2. Les modalités à mettre en oeuvre

Pour mettre en oeuvre ces objectifs, un certain nombre de mesures seraient nécessaires.

Tout d'abord, un recensement de l'ensemble des digues et de leurs propriétaires est indispensable, avant d'envisager tout transfert de propriété. En effet, un vaste recensement avait été lancé à la suite des grandes inondations du Rhône qui avaient noyé la Camargue en 1993 et 1994. Mais celui-ci n'est pas achevé. Pour certains ouvrages anciens, sans actes administratifs, il est parfois très difficile d'identifier les propriétaires.

Il convient également que l'ensemble des moyens de défense contre les risques de submersion (par exemple, les cordons dunaires) soit recensé et pris en compte dans la réflexion.

Des prescriptions précises devraient être établies, non seulement pour l'entretien courant des ouvrages naturels et artificiels mais également en termes d'aménagement (ex : pistes cyclables, accès pour entretien, chemins d'accès aux plages sur les cordons dunaires).

La mission préconise d'alléger les procédures pour le renforcement des digues existantes . Il conviendrait d'établir notamment une véritable logique de coopération entre les acteurs chargés de la protection de l'environnement et ceux qui assument la protection des populations. Nombre d'élus locaux et d'habitants ont fait part de leur mécontentement sur la manière dont certains projets de digues ont été retardés pour des considérations environnementales. Il va de soi que la protection des populations existantes est l'objectif absolument prioritaire. Inversement, toute création nouvelle de digue, qui ne viserait pas à protéger des habitations, mais par exemple à créer des zones d'urbanisation nouvelle, doit être proscrite.

Bien évidemment, les travaux sur les digues, notamment de renforcement ou de rehaussement, tiendront compte d'un aléa de submersion marine clairement défini et prenant comme référence les dernières données scientifiques sur l'évolution du niveau des mers et les « retours d'expérience » des phénomènes climatiques comme la tempête Xynthia.

Il convient également de repenser l'ingénierie des digues . En France, la maîtrise d'ouvrage semble défaillante dans ce domaine. Les collectivités territoriales, lorsqu'elles souhaitent édifier des digues, n'ont pas de cahier des charges ni de prescriptions techniques précises. Il apparaît que les grandes entreprises de travaux publics ne sont pas toujours performantes dans ce domaine. Une digue comme celle construite par l'Etat à Wissans dans le Nord-Pas-de-Calais en 2006 a cédé quelques mois après son inauguration en raison de malfaçons. Il n'existe pas suffisamment de culture de la protection marine dans notre pays, contrairement, par exemple, aux Pays-Bas. Un document technique unifié (DTU) doit recenser les règles de protection des digues. Des formations adaptées devraient être réalisées dans ce domaine.

En matière de gouvernance, deux thèses coexistent qui chacune s'inspire d'exemples étrangers. Certains experts ou organismes plaident pour un établissement public national spécialisé chargé de concevoir, d'organiser et de financer les dispositifs de protection face aux risques d'érosion et de submersion marine (modèle des Pays-Bas). D'autres proposent une gestion locale des digues.

La mission estime que le transfert de la gestion des digues à un établissement public national ne serait pas de nature à permettre une gestion efficace de la protection contre la submersion marine. Elle se prononce pour une gestion de proximité. En effet, les collectivités territoriales sont les mieux équipées pour connaître l'historique et la réalité des risques d'inondations et pour prendre les mesures nécessaires de prévention. Une « nationalisation » de la politique de gestion des digues paraît d'autant moins souhaitable que l'Etat a toujours la faculté d'intervenir, pour des raisons de sécurité publique, en cas de défaillance d'une collectivité territoriale.

Toutefois, cette gestion locale pourrait être complétée par la création d'un centre national de ressources , habilité également à définir les normes de gestion des digues, à favoriser l'échange des bonnes pratiques , à faciliter la formation des personnes concernées et à assurer le contrôle des ouvrages.

En termes de financement, la mission considère que l'implication de l'Etat dans un « plan digues » doit être forte, non seulement pour les digues qui sont de sa propriété et pour lesquelles il a annoncé prendre en charge intégralement les coûts de remise en état, mais également pour les autres ouvrages de la responsabilité des collectivités territoriales. Un taux de cofinancement minimal de 50 % serait nécessaire pour assurer une véritable relance de l'entretien des digues. Au-delà, un véritable « plan digues » national nécessiterait des moyens de financement pérennes, qui ne sont pas encore définis. Après l'examen sur place du système de défense contre la mer aux Pays-Bas, la mission fera dans son rapport final des prescriptions pour une politique nationale ambitieuse en la matière.

Les préconisations de la mission

- Réparer rapidement les digues endommagées par la tempête ;

- Ne pas créer de digues nouvelles ayant pour objet de créer une nouvelle urbanisation dans des zones à risques ;

- Apporter une attention particulière au cordon dunaire qui est un ouvrage naturel de défense contre la mer ;

- Corréler l'aménagement et le rehaussement au niveau de risque et de protection envisagés ;

- Clarifier Le régime de propriété et envisager un transfert de propriété publique qui permettra de clarifier les responsabilités ;

- Promouvoir une gestion locale de proximité de nature à assurer efficacement la surveillance et l'entretien de ces ouvrages ;

- Assurer un taux de prise en charge de ces travaux par l'Etat qui ne devra pas être inférieur à 50% et devra être soutenu dans le temps.

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