2. Accélérer la disparition de certaines molécules

Dans ce cadre, votre rapporteur est favorable à la disparition de certaines molécules, soit que l'on puisse les substituer, soit qu'il convienne d'éviter spécifiquement l'exposition périnatale.

a) Les phtalates à chaînes courtes

Les éléments recueillis par votre rapporteur le conduisent à penser qu'il serait possible et souhaitable d'accélérer le retrait du marché de certains phtalates.

D'après les informations transmises par les fabricants, il convient de distinguer deux grandes familles de phtalates, ceux à chaîne courte et ceux à chaîne longue qui se distinguent donc par leurs caractéristiques atomiques. Les phtalates à chaîne courte se dissocieraient plus facilement de leurs matériaux et pénètreraient plus aisément l'organisme.

A ces données s'ajoute le fait que la substitution est d'ores et déjà très engagée depuis une dizaine d'années en Europe. :

En outre, les prix des différents produits ne rendent pas trop complexe ce processus :

Plastifiants

Prix €/t

DEHP

1650

DINP

1750

DIDP

1750

DINCH

2200

DEHA

2100

DEHT

2100

trmellitates

2800

Mesamoll

2300

polymériques

2700 - 3000

phosphates

3200 - 3800

Source : Solvay, 2011

Plus particulièrement, votre rapporteur souhaite que des alternatives à l'usage médical du DEHP soient de nouveau envisagées . L'exposition des publics à risque à l'occasion d'une hospitalisation peut être importante à ce perturbateur endocrinien. Un prématuré hospitalisé serait surexposé au DEHP via les tubulures et différentes poches plastiques .

Il semble tout à fait possible de le conserver, si nécessaire, pour les publics sans risque mais de renoncer à son usage pour les femmes enceintes, allaitantes, les nouveaux nés et jeunes enfants et, sans doute, les personnes atteintes ou en rémission de cancers hormono-dépendants.

b) Retenir l'objectif d'interdire la présence de PE dans les produits spécifiquement destinés aux jeunes enfants et aux femmes enceintes

Plus généralement, votre rapporteur souhaite que les produits perturbateurs endocriniens soient exclus des produits à usage périnatal , c'est-à-dire tous les produits spécifiquement destinés aux femmes enceintes et aux jeunes enfants jusqu'à trois enfants.

On sait que la période périnatale est particulièrement vulnérable parce que l'organisme est en formation et que le foetus et le jeune enfant n'ont pas les mêmes capacités d'élimination qu'un adulte. Beaucoup d'études laissent à penser que dans cette période de la vie, la dose peut être moins importante que le moment où elle est absorbée et que ces conséquences peuvent être dramatiques, y compris sur plusieurs générations.

Dès lors, par précaution, il ne paraît pas disproportionné de proposer d'éliminer tout perturbateur endocrinien des produits destinés aux bébés et femmes enceintes et, par l'étiquetage, de permettre aux mères d'éviter pour elles-mêmes et pour leurs enfants des produits d'usage courant qui pourraient présenter un risque dans l'état des connaissances présentes.

c) Une action à inscrire dans un cadre européen

Comme l'avait déjà souligné notre collègue, le sénateur Gérard Dériot, dans son rapport sur la proposition de loi visant à interdire le Bisphénol A dans les plastiques alimentaires, la compatibilité d'un dispositif d'interdiction avec le droit communautaire est limitée . Le principe de libre circulation des marchandises s'oppose à toute interdiction qui aurait un objectif protectionniste. En revanche, une mesure fondée sur la protection de la santé est envisageable. Plus particulièrement, en ce qui concerne le principe de précaution, celui-ci peut conduire à l'adoption de mesures provisoires dans l'attente d'une évaluation plus complète du risque.

Gérard Dériot soulignait d'ailleurs qu'une procédure réglementaire était prévue par l'article L. 221-5 du code de la consommation et qu'une loi n'était pas juridiquement nécessaire .

Sous ce regard, la proposition de loi présentée par notre collègue député Yvan Lachaud visant à interdire l'utilisation des phtalates, des parabènes et des alkylphénols, et adoptée par l'Assemblée Nationale le 3 mai dernier, apparaît beaucoup trop générale. D'ailleurs, il avait lui-même souhaité la réduire à la suspension ou à l'interdiction de certaines substances et de certains usages destinés aux jeunes enfants et aux femmes enceintes. Ces amendements, qui finalement n'ont pas été retenus en raison de la procédure de vote utilisée, rejoignent l'analyse de votre rapporteur.

Toutefois, il propose de ne pas poursuivre dans la voie de multiples lois nationales d'interdiction en fonction de substances et d'usages précis car cela pourrait conduire à multiplier les textes au fur et à mesure des avancées scientifiques mais aussi de l'actualité et des manifestations d'inquiétude qui l'accompagnent.

Non seulement, même s'il s'agit de santé publique, une telle démarche relève plutôt du domaine réglementaire et n'est pas nécessairement compatible avec le droit européen, mais surtout de telles dispositions auraient beaucoup plus d'ampleur si elles étaient portées au niveau communautaire dans le cadre de la législation en vigueur car elles s'appliqueraient à l'ensemble du territoire de l'Union .

Les parlementaires auraient donc la possibilité soit d'adopter une résolution européenne sur la base d'un texte transmis au Parlement sur le sujet , soit, sans attendre une telle possibilité, de voter une résolution d'ordre général dans le cadre de l'article 34-1 de la Constitution .

Une telle résolution pourrait avoir pour objectif d'inciter le Gouvernement à entamer des démarches au niveau européen, notamment l'engagement d'une demande de restriction sur certains produits dans le cadre de Reach comme a pu le faire récemment le Danemark .

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