C. LE RÉSULTAT DÉCEVANT DE LA CAMPAGNE DE VACCINATION

La faible adhésion de la population à la vaccination - qui n'est pas une exception française - est sans doute avant tout imputable au fait que le public a eu le sentiment que la grippe était généralement bénigne et qu'il était donc inutile de se faire vacciner.

La commission d'enquête de l'Assemblée nationale a procédé à une étude approfondie de ce phénomène : elle a relevé la contribution à cet échec relatif de la politique de communication et a formulé des propositions ambitieuses.

La commission d'enquête se contentera donc, pour sa part, de relever deux points qui lui paraissent cruciaux.

Le premier est le rôle qu'a sans doute joué l'absence d'association du tissu sanitaire à l'organisation de cette opération majeure de santé publique, ce qui n'a pas été compris par la population.

Le second, qui a été une préoccupation majeure de la commission d'enquête, est que ce relatif échec contribue à la désaffection croissante de nos concitoyens pour la vaccination, qui reste une arme essentielle de prévention.

1. Le constat

La procédure d'envoi de coupons de convocation, mise en place pour assurer la traçabilité de la vaccination, a l'avantage de permettre un décompte précis de la participation à la campagne de vaccination.

Selon les chiffres, arrêtés au 20 juin 2010, donnés à votre commission d'enquête par M. Frédéric Van Roekeghem, directeur général de la CNAM-TS 156 ( * ) , 5,7 millions de coupons sont revenus aux caisses d'assurance maladie, sur 65 millions de convocations envoyées. Un certain nombre (350 000 environ) de ces coupons insuffisamment remplis n'ayant pu être traités, on peut donc estimer, en toute certitude, à 5,35 millions le nombre de personnes qui se sont fait vacciner 157 ( * ) , soit 8,23 % des personnes convoquées, dont le nombre correspondait à la « cible nationale » de la vaccination. A ces chiffres, concernant la vaccination en centres, il faut ajouter 17 000 coupons renvoyés par les médecins de ville (au 21 juin 2010), dans le cadre de la vaccination en ambulatoire qui a commencé au début de février 2010.

On ne connaît pas encore, toutefois, la répartition fine de la couverture vaccinale, notamment le taux de vaccination des populations à risques, ou par classe d'âge.

Les comparaisons internationales

Elles font apparaître, sauf de rares exceptions, le même manque d'adhésion à la vaccination, quelle qu'ait été, du reste, la stratégie retenue par les autorités nationales. Une comparaison intéressante peut être faite avec le Royaume-Uni, dont la population est comparable à la nôtre - 62 millions d'habitants - et qui avait aussi prévu une vaccination de l'ensemble de sa population. Le nombre des vaccinés avait été évalué fin janvier à 4 millions. Selon les informations données à la fin d'avril à une mission d'information de la commission d'enquête, il y aurait eu « entre 5 et 6 millions » de personnes vaccinées. En dépit d'une organisation très différente de la campagne de vaccination, les résultats apparaissent donc équivalents.

En Allemagne, où les commandes fermes de vaccins (50 millions de doses) ne devaient couvrir que 50 % de la population, il y a eu 8,2 millions de vaccinés, soit 10 % de la population (82 millions d'habitants).

En Italie, 40 millions de doses ont été acquises pour vacciner 40 % de la population, mais le taux de vaccination serait très faible (de l'ordre de 850 000 personnes en janvier 2010).

Aux Etats-Unis, 229 à 251 millions de doses de vaccins, selon les sources, avaient été achetées auprès de cinq fournisseurs, et le taux de vaccination serait de l'ordre de 25 % en moyenne (entre 72 et 81 millions de personnes, selon les estimations) - soit un taux nettement inférieur à la couverture vaccinale contre la grippe saisonnière, qui a atteint en 2009-2010 le niveau record de 40 % en moyenne, tous âges confondus.

Les « meilleurs élèves » ont été, en Europe, les pays nordiques, Suède et Norvège : la Suède a atteint un taux de 65 % ; la Norvège aurait dépassé 45 %. Mais ces performances s'expliquent en partie par des éléments favorables qu'on ne retrouve pas dans d'autres pays. Ainsi, la Suède a bénéficié d'une grande sensibilisation aux préoccupations de santé publique, d'une population peu nombreuse (9,2 millions d'habitants) et d'une bonne organisation de la médecine de premier recours : ce dernier atout existe aussi au Royaume-Uni, mais n'y a pas eu les mêmes effets.


* 156 Audition du 23 juin 2010.

* 157 550 265 personnes ont eu une deuxième injection (enfants de moins de 9 ans et certaines populations, dont les personnes allergiques à l'ovalbumine qui ont été vaccinées avec le vaccin Celvapan).

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