M. Pierre Michel, Directeur général adjoint chargé de la réassurance des catastrophes naturelles à la Caisse centrale de réassurance, M. Laurent Montador, Directeur à la CCR

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La mission commune d'information a enfin procédé à l'audition de MM. Pierre Michel, directeur général adjoint chargé de la réassurance des catastrophes naturelles à la Caisse centrale de réassurance, et Laurent Montador, directeur à la CCR.

Présentant tout d'abord la Caisse centrale de réassurance (CCR), M. Pierre Michel a rappelé qu'elle avait été créée en 1946, à l'origine comme établissement public industriel et commercial (EPIC), avant d'être transformée en société anonyme aux capitaux détenus intégralement par l'Etat, et qu'elle assurait la réassurance des dommages aux biens dans le cadre du régime de catastrophes naturelles. Depuis que cette faculté leur est ouverte, en 1982, une grande majorité des assureurs a ainsi fait le choix d'acquérir auprès d'elle de la réassurance, ce qui leur permet de bénéficier de la garantie illimitée de l'Etat, qu'ils n'auraient pas en s'adressant à des réassureurs privés. La CCR n'est pas un fonds public alimenté par des prélèvements obligatoires, mais une entreprise de droit privé devant constituer des provisions techniques, voire des réserves.

Si les assureurs peuvent bien entendu couvrir n'importe quel type d'évènement naturel, ils sont en revanche légalement tenus de proposer le régime « catastrophes naturelles », qui fait l'objet du prélèvement d'une surprime de 12 % sur les polices d'assurance. L'obligation de réassurance s'explique par le caractère incommensurable des dommages potentiels, qui appelle nécessairement une couverture illimitée de la puissance publique. Si le régime « catastrophes naturelles » a toujours été en équilibre, voire excédentaire depuis sa mise en place, la survenance d'un évènement naturel de grande ampleur comme il ne s'en est jamais produit le mettrait irrémédiablement en difficulté. La garantie de l'Etat n'a, jusqu'à aujourd'hui, été appelée qu'une seule fois, en 1999, suite à un épisode de pluies cévenoles.

Le régime français de couverture des aléas naturels est parmi les meilleurs au monde, couvrant l'ensemble des risques, protégeant la quasi-intégralité des citoyens et étant entièrement solvable.

Interrogé sur ce point par M. Bruno Retailleau, président, M. Pierre Michel a indiqué que le chiffre d'affaires de la CCR s'élevait à 1,2 milliard d'euros, provenant aux deux-tiers des réassurances avec garantie de l'Etat, dont les catastrophes naturelles représentent 90 %, soit 700 millions d'euros environ. Le total des surprimes d'assurance « catastrophes naturelles » se monte à 1,3 milliard d'euros, la CCR disposant de 3 milliards d'euros de réserves pour couvrir le risque « catastrophes naturelles ». Ainsi, en cas de sinistre d'un coût global de 6 milliards d'euros, 1,2 milliard d'euros seraient à la charge des assureurs et réassureurs privés, tandis que la CCR couvrirait tout le reste, dont 2 milliards d'euros seraient in fine pris en charge par l'Etat.

Questionné par M. Bruno Retailleau, président, sur l'opportunité de réformer le régime de catastrophes naturelles, M. Pierre Michel a préconisé un renforcement du volet prévention, qu'il a estimé encore insuffisamment développé, jugeant en revanche très favorablement le dispositif d'encadrement et de mutualisation des primes.

A M. Bruno Retailleau, président, qui lui demandait s'il serait incitatif de diminuer les primes d'assurance en cas de bonne anticipation des risques, M. Pierre Michel a répondu que l'effet serait sans doute faible, compte tenu du niveau modique des primes pour les particuliers. Dans les zones pourvues de PPR, la franchise s'applique après sinistre selon les dispositions du code des assurances, quel que soit le nombre d'occurrences du sinistre. En revanche, dans les autres zones, la franchise est augmentée d'un facteur variable selon le nombre d'occurrences du sinistre. Cette élévation du niveau de la franchise intervenant toutefois après la survenance du sinistre, son effet incitatif reste limité.

M. Laurent Montador, directeur de la CCR, a souligné l'insuffisance de l'information donnée aux particuliers, celle-ci provenant soit des assureurs possédant des systèmes de géolocalisation de leurs polices, soit d'actes notariés. Il a ainsi préconisé une meilleure diffusion de la culture du risque sur l'ensemble de la chaine des acteurs concernés.

A M. Bruno Retailleau, président, qui lui demandait si le système assurantiel français serait en mesure d'assumer la tempête Xynthia, M. Pierre Michel a indiqué que la prise en charge financière des dommages ne poserait de problème ni aux assureurs, ni aux réassureurs, sans qu'il soit nécessaire de recourir à la garantie de l'Etat. S'agissant des délais, en revanche, il a précisé qu'ils pourraient se trouver allongés du fait des discussions entre l'Etat et les assureurs en vue d'améliorer les modalités d'indemnisation actuelles.

M. Bruno Retailleau, président, s'étant enquis de savoir si les « zones noires » identifiées par le Gouvernement étaient particulièrement concernées, M. Pierre Michel a répondu par la négative. Il a précisé que le régime « catastrophes naturelles » suivait les règles contractuelles prévues par la police de base sur laquelle il se trouve greffé.

A M. Bruno Retailleau, président, qui l'interrogeait sur la prise en compte du critère de vétusté dans les indemnisations, M. Pierre Michel a indiqué que cela dépendait en théorie des clauses contractuelles des polices souscrites, précisant cependant que les assureurs avaient trouvé un accord avec l'Etat, dans le cas de la tempête Xynthia, pour ne pas en tenir compte en vue d'améliorer le niveau de couverture des sinistrés. La CCR, a-t-il ajouté, en partagera le coût supplémentaire.

M. Alain Anziani, rapporteur, a demandé à l'intervenant si l'action de la CCR rallongeait les délais d'indemnisation, si les règles posées par la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA) s'imposaient à cette dernière et s'il s'accordait avec les préconisations de réforme du régime « catastrophes naturelles » formulées à la suite à l'épisode de canicule de l'été 2003.

En réponse, M. Pierre Michel a indiqué que :

- l'indemnisation des personnes sinistrées est assurée directement par les assureurs, l'intervention de la CCR n'ayant de ce fait aucun impact sur les délais ;

- les choix opérés par les assureurs ne s'imposent pas à la CCR, qui se limite à appliquer l'ensemble des dispositions du code des assurances relevant du régime « catastrophes naturelles » ;

- il serait souhaitable de renforcer les mécanismes de prévention dudit régime. Si la modulation de la surprime d'assurance serait de peu d'effet auprès des particuliers, elle aurait peut-être davantage d'efficacité auprès des professionnels. Il serait, en outre, opportun d'utiliser davantage les prérogatives règlementaires et de police, mais également d'objectiver les critères d'indemnisation prévus par le régime légal. En effet, ceux-ci ne présentent pas de caractère quantitatif, mise à part la vitesse du vent, et font l'objet d'une évaluation par une commission ministérielle. Leur quantification permettrait tout à la fois d'accélérer les procédures d'indemnisation et de réduire les motifs de contestation, tout en conservant la possibilité de discuter des situations particulières.

M. Laurent Montador a estimé impossible de multiplier à l'excès les instruments de mesure.

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