ANNEXE II

PROJET DE L'A 51

L'autoroute A 51 relie Grenoble à Marseille, mais un tronçon demeure non réalisé de part et d'autre de Gap. À l'origine, le projet s'inscrivait dans la réalisation d'un axe nord-sud de traversée des Alpes, partant de Mâcon et passant notamment par Grenoble et Draguignan, permettant de décharger l'axe de la vallée du Rhône. Il peut aussi servir de maillon dans l'axe reliant la Côte d'Azur, le Languedoc et l'Espagne d'une part à la Suisse et à l'Europe centrale d'autre part.

Le tronçon actuellement non réalisé traverse le sud de l'Isère et le département des Hautes-Alpes. Deux trajets sont possibles :

- le trajet ouest longerait la RN75-RD1075 : plus court et plus facile à réaliser, il présente l'inconvénient de ne pas desservir la ville de Gap, chef-lieu du département des Hautes-Alpes ;

- le trajet est longerait la RN85 (dite « route Napoléon ») à l'est et passerait par Gap ; plus coûteux et un peu plus long, il desservirait mieux les Alpes du Sud.

De plus, le tronçon déjà réalisé au nord suit le trajet Ouest tandis que le tronçon réalisé au sud emprunte le trajet Est. La réalisation du tronçon central par Gap supposerait donc de relier ces deux trajets ou d'abandonner une partie du tronçon nord.

I. LE FEUILLETON DE L'A51 : DES INCERTITUDES SUR LE TRAJET À L'ABANDON OFFICIEL DU PROJET

Depuis les années 1980, le Gouvernement a fait part à plusieurs reprises de sa préférence soit pour le trajet est, soit pour le trajet ouest. En 1997, une enquête d'utilité publique a ainsi été arrêtée alors qu'elle venait juste d'être lancée.

En 2003, le comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) réaffirmait sa volonté d'achever la liaison autoroutière A 51 Grenoble-Sisteron. Le projet avait, selon les termes du CIADT, deux objectifs :

- assurer une fluidité des déplacements Nord-Sud en offrant aux trafics des massifs montagneux qui sont aujourd'hui attirés vers la vallée du Rhône, des infrastructures sûres et de qualité passant par leurs itinéraires naturels ;

- desservir des territoires alpins, actuellement mal irrigués par des infrastructures de transport, pour favoriser leur développement économique et touristique, notamment le briançonnais qui s'inscrit sur l'itinéraire transfrontalier du col du Montgenèvre. »

La Commission nationale du débat public a organisé un débat public en 2005. Il ressort du compte rendu de ce débat 31 ( * ) que le ministère et l'administration était considérés comme favorables à l'autoroute, notamment au passage par l'est, même si les avis des acteurs locaux étaient assez partagés sur le choix du trajet.

Le tracé est a finalement été choisi en 2006 par le ministre des transports, M. Dominique Perben, et le ministre délégué à l'aménagement du territoire, M. Christian Estrosi.

Toutefois, les orientations du Grenelle ont remis en cause ce projet, retenant le principe de l'arrêt du développement de nouvelles infrastructures autoroutières au profit des autres modes de transport.

Ainsi, l'avant-projet de SNIT entérine l'abandon de l'A 51 et, à titre de compensation :

- prévoit « d'importants travaux d'amélioration de la RN 85 existante entre Grenoble et Sisteron » (rectification de virages, créneaux de dépassement, contournement de villages), dont le coût serait d'environ 150 à 200 millions d'euros. Le contournement de Gap n'est pas inscrit formellement au SNIT, contrairement aux contournements de Montpellier, Lille, Rouen, Lyon, Arles, Thionville ;

- mentionne une « antenne A 51 sud - est de Gap (RN 94) » sur une longueur de 20 km. La nature de cette antenne n'est pas précisée. Elle faciliterait la liaison entre la Côte d'Azur, Gap et les stations de ski des Alpes du Sud (lien vers Briançon notamment), mais n'améliorerait pas la liaison entre Gap et Grenoble.

II LES DIFFICULTÉS DU PROJET D'ACHÈVEMENT DE L'A51

Le projet de réalisation de la section centrale de l'A 51 se heurte à plusieurs difficultés :

- des difficultés techniques : un site très tourmenté et une géologie instable nécessiteraient la réalisation d'ouvrages d'art qui seraient complexes, sans être impossibles à réaliser ;

- la présence de milieux naturels remarquables : le projet d'autoroute passe à proximité du parc national des Écrins et traverse des sites classés Natura 2000. L'autoroute devrait donc être conçue pour avoir l'impact le plus réduit possible sur l'environnement ;

LE CHAÎNON MANQUANT DE L'A51 : PLAN DE SITUATION

Source : DRE PACA / Commission particulière du débat public « Liaison Grenoble-Sisteron », 2005.

- des projections de trafic faibles : de l'ordre de 13 000 véhicules par jour 32 ( * ) .

Ces contraintes conduisent à une estimation de coût élevée par rapport au trafic : 2,5 milliards d'euros selon le ministère pour le passage par l'est (ou 1,8 milliard par l'ouest).

Le financement serait donc difficile à réunir , pour les raisons économiques, environnementales mentionnées, mais aussi pour des raisons juridiques. Le partenariat public-privé (PPP) conduirait à un loyer prohibitif sur une longue période en raison des faibles perspectives de trafic. La concession ne paraît pas non plus possible car 75 à 80 % du montant du projet devrait être apporté par des financements publics ; or le Conseil d'État considère que la concession ne peut être accordée lorsque cette part est supérieure à 70 % environ 33 ( * ) . Il faudrait donc recourir à un marché public .

La solution de l'adossement a été évoquée : elle consisterait à confier la réalisation du tronçon à l'une des compagnies déjà présentes soit sur le tronçon nord, soit sur le tronçon sud. L'une de ces compagnies réaliserait sans frais ou à frais réduit le tronçon central, en échange d'un allongement de la concession dont elle bénéficie déjà. Cette solution , qui entrainerait une augmentation importante de la durée des concessions existantes, ne paraît pas non plus possible juridiquement . Le système de l'adossement, qui a permis la réalisation d'une grande partie du réseau autoroutier français, a été remis en cause par le droit européen de la concurrence 34 ( * ) . Les sections nouvelles d'autoroute doivent donc faire l'objet d'une procédure de mise en concurrence et d'une concession spécifique.

Au total, la réalisation du projet relèverait donc d'un choix volontariste d'aménagement du territoire .


* 31 http://www.debatpublic.fr/docs//compte-rendu/compte-rendu+cpdp+lgs.pdf

* 32 Estimation effectuée dans le cadre du débat public de 2006 et communiquée à votre rapporteur par le ministère.

* 33 Conseil d'État, Syndicat mixte du traitement des ordures ménagères centre-ouest seine-et-marnais, 30 juin 1999, n° 198417. Dans le cadre d'une délégation de service public (par opposition à un marché public), la rémunération du concessionnaire doit être assurée pour une part substantielle (estimée à 30 %) par le résultat de l'exploitation du service.

* 34 Directive du 14 juin 1993, dite « directive Travaux ».

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