ANNEXE N° 7 : ÉTUDE OFCE

Observatoire français des conjonctures économiques

Perspectives de l'économie française
à l'horizon 2030

Janvier 2010

Perspectives de l'économie française à l'horizon 2030 88 ( * )

1. Conception générale de l'exercice

Cette projection de l'économie française à l'horizon 2030 a été réalisée par l'Observatoire Français des Conjonctures Economiques (OFCE) à l'aide de son modèle de simulation de l'économie française ( e-mod.fr ). Son approche est essentiellement macro-économique.

Le but de cet exercice est d'obtenir des indications quant aux scénarios possibles d'évolution des finances publiques en général et de la dette publique en particulier. Les simulations affichées pour les années 2009 et 2010 reprennent dans les grandes lignes les perspectives de prévision pour l'économie française élaborée par l'OFCE en octobre 2009 89 ( * ) , celles des années 2011-2013 tentent de coller avec les hypothèses du gouvernement figurant dans le Rapport Economique Social et Financier (RESF) du Projet de Loi de Finance (PLF). Enfin les 20 années suivantes prolongent ces dernières.

Afin de mettre à la disposition des membres du Sénat une telle « illustration », les évolutions macro-économiques suivent délibérément une vision tendancielle reposant sur des hypothèses généralement admises :

• Le scénario d'environnement international à moyen terme, qui sert de cadre à la projection de l'économie française a été élaboré à partir d'une hypothèse médiane suivant les estimations de croissance potentielle réalisée par l'OCDE ou par le FMI pour les zones hors OCDE pour les années 2011-2030.

• Le taux de change euro-dollar se stabilise à 1,40 dollar pour 1 euro. De son côté, le cours du pétrole se stabiliserait à 70 dollars le baril.

• Les prix des partenaires commerciaux de la France évolueraient de façon à stabiliser la compétitivité française à partir de 2010. La demande extérieure adressée à la France demeurerait dynamique sur l'ensemble de la période.

• Les scénarios reposent sur l'hypothèse d'une contribution nulle des variations de stocks.

• Les scénarios supposent une impulsion budgétaire neutre à partir de 2015

• En ce qui concerne la durée du travail, nous l'avons supposé inchangée à l'horizon de notre étude

Cinq scénarios pour l'économie française ont été envisagés à l'horizon 2030. Dans les trois premiers scénarios, le potentiel de croissance se situe à 2 %, niveau proche de celui observé au cours des 20 dernières années. Dans les deux derniers scénarios, il est supposé une rupture de potentiel à la baisse à respectivement 1,8 % et 1,5 %.

I.1. Le compte central : Croissance à 2,5 % et potentielle à 2 %

C'est sur la base des hypothèses du gouvernement formulées dans le RESF que nous avons élaboré notre compte central. La croissance de l'économie s'établirait un demi-point au-dessus de son potentiel de long terme (2,0 %) : nous supposons que la productivité du travail s'établit à (1,9 % en rythme annuel) et que la population active progresse d'environ 0,1 %. Nous supposons une impulsion budgétaire fortement négative au cours de la période 2011-2013 (-2,9 point de PIB sur la période), puis légèrement négative en 2014-2015 (-0,2 point de PIB) et neutre ensuite. Ce « compte central » nécessite une modification du taux d'épargne des ménages et une augmentation du taux d'investissement des entreprises. Dans ces conditions, l'output gap se refermerait en 2024. Au-delà, l'économie continuerait de croître à son rythme potentiel de 2 % (graphique 1).

1. PIB dans le scénario 1

En milliards d'euros

Sources : Comptabilités nationales, calculs et prévisions OFCE.

I.2. Scénarios 2 & 3 : Croissance potentielle à 2,0 % et rebond conjoncturel ou absence de rebond

Gardant les mêmes hypothèses que dans le scénario 1, nous avons élaboré deux scénarios alternatifs. Dans le scénario 2, nous explorons l'hypothèse d'un rebond conjoncturel fort qui permettrait de refermer plus rapidement l'output gap. La croissance serait de 3,5 % au cours de la période 2011-2014, de 2,9 % en 2015, puis de 2 % jusqu'en 2030. Dans le scénario 3, nous explorons l'hypothèse inverse, autrement dit celle de l'absence de rebond : dès 2011, la croissance s'établirait sur son potentiel en ne nécessitant aucune modification ni du taux d'épargne ni du taux d'investissement des entreprises.

2. PIB dans les scénarios 1-3

En milliards d'euros

Sources : Comptabilités nationales, calculs et prévisions OFCE.

I.3. Deux scénarios de ralentissement de la croissance potentielle

Dans les scénarios 4 et 5, nous supposons un rythme de progression de la productivité plus faible que celui retenu dans le compte central. Dans le scénario 4, celle-ci s'établirait à 1,7 % alors que dans le scénario 5, elle s'élèverait à 1,4 %. Comme les salaires progressent au même rythme que la productivité dans les deux scénarios, l'écart d'activité par rapport à la croissance potentielle ne demande pas un effort plus important aux agents privés : le taux d'épargne ainsi que le taux d'investissement sont identiques dans les deux scénarios tant que l'output gap ne s'est pas refermé. En revanche, contrairement au scénario central, l'output gap se refermerait plus rapidement dans ces deux scénarios, impliquant un effort moins important des agents privés au final.

3. PIB dans les scénarios 4 & 5

En milliards d'euros

Sources : Comptabilités nationales, calculs et prévisions OFCE.

II. Principaux résultats pour les années 2009-2010

La projection prolonge à l'horizon du moyen terme les prévisions à court terme (2009-2010) actualisées que l'OFCE vient de présenter 90 ( * ) .

II.2. En France

Après quatre trimestres consécutifs de recul, le PIB français a retrouvé le chemin de la hausse au deuxième trimestre 2009 (0,3 %). Cela n'évitera pas à l'économie française d'enregistrer en 2009 sa plus profonde récession depuis la Grande Dépression des années 1930 (tableau 1, graphique 6). Les effets de la crise financière sur l'économie réelle se sont brutalement matérialisés au quatrième trimestre 2008 avec un effondrement spectaculaire (-6,7 %) de la production industrielle (IPI) et du PIB (-1,4 %). Sur sa lancée de la fin 2008, l'économie française a continué de se contracter fortement au cours du premier trimestre 2009 (-7,2 % pour l'IPI et -1,4 % pour le PIB), subissant la conjonction de chocs économiques violents, concomitants et mondiaux qui se sont succédé depuis l'été 2007.

Tableau 1. Les périodes de récession en France

En %, moyenne annuelle

1921

1927

1930

1931

1932

1934

1935

1938

1975

1993

2009

PIB

-4.4

-2.0

-2.6

-3.9

-8.8

-3.4

-2.5

-2.5

-1.0

-0.9

-2.1

PIB par tête

-5.0

-2.1

-3.5

-4.8

-8.8

-3.5

-2.5

-2.5

-1.4

-1.3

-2.8

Sources : INSEE, CEPII (Pierre Villa), calculs et prévisions OFCE.

L'année 2009 porte les séquelles des crises financière et immobilière

Les crises financière et immobilière et leurs répercussions sur l'environnement économique international affectent de façon très concrète les entreprises et les ménages français en 2009.

Le retournement simultané des marchés financiers et immobilier a un impact direct sur la richesse nette des ménages. Alors que cette dernière n'a cessé de progresser au cours des dix dernières années, sous l'effet conjugué de la hausse des marchés financiers et surtout des prix de l'immobilier, atteignant près de 10 fois le revenu disponible brut (RdB) des ménages en 2007, la perte de richesse nette enregistrée en 2008 (graphique) se poursuit en 2009 et aura un impact sur leur comportement d'épargne.

Jusqu'alors épargné par le retournement, l'immobilier français a emboîté le pas de ses homologues anglo-saxon et espagnol en fin d'année 2008. Ce retournement a fait chuter l'investissement des ménages au cours des cinq derniers trimestres, amputant la croissance française de 0,6 point.

Par ailleurs, la forte hausse du risque de défaut a conforté les banques dans leur stratégie de durcissement des conditions d'accès au crédit. Cette stratégie adoptée dans un contexte de dégradation des profits, d'un surplus record de capacités de production et d'un fort endettement des entreprises, a incité ces dernières à freiner leurs investissements, contribuant très négativement à la croissance (-1,1 point depuis le début de la crise).

Ces mécanismes ayant également joué dans les autres pays occidentaux et notamment européens, leurs économies et leurs demandes adressées à la France ont aussi ralenti.

Enfin, face à la chute de leur demande, les entreprises ont entamé un fort mouvement de déstockage en fin d'année 2008 qui est venu amplifier la récession en amputant la croissance française de 1,8 point de PIB depuis le début de la crise.

Pourtant, des signes positifs apparaissent...

Après quatre trimestres consécutifs de recul, le PIB français a retrouvé le chemin de la hausse au deuxième trimestre 2009 (0,3 %). Ce résultat n'est pas le seul signe d'une amélioration du climat économique. Depuis plusieurs mois, un certain nombre d'indicateurs laissent entrevoir une amélioration du climat économique :

1. En premier lieu, une reprise de la croissance dans les pays émergents s'est engagée. Le retour à une croissance mondiale en 2010 proche de 3 % est envisagé, permettant un redressement de la demande étrangère adressée à la France après son effondrement sans précédent observé en 2008 (graphique 4).

4. Environnement international

En %, glissement annuel

Sources : Comptabilités nationales, calculs et prévisions OFCE.

2. Une baisse du coût de financement de l'économie semble s'opérer ces derniers mois. Depuis la faillite de Lehman Brothers, et malgré les baisses de taux répétées de la Banque centrale européenne (BCE), le coût du crédit pour les entreprises a très fortement augmenté au cours de l'année 2008. Les deux dernières enquêtes de la Banque de France font cependant ressortir une baisse significative du coût du crédit pour les entreprises depuis le début de l'année 2009 et ce quelles que soient les catégories de crédits considérées (-3,1 points pour le taux d'escompte,
-2,6 pour les découverts, -2,4 pour les crédits à moyen et long termes). De façon similaire, la prime de risque mesurée par le spread indique également un retournement non négligeable depuis le début de l'année.

3. A l'image de ce que l'on observe dans de nombreux pays, les enquêtes de conjoncture indiquent une amélioration du moral des agents économiques privés (graphique 5) : la situation des ménages s'améliore, comme l'illustre le lent redressement de leur moral, et les perspectives de production des chefs d'entreprise ont cessé de plonger. Ces enquêtes restent certes encore à des niveaux très dégradés et inobservés au cours des précédentes récessions, mais n'interdisent pas un rebond de l'activité économique, tout au moins à court terme, à l'instar de celui observé sur les marchés des actions.

L'indicateur avancé de l'OFCE, qui exploite l'information contenue dans les enquêtes auprès de l'industrie, des services, du bâtiment et des ménages, suggère d'ailleurs que l'économie française devrait connaître une croissance de 0,6 % au troisième trimestre 2009.

5. Evolution de la confiance...

Solde d'opinion, Centré réduit

Source : INSEE.

4. Cela est conforme avec un « rebond par les stocks » qui semble s'amorcer en France. A l'instar de leurs homologues étrangers, les chefs d'entreprises français, surpris par la violence inédite du ralentissement de la demande, ont vu leurs stocks s'accumuler massivement début 2008. Depuis, ils puisent fortement dans ces derniers, amplifiant par là-même l'arrêt de la production. Après quatre trimestres de fort déstockage, les chefs d'entreprises jugent - d'après la dernière enquête mensuelle dans l'industrie datant de septembre -, que leurs stocks sont revenus à un niveau normal. La forte baisse du ratio stocks sur ventes corrobore l'idée selon laquelle le fort déstockage semble être achevé. Cela devrait permettre à la production de repartir de façon mécanique afin de répondre à la demande, aussi maigre soit elle, sans que cela n'indique toutefois un redémarrage durable de l'activité industrielle. Au cours du prochain semestre, les variations de stocks devraient contribuer pour près de 1,5 point à la croissance du PIB.

... mais seront insuffisants pour pérenniser la reprise économique

Mais cette reprise pourrait ne constituer qu'une parenthèse : au-delà de cet épisode technique, de nombreuses incertitudes demeurent, annihilant tout espoir de relais par la demande.

L'activité observée au deuxième trimestre 2009 a été portée par la consommation et la contribution des exportations. Or ces deux derniers éléments devraient s'affaiblir au cours des prochains trimestres.

Une consommation moins dynamique dans les trimestres à venir...

La consommation des ménages a été stimulée en 2009 à la fois par la baisse des prix mais aussi par les effets du plan de relance et notamment de la prime à la casse. Or ces deux facteurs vont aller en s'amenuisant à l'horizon de notre prévision.

A l'instar de la « Balladurette » en 1994 et de la « Juppette » en 1996, la prime à la casse mise en place depuis le début de l'année 2009 en France a permis de soutenir le marché automobile français et par là-même la consommation des ménages. Cependant cette prime ne durera pas indéfiniment. La suppression progressive du dispositif en 2010 évitera éventuellement une forte baisse des ventes comme celles entrevues au troisième trimestre 1995 (-22 %) et au quatrième trimestre 1996 (-25 %) mais ne les empêchera pas. En effet, indépendamment de l'échéance des dispositifs, cette mesure ayant permis à de nombreux ménages de profiter d'un effet d'aubaine et d'anticiper leur projet d'achat, son impact s'épuiserait de lui-même 91 ( * ) .

Par conséquent, les ventes et les exportations de l'industrie automobile seraient sans doute encore stimulées par les plans de soutien au secteur au troisième trimestre 2009 mais accuseraient ensuite le contrecoup, ce qui devrait creuser le profil des exportations en début d'année 2010.

... pénalisée par le rebond de l'inflation...

De son côté, depuis la mi-2008, l'inflation connaît une décrue spectaculaire liée au contre-choc pétrolier et à des produits alimentaires rejoignant progressivement un rythme de hausse plus conforme à leur évolution de long terme. Mais sous l'hypothèse que le prix du pétrole confirme sa tendance haussière pour s'établir à 80 dollars le baril fin 2010 (plus de 60 euros/baril, soit une hausse de 40 % en moyenne sur un an), l'inflation devrait rebondir, désactivant le principal soutien du pouvoir d'achat des ménages en 2009. En moyenne annuelle, l'inflation devrait s'établir à 1,5 % en 2010 contre 0,2 % en 2009 et 2,8 % en 2008.

La fin de la désinflation sera couplée à de fortes destructions d'emplois dans le secteur marchand et à un effondrement de la valeur du patrimoine net des ménages.

... et d'un marché du travail qui continue de se dégrader

Sur le marché du travail, dans la foulée du quatrième trimestre 2008, les pertes d'emplois dans le secteur marchand s'accentueraient en 2009 en lien avec la forte contraction prévue de l'activité. Nous envisageons la destruction de près de 700 000 emplois marchands d'ici la fin 2010 (tableau 2).

Tableau 2. Evolution du marché du travail en France

Variations annuelles, en fin d'année (en milliers)

2005

2006

2007

2008

2009

2010

Population active observée

233

135

104

76

138

51

Emploi total

176

293

338

-27

-350

-259

- Emplois marchands

101

200

263

-88

-421

-282

- Emplois aidés non marchands

-40

38

-24

-77

9

3

- Autres emplois non marchands

115

55

99

138

62

20

Chômage

57

-158

-234

103

487

309

Sources : INSEE ; prévisions OFCE 2009 et 2010, e-mod.fr .

Dans ce contexte de forte dégradation du marché du travail, la politique de l'emploi, par l'intermédiaire du traitement social, ne jouera pas son rôle de « stabilisateur » du chômage. Après avoir amplifié la hausse du chômage en 2008, les nouveaux emplois aidés dans le secteur non-marchand permettront tout juste de revenir au niveau observé en début d'année 2008 (graphique 6). Le recul conjoncturel de la population active sera finalement le principal amortisseur du chômage. Cela ne sera toutefois pas suffisant et la hausse du chômage devrait atteindre près de 800 000 personnes en deux ans (2009-2010), soit la plus forte progression observée au cours des 25 dernières années.

6. Emplois aidés dans le secteur non-marchand et chômage

En milliers

Source : INSEE.

Le retournement constaté sur les marchés financier et immobilier a impacté significativement la richesse nette des ménages en 2008. L'hypothèse d'un retour à la situation antérieure étant exclu à l'horizon de notre prévision, nous envisageons une poursuite de cette correction - de près de 135 points de RdB 92 ( * ) - de la richesse nette des ménages en 2009 et 2010 (graphique 7) qui passerait de 9,5 fois le montant du RdB à un peu plus de 8 fois. Cette forte destruction de valeur du patrimoine des ménages aura une incidence sur leur comportement d'épargne et les incitera à poursuivre leur désendettement.

7.  Evolution de la richesse nette des ménages

En % du RdB

Note : La richesse financière nette des ménages est ici corrigée de la richesse nette non affectée des entreprises.

Sources : Comptes nationaux, calculs OFCE.

Ainsi, l'ampleur des répercussions des crises financière et immobilière sur l'économie réelle réduira le pouvoir d'achat des ménages dépourvus d'emploi et incitera les autres à épargner davantage.

Tableau 3. Les déterminants des variations du taux d'épargne en France

2002-2008

2009 *

2010 *

-1.5 pt

1.1 pt

0.3 pt

Ecart critique (g - r) **

0.1 pt

0.2 pt

0.0 pt

Effet richesse immobilière

-1.6 pt

0.4 pt

0.1 pt

Variation du chômage

-0.1 pt

0.4 pt

0.2 pt

Mesures Sarkozy 93 ( * )

-0.1 pt

-

-

Réforme fiscale

0.3 pt

-

-

* Prévisions OFCE

** L'écart critique est la différence entre le taux de croissance du revenu des ménages (g) et le taux d'intérêt à long terme (r). Cet écart résume la capacité des ménages à emprunter.

Sources : Calculs OFCE, e-mod.fr

Après avoir fortement baissé entre 2002 et 2008, le taux d'épargne devrait augmenter respectivement de 1,1 et 0,3 point en 2009 et 2010, bridant alors le dernier moteur de croissance (tableau 3). Le taux d'épargne devrait retrouver son niveau de 2002 à l'horizon de notre prévision : il s'établirait alors à 16,8 %, niveau très significativement supérieur à celui des vingt dernières années (15,0 %). Selon ces hypothèses, la consommation des ménages ne devrait donc pas être un soutien vigoureux à l'activité au cours des prochains trimestres. La croissance de la consommation atteindrait 0,5 % en 2009 et 0,6 % en 2010 après 0,9 % en 2008, rythme peu soutenu et très inférieur à celui observé entre 1998 et 2000 (3,4 %) et au cours des dix dernières années (2,6 %).

La contribution extérieure sera moins favorable

Si, comme nous l'avons mentionné précédemment, la demande adressée à la France devait profiter, dans les trimestres à venir, d'un regain de la croissance mondiale, cela ne permettrait toutefois pas au commerce extérieur français de répéter la performance enregistrée au deuxième trimestre 2009. En contribuant pour 0,8 point à la croissance, les échanges extérieurs ont été le principal moteur de la sortie de récession de l'économie française.

Deux bémols doivent néanmoins être apportés à ce bon résultat : en premier lieu, cette forte contribution est davantage due à la forte chute des importations (-2,1 %) plutôt qu'à une forte reprise des exportations (0,7 %). Par ailleurs, 80 % de la hausse de ces dernières ont été stimulées par les ventes d'automobiles, notamment en Allemagne, en Italie et en Espagne, pays qui ont mis en place une prime à la casse. Forts de leurs petits modèles à faible consommation, les constructeurs français ont fortement vendus cette gamme. Malheureusement, ces programmes se sont soit brutalement arrêtés (Allemagne, Etats-Unis), soit s'estomperont dans les trimestres à venir, privant les exportations françaises d'un soutien de poids.

Stimulée à nouveau par la demande mondiale mais privée des mesures de soutien à l'automobile, la question de la compétitivité des exportations retrouverait une place centrale dans le diagnostic conjoncturel. La forte appréciation récente de l'euro face au dollar ne devrait pas se poursuivre et le taux de change devrait se fixer progressivement à 1,25 dollar pour un euro fin 2010. Mais compte tenu du délai de transmission du taux de change à l'économie réelle, les bénéfices de cette baisse anticipée de l'euro ne se matérialiseront qu'en fin d'année 2010.

L'année 2009 portera les stigmates du fort enlisement dans la crise qui s'est matérialisé par un effondrement des échanges en début d'année. En moyenne annuelle, les exportations et les importations chuteront de respectivement -10,3 % et -8,5 %, amputant la croissance de plus de 1 point. Pour 2010, nous prévoyons une contribution nulle des échanges extérieurs, avec une reprise de près de 5 % des importations et des exportations.

Encadré : Les primes à la casse

Prévue fin 2008 dans le plan de relance budgétaire, le gouvernement a intégré un dispositif de prime à la casse dans le Pacte automobile lancé en février 2009 et devant consacré plus de 9 milliards d'euros pour venir en aide aux constructeurs automobiles français 94 ( * ) . Le dispositif prévoit le versement d'une prime de 1 000 euros pour tout achat, avant le 31/12/2009 d'un véhicule neuf émettant mois de 160 gCO2/km véhicule en contrepartie de la mise à la casse des véhicules de plus de 10 ans. A l'instar des précédentes primes, mises en place sous les gouvernements Balladur puis Juppé en 1994 et 1996, la mise en place du dispositif à compter du mois de mars 2009 a permis de relancer les immatriculations de voiture en France (graphique E1) dès le mois mars et surtout à partir de mai. Cependant, même si le gouvernement envisage une sortie progressive avec le maintien d'une prime de 700 euros après le 1 er janvier 2010 puis de 400 euros à partir du 1er juillet 2010, il est probable que les constructeurs subissent le contrecoup de ce dispositif. En effet, indépendamment de l'échéance de la prime, on peut imaginer que les mesures s'épuiseront d'elles-mêmes puisqu'elles ont permis à de nombreux ménages de profiter d'un effet d'aubaine et d'anticiper leur projet. Au fur et à mesure que le stock de voitures éligibles au dispositif est épuisé, son renouvellement est sans doute insuffisant pour continuer à doper significativement la demande. De fait, sur les précédentes expériences, l'évolution en moyenne mobile des immatriculations ne fait pas apparaître un effet très positif des primes à la casse. La prime Fillon aura soutenu un temps les constructeurs automobiles mais ne devrait pas à elle seule permettre une relance durable de l'industrie automobile.

Cependant, comparativement aux expériences précédentes du milieu des années 1990, plusieurs pays européens ont également adopté des dispositifs similaires afin de soutenir la consommation et/ou les constructeurs automobiles domestiques. Sur le principe, les dispositifs se ressemblent et se distinguent soit par le montant de la prime allouée, soit par la durée du dispositif, déjà épuisé par exemple en Allemagne et prévue jusqu'en mars 2010 en Italie (tableau). Dans tous ces pays, les primes à la casse ont permis d'enrayer le déclin des ventes de voitures. Elles ont de plus exercé un effet d'entraînement sur les autres pays et notamment sur la France dont les constructeurs ont bénéficié d'une demande accrue, expliquant alors le rebond observé des exportations de l'industrie automobile au deuxième trimestre 2008. Néanmoins, de même que pour la consommation, l'épuisement progressif des dispositifs, entraînerait un fléchissement des exportations de voitures françaises. Il faut alors espérer que le second volet du Pacte, tourné vers le financement, des constructeurs qui s'engageront vers la production de véhicules propres, portera ses fruits et répondra à une attente croissante des consommateurs européens.

E1. Immatriculations et prime à la casse sous ...

En milliers

Source : INSEE.

Tableau E1 : Prime à la casse et nombre de véhicules de tourisme exportés vers les 5 principaux clients

Taux de croissance trimestriel en %

2008 t4

2009 t1

2009 t2

Primes à la casse

Entrée en vigueur

Montant en €

Date d'arrêt

France

Janvier 2009

1 000

Décembre 2009*

Allemagne

-11,0

16,2

51,1

Janvier 2009

2 500

Septembre 2009

Espagne

-33,1

-6,3

59,0

Juin 2009

2 000

Mai 2010

Italie

25,1

2,3

11,6

Février 2009

1 500

Mars 2010

Royaume-Uni

-53,7

50,5

-3,3

Mai 2009

2 250

Février 2010

Belgique

-16,5

1,3

-14,6

Non

* Une sortie progressive de ce dispositif est envisagée. La prime s'élèverait à 700 euros à compter du 1 er janvier 2010 et à 400 euros à partir du 1 er juillet 2010.

Sources : Douanes, Données nationales.

Un octroi de crédit qui se resserre...

Le crédit ne constituera pas non plus un relais efficace pour pérenniser la croissance. Si dans notre scénario central la crise financière ne dégénère pas en crise systémique ni même en credit crunch, son impact sur l'activité française sera primordial en 2009 et 2010.

La grande lenteur de la normalisation du marché interbancaire, conjuguée à une hausse du risque de défaut, conforte les banques dans leur stratégie de durcissement des conditions d'accès au crédit. Cette stratégie adoptée dans un contexte de dégradation des profits, d'un surplus record de capacités de production et d'un fort endettement des entreprises, devrait inciter ces dernières à freiner leurs investissements.

... incitant à la poursuite du désendettement des agents privés

Le surplus de capacités de production se traduira par un report ou une annulation massive des projets d'investissement.

8. Taux d'investissement* et d'autofinancement** des SNF

En %, mm4 En %, mm4

* Investissement des SNF / Valeur ajoutée des SNF

** Epargne des SNF / Investissement des SNF

Sources : INSEE, comptes trimestriels, OFCE, e-mod.fr de 2009 à 2010.

La formation brute de capital fixe (FBCF) des sociétés non financières (SNF) devrait baisser de près de 12 % au cours de la période 2009-2010, après avoir augmenté de 7,3 % en 2007 et de 2,4 % en 2008, recul trois fois supérieur à celui observé à la suite de l'éclatement de la bulle Internet au début des années 2000 (graphique 8). Cette baisse de l'investissement, corolaire du désendettement, permettra une remontée du taux d'autofinancement des entreprises de près de 20 points à l'horizon de notre prévision (graphique 8).

Le retournement de l'immobilier français, entamé en fin d'année 2008, devrait se poursuivre. Le prix de l'immobilier dans l'hexagone connaîtrait une correction significative d'ici à la fin 2010 (-17 %), permettant aux rendements locatifs de combler l'écart enregistré depuis 2006 avec les rendements obligataires. Ce retournement ferait baisser l'investissement des ménages de -7,9 % en 2009 et de -4,5 % en 2010.

Les politiques économiques seront moins accommodantes

S'il est probable, comme nous l'envisageons dans notre scénario, que la politique de taux de la BCE demeure accommodante tant que la solidité de la reprise économique en europe n'est pas retrouvée, l'impulsion budgétaire fortement expansionniste en 2009 (1,8 point de PIB) ferait place à une impulsion légèrement négative en 2010 (-0,4 point de PIB).

9. Evolutions comparées du PIB par tête pendant les crises...

Indice 100 en t-5

Source : Comptabilité nationale, P. Villa, calculs et prévisions OFCE.

Au total, l'économie française en 2009 devrait connaître sa plus forte récession depuis les années 1930 (-2,1 % en moyenne annuelle, tableau 1).

Au cours de l'année 2010, l'activité devrait croître de nouveau (0,8 % en moyenne annuelle) mais à un rythme très faible, insuffisant pour parler de reprise (graphique 9).

S'établissant à un niveau très inférieur à son potentiel (1,6 %), la croissance attendue non seulement ne permettra pas à l'économie française de combler le retard de production accumulé depuis 2008, mais au contraire l'accentuera à l'horizon 2010 (graphique 10).

10. Ecart de production en France

Ecart en % entre la production effective et la production potentielle

Sources : INSEE, comptes trimestriels, OFCE, e-mod.fr de 2009 à 2010.

Chômage élevé et diminution de la marge de manoeuvre de l'Etat

Le taux de chômage poursuivra sa hausse entamée et atteindra 9,5 % fin 2009 et 10,6 % fin 2010, contre 7,8 % fin 2008. De son côté, le déficit public devrait s'établir respectivement à 8,3 % et 8,7 % en 2009 et 2010 portant la dette publique à 78,2 % du PIB en 2009 et 84,4 % en 2010 contre en 68,1 % en 2008 (tableau 4).

Tableau 4. Résumé de la prévision pour 2009 et 2010

En %, moyenne annuelle

2006

2007

2008

2009

2010

Taux de croissance du PIB

2.4

2.3

0.3

-2.1

0.8

Importations

5.9

5.4

0.6

-8.5

4.9

Consommation des ménages

2.6

2.4

0.9

0.5

0.6

Consommation des administrations

1.3

1.5

1.1

1.5

1.5

Investissement total

4.4

6.5

0.4

-6.6

-3.4

Exportations

5.0

2.5

-0.6

-10.3

5.3

Contribution à la croissance

Demande intérieure hors stocks

2.7

3.0

0.9

-0.8

0.0

Variations de stocks

0.0

0.2

-0.1

-1.1

0.8

Solde extérieur

-0.4

-0.9

-0.4

-0.3

0.0

Taux de croissance du PIB de la zone euro

3.0

2.7

0.7

-3.8

0.8

Autres indicateurs

Inflation (IPC)

1.7

1.5

2.8

0.2

1.5

Taux d'épargne (en % du RdB)

15.1

15.8

15.6

16.4

16.6

Taux de chômage

8.8

8.0

7.4

9.1

10.2

Solde public (en point de PIB)

-2.4

-2.7

-3.4

-8.3

-8.7

Sources : INSEE, comptes trimestriels ; OFCE, prévision e-mod.fr pour 2009 et 2010.

Nos prévisions pour l'économie française à l'horizon 2010 seraient toutefois légèrement moins négatives que celles envisagées pour ses principaux partenaires (tableaux 4 et 5 et graphique 8).

La France a mieux résisté que ses principaux partenaires européens

La période qui a précédé la crise (2006-2008) se caractérise par des performances françaises inférieures, pour la première fois depuis la mise en place de la monnaie unique, à celles enregistrées dans le reste de la zone euro (tableau 5). Cette meilleure performance de nos partenaires européens s'explique pour une grande partie par la stratégie allemande de désinflation compétitive engagée depuis le début des années 2000 95 ( * ) . En augmentant la taxation des biens importés et en améliorant la compétitivité-coûts des entreprises allemandes, cette politique non coopérative, s'apparente à une dévaluation réelle qui a pesé sur l'ensemble des économies européennes. Elle vise au renforcement des gains de parts de marché de l'Allemagne au détriment des autres grands pays européens et notamment de la France. Cette politique non coopérative a coûté plus d'1 point de croissance à l'économie française au cours de cette période (graphique 11).

11. Evolution du PIB par tête en France et chez ses partenaires européens

En PPA 2005

Sources : eurostat, INSEE, comptes trimestriels, prévisions OFCE à partir du troisième trimestre 2009.

Mais depuis le début de la crise, l'économie française a mieux résisté que ses principaux partenaires. Alors que la richesse par tête en parité de pouvoir d'achat a baissé de 4 % en France, celle-ci a connu une chute de plus de 6 % en moyenne dans les autres pays de la zone euro (6,1 % en Allemagne, 7,3 % en Italie, 5,4 % en Espagne, tableau 5) 96 ( * ) .

Une moindre exposition extérieure, des stabilisateurs automatiques plus développés, des agents privés moins endettés, des effets de richesses financière et immobilière moins négatifs ainsi qu'un marché du travail plus protecteur expliquent en grande partie la meilleure résistance ainsi que des perspectives d'activité moins dégradées en France que chez ses principaux partenaires européens (tableau 5) 97 ( * ) .

Tableau 5. Pourquoi la France résiste-t-elle mieux que ses partenaires ?

All

Ita

Esp

RU

EU

Jap

Exposition extérieure

----

--

-

0

++

---

Dépenses sociales

--

--

-

--

--

--

Plan de relance

+

-

++

+

++++

++

Bulle immobilière

+

0

--

--

--

0

Effet de richesse financière

0

0

0

--

---

-

Marché du travail

+

0

--

0

-

0

Différentiel d' Ouput gap avec la France

2008-2009t2

-2,4

-2,7

-1,3

-2,5

-0,8

-3,7

2008-2010

-0,9

-2,6

-2,1

-2,3

0,5

-2,1

Lecture du tableau : Un signe `-` (respectivement `+') indique que ce critère a un impact plus (respectivement `moins') récessif dans le pays considéré qu'en France.

Sources : eurostat, OCDE, comptes nationaux, calculs et prévisions OFCE.

III. Présentation des résultats macro-économiques à moyen terme (2011-2030)

III.1. Le scénario central

L'évolution du PIB et de ses principales composantes est décrite dans le tableau 6 ci-dessous :

6 - Evolution du PIB et de ses principales composantes 2009-2030

En %

2009

2010

2011

2012

2013

2014-2024

2025-2030

1987-1997

1997-2007

1997-20002

PIB en volume

-2.1

0.8

2.5

2.5

2.5

2.5

2.0

1.9

2.3

3.5

Importations

-8.4

4.9

4.1

4.1

4.1

4.1

4.1

4.5

6.1

10.3

Consommation des ménages

0.5

0.6

2.5

2.4

2.4

2.3

1.8

1.3

2.9

3.5

FBCF des SNF-EI

-8.0

-4.6

5.5

5.4

5.4

4.6

2.2

1.5

4.7

8.6

Exportations

-10.3

5.3

4.1

4.1

4.1

4.1

4.1

6.5

4.1

8.2

Contributions

Demande intérieure hors stocks

-0.8

0.0

2.5

2.5

2.5

2.5

2.0

1.7

3.2

3.6

Solde extérieur

-0.3

0.0

0.0

0.0

0.0

0.0

0.0

0.4

-0.6

-0.4

Variations de stocks

-1.1

0.8

0.0

0.0

0.0

0.0

0.0

-0.2

-0.3

0.3

Indice des prix consommation

0.4

1.6

1.9

1.9

1.9

1.9

1.9

2.5

1.6

1.0

Salaire horaire marchand

2.2

0.7

1.9

1.9

1.9

1.9

1.9

1.2

2.3

2.5

Productivité par tête

-0.6

2.8

1.9

1.9

1.9

1.9

1.9

1.6

1.1

1.3

Effectifs totaux (en milliers)

-285

-275

147

155

150

150

25

77

283

484

Effectifs salariés (en milliers)

-283

-246

90

95

100

98

16

161

285

509

Effectifs totaux (en %)

-1.1

-1.1

0.6

0.6

0.6

0.6

0.1

0.3

1.2

2.1

Taux d'investissement des SNF

18.5

17.3

17.6

18.0

18.3

19.5

20.4

17.4

17.9

17.3

Taux d'épargne des ménages

16.5

16.7

16.3

15.9

15.5

14.5

13.6

14.2

15.6

15.4

Taux de chômage

9.1

10.3

9.8

9.3

8.8

6.5

4.4

9.4

8.9

9.9

Déficit public (en % du PIB)

-8.3

-8.7

Impulsion budgétaire

Dette public (en % du PIB)

78.2

84.4

Sources : INSEE, prévisions OFCE.

Au cours de la période 2011-2013, nous reprenons les hypothèses fixées par le gouvernement d'une croissance du PIB à 2,5 %, soit un demi-point au-dessus de son potentiel de long terme (2,0 %) : nous supposons que la productivité du travail s'établit à (1,9 % en rythme annuel) et que la population active progressant d'environ 0,1 %. Nous reprenons l'hypothèse d'une impulsion budgétaire fortement négative au cours de la période 2011-2013 (-2,9 points de PIB sur la période). Cela revient à considérer une croissance spontanée du PIB à 3,4 % en moyenne annuelle au cours de cette période. Ce dynamisme ne peut être obtenu que par une baisse conséquente du taux d'épargne des ménages (-1,1 point de RdB) et d'une hausse de même ampleur du taux d'investissement des entreprises (1,1 % de la VA, graphique 12)).

12. Evolution du taux d'épargne des ménages et du taux d'investissement des SNF

En % de la VA En % du RdB

Sources : INSEE, prévisions OFCE.

A partir de 2014, l'impulsion redevient neutre mais le supplément de croissance par rapport à son potentiel nécessite encore un effort de la part des agents privés. Dans ces conditions, en 2024, l'output gap est refermé, le taux de chômage se situe à son niveau de plein emploi (graphique 13) et la croissance se maintient à son rythme potentiel (2 %) ne nécessitant plus de modification du taux d'épargne et du taux d'investissement qui se stabilisent respectivement à 13,6 % du RdB et 20,4 % de la VA des SNF, soit une baisse de 3,1 points par rapport aux niveaux de 2010 (graphique 12).

13. Evolution du taux de chômage au sens du BIT

En % de la population active

Sources : INSEE, prévisions OFCE.

Le tableau 6 reprend pour référence les moyennes constatées sur les cycles précédents. On constate que le scénario de croissance à moyen terme est identique à celui observé au cours de la période récente, celle qui prévalait durant les années 1997-2007 (2,3 %, tableaux 6 et 7).

III.2. Les scénarios alternatifs

Comme nous l'avons signalé en introduction, quatre scénarios alternatifs ont été étudiés. Les différentes caractéristiques sont résumées dans le tableau 7 et par les graphiques 14-17.

Dans le scénario 2, nous explorons l'hypothèse d'un rebond conjoncturel fort qui permettrait de refermer plus rapidement l'output gap. La croissance serait de 3,5 % au cours de la période 2011-2014, de 2,9 % en 2015, puis de 2 % jusqu'en 2030.

Dans le scénario 3, nous explorons l'hypothèse inverse, autrement dit celle de l'absence de rebond : dès 2011, la croissance s'établirait sur son potentiel en ne nécessitant aucune modification ni du taux d'épargne ni du taux d'investissement des entreprises.

7 - Principales caractéristiques des différents scénarios

Sc. 1

Sc. 2

Sc. 3

Sc. 4

Sc. 5

Taux de croissance potentielle

2 %

2 %

2 %

1.8 %

1.5 %

Taux de croissance du PIB

2011-2013

2.5 %

3.5 %

2.0 %

2.5 %

2.5 %

2011-2030

2.3 %

2.3 %

2.0 %

2.2 %

1.8 %

Année de fermeture de l'output gap

2024

2015

-

2020

2017

Baisse du taux d'épargne

-3.1 points

-3.1 points

-0.4 points

-2.3 points

-1.7 point

Hausse du taux d'investissement

3.1 points

3.1 points

0.4 points

2.3 points

1.7 point

Taux de chômage en 2030

4,4

4,4

10.3

4.4

4.4

Sources : INSEE, prévisions OFCE.

Dans les scénarios 4 et 5, nous supposons un rythme de progression de la productivité plus faible que celui retenu dans le compte central. Dans le scénario 4, celle-ci s'établirait à 1,7 % alors que dans le scénario 5, elle s'élèverait à 1,4 %. Comme les salaires progressent au même rythme que la productivité dans les deux scénarios, l'écart d'activité par rapport à la croissance potentielle ne demande pas un effort plus important aux agents privés : le taux d'épargne ainsi que le taux d'investissement sont identiques dans les deux scénarios tant que l'output gap ne s'est pas refermé. En revanche, contrairement au scénario central, l'output gap se refermerait plus rapidement dans ces deux scénarios, impliquant un effort moins important des agents privés au final.

14. PIB dans les différents scénarios

En milliards d'euros

Sources : Comptabilités nationales, calculs et prévisions OFCE.

15. Taux d'épargne des ménages dans les différents scénarios

En % du RdB

Sources : Comptabilités nationales, calculs et prévisions OFCE.

16. Taux d'investissement des SNF dans les différents scénarios

En % de la VA

Sources : Comptabilités nationales, calculs et prévisions OFCE.

17. Taux de chômage dans les différents scénarios

En % de la population active

Sources : Comptabilités nationales, calculs et prévisions OFCE.

IV. Tendances des finances publiques

IV.1. Les finances publiques à court terme

En France, la violente chute de l'activité est la principale raison de la hausse spectaculaire des déficits publics qui après avoir été de 3,4 % du PIB en 2008 devrait atteindre 8,3 % du PIB en 2009 et 8,7 % du PIB en 2010 (tableau 8) : elle implique des moins-values fiscales, une forte contraction de certaines assiettes fiscales (notamment celles utilisées pour le calcul de l'impôt sur les bénéfices des sociétés (IS)) ainsi que l'accélération des prestations chômage. Pour la seule année 2009, la contribution des stabilisateurs automatiques au creusement du déficit serait de 3,6 points de PIB. Avec les mesures prises dans le cadre du plan de relance, ce sont près de 5 points de PIB de dégradation du déficit public pour soutenir l'activité en 2009.

La dégradation conjoncturelle explique plus de 80 % de la hausse du déficit public entre 2008 et 2010. Au total, les stabilisateurs automatiques contribuent à creuser le déficit public de 4,4 point de PIB en deux ans (tableau 9) (3,6 points du PIB en 2009 et 0,8 en 2010) évitant à l'économie française de traverser une récession plus profonde. Le plan de relance, dont près de trois quarts des mesures disparaîtront en 2010, ne contribue qu'à hauteur de 0,3 point de PIB à la hausse du déficit public entre 2008 et 2010. Le reste s'explique essentiellement par les nouvelles mesures prises par le gouvernement en dehors du plan de relance et notamment la réforme de la taxe professionnelle qui contribue à hauteur de 0,6 point de PIB à la hausse du déficit en 2010, même si son coût pour les finances publiques est plus élevé en 2010 qu'à moyen terme. Dans ces conditions exceptionnelles, la dépense publique atteindrait un plus haut historique à 55,9 points de PIB en 2010 (soit 3,2 points de plus qu'en 2008) et les taux de prélèvements obligatoires baisseraient à 40,7 % du PIB (soit 2,2 points de PIB de moins qu'en 2008), le ramenant au niveau du début des années 1980. La dette publique brute atteindrait un niveau sans précédent : après 67,4 % du PIB en 2008, elle atteindrait 77,1 % en 2009 et 84,3 % en 2010. Une partie de cette augmentation a pour contrepartie une hausse des actifs financiers de l'Etat (environ 3 points de PIB via les prises de participation dans les banques réalisées par la Société de Prise de Participation de l'Etat (SPPE) et les prêts aux constructeurs automobiles), atténuant l'augmentation de la dette nette. L'impulsion budgétaire (hors évolution spontanée des recettes fiscales) contribue à augmenter le déficit public de 1,2 point de PIB entre 2008 et 2010. La totalité de l'impulsion est concentrée sur 2009 (1,7 points de PIB) en raison du plan de relance (1,3 points de PIB) et elle serait négative en 2010 (-0.5 point) avec la fin d'un certain nombre de mesures du plan de relance (-1 point de PIB) mais qui sont en partie compensées par des nouvelles mesures fiscales (0,5 point de PIB), notamment la réforme de la taxe professionnelle.

8. Finances publiques à court et moyen terme

En points de PIB

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Solde public

-3.4

-8.3

-8.7

-7.2

-6.2

-5.2

Dette publique

67.4

77.1

84.3

87.8

90.3

91.6

Croissance du PIB en volume (en %)

0.4

-2.1

0.8

2.5

2.5

2.5

Dépenses publiques

52.7

55.4

55.9

55.2

54.4

53.7

Recettes publiques

49.3

47.14

47.2

47.9

48.2

48.5

Sources : prévisions OFCE, programme pluriannuel des finances publiques du PLF 2010.

Après une augmentation de 3,6 points de PIB en 2008, la dette publique augmenterait de près de 10 points de PIB en 2009 et de plus de 7 points en 2010. Si la hausse de 2008 s'explique principalement par les politiques de refinancement de l'Etat afin de doter des fonds créés pour lutter contre les effets de la crise financière, la très forte augmentation de dette publique en 2009 et 2010 s'explique à 95 % par la dégradation vertigineuse des déficits publics et de la croissance nominale de l'activité.

En 2008, les opérations de refinancement des administrations publiques (APU) ont contribué à accroître la dette brute de 2 points de PIB (graphique 16). Celles-ci se composent des prises de participation de l'Etat dans les banques réalisées par l'intermédiaire de la SPPE, de l'accumulation d'actifs par le Fonds de réserve pour les retraites (FRR) et des régimes complémentaires (Agirc-Arcco) ainsi que des mesures de trésorerie visant à financer en partie le plan de relance de l'économie. En revanche, la dette nette des actifs financiers les plus liquides (dépôts, crédits et titres de créance négociables) n'a augmenté que de 2,2 points de PIB en 2008 car les mesures d'aide au secteur financier n'ont quasiment pas d'impact sur son évolution. Cependant, la dette nette au sens large (dans laquelle on retranche les actions cotées et titres d'OPCVM détenus par les APU) a augmenté de 7,7  points de PIB en raison de la dépréciation de près de 100 milliards d'euros des titres cotés détenus par les APU liée à la chute des marchés boursiers.

En 2009, la dette publique augmenterait de 9,7 points de PIB et les mesures de refinancement ne contribueraient qu'à hauteur de 0,9 point de PIB à l'augmentation de l'endettement public. Elles se composent essentiellement de prises de participation dans les banques ainsi que des prêts accordés par l'Etat au secteur automobile. Le plan de relance de l'économie contribuerait à hauteur de 1,3 point de PIB à la dégradation des finances publiques.

En 2010, l'augmentation de 7 points de l'endettement public s'explique uniquement par la hausse des déficits publics (dont 0,3 liés à certaines mesures du plan de relance qui sont reconduites) et par la faiblesse de la croissance nominale.

Au total, sur les 20,5 points de PIB d'augmentation de la dette publique brute entre 2007 et 2010, 2,9 points sont liés au plan de refinancement de l'économie et 1,6 aux mesures du plan de relance, soit une contribution d'environ 20 % à cette hausse. Dans un contexte où aucun établissement financier n'a fait défaut, les plans de refinancement n'ont pas d'impact sur la dette nette si ce n'est les recettes nettes qu'elles ont générées. Au final, la contribution des plans de soutien à l'économie représente moins de 10 % de la hausse de la dette publique nette entre 2007 et 2010. De plus, cette analyse purement comptable fait abstraction du surplus de croissance engendré par les plans de financement et de relance de l'économie qui ont permis de limiter les effets dépressifs de la crise et qui, en retour, ont permis d'éviter une aggravation plus marquée de la dette publique ex post .

16. Décomposition de la variation de la dette publique

En points de PIB

Sources : MINEFE, calculs OFCE.

IV.2. Les finances publiques à moyen terme

A partir de 2011, la part du déficit lié à la crise se réduirait progressivement sous les effets conjugués de la réduction de l'output ga p, de la fin des mesures de relance mais aussi du rebond spontané de certaines recettes fiscales, notamment l'IS et la TVA dont le rendement avait brutalement chuté avec la crise. Le déficit public se réduirait de 1,5 point en 2011, puis de 1 point en 2012 et 2013, atteignant 5,2 % du PIB en 2013. Dans ce scénario, l'Etat ne récupèrerait qu'une partie des pertes spontanées de recettes fiscales perdues durant la crise. En effet, avec la chute drastique de l'activité en 2009, les pertes spontanées de recettes fiscales représentent 1,3 point de PIB (dont 1 point de PIB pour les seules pertes d'impôt sur les sociétés) (tableau 9). Cette perte équivaut à l'ensemble des mesures du plan de relance et contribue à gonfler l'effet des stabilisateurs automatiques pour 2009. Cette dynamique spontanée de soutien à l'activité ne durera qu'un temps mais représente pour 2009 un véritable second plan de relance « caché » pour l'économie française.

A partir de 2011, avec une croissance qui repasserait au-dessus de son rythme potentiel, la remontée spontanée des recettes fiscales, due une élasticité des recettes fiscales au PIB supérieure à l'unité en période de reprise (2,5 % de croissance en moyenne de 2011 à 2013), permettrait une réduction du déficit public de 0,8 point de PIB en trois ans. L'impulsion budgétaire (hors évolution spontanée des recettes fiscales) serait plus négative en 2011 (-1,2 points de PIB) qu'en 2012 et 2013 (-0,6 point de PIB chaque année) pour deux raisons : la fin de l'ensemble des mesures du plan de relance en 2011 permettra mécaniquement d'améliorer le solde public de 0,3 point de PIB et les mesures hors relance déjà engagées devraient augmenter les PO de 0,5 point (dont 0,4 pour l'effet temporaire de trésorerie lié à la mise en place immédiate de la réforme de la taxe professionnelle en 2010 qui n'a plus d'effet en 2011).

Les impulsions budgétaires négatives (y compris évolutions spontanées des recettes fiscales) contenues dans le programme pluriannuel des finances publiques représentent 3,2 points de PIB de 2011 à 2013, dont 1,3 est attribuable à la remontée des taux de PO et 1,9 à un net ralentissement de la croissance des dépenses publiques. Si du côté des recettes publiques cette hypothèse semble prudente au regard des mesures engagées et du potentiel de hausse de certaines assiettes fiscales avec la reprise économique, du côté des dépenses publiques, cela nécessite une forte inflexion de la dynamique de la dépense publique. En effet, le gouvernement table sur une hypothèse de croissance de la dépense publique de 1 % en volume en moyenne de 2011 à 2013 (1,1 % hors contre effet du plan de relance). Or avec une augmentation de 0,2 point de PIB par an en moyenne de la charge d'intérêts sur la dette publique, il faudrait que la dépense publique primaire augmente en volume de seulement 0,7 % par an en moyenne sur la période 2011-2013, soit un rythme nettement en dessous de la tendance observée avant la crise (1,7 % en moyenne sur les cinq dernières années, 2,2 % sur les 10 dernières années et 2,3 % sur les vingt dernières années).

Enfin, avec un taux de croissance moyen du PIB prévu de 2,5 % par an de 2011 à 2013 et une impulsion budgétaire négative moyenne de 1,1 point du PIB par an (y compris évolution spontanée des recettes fiscales au PIB), la croissance spontanée de l'économie française (qui suppose un effet multiplicateur de la politique budgétaire à court terme de 1) devrait être de 3,6 % par an en moyenne sur trois ans. Si cette hypothèse paraît volontariste, elle ne semble cependant pas inatteignable, la France ayant déjà connu au cours des 30 dernières années deux périodes (1987-89 et 1998-2000) pendant lesquelles la croissance de l'économie (corrigée des politiques budgétaires) a crû à un rythme moyen de 3,5 -3,6 % par an en moyenne pendant trois ans (graphique 17). De plus, avec un output gap très négatif et si l'on considère que les pertes d'activité observées de 2008 à 2010 ne sont pas définitives, la reprise forte de l'économie à partir de 2011 pourrait avoir lieu afin de rattraper le retard de croissance accumulé depuis 2008.

17. Croissance spontanée 98 ( * ) et effective sur la période 1983-2013

En %, en volume

Source : calculs OFCE.

Malgré la réduction de 3,5 points de PIB du déficit public en trois ans, la dette publique augmenterait de 7 points de PIB entre 2010 et 2013 pour atteindre 91,6 % du PIB en 2013 (hors mesures de remboursement par les banques des recapitalisations bancaires opérées par l'Etat et remboursement des prêts par le secteur automobile à l'Etat). Durant cette période, le déficit public reste en effet constamment supérieur au déficit qui stabilise la dette publique en points de PIB, celui-ci se situant autour de 4 points de PIB à partir de 2011.

9. Contribution des recettes et des dépenses publiques à la variation du solde public

En points de PIB

2009

2010

2011

2012

2013

Variation solde public

(1) - (2)

-4,9

-0,4

1,5

1,0

1,0

(1) Variation taux de PO dont

-2,2

0,0

0,7

0,3

0,3

Mesures plan de relance + mesures sociales* (a)

-0,7

0,6

0,1

0,0

0,0

Autres mesures (b)

-0,2

-0,6

0,5

0,0

0,0

Evolution spontanée (c)

-1,3

0,0

0,2

0,3

0,3

(2) Variation taux de DP** dont

2,8

0,4

-0,8

-0,7

-0,7

Mesures plan de relance + mesures sociales* (d)

0,6

-0,4

-0,2

0,0

0,0

Ecart entre dépenses primaires potentielle (hors chômage) et la croissance (e)

2,0

0,6

-0,3

-0,2

-0,3

Charges d'intérêts (f)

-0,2

0,2

0,2

0,2

0,2

Prestations chômage (g)

0,3

0,2

-0,1

-0,1

-0,1

Autres (h)

0,2

-0,2

-0,5

-0,6

-0,6

Stabilisateurs automatiques

(-c+e+g)

3,6

0,8

-0,6

-0,6

-0,7

Impulsion budgétaire (hors prestations chômage et hors évolution spontanée des PO)

(-a-b+d+h)

1,7

-0,5

-1,2

-0,6

-0,6

Impulsion budgétaire (hors prestations chômage)

(-(1)+d+h)

3,0

-0,5

-1,4

-0,9

-0,9

*y compris les mesures qui ont été prolongées en 2010

** DP = Dépenses Publiques

Sources : OFCE, PLF 2010,

IV.3. Les finances publiques à long terme

A moyen terme, le programme pluriannuel des finances publiques nous permet d'évaluer les impulsions budgétaires à venir dont une partie est incorporée dans la fin des plans de relance et la remontée spontanée de certaines recettes fiscales avec le retour de la croissance. A plus long terme, la question de la soutenabilité de la dette publique va prendre de l'ampleur en raison de la dégradation exceptionnelle des finances publiques mais aussi du décalage dans le temps entre la réduction du déficit public et de la dette publique. En effet, la France n'atteindra pas le niveau du déficit public qui stabilise la dette avant un certain nombre d'années et verra sa dette publique gonfler durant cette période. De plus, à l'impact de la crise financière sur les finances publiques, s'ajoute celui du vieillissement sur les comptes sociaux durant les prochaines décennies qui conduira à un alourdissement des dépenses publiques de retraite et de santé dans la richesse nationale. Enfin, le problème de soutenabilité de la dette se pose peu dans un contexte de taux d'intérêt extrêmement bas. En revanche, la hausse des taux d'intérêt est très probable à moyen et long terme (fin des politiques monétaires accommodantes, diminution de l'aversion pour le risque pour les tires privés, remontée de la croissance nominale...), avec pour conséquence directe un gonflement de la dette publique et par effet de cascade des tensions sur les taux et une spirale de l'endettement.

Dans cette partie, nous avons réalisé un exercice de simulation de la dette publique à long terme de façon à appréhender la trajectoire plus ou moins soutenable de la situation financière des administrations publiques durant les deux prochaines décennies. Certaines hypothèses pèsent lourdement sur l'évolution de la dette publique à long terme. Dans une première partie, nous avons projeté l'évolution de la dette publique dans le cadre du scénario central mais aussi en fonction des quatre autres scénarii reposant sur des hypothèses différentes de croissance et de rythme de croissance potentielle (voir partie III.2).

Dans une seconde partie, à partir d'un scénario de référence, nous avons testé la sensibilité des projections budgétaires à différentes hypothèses : apparition d'une prime de risque avec la hausse de la dette publique, hausse plus prononcée des prélèvements obligatoires, surplus de croissance de la dépense publique par rapport au taux de croissance potentiel en raison du vieillissement de la population.

Finances publiques à long terme dans le scénario central

Les hypothèses à moyen terme concernant les évolutions de recettes publiques (en points de PIB) et de dépense publique en volume (en %) sont calées sur le programme pluriannuel des finances publiques. En outre, avec une élasticité des recettes fiscales au PIB unitaire à long terme, l'ensemble des recettes fiscales perdues en 2009 en raison d'une contraction très forte de certaines assiettes fiscales serait intégralement récupéré impliquant une hausse des taux de PO de 0,3 point de PIB en 2014 et 0,2 point en 2015 sans modification de la fiscalité. En effet, dans le compte à moyen terme à l'horizon 2013, sur les 1,3 points de PIB de recettes fiscales perdues en 2009 en raison d'une chute des élasticités, seul 0,8 point de PIB serait récupéré entre 2010 et 2013. Au-delà de 2015, les taux de PO sont stables. Le taux de croissance des dépenses publiques (en volume, en %) est celui du programme pluriannuel des finances publiques jusqu'en 2013. Au-delà de cette date, les dépenses publiques primaires évoluent comme le rythme de croissance potentiel. Enfin, le taux de croissance de l'économie est supérieur au taux de croissance potentiel jusqu'à la fermeture de l'output gap, puis celui-ci croît à son rythme potentiel.

Dans notre scénario de référence, la dette publique brute atteindrait un pic en 2017 (93,1 % du PIB) (graphique 18), année où le solde public atteint celui qui stabilise la dette (4,1 % du PIB). Au-delà de 2017, la dette publique commencerait à décroître pour atteindre 81,8 % en 2030 et le déficit public passerait sous la barre des 3% du PIB en 2022 et s'établirait à 2,2 % en 2030 (graphique 18 bis). Dans ce scénario, dans lequel il n'y a pas de dérive de la dette publique à long terme, les impulsions budgétaires cumulées représentent -3,8 points de PIB entre 2011 et 2030 et la croissance moyenne serait de 2,3 % entre 2011 et 2030 (tableaux 10 et 10 bis) avec une fermeture complète de l'output gap en 2024. La politique budgétaire restrictive de 2011 à 2015 permet de réduire significativement le déficit structurel 99 ( * ) qui passe de -5,5 % du PIB en 2010 à -2,2 % en 2015. La fermeture progressive de l' output gap permet une diminution du déficit conjoncturel qui passe de -3,3 points de PIB en 2010 à 0 en 2024. Les recettes publiques augmenteraient de 1,8 point de PIB pour atteindre 49% du PIB en 2015 puis se stabiliseraient à ce niveau ensuite et les dépenses publiques diminueraient de 4,8 points de PIB en l'espace de 20 ans pour atteindre 51 % du PIB en 2030 (niveau équivalent à celui du début des années 1990). La charge de la dette augmenterait significativement jusqu'en 2018 (de 3 points de PIB en 2010 à 3,9 points de PIB en 2018) sous l'effet conjugué de la hausse des taux apparents et de la dette publique, puis diminuerait progressivement dans la phase de désendettement pour atteindre 3,6 points de PIB en 2030.

18. Evolution des finances publiques à long terme

En points de PIB En points de PIB

Source : calculs OFCE

18 bis. Evolution des finances publiques à long terme

En points de PIB En points de PIB

Source : calculs OFCE

10. Résumé finances publiques à long terme

En points de PIB

PIB en volume (en %)

Solde public

Dette publique brute

Charge d'intérêts

Moyenne 2011-30

2015

2020

2030

2015

2020

2030

2015

2020

2030

2,3

-4,4

-3,4

-2,2

92,8

92,0

81,8

3,7

3,9

3,6

Source : calculs OFCE

10 bis. Résumé finances publiques à long terme

En points de PIB

Variation recettes publiques

Variation dépenses publiques

Impulsion budgétaire

Solde public structurel

2011-30

2011-30

Cumul 2011-30

2015

2020

2030

-4,8

1,8

-3,8

-2,2

-2,5

-2,1

Source : calculs OFCE.

Finances publiques à long terme dans les scénarii alternatifs

Dans les différents scenarii, les hypothèses concernant les évolutions de recettes publiques (en points de PIB) et de dépenses publiques en volume (en %) sont identiques à celles du scénario central jusqu'en 2013. Au-delà de 2013, l'évolution des recettes publiques (en points de PIB) est identique dans tous les scenarii et est calée sur celle du scénario central sur toute la période de projection. Au-delà de 2013, les dépenses publiques primaires évoluent comme le rythme de croissance potentiel de l'économie. Dans le cadre de cet exercice, seules les hypothèses sur le taux de croissance et sur celui de son potentiel, ainsi que sur les taux apparents (estimés à partir de la croissance nominale), varient impliquant une réduction plus ou moins rapide de l'output gap et un rythme différent d'évolution des dépenses publiques.

Selon les cinq scenarii, la dette publique brute serait en 2030 comprise entre 64,6 % du PIB dans le scénario de croissance le plus favorable et près de 135 % du PIB dans le cas le plus défavorable. Le poids de la dette publique varie dans le PIB du simple au double en fonction du scénario de croissance retenu (graphique 19). Dans tous les scenarii, les recettes publiques augmentent entre 2010 et 2030 de 1,8 point de PIB. A l'exception du scénario 3, les dépenses publiques baissent selon le scenario entre 4,1 et 5,7 points de PIB de 2011 à 2030. Cette baisse est fonction et du niveau du PIB potentiel et de la vitesse de réduction de l'output gap. Dans le scénario 2, l'output gap se referme en 2015 grâce à une croissance très forte (3,4 % en moyenne de 2011 à 2015) et ce malgré des impulsions très négatives (-3,8 points de PIB de 2011 à 2015). Dans ce scénario, le déficit public revient à 2% du PIB dès 2015 et la dette publique commence à baisser dès 2013. A l'inverse, dans le scénario le plus défavorable (scénario 3) où l'on considère les pertes de croissance accumulées de 2008 à 2010 comme définitivement perdues, les déficits publics restent élevés sur toute la période de projection. Ils diminuent légèrement à moyen terme (5,8 % du PIB en 2015) sous l'effet des impulsions budgétaires négatives, puis augmentent à nouveau pour atteindre 7,7 % du PIB en 2030 (tableau 11) en raison de la hausse de la charge d'intérêts. Dans ce scénario, les déficits publics sont considérés comme intégralement structurels et seules les impulsions budgétaires permettent une amélioration du solde public. Avec l'explosion de l'endettement public, la charge d'intérêts doublerait pratiquement entre 2010 et 2030 pour atteindre 5,7 % du PIB à l'horizon de notre projection.

Les scénarios 4 et 5 se distinguent du scénario central par le rythme potentiel de l'économie. Dans le scénario 5 dans lequel le taux de croissance potentiel est de 1,5 %, la fermeture de l'output gap a lieu en 2017 contre 2020 dans le scénario 4 où le taux de croissance potentiel est de 1,8 %. Le taux de croissance moyen sur la période est donc supérieur dans le scénario 4 (2%) à celui du scénario 5 (1,8 %). Au final, entre les deux scénarii il y a un écart de 6,2 points de PIB d'endettement public en 2030 et de 0,5 point de PIB de déficit public.

19. Dette publique brute dans les cinq scenarii

En points de PIB

Source : calculs OFCE

11. Finances publiques dans les cinq scenarii

En points de PIB

PIB en volume (en %)

Solde public

Dette publique brute

Charge d'intérêts

Moyenne 2011-30

2015

2020

2030

2015

2020

2030

2015

2020

2030

Scénario 1

2,3

-4,4

-3,4

-2,2

92,8

92,0

81,8

3,7

3,9

3,6

Scénario 2

2,3

-2,0

-1,9

-1,3

82,3

76,5

64,6

3,4

3,3

2,8

Scénario 3

2,0

-5,8

-6,4

-7,7

98,8

109,8

134,7

3,8

4,4

5,7

Scénario 4

2,1

-4,2

-2,6

-2,3

92,6

89,2

82,3

3,7

3,8

3,5

Scénario 5

1,8

-3,8

-3,0

-2,8

91,6

90,1

88,5

3,6

3,7

3,5

Source : calculs OFCE

11 bis. Finances publiques dans les cinq scenarii

En points de PIB

Variation recettes publiques

Variation dépenses publiques

Impulsion budgétaire

Solde public structurel

2011-30

2011-30

Cumul 2011-30

2015

2020

2030

Scénario 1

-4,8

1,8

-3,8

-2,2

-2,5

-2,1

Scénario 2

-5,6

1,8

-3,8

-2,0

-1,8

-1,3

Scénario 3

0,8

1,8

-3,8

-5,8

-6,4

-7,7

Scénario 4

-4,6

1,8

-3,5

-2,5

-2,7

-2,3

Scénario 5

-4,1

1,8

-3,0

-2,9

-3,0

-2,8

Source : calculs OFCE

Finances publiques à long terme dans les trois variantes

Afin d'analyser la sensibilité de certaines variables, nous avons simulé trois variantes analytiques. Dans la première, nous supposons que le coût de financement de l'endettement public serait plus élevé que prévu en raison de l'apparition d'une prime de risque exigée par les investisseurs. Dans cette variante, les taux apparents sont un point supérieur à ceux du scénario central de 2011 à 2030 ce qui entraîne une hausse de la charge d'intérêts et par ricochet une dégradation des finances publiques. En revanche, nous avons supposé que la croissance était exogène et que la hausse des taux n'avait pas d'effet récessif sur l'activité. Dans la deuxième variante, nous supposons un scénario de grande rigueur dans lequel il y a une hausse des taux de PO de 2 points dès 2011 par rapport au scénario central. Cette hausse n'est pas compensée par un supplément de dépense publique. Enfin, dans la dernière variante, nous avons supposé que l'effet du vieillissement conduisait à une dérive de la croissance de certaines dépenses publiques (retraite et santé) par rapport au taux de croissance potentiel de l'économie. Nous avons supposé dans ce scénario que ce supplément de dépenses publiques n'était pas financé par une hausse des prélèvements. La déformation de la pyramide des âges durant les deux prochaines décennies se traduit par le fait que le taux de croissance annuel du nombre de personnes de plus de 65 ans est en moyenne de 2 points supérieur à celui des personnes en âge de travailler sur la période 2011-30. Comme les dépenses publiques de retraite et de santé représentent 31 % de la dépense publique totale, nous avons supposé dans cette variante que le rythme de croissance de la dépense publique serait de 0,6 point supérieur à celui du potentiel de l'économie sur la période 2014-30.

Dans la première variante, la hausse des taux apparents conduit à une forte augmentation de la charge d'intérêts dès 2011 et donc à une moindre amélioration du déficit public (4 % du PIB en 2030) et à une hausse de la dette publique qui atteindrait environ 103 points de PIB en 2030, soit plus de 21 points de PIB par rapport au scénario central (tableau 12). Cet effet serait bien sûr accentué si l'on prenait en compte l'impact négatif de la hausse des taux d'intérêt sur la croissance (graphique 20).

Dans la deuxième variante, la hausse des taux de PO de 2 points dès 2011 par rapport au scénario central permet de diminuer plus rapidement le solde public qui revient à un niveau proche de l'équilibre en 2030. La dette publique serait d'environ 61 % du PIB en 2030 mais cette impulsion négative amputerait la croissance de 0,1 point en moyenne sur la période 2011-30. Cependant, nous avons fait l'hypothèse que la politique fiscal n'avait pas d'effet sur le rythme de croissance potentiel de l'économie. Dans le cas où la hausse de la pression fiscale modifierait le potentiel de croissance à la baisse, l'impact d'une hausse des taux de PO serait moins favorable à l'évolution de la dette publique.

Enfin, dans le dernier scénario, la croissance plus soutenue des dépenses publiques en raison du vieillissement conduirait par rapport au scénario central à une augmentation de la croissance moyenne sur la période 2011-30 (0,3 point de croissance en moyenne) mais aurait pour contrepartie l'accumulation d'un déficit public structurel car la hausse de la part des dépenses dans le PIB n'est pas financée (tableau 12 bis). Cet effet conduirait à augmenter la dette publique par rapport au scénario central de 19,4 points de PIB en 2030. Celle-ci serait donc d'environ 100 % du PIB en 2030.

20, Dette publique brute selon les variantes

En points de PIB

Source : calculs OFCE

12. Finances publiques dans les variantes par rapport au scénario central

En points de PIB

PIB en volume (en %)

Solde public

Dette publique brute

Charge d'intérêts

Moyenne 2011-30

2015

2020

2030

Moyenne 2011-30

2011-30

2011-30

Cumul 2011-30

2015

2020

Scénario hausse des taux

0,0

-1,2

-1,4

-2,0

4,8

10,0

21,4

1,2

1,4

2,0

Scénario hausse des PO

-0,1

1,1

1,4

1,9

-3,3

-8,5

-19,7

-0,1

-0,4

-0,9

Scénario hausse des DP

0,3

-0,3

-1,1

-3,4

-0,1

2,5

19,4

0,0

0,1

0,8

Source : calculs OFCE

12 bis. Finances publiques dans les variantes par rapport au scénario central

En points de PIB

Variation recettes publiques

Variation dépenses publiques

Impulsion budgétaire

Solde public structurel

2011-30

2011-30

Cumul 2011-30

2015

2020

2030

Scénario hausse des taux

0,0

2,0

0,0

-1,2

-1,4

-2,0

Scénario hausse des PO

2,0

0,1

-2,0

2,2

2,4

2,9

Scénario hausse des DP

0,0

3,4

5,1

-0,6

-2,2

-5,8

Source : calculs OFCE

* 88 Cette note a été rédigée par Eric Heyer et Mathieu Plane, Département Analyse et prévision, OFCE.

* 89 « Croissance précaire », Revue de l'OFCE, n°111, octobre 2009

* 90 « Croissance précaire », Revue de l'OFCE, n°111, octobre 2009

* 91 Pour plus de détails se référer à l'encadré « Prime à la casse »

* 92 Nous estimons que la perte de richesse nette des ménages sera de 135 points de RdB à l'horizon 2010. Elle s'explique à près de 55 % par une destruction de la richesse immobilière (72 points de RdB).

* 93 Pour plus de détails, se référer à Valérie Chauvin et alii (2004) : « Évaluation du plan de relance de l'économie française », Document de travail de l'OFCE , n°2004-04, mai. D'après l'INSEE, sur les 15 milliards d'euros rendus à la consommation par ces mesures, seuls 1,5 à 2 milliards ont été réellement dépensés et auraient alors permis une baisse de 0,2 point du taux d'épargne en 2004 compensée partiellement par une hausse de 0,1 point en 2005.

* 94 Voir OFCE-DRIC (2009) : « Mérites et limites du Pacte automobile », Lettre de l'OFCE , n° 308.

* 95 Pour plus détails, se référer à Heyer, Montperrus-Veroni et Timbeau (2006) : « De la TVA sociale à la désinflation compétitive » in L'économie française 2007 , coll. Repères, La Découverte.

* 96 La baisse est également plus forte au Royaume-Uni (6,2 %), aux Etats-Unis (4,7 %) et au Japon (7,5 %).

* 97 Pour plus de détails, se référer à : « France : la mer se retire », Revue de l'OFCE , n°109, avril.

* 98 Sur la période 1983-2013, la croissance moyenne de l'économie française est de 2% et la somme des impulsions budgétaires est nulle (avec une hypothèse de croissance potentielle constante à 2 %). La croissance spontanée est celle que l'économie aurait connue à chaque période avec une impulsion budgétaire neutre et un multiplicateur budgétaire de 1. Par exemple, sous ces hypothèses, l'économie française aurait connu une récession en 2002 (-0,4 %) si la politique budgétaire avait été neutre. Avec une impulsion budgétaire de 1,4 % du PIB, la croissance effective a été de 1% en 2002.

* 99 Nous avons calculé un solde budgétaire structurel qui est la différence entre le solde public et le solde conjoncturel, ce dernier étant calculé à partir de l' output gap .

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