C. QUELLES RECETTES ET POUR QUEL USAGE ?

1. Ne pas faire de la taxe carbone une « recette de poche »

a) Quel rendement, pour quels contribuables ?

Selon l'ADEME, le rendement d'une contribution énergie-climat additionnelle serait de 8,3 milliards d'euros , sur la base d'un tarif de 32 euros par tonne de CO 2 et d'une exclusion des émissions soumises à l'ETS. Le rendement de la contribution différentielle serait de près de 5 milliards d'euros . Le produit résultant de deux tarifs alternatifs (21 et 27 euros) figure dans le graphique qui suit 83 ( * ) .

Rendement des contributions additionnelle et
différentielle selon trois hypothèses de tarifs

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après l'ADEME

En cohérence avec l'ensemble des chiffrages fournis dans les développements qui précèdent, une analyse par type d'énergie et par secteur enseigne que le résidentiel, soit les ménages, acquitteraient, dans les deux scénarios, plus de la moitié de la contribution, devant le secteur tertiaire et l'industrie. Celle-ci pèserait en outre le plus largement sur les consommations de carburant ( cf . tableau suivant).

Rendement des contributions additionnelle et
différentielle par énergie et secteur

(en millions d'euros)

* Agriculture, sylviculture, pêche
** Carburant acheté sur le territoire national par des véhicules étrangers
Source : commission des finances, d'après l'ADEME.

b) Un rendement « biodégradable » ?

La fiscalité comportementale, et en particulier la fiscalité environnementale, ayant pour objet de détruire son assiette , l'idée est communément admise qu'elle ne saurait procurer de rendements substantiels à long terme . Ce point de vue a été confirmé par plusieurs interlocuteurs du groupe de travail, qui ont considéré qu'une taxe carbone procurant des ressources pérennes aurait manqué son objectif.

L'observation de cinq séries statistiques intéressant l'étranger valide, en première analyse, cette assertion, dans la mesure où le produit de la taxe exprimé en proportion du produit intérieur brut tend à légèrement décroître ( cf . graphique). Il convient toutefois de souligner le caractère « rudimentaire » des données disponibles, qui reposent sur des séries brèves et mériteraient d'être enrichies par l'analyse des éventuels changements de législation fiscale sur le CO 2 ou des évolutions économiques ayant affecté l'assiette des prélèvements, soit autant d'éléments dont le groupe de travail ne disposait pas pour la rédaction du présent rapport.


L'évolution du produit de la fiscalité carbone

(en % du PIB)

Source : commission des finances, d'après l'ADEME.

Par ailleurs, il doit être rappelé qu'en application des recommandations du groupe de travail, le tarif de la taxe aurait vocation à augmenter progressivement , selon la trajectoire telle que définie par les rapports Boiteux ou Quinet. Or cet accroissement tarifaire pourrait compenser la diminution attendue de la taxe, conduisant à stabiliser son rendement, sinon à l'accroître .

Il ressort ainsi, sur la base d'une hypothèse haute d'élasticité des émissions de CO 2 au prix de l'énergie, que le produit de la taxe pourrait augmenter de 3,6 milliards d'euros d'ici à 2020 , sous réserve de retenir un taux de progression du tarif de 5 % par an en moyenne (soit une tonne de CO 2 tarifée à 52 euros en 2020).

Evolution du produit de la taxe en 2020,
sur la base d'un accroissement annuel moyen de 5 % de son tarif

Secteur

Hausse du coût des combustibles fossiles taxés

Elasticité des émissions au prix de l'énergie

Diminution des émissions de CO 2 *

Réduction des émissions en % du total du secteur

Evolution du produit de la taxe**

Industrie

Tertiaire

Résidentiel

Autres

Carburant

56 %

37 %

25 %

64 %

13 %

-0,27

-0,58

-0,81

-0,25

-0,40

-3,56

-6,57

-12,84

-1,25

-6,49

-15,1 %

-21,2 %

-20,1 %

-15,9 %

-5,1 %

+290

+282

+616

+93

+2.331

Total

25 %

-

-30,71

-24,3 %

+3.612

* En millions de tonnes
** En millions d'euros
Sur la base d'un scénario additionnel commençant à 32 euros par tonne et mettant en oeuvre les exonérations prévues par le droit communautaire.
Source : commission des finances

La simulation contenue dans le tableau qui précède repose sur une hypothèse de croissance de l'efficacité énergétique égale à la croissance tendancielle du produit intérieur brut. L'interprétation de ses résultats doit, comme telle, être entourée de précautions, mais tend à démontrer que la question du rendement de la fiscalité environnementale ne mérite pas d'être évacuée sur le fondement d'un raisonnement uniquement théorique.

* 83 Pour mémoire, les taxes ou surtaxes CO 2 mises en oeuvre dans les pays étudiés par le groupe de travail ont procuré les rendements suivants : 1) la Revenue-neutral carbon tax instaurée en Colombie britannique a procuré 300 millions de dollars canadiens (185 millions d'euros) de recettes fiscales entre sa mise en oeuvre en juillet 2008 et mars 2009 (fin de l'année fiscale), soit l'équivalent de 1,6 % des recettes fiscales provinciales. Le produit attendu pour les trois prochains exercices budgétaires s'élève à environ 2,27 milliards de dollars canadiens ( 1,4 milliard d'euros ) ; 2) le produit des taxes CO 2 finlandaises était de 2,9 milliards d'euros en 2007 ; 3) la taxe carbone suédoise a rapporté, en 2007, 2,6 milliards d'euros ; 4) la taxe CO 2 danoise procure enfin une ressource annuelle de 680 à 685 millions d'euros , acquittée à 38 % par les ménages et à 62 % par les entreprises.

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