3. Les questions en suspens

La mise en oeuvre d'une concurrence ferroviaire au niveau régional entraînerait inévitablement un grand nombre de difficultés et de problèmes pratiques. Quelques uns peuvent d'ores et déjà être identifiés.

a) Quels marchés ?

Au moment de passer au stade de la réalisation, quelques distinctions, apparemment claires et fondées, perdent de leur pertinence. C'est le cas par exemple de la distinction entre la concurrence pour le marché et la concurrence sur le marché. Dans le premier cas, l'entreprise sélectionnée est seule sur le marché. La concurrence est au bénéfice de la région, qui a le choix entre plusieurs opérateurs. Dans le second cas, plusieurs entreprises sont présentes sur un même marché. La concurrence est visible et est surtout au bénéfice de l'usager, qui a le choix entre plusieurs opérateurs. Cette distinction apparemment claire peut s'avérer, dans les faits, assez trouble. Tout dépend du « découpage » retenu. Si l'ensemble du marché régional est attribué à une seule société, on se retrouve dans le premier cas de figure ; en revanche, on peut aussi imaginer que le marché régional soit fractionné. Ainsi, en théorie, à l'occasion d'attribution de sillons, rien n'empêcherait qu'une ligne directe Strasbourg-Colmar-Mulhouse soit affectée à une société et une autre ligne sur le même trajet, mais en desserte omnibus cette fois, soit affectée à une autre société. Il s'agit formellement de deux marchés distincts qui laissent place, potentiellement, à deux opérateurs distincts.

b) La question du matériel

En pratique, il y a deux modèles d'ouverture et de prestations de service par un transporteur :

- le modèle allemand, où l'entreprise qui sollicite le marché vient avec ses propres matériels roulants, son propre personnel et se charge de l'ensemble du service ;

- le modèle de transport urbain : le matériel roulant appartient à l'autorité organisatrice qui attribue le marché.

Le modèle du ferroviaire régional se rapproche plus de celui du transport urbain, sans être strictement identique. Aujourd'hui, la situation du matériel - les voitures - est complexe. La SNCF passe le marché et reste formellement propriétaire du matériel, qui reste inscrit au bilan de la SNCF, mais celle-ci reçoit une subvention des régions pour acheter le matériel. Les régions sont « quasi propriétaires » du matériel, même si formellement la propriété reste à la SNCF. Que se passerait-il en cas d'attribution du marché à un nouvel opérateur ? Certaines conventions conclues entre la SNCF et les régions prévoient une clause explicite de reprise du matériel par la région. Mais même en l'absence de clause explicite, il est vraisemblable que le matériel reviendrait à la région.

Dans cette compétition, la SNCF a un atout majeur et un handicap. L'atout est lié à l'expérience et l'antériorité. On a vu que les régions peuvent choisir leur prestataire sans être obligé de passer par appel d'offre ce qui donne un avantage au prestataire en place. A l'inverse, la SNCF observe que la société nationale est dans une position moins favorable que ne l'est la Deutsche Bahn qui finance le matériel et en reste par conséquent propriétaire des rames, ce qui constitue un avantage. L'achat de nouveaux matériels constitue évidemment une barrière à l'entrée sur le marché du transport ferroviaire. Les régions françaises qui ont financé le matériel ont donc beaucoup plus de latitude pour, à l'avenir, choisir le transporteur.

Si l'obstacle du matériel est levé, il en va différemment de la question du personnel.

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