CONCLUSION

Le deuxième acte de la crise financière grecque vient souligner les limites de l'intervention financière européenne du printemps 2010 et l'incapacité pour l'Union européenne de rassurer les marchés sur la solvabilité d'un de ses Etats membres. Les mesures qu'elle a pu adopter en faveur d'une meilleure gouvernance économique peinent, en outre, à convaincre les créanciers des pays dits périphériques, l'effet de contagion ne parvenant pas à être stoppé.

La situation économique et financière de la Grèce devrait néanmoins conduire l'Union européenne à fournir, aux côtés du Fonds monétaire international, une nouvelle aide à Athènes afin, notamment, de lui permettre de continuer à mettre en place les réformes structurelles aptes à réduire son déficit budgétaire et faciliter, dans le même temps, une reprise économique.

Ce nouveau prêt constitue la moins mauvaise hypothèse tant toute restructuration, « reprofilage » ou rééchelonnement comporte des risques pour le système financier local mais aussi l'ensemble de la zone euro, en dissuadant les investisseurs et en fragilisant un peu plus l'Irlande et le Portugal, qui bénéficient eux aussi d'une assistance financière. Ce deuxième plan d'aide n'en comporte pas moins des risques politiques et sociaux, un durcissement de l'opposition aux mesures d'austérité étant nettement perceptible.

Les institutions communautaires doivent, à cet égard, tenter de redonner un sens positif à l'union monétaire tant celle-ci semble partiellement déconsidérée par les opinions publiques. Le franchissement d'une nouvelle étape en matière de gouvernance de la zone euro apparaît à cet égard indispensable alors qu'un débat de fond doit être engagé sur la valeur même de la monnaie ou la gestion de la dette souveraine. Il convient à cet égard de réfléchir aux conditions d'octroi aides financières à la Grèce, à l'Irlande ou au Portugal, afin de redonner un espoir aux populations concernées, en particulier chez les plus jeunes. Il en va de la crédibilité même du projet européen.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission s'est réunie le mercredi 15 juin 2011 pour l'examen du présent rapport. A l'issue de la présentation faite par les rapporteurs, le débat suivant s'est engagé :

Mme Catherine Tasca :

J'espère que votre déplacement a été ressenti par vos interlocuteurs comme une marque d'attention de la part de notre pays à l'égard d'un pays en proie à de si graves difficultés.

Nous en sommes néanmoins réduits au rôle de spectateurs d'un naufrage, d'une véritable descente aux enfers. Mais peut-on réellement parler d'échec du gouvernement grec ? Il s'agit plutôt d'un échec pour les prescripteurs d'une potion - celle de la rigueur - qui tue. Le Parlement français se doit d'alerter les membres de la Troïka sur les effets dévastateurs de ces plans d'austérité sur des pays exsangues.

Les conditions de financement de la dette octroyées par les marchés à la Grèce sont scandaleuses : comment peut-on tolérer des taux à 10 ans atteignant 17 %. Face à de tels chiffres, l'Union européenne se doit de réagir et prêter à des taux quasi symboliques. C'est la construction européenne qui est en cause.

M. Simon Sutour :

Il existe effectivement un risque réel que, face aux programmes de rigueur mis en place, le malade meure guéri. Nous n'avons pas de prise sur tous les membres de la Troïka, loin de là : nous ne pouvons agir ni sur le FMI, ni sur la BCE. Le Conseil des ministres de l'Union européenne dispose, lui, d'un certain pouvoir. Il ne doit plus, à cet égard, être le lieu de déclarations et de postures contradictoires, parfois adoptées pour des raisons de politique interne. Il faut avoir conscience que, dans le contexte de la mondialisation, la moindre « petite phrase » de certains dirigeants peut avoir de lourdes conséquences financières. Nos interlocuteurs ont, d'ailleurs, souligné la qualité de la réaction française à cette crise. Par ailleurs, l'euro doit, au-delà de son acception économique, devenir un véritable instrument politique.

Le gouvernement grec, qui nous a semblé être composé de personnalités solides, se retrouve dans une situation terrible, contraint d'appliquer un programme sur lequel il n'a pas été élu. Le souhait de voir l'opposition appuyer le plan gouvernemental demeure, pour des raisons de politique nationale, un voeu pieux, en dépit des appels en ce sens de l'Union européenne et du FMI. François Fillon, comme José Manuel Barroso, ont néanmoins invité le leader de Nouvelle démocratie , la principale formation d'opposition, à aller dans cette direction, à l'occasion d'entretiens à Paris et à Bruxelles la semaine passée.

La population grecque semble lasse, fragilisée par des mesures de rigueur sans précédent et divisée, chaque catégorie de la population scrutant chez la voisine des réformes à accomplir.

M. Charles Gautier :

Il convient de rappeler que la Grèce a vécu largement au dessus de ses moyens pendant des années. Elle paye malheureusement aujourd'hui le prix d'excès en tout genre : fraude fiscale, recrutement complaisant et sans retenue au sein de la Fonction publique etc. Il n'appartient pas au contribuable européen de combler totalement les besoins de financement grecs.

M. Simon Sutour :

Il y a eu certes des abus et il en reste à corriger. On m'a cité l'exemple de l'intégration des assistants parlementaires dans la fonction publique à des conditions avantageuses : seize mois et demi de salaire par an. La population ne veut plus, à cet égard, endosser la responsabilité des errements des gouvernements précédents. Et les jeunes sont victimes d'une injustice : ils sont les premières victimes du laxisme budgétaire du passé. L'euro est un symbole politique, ce n'est pas seulement une question économique. C'est un symbole de solidarité. Nous ne devons pas créer des fossés entre Européens.

M. Pierre Bernard-Reymond :

La solution à ces difficultés tient sans doute à l'émergence d'un véritable fédéralisme économique européen.

Par ailleurs, si le climat entourant la préparation de ce deuxième plan d'aide semble tendu, il ne faut pas oublier que la situation était quasiment la même il y a un an, l'Allemagne tardant à donner son accord à l'octroi du premier prêt.

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À l'issue du débat, la commission a autorisé la publication du présent rapport.

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