2. La nécessaire professionnalisation du secteur artistique

Selon une très récente étude du département des études de la prospective et des statistiques (DEPS) du ministère de la culture, 24 000 artistes auteurs étaient affiliés à la Maison des artistes en 2009, avec une progression de 6 % par an en moyenne depuis 1999. Lors de leur audition, les représentants de la Maison des artistes ont évoqué, pour 2011, le chiffre de 53 000 artistes auteurs comptabilisés, ajoutant à la catégorie des affiliés celle des assujettis.

LA MAISON DES ARTISTES

Une mission administrative d'exécution de service public puisque la MDA est l'organisme agréé par l'État pour la gestion de la branche des arts graphiques et plastiques du régime obligatoire de sécurité sociale des artistes auteurs.

Dans le cadre de sa mission de gestion de la sécurité sociale, la Maison des Artistes

- a une compétence nationale, c'est-à-dire qu'elle est chargée d'instruire les dossiers des artistes et diffuseurs de leurs oeuvres résidant fiscalement en France (région parisienne, province, départements d'outre mer). La Maison des Artistes ne dispose pas d'antennes dans les régions ou départements) ;

- agit pour le compte du régime général de sécurité sociale sous la double tutelle du ministère chargé de la sécurité sociale et du ministère chargé de la culture.
Elle met en application les dispositions législatives et réglementaires codifiées aux articles L. 382-1, R. 382-1 et suivants du code de la sécurité sociale qui lui assignent les opérations de gestion administrative, financière et comptable du régime, soit :

- le recensement permanent des artistes des arts graphiques et plastiques et des diffuseurs de leurs oeuvres résidant fiscalement en France, y compris les DOM ;

- les obligations des employeurs en matière d'affiliation à la sécurité sociale pour les artistes dont elle instruit les dossiers ;

- le recouvrement des cotisations et contributions concernant les artistes et les diffuseurs ;

- le secrétariat conjoint avec l'AGESSA d'une commission d'action sociale.

Source : Maison des artistes

Le constat est celui d'un éclatement des types d'artistes auteurs, n'ayant pas un profil type. La notion d'artiste recouvre des réalités très variées, devant être prises en compte globalement, à défaut de pouvoir se retrouver sous un statut unique d'artiste-auteur. Ce morcellement , regretté par les professionnels et déjà décrit en 2009 par MM. Butaud et Kancel 40 ( * ) (inspection générale des affaires culturelles), se traduit d'ailleurs dans l'approche « par petits bouts » que représente par exemple la circulaire 41 ( * ) du 16 février 2011 relative aux revenus tirés d'activités artistiques relevant de l'article L. 382-3 du code de la sécurité sociale et au rattachement de revenus provenant d'activités accessoires aux revenus de ces activités artistiques. En outre, on peut constater une dispersion des revenus artistiques, soulignée par le DEPS, ainsi qu'une très forte concentration puisque les 10 % des artistes les mieux rémunérés captent à eux seuls 43 % des revenus.

LE RÉGIME DE SÉCURITÉ SOCIALE DES ARTISTES AUTEURS AFFILIÉS

Toute diffusion ou exploitation commerciale, par un diffuseur 42 ( * ) , d'une oeuvre originale d'un artiste auteur donne lieu au versement d'une rémunération (les droits d'auteur). L'acquisition de l'oeuvre (tableau, sculpture, etc.) donne lieu également à rémunération.

Lorsque l'artiste auteur exerce son activité de façon indépendante (non salariée) et qu'il réside fiscalement en France, le versement des droits d'auteur par le diffuseur ou la vente d'oeuvres s'accompagne du prélèvement de cotisations et contributions obligatoires, opération appelée précompte. Ces cotisations et contributions sont collectées par deux associations agréées :

- la Maison des artistes pour les oeuvres d'art graphiques et plastiques ;

- l'Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs (Agessa) pour les activités de création littéraire, dramatique, musicale, audiovisuelle et photographique.

Les cotisations aux assurances sociales (vieillesse, maladie, maternité, invalidité, décès), la CSG et la CRDS sont dues par l'artiste auteur 43 ( * ) au titre du régime de protection sociale des artistes auteurs (articles L. 382-1, R. 382-1 et suivants du code de la sécurité sociale) ; ce régime spécifique est rattaché au régime général des salariés.

Sous conditions de ressources et s'il en fait la demande, l'artiste auteur est affilié à la Maison des artistes ou à l'Agessa ; à ce titre, il bénéficie des prestations équivalentes à celles du régime général (indemnités journalières, congés maternité, etc.). Pour cela, il doit avoir perçu, l'année civile qui précède, des revenus d'auteur 44 ( * ) supérieurs au seuil d'affiliation, soit 900 fois la valeur du Smic horaire (7 524 euros de revenus sur l'année 2007, 7 749 euros de revenus sur l'année 2008). Lorsque le seuil d'affiliation n'est pas atteint, l'affiliation ou son maintien peut être prononcé, à titre dérogatoire, par la commission professionnelle de la Maison des artistes ou de l'Agessa, qui juge de l'engagement professionnel de l'artiste auteur. S'il n'est pas affilié, il est dit assujetti.

Source : Ministère de la culture, département des études, de la prospective et des statistiques - avril 2011

Au sein des douze disciplines répertoriées, trois catégories méritent un commentaire. Selon l'étude du DEPS, graphistes et peintres représentent 71 % du total des affiliés, tandis que les plasticiens, qui ne représentent que 5 %, ont toutefois vu leur nombre tripler en dix ans, traduisant le développement des nouvelles formes de création dans ce domaine (installations, vidéos, oeuvres éphémères, etc.).

Elle décrit également d'autres phénomènes intéressants : la concentration de la population artistique en Ile-de-France (plus de la moitié des affiliés) et à Paris (où vit un tiers des affiliés).

La dispersion des revenus, des profils, des situations et les témoignages recueillis par votre rapporteur illustrant les difficultés face à une profession éclatée, sont autant d'éléments mettant en évidence la nécessité d'une approche globale. Les témoignages des personnes auditionnées ont particulièrement souligné ce besoin dans le monde des arts plastiques. Or les professionnels peuvent s'appuyer sur des structures existantes, telles que le Cipac (fédération des professionnels de l'art contemporain), pour travailler dans ce sens. Le Cipac réunit dix-sept associations professionnelles et représente ainsi les directeurs de centres d'art, de musées, de Frac, d'écoles d'art et de classes préparatoires, les galeristes, les commissaires d'exposition, les responsables d'artothèques ou de bibliothèques spécialisées en art, les critiques d'art, les enseignants d'écoles d'art, les médiateurs et les chargés des relations auprès des publics, les régisseurs et restaurateurs d'oeuvres. Cette fédération dénombre, à travers ses associations membres, 1 600 professionnels travaillant dans le secteur de l'art contemporain en France et 550 structures culturelles (musées, galeries, écoles d'art, etc.).

Le lancement d'une réflexion sur la nécessité d'une convention collective propre au secteur des arts plastiques, et le chantier de la formation professionnelle ont été évoqués au cours des auditions. Ce dernier thème fait d'ailleurs suite au rapport de l'inspection générale des affaires culturelles (IGAC) de 2009 « Propositions pour la mise en place d'un dispositif de formation continue pour les artiste auteurs ». Ce sont des réformes qu'il paraît urgent d'entreprendre pour une mise en oeuvre rapide de propositions pour l'ensemble de la profession.

Proposition n° 24 : Mettre en oeuvre une convention collective pour les professionnels du secteur des arts plastiques.

Proposition n° 25 : Proposer aux artistes auteurs un dispositif de formation continue.


* 40 Rapport de l'inspection générale des affaires culturelles (IGAC) de 2009 « Propositions pour la mise en place d'un dispositif de formation continue pour les artistes-auteurs ».

* 41 Cf. annexe.

* 42 Par exemple, les galeries d'art, les éditeurs, les producteurs de films. Les sociétés d'auteurs (telles que la Sacem, la Scam, la SACD) reversent à l'Agessa les cotisations afférentes aux droits d'auteur qu'elles répartissent.

* 43 Le diffuseur quant à lui verse à l'Agessa ou à la Maison des artistes une contribution représentant 1 % de la rémunération versée, 1 % des commissions perçues (sociétés de ventes volontaires) ou 1 % de 30 % du chiffre d'affaires issu de la vente d'oeuvres artistiques.

* 44 On entend par revenus d'auteur les revenus imposables au titre des bénéfices non commerciaux majorés de 15 % ou les droits d'auteur bruts s'ils sont déclarés en traitements et salaires.

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