E. FAUT-IL ALLER DU LISSAGE DES DOTATIONS À UNE DOTATION GLOBALE DE PÉRÉQUATION ?

Vos rapporteurs ont constaté que les écarts de répartition de la DGF sont très largement le fruit de l'histoire, plus que le résultat de situations économiques ou sociales différentes. Ils observent que ces inégalités de traitement entre deux collectivités territoriales, qui semblent souvent en tous points similaires, ne paraissent plus justifiées, puisque les raisons même de leur existence sont oubliées des acteurs locaux qui ne les comprennent plus et ne répond plus à la réalisation d'un objectif déterminé.

Ces écarts sont souvent issus de mécanisme de garantie ou de compensation qui se sont stratifiés. D'importants crédits sont ainsi figés au nom de situations historiques dépassées : la surtaxe sur les eaux minérales ou la taxe locale pesant sur les cafés, hôtels et restaurants, ont disparu depuis plus d'un demi-siècle mais produisent encore des effets.

Au niveau des intercommunalités, l'un de vos rapporteurs a relevé que l'existence de cinq régimes fiscaux différents pour les groupements de communes (communautés de communes à fiscalité additionnelle, communautés de communes à TPU, communautés d'agglomération, syndicats d'agglomérations nouvelles, communautés urbaines 12 ( * ) ) accentue les inégalités de traitement : le bénéfice ou non de certaines dotations est lié à la date de création du groupement de communes, et non à un objectif de diminution des inégalités de ressources.

De plus, vos rapporteurs ont démontré ci-dessus que le mode de réforme des dotations avait conduit à leur stratification . En effet, à chaque évolution des concours financiers, était créée un mécanisme de compensation, annulant, ou quasiment, les effets négatifs de la réforme en cours, c'est-à-dire, les diminutions de recettes. Si cette logique de préservation des ressources des collectivités territoriales a pu avoir un sens, on remarque qu'elle a conduit à fixer puis pérenniser des niveaux de dotation très différents, pour des situations apparemment très proches.

Vos rapporteurs recommandent donc le lissage de ces écarts de dotations ainsi qu'une harmonisation des dispositifs fiscaux au niveau des EPCI de même strate . Ils souhaitent favoriser la logique de péréquation plutôt que la logique de compensation des situations historiques .

Cependant, une telle réforme aura des effets importants sur les finances des collectivités territoriales, elle doit donc être réalisée très progressivement, de façon à être aussi « neutre » que possible. Étalée sur une dizaine d'années, elle ne devrait pas entraîner de réduction de dotation de plus de 1,5 à 2 % par an (soit le niveau d'écrêtement du complément de garantie retenu depuis deux ans par le CFL).

Le principe de « sortie en sifflet » , c'est-à-dire de réduction progressive des dotations de compensation ou des compléments de garantie, devrait devenir un fondement intangible de la répartition des dotations . En effet, il n'est possible de dégager des marges de manoeuvre permettant de mener à bien une politique de péréquation efficace dans un contexte économique contraint que si les situations existantes ne sont pas figées.

Vos rapporteurs se demandent si la globalisation des dotations de péréquation ne devrait pas être envisagée. Ils y sont favorables pour plusieurs raisons :

- une telle réforme améliorerait la lisibilité de la politique menée par l'Etat en faveur des collectivités territoriales. Des objectifs affichés, des critères simples et peu nombreux, correspondant à une dotation globale de péréquation distincte de la dotation globale de fonctionnement, auraient le mérite de favoriser la compréhension et l'adhésion des acteurs locaux ;

- l'évolution des composantes de la dotation globale de péréquation seraient sans doute facilitée. Il ne s'agirait pas de figer chaque dotation de péréquation et les « droits acquis » correspondant, comme c'est le cas actuellement, mais de proposer un niveau global de péréquation tenant compte des écarts de richesse. On peut considérer que si une politique de péréquation est efficiente, elle doit s'éteindre , une fois que les différences de situation sont corrigées (au niveau de l'objectif fixé), les crédits ainsi dégagés devant être réalloués à une nouvelle politique de péréquation. Or, on constate aujourd'hui qu'il n'est pas possible de supprimer une dotation de péréquation, soit qu'elle ait atteint son but, soit qu'elle ait démontré ses limites, voire son inefficacité. Il devient donc impossible de réaliser et de mettre en oeuvre des choix politiques de péréquation ;

- enfin, la globalisation des dotations de péréquation pourrait avoir un effet de responsabilisation des gestionnaires locaux . Recevant une dotation globale de péréquation, il leur incomberait d'en déterminer l'allocation, et d'en assurer la performance. On éviterait l'effet de saupoudrage, sur chaque objectif particulier de chaque dotation de péréquation existante. Cette globalisation, proche du modèle de la nouvelle constitution financière de l'Etat, pourrait favoriser une meilleure efficience des crédits alloués dans le cadre de la politique de péréquation.

* 12 La loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale prévoyait un dispositif différent pour les communautés urbaines créées avant cette loi, qui bénéficiaient du régime de fiscalité additionnelle, et celles qui ont été créées après cette loi, bénéficiant d'un régime fiscal à TPU. Le régime de la TPU est de plein droit, pour les communautés urbaines, depuis le 1er janvier 2002, sauf délibération contraire d'au moins la moitié des conseils municipaux des communes intéressées, aux communautés urbaines créées avant la loi du 12 juillet 1999.

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