D. LA QUESTION DES EFFETS DU « VIEILLISSEMENT » DÉMOGRA-PHIQUE SUR LES FINANCES PUBLIQUES

Le vieillissement devrait se traduire par une augmentation des dépenses publiques , dans des proportions toutefois très différenciées selon les pays.

HAUSSE PRÉVUE DES DÉPENSES LIÉES AU VIEILLISSEMENT 2007-2030 (% DU PIB)

Source : OCDE

COÛT DU VIEILLISSEMENT
(en points de % de PIB)

Retraites

Santé

Dépendance

Chômage

Total

2010

Variation

de 2010
à 2060

2010

Variation

de 2010
à 2060

2010

Variation

de 2010
à 2060

2010

Variation

de 2010
à 2060

2010

Variation

de 2010
à 2060

Belgique

10,3

4,5

7,7

1,1

1,5

1,3

7,3

-0,3

26,8

6,6

Allemagne

10,2

2,5

7,6

1,6

1,0

1,4

4,6

-0,4

23,3

5,1

Estonie

6,4

-1,6

5,1

1,1

0,1

0,1

3,2

0,3

14,8

-0,1

Irlande

5,5

5,9

5,9

1,7

0,9

1,3

5,3

-0,2

17,5

8,7

Espagne

8,9

6,2

5,6

1,6

0,7

0,7

4,8

-0,2

20,0

8,3

France

13,5

0,6

8,2

1,1

1,5

0,7

5,8

-0,2

29,0

2,2

Italie

14,0

-0,4

5,9

1,0

1,7

1,2

4,3

-0,2

26,0

1,6

Pays-Bas

6,5

4,0

4,9

0,9

3,5

4,6

5,6

-0,2

20,5

9,4

Pologne

10,8

-2,1

4,1

0,8

0,4

0,7

3,8

-0,6

19,1

-1,1

Finlande

10,7

2,6

5,6

0,8

1,9

2,5

6,4

0,0

24,7

5,9

Suède

9,6

-0,2

7,3

0,7

3,5

2,2

6,6

0,0

27,1

2,7

Royaume-Uni

6,7

2,5

7,6

1,8

0,8

0,5

4,0

0,0

19,2

4,8

EU-27

10,2

2,3

6,8

1,4

1,3

1,1

4,9

-0,2

23,2

4,6

Source : Commission européenne

Pour l'Union européenne à 27, les dépenses liées au vieillissement augmenteraient de 4,6 points de PIB à l'horizon 2060 dont 2,3 points au titre des dépenses de pension ; 1,4 point pour la santé ; 1,1 point pour la dépendance et, en sens inverse, - 0,2 point de PIB au titre du chômage.

Plusieurs pays connaîtraient une augmentation plus forte de leurs dépenses publiques : la Belgique (+ 6,6 points de PIB), l'Allemagne (+ 5,1 points), l'Irlande (+ 8,7 points), l'Espagne (+ 8,3 points), les Pays-Bas (+ 9,4 points de PIB).

La France (+ 2,2 points de PIB dont 0,6 point seulement pour les pensions) serait, avec la Suède et l'Italie, l'un des pays où cette dynamique serait la plus faible.

Ces projections sont tributaires de scénarios de croissance générale et du jeu des hypothèses nécessaires à la projection des différentes catégories de dépense sensibles au vieillissement, étant entendu que ces projections sont effectuées à législation constante .

On estime, en général, que plus la croissance sera élevée moins l'augmentation des dépenses publiques liées au vieillissement sera forte.

On ne doit toutefois pas prêter une portée excessive à cette observation. Pour un très grand nombre de dépenses liées à l'âge, leur dynamique intègre des éléments en lien avec le rythme de la croissance économique. C'est d'ailleurs une orientation, discutée en tant que telle, des politiques de protection sociale de distendre le lien entre dépenses sociales et croissance qui, en l'état, demeure assez serré.

Il n'en reste pas moins que les problèmes de financement des prélèvements nécessaires à la couverture des dépenses supplémentaires résultant du vieillissement n'auront pas la même acuité selon que la croissance permettra ou non des gains élevés de pouvoir d'achat aux actifs et aux propriétaires du capital.

Les hypothèses relatives à la croissance économique (d'ici à l'horizon 2050) sont récapitulées dans le tableau ci-dessous.

PROJECTIONS COMPARÉES DE LA CROISSANCE

Croissance
2008-2050

PIB/heure travaillée

Emploi

Population totale

Taux d'emploi

Croissance du PIB/tête 2004-2050

Belgique

1,9

1,6

0,3

0,3

0,1

1,5

Danemark

1,8

1,7

0,0

0,2

0,1

1,6

Allemagne

1,3

1,7

-0,4

-0,2

0,2

1,5

Irlande

2,8

1,8

0,9

1,1

0,1

1,7

GR

2,0

2,1

-0,1

0,1

0,1

1,9

Espagne

2,1

1,8

0,4

0,5

0,3

1,6

France

1,8

1,7

0,2

0,4

0,1

1,5

Italie

1,4

1,4

0,0

0,1

0,2

1,3

Pays-Bas

1,6

1,7

-0,1

0,1

0,1

1,5

Autriche

1,7

1,7

0,1

0,3

0,0

1,5

Finlande

1,9

1,9

0,0

0,1

0,2

1,8

Suède

2,1

1,8

0,3

0,4

0,0

1,7

Royaume-Uni

2,2

1,8

0,4

0,5

0,1

1,7

EU-27

1,8

1,8

0,0

0,1

0,1

1,7

EA-12

1,7

1,7

0,0

0,2

0,2

1,5

EU-15

1,8

1,7

0,1

0,2

0,1

1,5

Source : DG ECFIN, EPC (AWG)

Dans le contexte général dessiné par les projections démographiques d'une baisse de la population en âge de travailler compensée par une augmentation des taux d'emploi (un plus fort pourcentage de la population active serait employé) et d'une neutralisation des évolutions démographiques défavorables au niveau du nombre des heures travaillées, la croissance économique potentielle ralentirait à 1,8 % pour l'Union européenne à 15.

Les gains de productivité horaire, en ralentissement par rapport aux tendances longues, assureraient, dans le futur, l'essentiel du potentiel de croissance .

Dans la plupart des pays, l'emploi continuerait à progresser, apportant une contribution, mais affaiblie, à la croissance potentielle. Cependant, dans de rares pays (l'Allemagne au premier chef), les perspectives démographiques défavorables réduiraient le potentiel de croissance par rapport aux espérances liées aux gains de productivité du travail.

Pour la France , la croissance potentielle est estimée à 1,8 % en moyenne par an grâce à des gains de productivité horaire de 1,7 et une augmentation résiduelle de l'emploi.

La croissance sera donc, dans l'avenir, ce que seront les gains de productivité .

Sur ce point, il faut d'abord rappeler que les perspectives de long terme sont soumises à de très fortes incertitudes .

En outre, on peut relever que les projections de productivité tablent dans l'ensemble sur des gains de même ordre pour les différents pays les plus développés de l'Union européenne. Si des divergences, toujours possibles - compte tenu du maintien voire du creusement des spécificités nationales assez fortes dans la composition de l'offre productive et dans les dynamiques d'investissement notamment - devaient intervenir, les pays européens connaîtraient sans doute des évolutions encore plus contrastées de la dynamique des dépenses liées au vieillissement.

Celui-ci exerce ses effets principalement à travers l'augmentation de la part relative des retraités dans la population. Ce « rapport démographique » est appelé à se détériorer, le ratio de dépendance rapportant la population âgée de plus de 65 ans aux 15-64 ans devant passer de 25,3 % en 2008 à 39 % en 2030 et 45,2 % en 2060.

Une variante a été réalisée pour mesurer l'impact à long terme (à l'horizon 2030) d'un supplément de dépenses publiques résultant du vieillissement de la population.

Sous la condition que le supplément annuel de dépenses publiques sur la période qui atteint en moyenne 0,3 point de PIB ne soit pas financé, cette variante provoque une croissance plus élevée mais une augmentation du déficit structurel et de la dette publique. Celle-ci atteint au minimum un niveau supérieur de 19,4 points de PIB à celui du scénario central, autour de 100 points de PIB en 2030.

A un horizon plus long - 2060 -, le besoin de correction du solde structurel lié au vieillissement démographique est plus fort. Il est estimé entre 1,4 et 1,8 point de PIB pour la France selon la Commission européenne.

Pour d'autres pays, le poids du vieillissement démographique comporte plus d'exigences encore. Ainsi en va-t-il pour l'Allemagne (entre 2,1 et 3,3 points de PIB), pour la Grèce (entre 7,7 et 11,5 points de PIB), pour les Pays-Bas (entre 3,7 et 5 points de PIB)...

LA SOUTENABILITÉ DES FINANCE PUBLIQUES SELON LA COMMISSION EUROPÉENNE :
PRÉCISIONS DE MÉTHODE

Pour apprécier la soutenabilité des finances publiques, la Commission européenne recourt à deux indicateurs : le premier (S1) mesure l'écart entre la position budgétaire actuelle et celle qui permettrait de stabiliser la dette publique à 60 % du PIB en 2060 ; le second (S2) mesure l'écart entre la position budgétaire actuelle et celle qui permettrait de faire face aux dépenses futures supplémentaires sans augmentation de la dette publique initiale (cet indicateur est souvent présenté comme révélateur de la contrainte intertemporelle qui s'exerce sur les finances publiques).

Dans ces deux indicateurs, l'écart qui est mesuré porte sur le solde primaire structurel et est censé livrer une estimation de l'ampleur des rééquilibrages à entreprendre : un indicateur de X points de PIB signifie qu'il faut améliorer le solde primaire structurel de X points de PIB pour atteindre l'un ou l'autre des deux objectifs visés par chacun des indicateurs.

Les indicateurs de soutenabilité sont décomposés en plusieurs éléments :

- le premier (IBP) retrace la contribution à l'écart de soutenabilité de la situation en cours ;

- le deuxième (LTC) indique la pression découlant des dépenses supplémentaires anticipées en lien avec le vieillissement démographique ;

- enfin, un troisième élément (DR) s'ajoute pour calculer le seul indicateur (S1) 1 qui résulte de l'écart entre le niveau du solde primaire structurel actuel et celui qui permettrait d'atteindre en 2060 un niveau de dette publique de 60 points de PIB.

Pour construire ces indicateurs, un grand nombre d'hypothèses doit être envisagé. Elles correspondent aux différentes grandes variables dont leur valeur dépend : la croissance économique, le niveau de la croissance économique potentielle (ce principalement pour identifier les composantes structurelle et conjoncturelle respectivement du solde public), le niveau des taux d'intérêt (dont dépend la dynamique de « l'effet boule de neige » de la dette publique) et la trajectoire des dépenses publiques liées au vieillissement de la population.

1 Dans l'autre indicateur (S2), il n'y a pas d'objectif de dette publique autre que celui d'en éviter l'augmentation.

LES INDICATEURS DE SOUTENABILITÉ DES FINANCES PUBLIQUES
DE LA COMMISSION EUROPÉENNE

Solde primaire structurel

Variation des dépenses publiques liées à l'âge en 2060

S1

S2

2008

2009

Total

dont IBP*

DR*

LTC*

Total

dont IBP*

LTC*

Belgique

1.5

0.7

5.9

4.5

0.5

0.6

3.5

5.3

0.6

4.8

Bulgarie

1.0

1.1

3.2

-0.6

-0.7

-0.5

0.6

0.9

-0.6

1.5

République tchèque

-2.3

-2.9

6.3

5.3

3.6

-0.3

1.9

7.4

3.7

3.7

Danemark

5.6

2.8

1.0

-0.6

-1.9

-0.5

1.8

-0.2

-1.6

1.4

Allemagne

1.6

0.6

5.1

3.1

0.8

0.2

2.1

4.2

0.9

3.3

Estonie

-3.9

-0.6

-0.1

0.3

1.0

-0.6

-0.2

1.0

1.1

-0.1

Irlande

-6.4

-7.6

8.7

12.1

8.2

0.2

3.7

15.0

8.3

6.7

Grèce

-2.1

-0.9

16.0

10.8

2.4

0.7

7.7

14.1

2.6

11.5

Espagne

-2.4

-5.2

8.0

9.5

5.9

-0.1

3.6

11.8

6.1

5.7

France

-1.5

-2.7

2.1

5.5

3.8

0.4

1.4

5.6

3.8

1.8

Italie

1.7

2.0

1.6

1.9

-0.2

0.7

1.4

1.4

-0.1

1.5

Chypre

2.9

0.2

10.7

4.6

0.2

-0.3

4.7

8.8

0.5

8.3

Lettonie

-4.9

-8.1

1.3

9.4

8.8

-0.2

0.9

9.9

8.9

1.0

Lituanie

-4.5

-3.1

6.0

5.4

3.7

-0.3

2.0

7.1

3.9

3.2

Luxembourg

2.3

1.2

16.2

6.2

-0.6

-0.8

7.5

12.5

-0.4

12.9

Hongrie

-0.3

3.1

3.3

-1.1

-1.9

0.4

0.4

-0.1

-1.6

1.5

Malte

-1.6

-0.2

9.2

4.7

1.1

0.2

3.4

7.0

1.4

5.7

Pays-Bas

1.7

0.0

6.7

5.2

1.6

0.0

3.7

6.9

1.9

5.0

Autriche

0.8

-0.2

4.0

3.8

1.5

0.2

2.2

4.7

1.6

3.1

Pologne

-3.1

-3.1

-1.2

2.9

4.2

0.0

-1.2

3.2

4.4

-1.2

Portugal

-0.9

-2.4

2.8

4.7

3.4

0.3

1.0

5.5

3.7

1.9

Roumanie

-7.2

-3.7

8.5

6.9

4.1

-0.4

3.2

9.1

4.3

4.9

Slovénie

-1.3

-3.3

12.5

9.2

3.8

-0.3

5.7

12.2

3.9

8.3

Slovaquie

-3.5

-3.7

5.5

5.7

4.3

-0.3

1.6

7.4

4.5

2.9

Finlande

4.3

2.1

5.4

2.6

-0.8

-0.3

3.7

4.0

-0.5

4.5

Suède

3.4

0.9

2.4

0.5

-0.1

-0.3

0.8

1.8

0.2

1.6

Royaume-Uni

-3.3

-7.8

4.8

10.8

8.6

0.2

2.0

12.4

8.8

3.6

EU-27

-0.4

-2.0

4.4

5.4

3.1

0.2

2.0

6.5

3.3

3.2

EA

0.2

-0.9

4.8

4.8

2.1

0.3

2.4

5.8

2.3

3.5

IBP : Position budgétaire initiale

DR : Objectif de dette publique de 60 % du PIB en 2060

LTC : Dépenses publiques liées au vieillissement démographique

Source : Services de la Commission européenne

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