B. D'AUTRES MODÈLES À PROMOUVOIR ?

Lors de leurs auditions, d'autres modèles ont été évoqués devant vos rapporteurs, susceptibles de constituer des contrepoids à la gouvernance actionnariale et aux logiques purement financières.

1. La promotion de l'actionnariat de long terme

Lors de son audition par la Délégation à la prospective, M. Jean-Louis Beffa a indiqué : « La question de l'actionnariat des entreprises n'a pas été convenablement traitée : en France les investisseurs court-termistes, sans affectio societatis , représentent une menace pour l'industrie. »

Pour contrer ces investisseurs court-termistes, M. Jean-Louis Beffa a critiqué les options choisies lors de la transposition en 2006 de la directive européenne relative aux offres publiques d'acquisition de 2004.

Il a préconisé :

- d'une part, de renforcer les dispositifs de protection existants contre les offres publiques d'acquisition hostiles (bons « Breton ») en les rendant possibles dans toutes les entreprises d'une certaine taille alors qu'ils font à l'heure actuelle l'objet d'une décision de l'assemblée générale des actionnaires et en s'inspirant de l'exemple de l'Allemagne qui a transposé la directive OPA de façon plus souple que la France ;

- d'autre part, d'abaisser le seuil de déclenchement des OPA obligatoires, de 33,3 % à 20 % du capital ou des droits de vote, afin de réduire le risque de prise de contrôle « rampante ».

LE DISPOSITIF DE « POISON PILL » À LA FRANÇAISE : LES BONS « BRETON »

Lors du vote de la loi relative aux offres publiques d'acquisition n° 2006-387 du 31 mars 2006, le gouvernement a introduit la faculté pour l'assemblée générale de la société visée par une OPA de décider ou d'autoriser l'émission, en période d'offre, de bons de souscription d'actions (BSA), susceptibles d'être attribués à tous les actionnaires de la société et permettant de souscrire à des conditions préférentielles.

Toutefois, les modalités d'émission de tels bons demeurent strictement encadrées, en application de l'article 9 de la directive européenne de 2004 sur les OPA . Le principe de l'émission, les conditions d'exercice et les caractéristiques des BSA requièrent en effet une décision ou une délégation de compétence préalable de l'assemblée générale. Dans tous les cas, l'assemblée générale doit fixer le montant maximal de l'augmentation de capital et le nombre maximal de bons émis, selon un régime analogue à celui du droit commun des augmentations de capital.

Si un ou plusieurs attaquants n'appliquent pas l'article 9 de la directive ou des mesures équivalentes, la société cible peut invoquer la clause de réciprocité et les dirigeants peuvent prendre des mesures de défense, en particulier émettre des BSA, sans réunir à nouveau l'assemblée générale . L'émission des BSA peut donc procéder d'une délégation antérieurement accordée par l'assemblée générale.  Lorsque les mesures de défense ont été décidées « à froid », elles doivent avoir été expressément autorisées par l'assemblée générale dans les 18 mois précédant l'offre.

Plusieurs pays européens (Allemagne, Belgique, Danemark, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Pologne) ont pour leur part choisi de rendre l'article 9 de la directive facultatif, conservant ainsi une plus grande souplesse d'utilisation de leurs mesures de défense.

D'autres conditions d'un engagement de plus long terme des propriétaires du capital des entreprises sont mentionnées plus avant dans le présent rapport, qui montrent le caractère quelque peu héroïque d'un tel objectif dans un contexte où le capital, par sa mobilité même, peut, à tout moment, redéfinir ses modalités d'allocation.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page