DEUXIÈME PARTIE - LA STRATÉGIE FINANCIÈRE ET ÉDITORIALE

I. LA COHÉRENCE DE LA TRAJECTOIRE DE CHARGES : FRANCE TÉLÉVISIONS, UNE ENTREPRISE COMME LES AUTRES ?

A. UN RETOUR INATTENDU À L'ÉQUILIBRE ...

1. De 2005 à 2008, du bénéfice au déficit

Si France Télévisions a réalisé son virage éditorial au moment propice, l'entreprise commune est née dans une période de crise économique et financière.

En effet, les années 2005 et 2006 ont été bénéficiaires . Le résultat net après impôts de France Télévisions s'est établi respectivement à 23,9 millions d'euros en 2005 et 13 millions d'euros en 2006. L'écart entre le résultat net réel et celui du plan d'affaires a été particulièrement faible : respectivement 0,1 million d'euros et 0,6 million d'euros.

En revanche, 2007 constitue une année en trompe l'oeil . Bien que le résultat net après impôts de France Télévisions se soit élevé à 22,2 millions d'euros 19 ( * ) , le chiffre d'affaires n'avait cette année progressé que de 1,91 % contre 2,71 % prévus dans le COM.

Cette dégradation du chiffre d'affaires s'est produite dans le cadre d'une situation financière du groupe tendue . La diminution des recettes publicitaires a réduit la capacité d'autofinancement de l'entreprise. Celle-ci est ainsi passée de 141,8 millions d'euros en 2006 à 82,6 millions d'euros en 2007, loin des 123,1 millions d'euros prévus par le COM. La trésorerie a été réduite de 114,3 millions d'euros en 2006 à 61,3 millions d'euros en 2007.

Ainsi que le souligne la Cour des comptes dans son rapport 20 ( * ) , en 2007 « le groupe France Télévisions a privilégié l'investissement dans les programmes, plutôt que le respect des équilibres économiques fixés dans le COM ». Son coût de grille a augmenté de 2,4 %. Le réinvestissement dans les programmes s'est poursuivi à un rythme soutenu. Les droits de diffusion acquis inscrits à l'actif sont passés de 753,6 millions d'euros à 829,7 millions d'euros, soit une progression de 10,2 %, mais cette hausse s'est accompagnée de celle de l'endettement à l'égard des fournisseurs de programmes pour un montant presque équivalent.

La stratégie éditoriale a été particulièrement contrainte en 2008, année déficitaire . L'effondrement des recettes publicitaires a provoqué un résultat d'exploitation négatif de 101,2 millions d'euros aggravé par un résultat exceptionnel de - 30,9 millions d'euros.

La capacité d'autofinancement du groupe est devenue négative pour la première fois de son histoire. La dotation en capital de 150 millions d'euros versée par l'État à titre de soutien exceptionnel a certes permis de rétablir la trésorerie en fin d'exercice, mais celle-ci est rapidement redevenue déficitaire au début de l'exercice 2009. France Télévisions a finalement enregistré un déficit avant impôts de 137,7 millions d'euros en 2008.

2. 2009, le retour à l'équilibre
a) L'absence d'« effet d'aubaine » publicitaire

Vos rapporteurs rappellent qu'à compter de 2009, les missions de service public de France Télévisions sont financées non seulement par la dotation issue du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel » 21 ( * ) mais également par une dotation complémentaire provenant de la mission « Médias » du budget général 22 ( * ) . Cette dotation budgétaire doit permettre à France Télévisions d'accomplir sa mission de service public dans le cadre d'un changement de modèle économique lié notamment à la disparition progressive de la publicité sur les chaînes du groupe à partir de janvier 2009.

Son montant, initialement fixé à 450 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2009, a été versé à hauteur de 415 millions d'euros 23 ( * ) , compte tenu du surplus de recettes publicitaires généré en 2009.

En effet, dès juillet 2009, France Télévisions a annoncé à son conseil d'administration un écart favorable de 70 millions d'euros sur les recettes de publicité et de parrainage. Cet écart a été révisé à la hausse lors du conseil d'administration de septembre pour s'établir à 105 millions d'euros. Il s'élève, à la clôture de 2009, à 144,9 millions d'euros 24 ( * ) , soit un surplus de l'ordre de 55,73 % par rapport à l'objectif de 2009 (260 millions d'euros).

Si le marché publicitaire de la télévision hertzienne est en recul de 8 % en valeur et de 6 % en volume, à périmètre constant, vos rapporteurs se félicitent de l'excellente performance de France Télévisions qui enregistre une augmentation de 8,1 % par rapport au seul chiffre d'affaires en journée 25 ( * ) . La bonne tenue des audiences du groupe, ainsi que la valorisation de celles-ci par la régie auprès des annonceurs expliquent en partie cette performance.

b) Une amélioration du solde des comptes d'exploitation

Ø L'analyse du compte de résultat fait apparaître une amélioration des différents postes hormis le résultat exceptionnel

- Un bénéfice net de 23,6 millions d'euros

Si le début de l'année 2009 a été marqué par une incertitude sur le respect de la trajectoire financière, l'absence d'effet de report total des ressources publicitaires sur les chaînes privées a permis de résorber le déficit prévisionnel , de manière inattendue.

France Télévisions a ainsi conservé un complément de financement de près de 110 millions d'euros non inscrit dans le budget de 2009 qui ont été affectés à la réduction du déficit prévisionnel estimé à 135,4 millions d'euros 26 ( * ) . Le bénéfice net avant impôts s'élève au 31 décembre 2009 à 23,6 millions d'euros 27 ( * ) . Le résultat net après impôts est de 19,6 millions d'euros. Vos rapporteurs saluent ce retour à l'équilibre qui n'était prévu par le plan d'affaires qu'en 2011, s'agissant du retour à l'équilibre opérationnel et 2012 pour celui relatif à l'équilibre net.

- Une amélioration de la situation financière

Ils se félicitent du rétablissement de la trésorerie en 2009. Cette dernière s'établit à 150,7 millions d'euros contre 33,1 millions d'euros au 31 décembre 2008. Sa reconstitution s'est réalisée au fur et à mesure, ainsi que l'illustrent les différentes estimations effectuées tout au long de l'année. Le budget de 2009 l'avait évaluée initialement à - 294,1 millions d'euros. Ce montant a été revu à la hausse dans le cadre du plan d'affaires (- 254,4 millions d'euros), puis en mai (- 45,6 millions d'euros) et en juin 2009 (- 12,7 millions d'euros). L'écart à la prévision s'explique essentiellement par les boni publicitaires ainsi que par l'absence d'impact négatif présumé de la loi de modernisation de l'économie (LME) 28 ( * ) . De surcroît, cette situation financière est confortée par le fait que la contribution à l'audiovisuel public est versée par douzième.

La capacité d'autofinancement redevient positive en 2009 : 172,4 millions d'euros contre - 11,6 millions d'euros en 2008. Son amélioration est la conséquence de la réalisation d'un bénéfice net de 23,6 millions d'euros au lieu d'un déficit de 135,4 millions d'euros.

Si le déficit du résultat financier est moins important que prévu, soit 28,4 millions d'euros dans le budget initial de 2009, il s'établit néanmoins à 8,5 millions d'euros contre 5,4 millions d'euros, au 31 décembre 2008. La chute de la rémunération des taux a conduit à une moindre rémunération de la trésorerie.

- Un résultat opérationnel positif

En premier lieu, s'agissant du résultat opérationnel du diffuseur celui-ci s'élève après coûts de transition à 18,3 millions d'euros contre une prévision de déficit de 123,4 millions d'euros selon le budget et 87,1 millions d'euros selon le plan d'affaires.

Quant au coût de grille, il s'élève à 1 937,1 millions d'euros en 2009. Il apparaît que France Télévisions a consacré l'accroissement de ses ressources en priorité à la grille des programmes en menant une politique de maîtrise des coûts hors grille . A titre d'illustration, ces derniers ont crû de 0,7 % depuis 2007, alors que le coût de grille progressait de + 6,8 % durant ces trois exercices.

Les autres dépenses du diffuseur s'élèvent à 517,6 millions d'euros, soit une diminution de 27 millions d'euros par rapport au budget et de 3,3 millions d'euros par rapport au plan d'affaires. En effet, les coûts de diffusion ont été réduits par rapport au budget de 6,95 % s'agissant de la diffusion hertzienne et de 19,09 % pour la diffusion numérique. Vos rapporteurs saluent également une baisse des frais généraux de 6,04 % par rapport au budget de 2009 mais également de 1,5 % par rapport aux coûts de 2008. En revanche, les subventions aux filiales cinéma sont responsables d'un dépassement de 4,9 millions d'euros du budget (soit 37 %) en raison de la croissance des contributions à la création cinématographique du fait des accords signés 29 ( * ) .

Le poste « autres éléments » du compte de résultat comptabilise notamment les coûts de transition. Ils s'élèvent à 24,6 millions d'euros en 2009 . Ce montant inclut notamment le versement, permis en raison du rétablissement financier, d'une prime exceptionnelle en remplacement de l'intéressement. En effet, France Télévisions n'ayant pu renégocier de tels accords, a décidé de verser une prime de 500 euros par salarié pour un montant total de 8,2 millions d'euros.

Quant au résultat opérationnel des autres activités (producteur, régies publicitaires, gestion de droits et autres activités), il est très nettement supérieur au budget initial (149,23 %). Il s'établit à 48,6 millions d'euros contre 15,9 millions d'euros en 2008, soit une progression de 205,66 %. Cette amélioration est notamment due à la performance de la régie publicitaire, ainsi qu'au retour à l'équilibre de la filière production (ex-France 3) et enfin aux bons résultats de la distribution avec notamment le documentaire « Apocalypse ».

Constatant la réalisation d'un bénéfice de 3,3 millions d'euros en 2009 par la filière production de France 3, devenue filière de production de l'entreprise commune, vos rapporteurs ont souhaité obtenir des précisions sur les modalités de son retour à l'équilibre. Le résultat opérationnel du producteur de 100 000 euros est conforme aux prévisions et en progression par rapport à l'exercice 2008 qui s'était soldé par une perte de 900 000 euros.

Cette amélioration du résultat s'explique par une activité plus soutenue en 2009 qu'en 2008 , notamment grâce à la vidéo-mobile et aux équipes légères, d'une part, ainsi qu'à l'augmentation des marges réalisées sur l'ensemble des processus, d'autre part. En effet, la politique de réduction des coûts 30 ( * ) et la réorganisation de la production, gérée par pôle d'activité, mises en oeuvre en 2007, portent leurs fruits.

- Un résultat exceptionnel obéré par la provision pour incitation au départ volontaire

Vos rapporteurs constatent que le résultat exceptionnel enregistre un déficit à hauteur de 35,5 millions d'euros contre une prévision de 2 millions d'euros dans le cadre du budget. En effet, il tient compte de la provision pour incitation aux départs volontaires en retraite comptabilisée dès 2009.

Ø Outre l'analyse du compte de résultat, vos rapporteurs ont apporté une attention particulière aux recapitalisations régulières de Gulli.

Ils observent que depuis sa création, Jeunesse TV, société éditrice de la chaîne Gulli, a été financée par France Télévisions et le groupe Lagardère par apport en capital et en comptes courants à hauteur de leur participation respective. La chaîne est dotée d'un million d'euros en capital, dont 340 000 euros pour France Télévisions, et de 50,33 millions d'euros en comptes courants de 2005 à 2010 (dont 17,1 millions d'euros pour France Télévisions). Ces financements ont été régulièrement approuvés par le conseil d'administration de France Télévisions en 2005, 2008 et 2009.

Au 31 décembre 2006, les capitaux propres de Jeunesse TV se sont révélés inférieurs à la moitié du capital social . Ayant statué sur la poursuite de son activité, la société devait régulariser sa situation au 31 décembre 2009 31 ( * ) , conformément à l'article L. 225-248 du code de commerce.

A cette fin, le conseil d'administration de France Télévisions a approuvé, le 13 avril 2010, le principe d'une augmentation de capital d'un montant de 41,3 millions d'euros dont 34 % sont pris en charge par France Télévisions. Vos rapporteurs se félicitent que cette recapitalisation ne conduise à aucun apport supplémentaire puisqu'elle s'effectuera par conversion des comptes courants en capital social .

S'agissant de la pertinence de ces recapitalisations, ils constatent que les financements effectués par les actionnaires ont permis d'accompagner avec succès la croissance de la chaîne . Figurant dans le trio des chaînes gratuites de la TNT avec TMC et W9, la part d'audience nationale de Gulli progresse de 22 % au premier quadrimestre 2010 par rapport à 2009. Sur la cible des enfants de 4 à 10 ans, elle est la deuxième chaîne nationale derrière TF1.

Son chiffre d'affaires publicitaire reflète sa croissance puisqu'il a augmenté de 35 % par rapport à 2008. Son développement devrait se maintenir en 2010 permettant, pour la première fois, la réalisation d'un résultat d'exploitation à l'équilibre .

COMPTES DE RÉSULTAT SYNTHÉTIQUE DE FRANCE TÉLÉVISIONS DE 2007 À 2010 (PRÉVISIONS)

(en millions d'euros)

Source : d'après les données de France Télévisions

c) Le respect de la trajectoire de charges

France Télévisions a respecté la trajectoire de charges, telle qu'elle a été définie par le plan d'affaires ainsi que l'illustre le graphique ci-dessous.

PRÉVISION ET ÉVOLUTION DES CHARGES OPÉRATIONNELLES DES DIFFUSEURS ENTRE 2007 ET 2012

Source : France Télévisions

Vos rapporteurs rappellent que l'État a conclu avec France Télévisions un contrat d'objectifs et de moyens (COM) en avril 2007 prévoyant une trajectoire financière pour la période 2007-2010. La perspective de suppression de la publicité annoncée dès janvier 2008 modifiant le modèle économique du groupe a conduit à la conclusion d'un avenant au COM ainsi que d'un plan d'affaires couvrant la période 2009-2012 32 ( * ) . Ce dernier fait partie intégrante de l'avenant au COM et se substitue donc à son volet financier. Il définit le modèle de financement des missions de service public de France Télévisions (I), ses objectifs de maîtrise des charges (II), sa stratégie de développement et d'innovation (III), les coûts de transition liés à la réforme de l'entreprise (IV) ainsi que ses résultats prévisionnels (V).

LE PLAN D'AFFAIRES 2009-2012

Extrait

« I. Le plan d'affaires clarifie le modèle de financement des missions de service public de France Télévisions.

« Le plan d'affaires initial (avant reprévision pour 2009) prévoyait une croissance annuelle moyenne des recettes nettes disponibles du groupe de 2,1% entre 2009 et 2012.

« L'évolution du modèle de financement des missions de service public de France Télévisions conduit à une forte augmentation des ressources publiques allouées au groupe, qui passent de 1 945,3 millions d'euros en 2008 à 2 447,2 millions d'euros en 2009 (montant initialement prévu, finalement réduit de 35 millions d'euros). A l'évolution de la ressource publique déjà prévue au COM 2007-2010 pour 2009, s'ajoute en effet un montant de dotation publique de 450 millions d'euros visant à financer les missions de service public dans le cadre de la suppression progressive de la publicité. L'ensemble de la dotation publique progresse ensuite de +2,4 % en 2010 puis en 2011 et connaît à nouveau une forte évolution en 2012 (+ 6,4 %) pour atteindre 2 732 millions d'euros. Avec la suppression de la publicité en soirée en 2009 la part des ressources publiques de l'activité diffuseur passe de 70 % en 2007 à 90,2 % en 2009 (prévision initiale) des ressources brutes. A l'extinction de l'analogique, prévue en 2012, et avec la suppression de la publicité en journée, la part des ressources publiques devrait représenter 95,3 % des ressources brutes.

« Les recettes de publicité et de parrainage étaient prévues à 260 millions d'euros en 2009 contre 591 millions d'euros réalisés en 2008 (pour un budget initial de 810 millions d'euros) du fait de la suppression de la publicité en soirée.

« La reprévision 2009 datée de septembre 2009, qui complète le plan d'affaires, indique des recettes de publicité et de parrainage de 365 millions d'euros. En 2010 et 2011, elles diminuent du fait d'un effet attendu d'anticipation par les annonceurs de la suppression de la publicité en journée, qui intervient en 2012, année pour laquelle les recettes de publicité et de parrainage sont prévues à 115 millions d'euros, compte tenu du maintien du parrainage, de la publicité pour les biens ou services présentés sous leur appellation générique et de la publicité diffusée sur les décrochages régionaux et locaux des services nationaux de France Télévisions, c'est-à-dire aux décrochage de France 3.

« II. Le plan d'affaires fixe un objectif de maîtrise des charges volontariste, cohérent avec les évolutions du secteur audiovisuel, tout en finançant les ambitions de service public et les nécessaires adaptations aux nouveaux modes de consommation des programmes.

« Il se traduit par une meilleure maîtrise des charges qui connaîtront une progression plus modérée que celle prévue initialement par le COM 2007-2010, avec le renforcement de la performance économique du groupe permise par la mise en place de l'entreprise commune.

« Cette évolution est par ailleurs conforme avec les orientations du secteur audiovisuel, et plus particulièrement celle des diffuseurs historiques.

« Les charges opérationnelles (hors coût de transition) connaîtront une évolution très modérée sur la période 2009-2012 (+ 0,2 % de taux de croissance annuel moyen, contre + 2,1 % dans le COM 2007-2010), qui traduit un objectif de maîtrise structurelle des coûts et reflète les ajustements à réaliser par France Télévisions pour s'adapter aux nouvelles contraintes économiques du secteur audiovisuel dans son ensemble.

« Au sein des charges opérationnelles, le coût de grille reste bien évidemment privilégié, avec un coût des programmes en progression annuelle moyenne de 1,5 % entre 2009 et 2012 (contre 2,7 % dans le COM 2007-2010) pour s'établir à 2 027,9 millions d'euros en fin de période. L'objectif reste de consacrer 86 % des dépenses hors diffusion à la grille.

« Cette évolution préserve les objectifs volontaristes en matière de programmes de création, les actions de développement de média global et un effort important pour le développement du sous-titrage et le lancement de l'audio description.

« Les autres charges opérationnelles (coût de grille mis à part) diminuent globalement de 4,6% par an pour s'établir à 452,1 millions d'euros en 2012. La réduction porte notamment sur les coûts de diffusion qui diminuent en fin de période après une coexistence entre la diffusion analogique (dont l'effet de l'extinction pleine est prévu sur 2012) et la diffusion numérique. Les coûts de structures seront également optimisés. Ce poste intègre également les coûts techniques liés aux nouveaux médias.

« Au total, les charges du diffuseur (hors coûts de transition) évoluent de manière très modérée sur la durée du plan d'affaires du fait de la réalisation progressive de synergies. Même après retraitement des coûts de diffusion qui s'inscrivent en baisse sur la période en raison des économies générées par l'extinction progressive de la diffusion analogique au profit de la diffusion numérique, la progression moyenne annuelle de ces charges est de 1,3 % sur 2009-2012, alors que le COM 2007-2012 initial affichait sur ce même périmètre une évolution moyenne de 2,5 %. Ceci traduit l'effort de maîtrise des coûts à réaliser de manière structurelle et pérenne par France Télévisions avec la montée en puissance progressive des synergies permises notamment par l'entreprise commune. »

Source : Plan d'affaires et Direction générale des médias et des industries culturelles du ministère de la culture et de la communication

Même s'ils observent que la trajectoire de charges a été globalement respectée , vos rapporteurs ont relevé un certain nombre d'écarts avec les prévisions budgétaires. A titre d'illustration, le compte de résultat synthétique fait apparaître des coûts de transition de 24,6 millions d'euros en 2009, alors que ces derniers étaient budgétés pour 40,7 millions d'euros.

En outre, il apparaît que certaines charges inscrites en 2012 ont été déjà comptabilisées en 2009 ou ne se réaliseront probablement pas . Il s'agit notamment dans le premier cas des charges liées au plan de départ et financées en 2009, ou bien dans le second cas des charges induites par le déficit initialement prévu jusqu'en 2011. En effet, le plan d'affaires est caractérisé par un résultat financier fortement dégradé, notamment du fait des déficits prévisionnels cumulés de 2009, 2010 et 2011 33 ( * ) .

En réponse aux interrogations de vos rapporteurs sur une éventuelle sous-consommation des coûts ainsi budgétés , ou sur l'inexactitude des hypothèses fondant le plan d'affaires , France Télévisions a tout d'abord expliqué les écarts à la prévision budgétaire en invoquant la nécessaire modification de la programmation des dépenses ainsi que les différentes modalités de comptabilisation des charges .

D'une part, France Télévisions a convenu que le rythme de réalisation de certaines dépenses avait dû être modifié, sans toutefois entraîner un dépassement quelconque de l'enveloppe globale .

Ainsi certaines dépenses programmées en 2008 ne seront réalisées qu'en 2009 ou 2010 . A titre d'illustration, la provision pour dépréciation prévue pour le changement du système informatique, programmée pour 2008, a été comptabilisée en 2009. L'amorce des dépenses liées à la fusion des régies de diffusion, estimée à une vingtaine de millions d'euros, est décalée à 2010.

A contrario , d'autres dépenses ont pu être réalisées plus tôt que prévu. Il s'agit notamment du provisionnement exceptionnel sur 2009 du plan des départs volontaires à la retraite.

Il convient également de mentionner les nouvelles charges non prévues dans le plan d'affaires 34 ( * ) . Il s'agit notamment de :

- la décision de diffusion de France Ô en national. Celle-ci s'est traduite par des coûts de diffusion complémentaires et des besoins liés à la grille de programmes ;

- l'accroissement des obligations d'investissement dans le cinéma ;

- la prise en charge par France Télévisions des coûts d'accompagnement au déploiement du numérique outre-mer.

D'autre part , certaines dépenses liées à la mise en oeuvre de la nouvelle organisation ne sont pas comptabilisées au titre des coûts de transition mais l'ont été dans les charges de personnel (telles que la réduction des disparités hommes/femmes) ou en charges exceptionnelles (notamment la provision de l'incitation pour les départs en retraite).

3. 2010 : An I de l'entreprise unique

L'amélioration des recettes publicitaires constatée en 2009, qui a desserré la contrainte financière en début d'année 2010, permet d'envisager plus sereinement le maintien de la trajectoire de charges ainsi qu'une amélioration du résultat financier.

Pour autant, certaines incertitudes demeurent . Le retour à l'équilibre tiré par les performances publicitaires l'année dernière doit se poursuivre par la maîtrise des charges. L'équilibre atteint en 2009 reste fragile compte tenu de l'ampleur des réformes à poursuivre pendant les deux prochaines années, telles que le développement du média global. Il ne pourra être consolidé que par un effort structurel permis par les synergies dont les effets sont attendus sur la période 2010-2013 ainsi que par une politique systématique de réduction des coûts externes.

S'agissant des dépenses , un certain nombre de projets n'ont trouvé qu'une traduction financière très incomplète . L'enveloppe de 22 millions d'euros prévue dans le plan d'affaires pour les coûts de transition en 2010 pourrait être dépassée.

En ce qui concerne les coûts de diffusion, tout décalage du calendrier d'extinction de la diffusion analogique et de déploiement du numérique pourrait peser sur les économies anticipées.

Il convient également de souligner que le groupe a fait l'objet d'un contrôle fiscal portant sur les années 2005 à 2007. Des propositions de notifications ont été reçues en 2008 concernant 2005, et avant la clôture de l'exercice pour les années 2006 et 2007. Le redressement porte essentiellement sur :

- les principes d'affectation des coûts des programmes aux différentes diffusions ;

- les modalités de comptabilisation des droits sportifs pluriannuels ;

- la territorialité de la redevance reçue par le groupe pour le financement de ses activités dans les territoires d'outre mer.

En réponse à vos rapporteurs sur les conséquences financières de ce contrôle, France Télévisions a précisé que celles-ci « sont sans commune mesure avec les montants notifiés à ce stade de la procédure . [...] Il en résulte un montant total de redressements d'impôts proposés s'élevant à 210 millions d'euros . [...] Cependant, la direction se trouve dans l'incapacité d'estimer avec une fiabilité suffisante le montant probable des conséquences de ces redressements sur les sujets les plus importants relevés par ces notifications . »

En conséquence, l'entreprise a maintenu la provision globale constituée sur l'exercice précédent (ainsi que les impôts différés actifs correspondant aux éléments du redressement qui avaient uniquement un impact de décalage temporel), et l'a complétée pour faire face aux redressements acceptés, ou sur lesquels il existe un risque de dénouement favorable à l'administration. Le montant total des provisions constituées au titre de ce contrôle fiscal s'élève à 18,3 millions d'euros.

Vos rapporteurs se sont également interrogés sur l'état d'avancement du contentieux opposant France Télévisions à la société Télédiffusion de France (TDF) qui fournit au groupe les services de télédiffusion.

TDF est entrée dans une procédure de dialogue compétitif avec France Télévisions afin de fixer le montant des prestations que TDF doit assurer sur les prochaines années, dans le cadre de l'extinction de la diffusion analogique.

La négociation n'ayant pas abouti , TDF a assigné France Télévisions afin de faire reconnaître l'existence d'un accord. Selon le groupe, le montant du coût des prestations 2009 de TDF au titre de la diffusion analogique des chaînes du groupe qui a été retenu correspond à la demande faite par TDF dans le cadre de cette assignation. Il est conforme aux montants retenus sur les exercices précédents. Vos rapporteurs relèvent qu'aucune provision n'a été constituée au titre des dommages allégués par TDF. Néanmoins, France Télévisions les a assurés d'une résolution du conflit très prochaine dans des termes raisonnables pour les deux parties.

S'agissant des ressources , vos rapporteurs se sont demandé si l'absence de report total des écrans publicitaires vers les chaînes privées se renouvellerait en 2010.

En dépit de la performance réalisée par la régie de publicité FTP en 2009, le budget 2010 prévoit une érosion des revenus publicitaires des chaînes de France Télévisions de 16,28 % 35 ( * ) par rapport à l'année 2009. En effet, l'arrêt total de la publicité en 2011 a été ainsi pris en compte.

Quant au plan d'affaires, il a défini une trajectoire des ressources fixant les recettes nettes disponibles après prélèvements à 2 441 millions d'euros en 2010, 2 478 millions d'euros en 2011 et 2 564 millions d'euros en 2012 dont 115 millions d'euros de publicité et de parrainage au terme de la période. Or, il apparaît qu'au 7 juin 2010, le chiffre d'affaires de France Télévisions devrait être supérieur de 25,8 % à l'objectif fixé en 2010.

Vos rapporteurs tiennent à souligner que ce surplus de ressources provient des recettes publicitaires et non de celles du parrainage qui est en très léger retrait 36 ( * ) . France 2 explique 81 % de l'avance en matière de publicité.

Or, cette tendance est susceptible de se prolonger au second semestre car les objectifs 2010 de chiffres d'affaires pour cette période ont été fixés en retrait de 25 % par rapport au montant réalisé en 2009.

Quelle que soit l'évolution finale de ces ressources, le retour à l'équilibre enregistré en 2009 devrait se maintenir en 2010, compte tenu du chiffre d'affaires déjà réalisé. Cette projection est conditionnée néanmoins par le versement de la dotation budgétaire 37 ( * ) ainsi que par le maintien de la trajectoire de charges conformément au plan d'affaires. L'ampleur du bénéfice qui pourrait être éventuellement généré dépendra à la fois du marché publicitaire ainsi que de la performance de la régie face à la concurrence.

Cette stabilisation de la situation financière devrait permettre à France Télévisions de poursuivre en 2010 sa ligne éditoriale ainsi que l'illustre le graphique ci-après. Le coût de grille devrait s'élever à 1 983,3 millions d'euros, soit une progression de 2,38 % par rapport au coût de 2009. Si le coût de grille demeure stable 38 ( * ) pour l'ensemble des genres (jeunesse, magazines, documentaires théâtre, musique variétés, jeux, divertissements), celui de l'information enregistre une augmentation de 5,34 %. Ne disposant pas d'informations précises expliquant cette hausse, vos rapporteurs tiennent à rappeler néanmoins que l'information constitue un secteur dans lequel un nombre significatif d'économies et de synergies peuvent être réalisées.

ÉVOLUTION DE LA RÉPARTITION DU COÛT DES PROGRAMMES EN 2010
PAR RAPPORT À 2009

( en millions d'euros)

Source : d'après les données de France Télévisions

4. 2011 et 2012: la poursuite des réformes

Les réformes entreprises en 2009 et 2010 devront se poursuivre en 2011 et 2012 .

Les réformes structurelles, sociales et économiques doivent être conduites en étroite corrélation . Le nouveau modèle juridique, issu de la fusion des différentes antennes en entreprise unique, devra être accompagné d' ajustements dans l'organisation sociale .

Vos rapporteurs rappellent que la restructuration est fondée sur la base du volontariat. Aucune obligation de mobilité géographique ou fonctionnelle n'a été imposée aux personnels de France 3. Les synergies devront donc être renforcées ou mises en oeuvre, selon les directions régionales.

De surcroît, l'entreprise unique doit parfaire son modèle économique en corrélation avec le modèle de média global qu'elle projette de développer. En effet, la suppression progressive de la publicité, telle que prévue dans le cadre de la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle, a bouleversé les modalités de financement de France Télévisions dans un contexte budgétaire extrêmement contraint. Quant à la stratégie du média global , celle-ci devrait irriguer l'ensemble des projets et métiers qui sont eux-mêmes soumis à une nécessaire redéfinition depuis la fusion des chaînes dans l'entreprise commune.

Cependant, ces défis s'inscrivent dans un contexte économique fragile et peu prévisible . En effet, la concurrence, de la part des chaînes de la TNT bénéficiant d'une couverture géographique en pleine expansion, s'intensifie.


* 19 Ce résultat provient en partie de la réalisation d'un résultat financier positif de 2,1 millions d'euros au lieu d'une prévision de perte financière de 11,2 millions d'euros. La renégociation en 2006 du swap de taux de la SCI France Télévisions et la réalisation de gains sur le portefeuille de placement ont permis de dégager ce résultat.

* 20 Rapport public thématique de la Cour des comptes d'octobre 2009 intitulé « France Télévisions et la Nouvelle télévision publique »

* 21 Programme 841 « France Télévisions ».

* 22 Programme 313 « Contribution au financement de l'audiovisuel public ».

* 23 La réduction de 35 millions d'euros de la dotation a permis de financer d'autre besoins de l'audiovisuel. Son montant a été versé au programme 846 « passage à la télévision tout numérique » du compte de concours financier afin de financer les premières dépenses des fonds d'aides aux populations les plus fragiles, ainsi que celles se trouvant dans des zones privées de TNT.

* 24 Tel que figurant dans les comptes arrêtés par le conseil d'administration du 13 avril 2010.

* 25 Source : Présentation des résultats 2009 au conseil d'administration du 13 avril 2010.

* 26 Le plan d'affaires a prévu un déficit de 98,3 millions d'euros en 2009 qui a été finalement budgété pour 135,4 millions d'euros. Il convient de souligner que le budget 2009 a été adopté lors du conseil d'administration du 16 décembre 2008. Le plan d'affaires 2009-2012 a été présenté au conseil d'administration du 2 juin 2009.

* 27 Cf. compte de résultat.

* 28 Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie.

* 29 L'accroissement de l'obligation cinéma provient du passage du taux basé sur le chiffres d'affaires de référence de 3,3% à 3,4% ainsi que de la prise en compte de la dotation en capital 2008 de 150 millions d'euros dans le calcul de l'assiette 2009.

* 30 Optimisation de la planification et du recours aux personnels non permanents, réduction des coûts de structure, centralisation de certains achats (locations de matériel...).

* 31 Article L. 225-248 du code de commerce : « Si la dissolution n'est pas prononcée, la société est tenue, au plus tard à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes est intervenue et sous réserve des dispositions de l'article L. 224-2 de réduire son capital d'un montant au moins égal à celui des pertes qui n'ont pas pu être imputées sur les réserves, si, dans ce délai, les capitaux propres n'ont pas été reconstitués à concurrence d'une valeur au moins égale à la moitié du capital social. » .

* 32 Le plan d'affaires de 2009-2012 a été négocié à partir de juillet 2008. Il a été présenté dans une première version au conseil d'administration de France Télévisions le 2 juin 2009. Des modifications pour 2009 sont intervenues en septembre 2009. Le plan est intégré à l'avenant au COM pour 2009-2012 (approuvé par le conseil d'administration du 18 décembre 2009 et en cours de signature).

* 33 Le plan d'affaires prévoit des déficits du résultat opérationnel en 2009 et 2010, un retour à l'équilibre opérationnel en 2011 et un excédent du résultat opérationnel en 2012 permettant le retour à un résultat net positif en fin de période.

* 34 Plan d'affaires validé et présenté au conseil d'administration du 2 juin 2009.

* 35 339 millions d'euros in comptes de résultat synthétiques. Cette prévision est néanmoins supérieure à celle du plan d'affaires qui est de 229 millions d'euros.

* 36 Le parrainage en 2010 enregistre une baisse de 947 000 euros par rapport à l'objectif.

* 37 En 2010, le plan d'affaires prévoit l'indexation de la dotation à un taux de 1,75 % pour s'établir à 457,9 millions d'euros. En 2011, le montant de la dotation s'élève à 465,9 millions d'euros après indexation. Il est enfin de 650 millions d'euros en 2012.

* 38 A l'exception du cinéma et des fictions et séries TV qui enregistrent respectivement une baisse de 0,05 % et de 0,04 %.

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