B. RENFORCER LA COOPÉRATION SANS ABANDONNER SES CONVICTIONS

La construction de l'Europe de la défense est un axe essentiel de la politique européenne de la France. La présidence française de l'Union européenne au 1 er semestre 2009 en a du reste fait un thème central. Cet engagement demeure, mais il est évident que l'objectif poursuivi n'est pas un but en soi, de nature idéologique. A cet égard, nous partageons les approches du Livre vert britannique :

• La coopération des Européens en matière de défense offre des opportunités, en particulier pour le maintien de la paix et la résolution des conflits dans le monde ;

• L'influence de chacun des pays membres et de l'ensemble de l'Europe ne peut qu'être renforcée par une action commune et une concertation sur les grandes questions relatives à la sécurité et à la défense ;

• La défense européenne ne se situe pas en concurrence, voire en opposition, mais en complémentarité avec l'OTAN et avec les Etats-Unis.

La coopération bilatérale privilégiée, avec un partenaire dont tout nous rapproche, n'exclut pas la poursuite d'une coopération multilatérale dont les avantages sont évidents et à laquelle la Grande-Bretagne participe déjà, que ce soit au niveau de l'Organisation de coopération conjointe pour l'armement, ou OCCAR, créée en 1996, de l'accord-cadre LoI (lettre d'intention) entre les six principaux pays producteurs d'armement européens, mis en place en 2000, ou, plus modestement, de l'Agence européenne de défense (AED), créée en 2004, et bien sûr de l'OTAN.

En tout état de cause, le bilatéral pur trouvera ses limites dans les capacités financières des deux Etats à partager seuls le fardeau. Par contre, les règles de juste retour, non justifiées par l'existence de capacités industrielles et de compétences avérées, doivent être, sinon totalement proscrites, du moins très limitées.

En définitive, au pragmatisme de l'approche britannique doit répondre un égal pragmatisme de la France.

En matière de construction européenne, notre approche de la PSDC est déterminée par les besoins et non par des considérations de développements institutionnels. Toute autre affirmation serait d'ordre idéologique. Le Traité de Lisbonne est entré en vigueur et n'est plus contesté, ni menacé d'un référendum par les conservateurs britanniques. Nous pouvons sans reniement partager l'approche du Royaume-Uni selon laquelle ce sont les besoins en capacités qui détermineront, ou non, l'adaptation des structures.

Cette approche n'exclut ni la mise en place des mécanismes prévus par le Traité de Lisbonne, ni leur utilisation, le cas échéant.

Le fait que nous pensions qu'un OHQ permanent est nécessaire et qu'il n'est, en aucune façon, un doublon de ce qui existe à l'OTAN, ne constitue pas un préalable.

Il en va de même pour l'AED dont la France souhaite sans ambiguïté le renforcement du rôle. Les réticences des conservateurs envers l'AED posent néanmoins la question de la transition entre le groupe des pays de la LoI 14 ( * ) du 27 juillet 2000 et l'agence. En effet, il est prévu par la LoI que certaines activités (génération des projets de R&T, harmonisation des besoins militaires) soient progressivement reprises par l'AED. La revitalisation de son action a fait l'objet d'un rapport approuvé par les six ministres de la défense en 2007, ce qui amène logiquement la LoI à concentrer sa réflexion sur les initiatives relatives à la consolidation de la base industrielle et technologique de défense (BITD) européenne et sur les projets nourrissant les travaux et les études de l'Agence européenne de défense.

De même, le renforcement de la coopération bilatérale entre les deux pays ne s'effectue pas au détriment de nos autres partenaires en particulier de l'Allemagne, de l'Italie et de l'Espagne.


* 14 Le 27 juillet 2000, les ministres de la défense de six pays européens (Allemagne, Espagne, France, Italie, Royaume-Uni, Suède) ont signé un traité (« Accord-cadre ») en vue de la mise en oeuvre des mesures prévues dans la « lettre d'intention » du 6 juillet 1998, qui visaient à faciliter les restructurations et le fonctionnement de l'industrie européenne en matière d'armement.

Le processus LoI consiste fondamentalement à encourager la concertation des représentants étatiques et le dialogue avec les industriels des six pays. Son cadre restreint permet aux six partenaires d'oeuvrer à la convergence des priorités et des pratiques nationales, ainsi qu'à simplifier et à harmoniser les procédures entre pays dans les domaines indiqués par le traité.

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