif recouvre des formules souvent fragiles ou précaires qui tiennent au volontarisme d'un ou plusieurs partenaires . La difficulté repose sur le fait que ces pratiques sont rarement formalisées.

Le cas de la passerelle des deux ans dans la ZEP sud de Saint-Jean de la Ruelle

Cette initiative est née d'une réflexion commune entre enseignants et service petite enfance de la ville. Elle part des constats suivants sur le profil d'élève de ZEP dans les années 1980 : une maîtrise de la langue peu assurée, des difficultés d'apprentissage de la lecture en CP. Les objectifs sont centrés sur la problématique de la séparation entre la mère et l'enfant, la connaissance pour les parents des rôles pédagogiques et éducatifs de l'école maternelle et l'accompagnement dans la découverte de l'univers scolaire.

L'inscription des enfants dans cette structure se fait par repérage de ceux qui n'ont jamais quitté le milieu familial et qui sont susceptibles de rencontrer des problèmes de langage. Il s'agit de leur permettre de vivre une socialisation collective avant d'entrer à l'école maternelle.

La « passerelle » a été ouverte en septembre 1991. Cette structure a fait l'objet d'une convention signée par la ville et l'inspection académique dans le cadre d'un projet éducatif et pédagogique. Elle est située dans un logement de fonction aménagé, près d'une des écoles maternelles ; quinze enfants y sont reçus quatre matins par semaine. L'équipe d'accueil est composée d'une enseignante, d'une éducatrice de jeunes enfants et d'une auxiliaire de puériculture. Chaque enfant est progressivement intégré à la maternelle dès que son temps d'adaptation est terminé ; il est alors accompagné dans la classe d'accueil de son école.

Chaque intervenant dans la « passerelle » a un rôle bien défini. L'éducatrice de jeunes enfants est chargée de l'accueil de la famille avec son histoire, sans jugement porté. Elle a un rôle d'accompagnement et de lien entre les différentes institutions école-passerelle-famille. L'enseignante assure le lien pédagogique entre les parents et l'équipe scolaire, entre les activités menées dans la passerelle et le travail de liaison avec l'école. Le rôle de l'auxiliaire de puériculture est de veiller à la sécurité physique des enfants. Cette organisation a permis de travailler le rôle de l'ATSEM par rapport à l'enseignant, qui doit être un co-éducateur.

Les inscriptions des enfants ont lieu à l'incitation des enseignants, par le biais de la PMI ou des assistants sociaux à la discrétion d'une commission qui doit tenir compte de critères hiérarchisés, tels que la connaissance du milieu familial.

Il apparaît que les enfants qui ont fréquenté la « passerelle » progressent plus rapidement sur le plan langagier et dans les activités scolaires. Le recul est de dix ans pour tenter d'établir un bilan. Une évaluation en termes d'efficacité scolaire avait été réclamée auprès des services du ministère de l'éducation nationale.

Lorsque la première cohorte d'élèves ayant fréquenté l'école à deux ans a atteint la classe de CE2, il est apparu que les résultats aux évaluations étaient meilleurs que les années précédentes, sans que l'on puisse en tirer des conclusions. Il est à noter qu'il n'y a pas eu de suivi de cohorte sur cette question. Ce suivi est d'autant plus difficile que la population des ZEP est très mobile.

Intervention de Mme Sylvie Chevillard, conseillère pédagogique,
membre de l'équipe de recherche ESCOL (Paris-VIII) devant le groupe de travail

c) Une expérimentation pourtant controversée

Ces initiatives font l'objet d' appréciations diverses en fonction de l'implication des différents partenaires dans le dispositif. Les auditions du groupe de travail ont souligné cette divergence de points de vue. Ceux qui ont accompagné ou participé au développement de ces dispositifs ont fait part des motifs qui doivent inciter à pérenniser, voir à encourager leur développement : le bénéfice réel retiré par les enfants et le lien privilégié qui s'instaure avec les parents à l'égard de cette forme de socialisation.

Cette pratique est cependant marquée par une grande hétérogénéité concernant les sites d'implantation, les conceptions éducatives, les activités proposées ou le mode de participation des parents.

Ces classes passerelles sont souvent conçues comme des structures d'exception dans un environnement local déterminé, qui procède plus d'une forme d'expérimentation laissée à l'appréciation des professionnels concernés, et qui n'est par conséquent peu enclin à se généraliser.

Par ailleurs, le caractère pluri institutionnel semble être également un frein à leur développement, dans la mesure où il se trouve confronté au cloisonnement des structures et des financements concourant à la politique d'accueil de la petite enfance.

Une autre critique concerne le positionnement des parents à l'égard de ces formules, certains partenaires considérant que la place qui leur est faite dans le projet éducatif les encourage à une présence trop pressante.

Certes, ces dispositifs ont été peu évalués . Un rapport sur la généralisation des dispositifs passerelles, paru en 2000, met en garde sur la généralisation des dispositifs passerelles et pointe un certain flou dans l'initiative et le pilotage. « Ils doivent être encadrés, s'inscrire dans des modalités concrètes et faire l'objet d'une expérimentation, d'une part mieux suivie et ayant pu, d'autre part, s'ouvrir sur des espaces nouveaux ». 22 ( * )

IV. LES PRÉCONISATIONS DU GROUPE DE TRAVAIL

A l'issue de ses travaux, le groupe de travail a acquis la conviction que les conditions actuelles de la scolarisation des jeunes enfants, qui font l'objet de critiques de l'ensemble des acteurs, au sens large, du système éducatif, mais aussi l'intérêt de l'enfant qui a guidé sa réflexion, doivent conduire à s'écarter progressivement d'un tel dispositif . Force est de reconnaître que le fonctionnement de l'école maternelle semble peu adapté à cette tranche d'âge, tout au moins pour une immense majorité des enfants.

Néanmoins, il ne s'agit pas d'éloigner trop brutalement les jeunes enfants et leurs familles de l'école maternelle, car celle-ci propose encore aujourd'hui un accueil parfois nécessaire en l'absence de structure appropriée. Se désengager d'une politique de scolarisation précoce suppose que l'on soit en mesure d'apporter d'autres réponses à la question de l'accueil des jeunes enfants.

Le groupe de travail propose de constituer un pôle autour de l'accueil de la petite enfance reposant sur un ensemble de structures éducatives , qui s'articulerait en un triptyque fondé sur une approche chronologique du temps de l'enfance :

- destiner en priorité les établissements d'accueil de type crèche collective et familiale aux seuls bébés ;

- promouvoir de nouvelles structures d'accueil éducatif pour les jeunes enfants âgés de deux ans et plus ;

- assurer une scolarisation réussie des enfants à partir de trois ans révolus dans l'année civile.

Vos rapporteurs souhaitent que les pouvoirs publics soient en mesure d'apporter une réponse à l'interrogation formulée par le linguiste Alain Bentolila à propos de l'entrée à l'école maternelle des enfants de moins de trois ans : « comment assurer, à un moment crucial du développement d'un enfant, une qualité d'accueil et d'accompagnement qui lui donne les meilleures chances d'épanouissement ? » .

A. ENGAGER UNE LARGE CONCERTATION SUR LES MODES D'ACCUEIL DU JEUNE ENFANT

La politique d'accueil de la petite enfance relève de la compétence de la commission des affaires sociales. Ainsi, les suggestions de votre groupe de travail s'articulent autour des recommandations qui ont été formulées lors des auditions, et ne s'orientent pas délibérément sur la question d'un développement de l'offre d'accueil en direction de la petite enfance.

1. Proposer une approche mieux structurée : un temps de l'accueil et un temps de l'éducation

On peut distinguer deux grands modèles à l'égard de la politique de la petite enfance . Une première approche plaide pour une trajectoire complète, qui assure une continuité de prise en charge. Cette approche intégrée est observée dans les pays nordiques où les enfants de moins de six-sept ans sont accueillis dans des services qui relèvent d'un seul ministère, généralement en charge des affaires sociales. C'est la voie qui semble privilégiée par l'UNESCO et l'OCDE.

Cette approche intégrée s'oppose à l'approche divisée en deux temps , soit l'accueil (0-3 ans) puis l'éducation (3-6 ans). La France qui privilégie ce cadre promeut une politique généreuse pour les enfants jusqu'à six ans, tout particulièrement grâce à l'école maternelle qui accueille gratuitement tous les enfants dès l'âge de trois ans, malgré son caractère facultatif. Cependant, cette conception de la politique de la petite enfance repose dans notre pays sur une relative confusion concernant la catégorie des deux-trois ans puisqu'elle ne relève pas d'une modalité unique en termes de mode de garde, l'école maternelle étant partie prenante d'une forme d'accueil pour les tout-petits.

Votre groupe de travail suggère de considérer que les établissements d'accueil de type crèche collective et familiale soient principalement orientés vers la prise en charge des bébés, afin de faire émerger une nouvelle offre plus appropriée.

2. Décloisonner les univers professionnels et opter pour une transversalité

Trop souvent, les relations entre les différents partenaires en charge de l'accueil des enfants de zéro à six ans sont marquées par l'antagonisme existant entre le secteur de la petite enfance, sous la tutelle du ministère des affaires sociales, et le secteur de l'école maternelle, sous la tutelle du ministère de l'éducation nationale.

Il importe d'envisager une harmonisation des différents dispositifs en développant les relations entre les partenaires de la petite enfance et ceux de l'éducation nationale et en favorisant les partenariats.

Dans ce cadre, les professionnels de la petite enfance, qu'ils interviennent en crèche, halte-garderie, centre de loisirs ou école maternelle, pourraient bénéficier d'actions communes de formation. Il s'agit notamment de favoriser la synergie entre des formations et des cultures professionnelles différentes .

Votre groupe de travail souhaite que l'ensemble des parties prenantes à la mise en oeuvre des modes de garde élaborent au niveau national une charte de qualité pour l'accueil des tout-petits , qui permette de définir les conditions d'un accueil adapté et sécurisant, dans un esprit de concertation et de consensus. Cette proposition qui a certes déjà été mise en oeuvre dans certains départements a été formulée par plusieurs observateurs attentifs de la politique de la petite enfance en France et soucieux de valoriser le professionnalisme des principaux intervenants.

Les actions concertées proposées par votre groupe de travail supposent une coordination entre ministères et cadres législatifs différents.

3. Mieux cerner les attentes des parents

La politique familiale doit permettre de répondre à la demande des familles sur le plan des modes de garde tout en s'adaptant aux évolutions socio-économiques . Les structures collectives sont fortement sollicitées par les parents, car elles sont le plus souvent considérées comme un mode de socialisation intéressant. Les normes imposées par la réglementation actuelle participent de leur image valorisée et sécurisée pour de nombreux parents.

Il s'agit de converger vers une couverture optimale des besoins des parents et d'en développer les outils de connaissances.

Les difficultés propres aux quartiers défavorisés font que la demande pour les structures collectives payantes est relativement réduite. Or la solution d'une garde gratuite suscite l'envie de socialisation. L'offre d'accueil doit également prendre en compte ces populations plus fragiles .

Les caisses d'allocations familiales expérimentent des services complémentaires en direction de l'information des parents. Elles sont également chargées de procéder à un recensement de la demande afin de la rationnaliser et de l'adapter à une organisation territoriale dans le cadre de schémas départementaux d'accueil de la petite enfance .

Votre groupe de travail suggère de mieux organiser l'information sur les modes de garde et d'accueil afin qu'elle prenne en compte les besoins spécifiques de chaque tranche d'âge et qu'elle accompagne les parents dans leur démarche afin d'éclairer leur choix entre les diverses modalités de prise en charge des enfants.

B. OFFRIR UN ACCUEIL APPROPRIÉ AUX ENFANTS DE DEUX À TROIS ANS : LE JARDIN D'ÉVEIL

En France, la norme scolaire est ancrée dans une logique profondément culturelle et presque idéologique. « Peut-on aujourd'hui en France regarder l'école maternelle comme un système préscolaire parmi d'autres, produit d'une culture qui valorise le rôle éducatif de l'Etat, qui conçoit l'éducation comme une ascèse qui commence dès deux ans, qui pense la rupture avec la famille comme possibilité d'une égalité des chances ? » . 23 ( * )

Les deux-trois ans forment une tranche d'âge charnière qui relève d'une grande diversité sur le plan de la maturité psychique et physique. Ces jeunes enfants sont à la fois un peu grands pour fréquenter la crèche, qui est une structure plutôt conçue autour des tout-petits même si les rythmes de l'enfant font l'objet d'une attention particulière, et un peu petits pour une école plus enclin à les placer en situation d'apprentissage.

Cette tranche d'âge nécessite un autre mode de prise en charge qui accepte que l'enfant se développe à son rythme. Ils ont un besoin de sécurité affective mais aussi d'éveil. Il s'agit de proposer une socialisation de l'enfant prenant appui sur des activités pédagogiques ou éducatives en mobilisant des moyens adaptés aux particularités de cette tranche d'âge.

1. Promouvoir une structure innovante à mi-chemin entre la crèche et l'école

La réflexion engagée par votre groupe de travail conduit à proposer la création d'un lieu d'éducation et d'éveil destiné aux enfants de deux à trois ans, conçu comme structure intermédiaire originale répondant à un cahier des charges précis. Ce lieu, qui précéderait l'entrée à l'école maternelle, pourrait prendre la dénomination de jardin d'éveil et s'inscrirait dans le cadre de la politique familiale comme un nouveau service public . Cette proposition reprend entre autre les conclusions du rapport 24 ( * ) de Mme Tabarot, députée des Alpes-Maritimes, influencées par les orientations de la Révision générale des politiques publiques (RGPP).

Cette idée n'est pas nouvelle . Elle est mise en avant assez régulièrement. En avril 2001, Mme Ségolène Royal, alors ministre délégué à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées, avait annoncé son intention de créer des « jardins d'enfants éducatifs », destinés aux enfants de deux-trois ans, inspirés à la fois des jardins d'enfants et des structures passerelles préparant à l'entrée en maternelle. Malgré l'abondement supplémentaire du Fonds d'aide à l'investissement pour la petite enfance (FIPE) lors de la conférence de la famille en 2001, le développement de telles structures est resté lettre morte.

La mise en place d'un tel dispositif a été demandée par un certain nombre des personnes auditionnées par le groupe de travail.

Il s'agit de créer une nouvelle structure ambitieuse en termes d'accueil éducatif qui s'inscrive dans une forme de transition éducative qui permet de préparer chaque enfant à l'entrée en école maternelle , en lui offrant un lieu privilégié de contact avec l'adulte et ses pairs. Cette structure pourrait également s'entendre comme une action en faveur des enfants qui n'ont pas fréquenté de mode de garde collectif.

Le jardin d'éveil doit favoriser le développement psychomoteur de l'enfant, stimuler les échanges, encourager les jeux libres, offrir un espace propice à l'exercice de sa motricité.

Le jardin d'éveil doit pouvoir offrir un programme centré sur le jeu, des effectifs réduits et un personnel formé aux spécificités des jeunes enfants, reposant sur une souplesse de fonctionnement afin d'éviter de multiplier différentes modalités de garde pour un même enfant. Cette structure doit fonctionner sur l'ensemble de l'année civile et offrir une amplitude horaire similaire aux crèches collectives.

Cette nouvelle structure doit s'inscrire dans le cadre d'une politique familiale ambitieuse qui permette la conciliation de la vie familiale et professionnelle par une politique tarifaire attractive lorsque les deux parents sont actifs.

Ce lieu ne peut se concevoir sans l'établissement d'un lien privilégié avec l'école maternelle la plus proche, dans une approche de continuité éducative. Sa création repose sur une dimension partenariale et un ancrage local. La volonté des trois partenaires à savoir l'Éducation nationale, la Caisse nationale d'allocations familiales et les collectivités territoriales est un passage obligé pour créer ce projet de niveau intermédiaire entre la crèche et l'école.

2. Assurer les conditions matérielles de l'accueil

Il ne relève pas de la compétence de votre commission des affaires culturelles de fixer l'ensemble des moyens nécessaires à la mise en oeuvre de ces jardins d'éveil. Il appartient en effet aux différents ministères de s'engager dans une réflexion concertée pour déterminer les modalités administratives et financières. Cependant, le groupe de travail souhaite formuler quelques orientations.

a) Assouplir les normes d'encadrement

La question des normes d'encadrement a été abordée. Au contraire de la crèche (un adulte pour cinq enfants) et du centre de loisirs (un adulte pour huit enfants), il n'existe aucune norme pour l'école, et notamment pour les classes de maternelle, bien que les enfants se situent dans la même tranche d'âge. La seule référence est le seuil d'ouverture et de fermeture de classes sachant que les petites classes de maternelle fonctionnent rarement à effectif plein.

Votre groupe de travail suggère de réfléchir à un assouplissement des normes d'encadrement, selon un ordre de grandeur d'un adulte pour quinze enfants , sa conviction reposant sur le diagnostic formulé lors des auditions par de nombreux acteurs du domaine de la petite enfance et de l'éducation. Des enseignants ont ainsi fait part d'une forme de « classe idéale » lorsque par le biais des absences le groupe des écoliers présents est réduit à quinze. Le travail de l'enseignant s'en trouve facilité par exemple sur le plan du langage ou en termes de déplacement dans l'espace classe.

b) Recenser les locaux disponibles

Une structure adaptée aux moins de trois ans suppose un aménagement fonctionnel des locaux pour répondre à leurs besoins de mouvements, de jeux, de repos... Il est nécessaire de concevoir un espace à leur échelle.

Les écoles maternelles pourraient mettre à disposition des locaux existants déjà partiellement aménagés et autoriser l'utilisation conjointe de certains lieux. Les jardins d'éveil devraient être en priorité adossés aux écoles maternelles.

Les locaux pourraient ainsi faire l'objet d'une forme de mutualisation au sein des écoles maternelles, tout en distinguant un lieu spécialement réservé aux jeunes enfants.

Votre groupe de travail propose de définir un schéma départemental de l'offre pour recenser les locaux disponibles qui servirait de base à l'établissement d'une carte de développement des jardins d'éveil.

3. Développer l'emploi dans le secteur de la petite enfance

Les jardins d'éveil pourraient s'appuyer sur une équipe professionnelle disposant de formations diverses. Le développement de l'emploi des éducateurs de jeunes enfants qui constituent un personnel qualifié pourrait être l'axe central de ce nouveau dispositif en termes de ressources humaines. Les éducateurs de jeunes enfants sont en situation de proposer des activités autour de la motricité, du jeu et du langage.

Ces éducateurs pourraient être aidés dans leurs tâches d'ATSEM. Le recrutement de personnels issus de la filière sanitaire et social ne pourrait être envisagé, d'autant que ces formations souffrent d'un manque de débouchés.

Les professeurs des écoles pourraient jouer un rôle au sein de ces jardins d'éveil en apportant leurs connaissances pédagogiques et éducatives à l'équipe du jardin d'éveil par un travail de rencontres, d'échanges ou de formation, selon des modalités qui devront faire l'objet d'une concertation.

C. CONFORTER L'IDENTITÉ ET LES OBJECTIFS DE L'ÉCOLE MATERNELLE

1. Définir une école maternelle en trois ans

Les travaux de votre groupe de travail ont montré que l'école maternelle souffre d'une certaine ambigüité : est-elle un mode de garde ou un véritable lieu d'apprentissage ? Il est absolument nécessaire de conforter le rôle de première école qui est au coeur de la mission de l'école maternelle . Les nouveaux programmes de l'école primaire élaborés cette année affirme la finalité de l'école maternelle qui est de préparer les élèves à l'apprentissage de la lecture, de l'écriture et du calcul tout en conservant sa spécificité propre, ces domaines d'activité devant être abordés sur trois années, sans contrainte horaire.

Par ailleurs, l'entrée dans la scolarisation est pour chaque enfant une étape et le moment d'une rupture avec la sphère familiale. Cette étape doit se faire en respectant le développement personnel de chaque enfant. Votre groupe de travail suggère que la décision de scolarisation de l'enfant fasse l'objet d'un avis élaboré au sein de la communauté éducative, compte tenu de l'épanouissement et du développement de l'enfant, pour permettre le repérage éventuel et précoce de difficultés d'apprentissage.

Votre groupe de travail prône dans le respect des nouveaux programmes de l'école primaire une scolarité préélémentaire sur trois années . L'école maternelle ne doit pas être instrumentalisée au profit d'enjeux qui ne relèvent pas de l'intérêt de l'enfant.

2. Renforcer la formation des professeurs des écoles sur l'école maternelle

La formation initiale des enseignants repose sur une polyvalence : tout professeur des écoles doit être capable d'enseigner à tous les niveaux : de l'école maternelle au cours moyen 2. Or l'enseignement en maternelle requiert des connaissances théoriques et un savoir-faire pédagogique spécifiques . Le contenu des formations doit tenir compte de cette spécificité.

Dans le cadre de la réforme du recrutement et de la formation des enseignants, qui doit s'appliquer en 2010, et qui prévoit que le recrutement se fasse au niveau « master 2 » (bac+5), il faut envisager la mise en oeuvre d'une formation axée sur les enjeux propres à l'enseignement en école maternelle .

Les nouveaux masters qui comporteront en principe une dimension professionnelle, disciplinaire et didactique devront développer l'aptitude des futurs enseignants à enseigner à tous les niveaux de classe. Le nouveau concours du premier degré, comme ceux du second degré, comportera trois types d'épreuves destinées à évaluer la culture disciplinaire, la capacité à concevoir et organiser un enseignement adapté aux niveaux de classe, aux situations d'apprentissage et enfin la connaissance du système éducatif.

Votre groupe de travail appelle de ses voeux l'organisation d'une formation de base autour de la connaissance du développement physique, psychologique et psychique du jeune enfant pour les professeurs des écoles , qui peuvent être appelés à enseigner en école maternelle, en accordant une attention particulière aux enseignants qui débutent auprès des plus jeunes. L'école maternelle française doit pouvoir disposer d'enseignants formés au cadre particulier de ce niveau d'enseignement et conscients de ses enjeux pédagogiques et éducatifs.

CONTRIBUTION DES GROUPES SOCIALISTE ET COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN

M. Claude Bérit-Débat, Mme Marie-Christine Blandin, M. Yannick Bodin, Mmes Maryvonne Blondin, Françoise Cartron
et les membres du groupe socialiste et rattachés
et de Mme Brigitte Gonthier-Maurin
et les membres du groupe communiste républicain et citoyen

Nous constatons l'approche attentive des rapporteurs aux besoins spécifiques des tout jeunes enfants scolarisés, particulièrement ceux âgés de moins de trois ans.

Nous partageons les observations de disparités territoriales et de diversité de la maturité de chaque enfant.

L'attention portée à une chaîne continue d'accueil, de scolarisation, d'éducation est intéressante, à condition de ne pas faire glisser un temps éducatif vers un temps de garde.

Nous nous inscrivons en opposition avec les pistes développées, dont le « jardin d'éveil » en raison de ruptures que nous ne pouvons pas cautionner :

- fin de l'égalité d'accès des familles et de la gratuité d'accueil ;

- désengagement de l'éducation nationale ;

- perspectives de fortes inégalités territoriales si cela devait reposer sur les collectivités territoriales ou des initiatives aléatoires de partenariat ;

- risque de coût transféré aux communes ;

- non garantie de couverture exhaustive du territoire national ;

- manque de réaffirmation claire du droit à l'école maternelle à 3 ans.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

MM. Jean-Louis Nembrini , directeur général de l'enseignement scolaire, et Jean-Marc Goursolas , adjoint au directeur général, au ministère de l'éducation nationale

Mme Viviane Bouysse et M. Alain Houchot , inspecteurs généraux de l'éducation nationale

Mme Nicole Geneix , directrice de l'Observatoire de l'enfance en France

Mmes Corinne Métral , présidente, et Christine Boutry , membre de l'Association des directeurs d'établissements et de services Petite enfance (ARDESPE)

MM. Pierre-Yves Jardel , maire d'Orbois-l'Abbaye (Marne), représentant de l'Association des maires de France (AMF), et Sébastien Ferriby , chargé d'études à l'AMF

Mmes Claudine Paillard , présidente, Chantal Blandel et M. Abdelouhab Zahri , secrétaires nationaux, de l'Association des directeurs de l'éducation des villes de France (ANDEV)

Mme Delphine Chauffaut , responsable du département de l'animation de la recherche et du réseau des chargés d'étude, M. Laurent Ortalda , conseiller à la direction de l'action sociale, et Mme Patricia Chantin , responsable des relations avec le Parlement, de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF)

Mme Agnès Florin , professeur de psychologie du développement et de l'éducation, responsable d'une équipe de recherche au sein du laboratoire de psychologie "Education, cognition, développement" de l'Université de Nantes

Mme Mireille Brigaudiot , maître de conférences en sciences du langage à l'Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) de Versailles

Mme Luce Dupraz , membre du Comité enfance de la Fondation de France

M. Richard Redondo , président, et Mme Suzanne Guillard , chargée des publications, de l'Association française des psychologues de l'éducation nationale

M. Alain Bentolila , professeur de linguistique à l'université Paris V

Mme Lucile Barberis , présidente de l'Association générale des enseignants des écoles et classes maternelles publiques (AGEEM)

Mme Karine Autissier , chargée de mission à la Fédération des conseils de parents d'élèves des écoles publiques (FCPE)

Mmes Valérie Marty , présidente, et Laurence Kratzer , vice-présidente, de la délégation des Hauts-de-Seine de la Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP),

Mme Valérie Beauchamps , membre du bureau national, et M. Christophe Abraham , chargé des relations extérieures, de l'Union nationale des associations de parents d'élèves de l'enseignement libre (UNAPEL)

Mme Joce Le Breton , membre du conseil d'administration de l'Observatoire des zones prioritaires

Mme Sylvie Chevillard , conseillère pédagogique, membre de l'équipe de recherche ESCOL (Paris-VIII)

M. Etienne Anquetil , président de la Fédération nationale pour l'école rurale (FNER)

Mme Claire Brisset , inspecteur général de l'éducation nationale, ancienne défenseure des enfants

M. Michel Botbol , secrétaire général de l'Association française de psychiatrie

MM. Didier Geiger , vice-président de la Conférence des directeurs d'Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM), et Jean-Louis Auduc , directeur-adjoint de l'IUFM de Créteil, responsable des formations 1er degré

Mme Martine Maurice , ancienne présidente, membre du conseil d'administration de la Fédération nationale des éducateurs de jeunes enfants

M. Olivier Peraldi , adjoint au délégué interministériel à la famille, Mmes Laurence Levy-Delpla , chargée de mission à la délégation interministérielle à la famille, et Hélène Siavellis , médecin pédiatre

M. Rémy Guilleux , administrateur en charge du pôle d'études enfance et petite enfance, et Mme Patricia Humann , coordinatrice département éducation jeunesse, de l'Union nationale des associations familiales (UNAF)

Visite de l'école maternelle des Grésillons à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) - Classe de très petite section de M. Thierry Gueux - Rencontre avec Mme Sandrine Hertig , directrice, et les enseignants

ANNEXE 1 - L'ÂGE D'ENTRÉE À L'ÉCOLE MATERNELLE SELON PLUSIEURS CARACTÉRISTIQUES DE L'ÉLÈVE ET CELLES DE SA FAMILLE

En %

Caractéristiques de l'élève

Age d'entrée à l'école maternelle

2 ans

3 ans

4 ans et +

Sexe

Garçon

30,6

63,9

5,5

Fille

31,6

62,8

5,6

Trimestre de naissance

1 er trimestre

46,2

48,8

5,1

2 e trimestre

35,4

60,2

4,3

3 e trimestre

26,7

67,6

5,7

4 e trimestre

16,6

76,4

7,0

Nationalité de l'élève

Français

31,6

63,2

5,2

Étranger

21,4

66,5

12,1

Mode de garde avant l'école maternelle

Crèche collective

25,8

69,1

5,1

Crèche familiale

26,4

68,0

5,7

Nourrice agréée

37,5

59,0

3,5

Garde à domicile

32,2

61,7

6,1

Profession et catégorie socioprofessionnelle de la personne de référence du ménage

Agriculteur

46,0

49,5

4,5

Artisan, commerçant

32,1

60,3

7,5

Cadre, chef d'entreprise

25,7

69,8

4,5

Professeur, instituteur

35,5

59,9

4,6

Profession intermédiaire

32,6

63,2

4,2

Employé

29,3

65,3

5,4

Ouvrier qualifié

33,0

61,2

5,8

Ouvrier non qualifié

32,1

62,2

5,7

Inactif

25,0

63,6

11,4

Structure parentale

Père et mère

31,8

63,0

5,2

Famille mono-parentale

26,9

66,4

6,6

Famille recomposée

30,3

62,9

6,9

Autre situation

27,7

62,8

9,6

Activité de la mère

Mère active

32,5

62,9

4,6

Mère inactive

28,0

64,4

7,6

Taille de la famille

1 enfant

24,8

68,2

7,0

2 enfants

31,6

63,8

4,7

3 enfants

33,5

61,6

4,9

4 enfants

31,9

60,6

7,5

5 enfants

27,0

64,4

8,7

6 enfants et +

27,7

64,5

7,9

Ensemble

31,1

63,4

5,5

Source : Panel d'élèves du premier degré recruté en 1997

Lecture : 30,6% des garçons sont entrés à l'école maternelle à deux ans. Les pourcentages en italique portent sur des effectifs compris entre 50 et 100. Ils doivent donc être appréciés avec prudence.

Éducation & formations - n° 58 - juillet-septembre 2001

ANNEXE 2 - POLITIQUES ACADÉMIQUES ET DÉPARTEMENTALES EN MATIÈRE DE SCOLARISATION À 2 ANS

Départements

Taux de scolarisation à 2 ans ( 25 ( * ) ) dans
l'enseignement public et privé ((%)

Académie

Rentrée scolaire 1990

Rentrée scolaire 1999

Rentrée scolaire 2007

Alpes de Haute Provence

53,9

53,0

32,7

Hautes-Alpes

48,3

41,5

14,5

Bouches-du-Rhône

33,0

29,0

14,1

Vaucluse

18,6

15,3

7,2

Académie d'Aix-Marseille

31,9

27,9

13,7

Aisne

37,2

42,0

20,9

Oise

14,0

23,0

11,2

Somme

36,6

45,3

26,3

Académie d'Amiens

26,9

34,4

18,2

Doubs

40,4

31,5

20,5

Jura

58,2

49,2

24,9

Haute-Saône

29,4

35,4

16,3

Territoire de Belfort

33,1

28,6

16,1

Académie de Besançon

41,1

35,8

20,0

Dordogne

33,3

38,9

18,7

Gironde

29,0

24,0

14,0

Landes

35,5

38,3

12,3

Lot-et-Garonne

34,2

40,1

20,5

Pyrénées-Atlantiques

47,5

45,6

23,7

Académie de Bordeaux

34,5

33,3

16,9

Calvados

35,8

37,1

22,0

Manche

40,7

46,2

29,3

Orne

39,0

41,9

24,3

Académie de Caen

38,1

41,1

24,8

Allier

41,5

48,7

29,7

Cantal

51,1

60,9

40,5

Haute-Loire

71,0

77,0

60,9

Puy-de-Dôme

34,2

40,7

19,0

Académie de Clermont-Ferrand

44,1

51,1

31,6

Corse-du-Sud

14,7

17,0

15,7

Haute-Corse

22,8

23,2

13,7

Académie de Corse

18,8

20,4

14,9

Seine-et-Marne

10,3

14,4

5,8

Seine-Saint-Denis

22,2

21,2

5,0

Val-de-Marne

35,5

30,1

13,8

Académie de Créteil

22,6

21,8

7,8

Côte d'Or

33,1

33,5

22,4

Nièvre

39,7

44,6

30,8

Saône-et-Loire

41,9

38,6

22,7

Yonne

24,5

20,9

12,6

Académie de Dijon

35,0

33,7

21,4

Ardèche

69,2

71,4

40,1

Drôme

48,5

39,8

30,4

Isère

26,0

15,1

8,1

Savoie

37,1

21,8

8,1

Haute-Savoie

4,1

4,6

2,5

Académie de Grenoble

29,7

22,2

13,0

Nord

60,9

65,1

55,6

Pas-de-Calais

45,7

57,9

48,5

Académie de Lille

55,5

62,5

53,1

Corrèze

57,4

54,1

29,7

Creuse

42,1

51,6

42,6

Haute-Vienne

37,9

32,7

13,0

Académie de Limoges

45,1

42,9

22,7

Ain

39,2

41,4

16,7

Loire

68,5

67,2

40,4

Rhône

56,3

45,8

27,2

Académie de Lyon

56,3

49,8

28,1

Aude

56,3

49,4

30,5

Gard

40,4

32,0

16,9

Hérault

44,9

35,2

20,5

Lozère

75,0

64,8

46,7

Pyrénées-Orientales

31,8

27,4

23,0

Académie de Montpellier

43,9

35,7

21,9

Meurthe-et-Moselle

43,9

47,4

24,8

Meuse

47,7

57,8

39,2

Moselle

27,4

27,1

13,0

Vosges

32,7

39,0

27,5

Académie de Nancy-Metz

35,0

38,0

21,1

Loire-Atlantique

36,7

36,4

22,2

Maine-et-Loire

59,5

63,5

39,4

Mayenne

56,3

70,0

40,5

Sarthe

42,9

45,0

25,9

Vendée

55,1

56,4

38,2

Académie de Nantes

47,8

50,1

31,0

Alpes-Maritimes

14,6

14,0

10,7

Var

10,1

12,0

12,5

Académie de Nice

12,4

13,0

11,6

Cher

34 ?7

37,7

14,1

Eure-et-Loir

17,9

21,9

7,8

Indre

45,7

44,9

22,6

Indre-et-Loire

34,6

30,8

10,4

Loir-et-Cher

44,7

43,2

20,6

Loiret

15,6

11,4

7,3

Académie d'Orléans-Tours

28,6

27,3

11,8

Académie de Paris

20,5

11,4

5,8

Charente

47,9

45,4

24,9

Charente-Maritime

40,3

35,1

14,7

Deux-Sèvres

56,0

60,3

33,9

Vienne

56,3

52,6

22,0

Académie de Poitiers

49,1

47,0

22,8

Ardennes

43,7

57,1

32,4

Aube

39,0

32,9

20,1

Marne

44,8

40,8

22,7

Haute-Marne

38,9

51,5

28,9

Académie de Reims

42,5

44,2

25,0

Côtes d'Armor

67

71,8

51,2

Finistère

72,5

71,2

62,1

Ille-et-Vilaine

59,7

60,8

34,6

Morbihan

68,6

72,5

59,9

Académie de Rennes

66,7

68,1

50,4

Eure

10,3

22,3

7,9

Seine-Maritime

12,2

27,3

15,7

Académie de Rouen

11,6

25,8

13,1

Bas-Rhin

10,7

16,6

10,2

Haut-Rhin

3,9

4,5

4,4

Académie de Strasbourg

7,8

11,6

7,8

Ariège

47,3

52,3

24,1

Aveyron

69,8

66,7

51,8

Haute-Garonne

41,0

27,9

17,8

Gers

57,4

64,0

28,5

Lot

55,4

58,6

45,4

Hautes-Pyrénées

56,1

51,8

32,5

Tarn

65,1

62,4

27,9

Tarn-et-Garonne

60,7

53,0

23,9

Académie de Toulouse

52,6

44,6

26,2

Yvelines

16,8

17,8

10,0

Essonne

7,4

13,9

7,1

Hauts-de-Seine

25,9

12,4

9,2

Val-d'Oise

17,2

19,6

10,1

Académie de Versailles

17,2

15,8

9,1

France métropolitaine

35,2

34,9

21,3

Académie de la Guadeloupe

10,7

15,8

15,2

Académie de la Guyane

2,1

2,6

1,2

Académie de la Martinique

27,1

36,0

26,5

Académie de la Réunion

18,2

13,6

7,5

DOM

16,5

16,5

11,0

France Métropolitaine + DOM

34,7

34,1

20,9

Source : MEN

* 1 Circulaire de Thiers aux préfets, 5 mars 1833.

* 2 Circulaire du 4 juillet 1833.

* 3 Kergomard Pauline Les écoles maternelles de 1837 jusqu'en 1910. Paris : Nathan, 1910

* 4 A. Prost Histoire générale de l'enseignement et de l'éducation en France Tome IV 1981

* 5 Rapport annexé à la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989.

* 6 Rapport annexé à la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989.

* 7 Voir tableau en annexe : politiques académiques et départementales en matière de scolarisation à deux ans.

* 8 Evelyne Sullerot, Les modes de garde des jeunes enfants, rapport présenté au nom de la section des actions éducatives, sanitaires et sociales, Conseil économique et social, avril 1981.

* 9 Préélémentaire : les enfants sont accueillis soit dans les écoles maternelles, soit dans des écoles primaires comportant une classe maternelle ou une section maternelle au sein d'une classe à plusieurs niveaux, soit dans des écoles spéciales.

* 10 Enquête réalisée par la DRESS en 2002.

* 11 Sondage effectué auprès d'un échantillon national représentatif de 1006 mères de bébés âgés de 0 à 24 mois entre le 21 juillet et le 2 août 2006

* 12 Enquête réalisée par Audirep du 9 au 14 avril 2004 auprès de 803 personnes (63 % de femmes et 37 % d'hommes) ayant au moins un enfant scolarisé et dont 75 % ne sont pas adhérents d'une association de parents d'élèves.

* 13 relatif aux établissements et services d'accueil des enfants de moins de six ans et modifiant le code de la santé publique.

* 14 RGPP La politique familiale CMPP1 du 12 décembre 2007

* 15 Paul Caille « scolarisation à deux ans et réussite de la carrière scolaire au début de l'école élémentaire » Éducation et formations n° 6 - juillet-septembre 2001.

* 16 Agnès Florin L'école primaire en France Rapport au Haut Conseil de l'éducation janvier 2007.

* 17 Agnès Florin Modes d'accueil pour la petite enfance Qu'en dit la recherche internationale ? Edition 2007

* 18 Jean-Paul Caille et Fabienne Rosenwald Les inégalités de réussite à l'école élémentaire : construction et évolution Portrait social 2006

* 19 Jean-Paul Caille et Fabienne Rosenwald Les inégalités de réussite à l'école élémentaire : construction et évolution Portrait social 2006

* 20 Paul Caille « scolarisation à 2 ans et réussite de la carrière scolaire au début de l'école élémentaire ». Education et formations n° 6 - juillet-septembre 2001.

* 21 JEANTHEAU Jean-Pierre, MURAT Fabrice. Observation à l'entrée en CP des élèves du «panel 1997». Note d'information de la DPD, n° 40, 1998

* 22 Rapport sur la généralisation des dispositifs passerelles, « De la famille et du lieu de garde à l'école maternelle ». Daniel Villain et Bernard Gossot, rapport remis en novembre 2000 à la ministre de l'emploi et de la solidarité, au ministre de l'éducation nationale et à la ministre déléguée à la famille et à l'enfance.

* 23 Gilles Brougère L'exception française : L'école maternelle face à la diversité des formes préscolaires Les dossiers des sciences de l'éducation n° 7 2002

* 24 Rapport sur le développement de l'offre d'accueil de la petite enfance Mission confiée par le Premier ministre à Mme Michèle Tabarot, députée des Alpes Maritimes juillet 2008

* 25 Taux de scolarisation : (nombre d'enfants scolarisés ayant 2 ans révolus à la rentrée / nombre d'enfants de 2 ans de l'année civile) x 100.

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