III. UNE TROP LENTE RÉSORPTION DU NOMBRE DE LOIS EN ATTENTE DE MESURES RÉGLEMENTAIRES

La plupart des commissions déplorent la stagnation ou la trop lente diminution du nombre des lois les plus anciennes non totalement mises en application . En revanche, la commission des lois constate une amélioration, surtout pour les lois les plus anciennes.

La commission des affaires sociales fait observer que , sur les 109 lois promulguées au cours des années parlementaires 1997-1998 à 2009-2010, 63 lois sont désormais pleinement mises en application et 46 ne le sont encore que partiellement. Sur 2 645 mesures attendues, 2 106 mesures ont été prises et 539 sont encore à prendre.

Sur les 35 lois promulguées au cours des années parlementaires 2006-2007 à 2009-2010, 19 lois sont désormais pleinement mises en application, 15 lois ne le sont encore que partiellement et 1 pas du tout. Sur 687 mesures attendues, 548 mesures ont été prises, 139 mesures réglementaires sont encore à prendre.

Commission des affaires sociales

Mesures réglementaires relatives aux lois promulguées depuis l'année parlementaire 2006-2007

Année parlementaire

Nombre de mesures prévues (sauf rapports) (1)

Nombre de mesures prises (sauf rapports)

2006-2007

181

122

2007-2008

78

74

2008-2009

336

278

2009-2010

92

74

Total

687

548

(1) Sont exclues les mesures attendues par des dispositions devenues sans objet (de même que pour le calcul du taux de mise en application de chaque loi).

La commission des affaires sociales note que, par rapport à l'ensemble des lois promulguées depuis juin 1981 (et hors lois d'application directe), dans les secteurs relevant au fond de sa compétence, 78 % de ces textes ont été pleinement mis en application , soit 217 lois tandis que 54 lois n'étaient encore que partiellement mises en application, 5 pas du tout et 3 devenues sans objet.

La commission de l'économie précise qu'il n'y a plus lieu d'attendre la mise en application de 14 lois dont les mesures sont désormais considérées comme étant devenues sans objet . En effet, soit les dispositions qui restaient en attente de décrets d'application ont été mises en oeuvre par d'autres textes, soit le Gouvernement a annoncé avoir définitivement renoncé à adopter les textes d'exécution correspondants.

Elle signale également le cas de la loi n° 2000-698 du 26 juillet 2000 relative à la chasse pour laquelle ne manque plus qu'un décret prévoyant la mise en place d' un fichier national des permis de chasser . Un groupe de travail a été mis en place en 2006...

La commission des finances note que 6 lois anciennes, remontant à 2001, ont été entièrement mises en application dans l'année, mais il est vrai que cela a souvent résulté de la renonciation à élaborer des décrets devenus sans objet, suite à l'adoption, plusieurs années plus tard, de mesures législatives ou réglementaires sur le même thème.

La commission regrette que 2 lois n'aient connu aucune évolution de leur mise en application depuis un an et qu'ainsi, par exemple, le dispositif relatif à l'allégement de la taxation des jeux automatiques installés dans les lieux publics soit toujours inopérant depuis plus de cinq ans.

La commission des finances relève également que les quatre mesures relatives aux droits d'accises encore attendues pour l'application de la loi de finances rectificative pour 1999 et annoncées comme imminentes à la fin de l'année 2010 semblent ne plus devoir être prises.

À ce propos la commission émet le souhait d'être informée des motifs des situations de blocage portant sur les textes les plus anciens ou qu'une initiative gouvernementale en prévoit l'abrogation .

La commission des lois considère que les lois promulguées sous la XII ème législature et sous la XIII ème législature antérieurement à l'année parlementaire 2010-2011, présentent globalement des taux de mise en application satisfaisant mais que certains retards doivent être soulignés.

2 lois partiellement non mises en application le sont à présent totalement :

- loi n° 2010-201 du 2 mars 2010 renforçant la lutte contre la violence de groupe et la protection des personnes chargées d'une mission de service public ;

- loi n° 2010-658 du 15 juin 2010 relative à l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée dont le dernier décret (n° 2011-1481) date du 8 novembre 2011.

Cependant la commission relève également que quelques lois anciennes ne sont que partiellement mises en application :

- loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs ;

- loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire ;

- loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité aux parcours professionnels dans la fonction publique ;

- loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale .

Enfin la commission déplore que ne soit toujours pas mise en application la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2010 relative au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers.

Pour l'ensemble des commissions , le détail, loi par loi, des mesures d'application prises permet de relever quelques cas emblématiques de retard dans la mise en application des lois énumérés ci-dessous, par ordre chronologique.

12 ans de retard

- Mise en application de la loi n° 99-584 du 12 juillet 1999 modifiant l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques vacances (commission des affaires sociales), la seule mesure attendue n'ayant toujours pas été prise.

11 ans de retard

- Mise en application de la loi n° 2000-197 du 6 mars 2000 visant à renforcer le rôle de l'école dans la prévention et la détection des faits de mauvais traitements à enfants (commission de la culture).

Un décret d'application devait fixer les modalités d'organisation des visites médicales de détection des enfants maltraités ainsi que celles de séances annuelles d'information et de sensibilisation . Près de douze années plus tard, ce décret, pourtant indispensable à la mise en oeuvre de la loi, n'est toujours pas publié.

- Mise en application de la loi n° 2000-627 du 6 juillet 2000 modifiant la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives (commission de la culture).

Un décret est toujours attendu pour définir les droits et obligations des sportifs de haut niveau, des sportifs espoirs et des partenaires d'entraînement. Un décret en conseil d'État doit fixer les conditions d'emploi dans les administrations publiques des sportifs de haut niveau mais le ministère chargé des sports et celui chargé de la fonction publique ne sont toujours pas parvenus à s'entendre sur un projet. Enfin, un décret en Conseil d'État doit préciser les conditions d'application des mesures d'accompagnement compensatoires ou correctrices en cas d' atteinte aux espaces, sites, ou itinéraires des sports de nature .

Ce retard de 11 années a été dommageable tant pour les sportifs que pour l'environnement que la loi avait prévu de protéger .

9 ans de retard

- Mise en application de la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale (commission des affaires sociales) avec un taux de mise en application stagnant depuis plusieurs années à 56 % pour 28 mesures encore attendues .

- Mise en application de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale (commission des affaires sociales) avec un taux de mise en application stagnant également depuis plusieurs années à 51 % pour 62 mesures encore attendues.

- Mise en application de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (commission des affaires sociales) avec le même taux que l'an dernier de 47 % pour 46 mesures encore attendues.

7 ans de retard

- Mise en application de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (commission de l'économie).

Cinq décrets étaient attendus depuis six ans : deux ont été pris en 2010-2011. Il manque encore le texte concernant la fermeture d'un site pour atteinte ou risque d'atteinte au maintien de l'ordre et de la sécurité publique, tandis que le décret en Conseil d'État qui devait fixer le régime des sanctions a été abandonné.

- Mise en application de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle (commission de l'économie).

Trois décrets sont attendus depuis sept ans Ces textes concernent l'autorisation par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) des décrochages locaux - le projet de décret a recueilli un avis défavorable du CSA et rencontré l'hostilité des opérateurs -, la procédure d'autorisation par le CSA de l'usage des fréquences de diffusion radio-télévision par satellite , et les conditions d'obligation de service minimal en langue française .

La publication de ce dernier décret ne semble plus du tout envisagée, les craintes qui avaient poussé le législateur à intervenir en 1986 n'étant plus considérées comme étant d'actualité.

- Mise en application de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (commission des lois).

Cinq décrets ne sont toujours pas publiés sept ans après la promulgation de la loi . Il s'agit de textes relatifs à la politique de lutte contre l'insalubrité et le saturnisme dans l'habitat , à la création d'établissement publics d'enseignement primaire expérimentaux , aux écoles de la marine marchande , à la dotation générale de décentralisation .

Aucun nouveau texte d'application n'a été pris depuis le mois d'octobre 2010.

6 ans de retard

- Mise en application de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux (commission de l'économie).

Trois mesures d'application sont encore attendues, près de sept années après la publication de la loi , relatives à l'institution d'un fichier central à caractère national des permis délivrés , des validations et des autorisations de chasser , aux dates de chasse aux oiseaux d'élevage .

Alors que la rédaction de ces trois textes, déjà fort avancée au printemps de 2006, laissait prévoir leur publication avant la fin de l'année 2006, aucun changement n'est intervenu depuis 2010 .

- Mise en application de la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école (commission de la culture).

Depuis plus de six ans, l'application de cette loi attend toujours trois décrets en Conseil d'État relatifs aux fonctions spécifiques des directeurs d'école maternelle et élémentaire , à l'indemnisation de la formation continue des enseignants et à l'application du code de l'éducation dans les établissements français d'enseignement à l'étranger .

- Mise en application de la loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales (commission de l'économie).

Un décret est attendu depuis six ans pour fixer les modalités de la représentation des agents de La Poste et l'adaptation à cette dernière des dispositions du code du travail relatives à l'hygiène, la sécurité et la santé au travail .

5 ans de retard

- Mise en application de la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d' orientation agricole (commission de l'économie).

Quatre mesures d'application sont encore attendues, depuis plus de cinq années , relatives à l'interdiction de lubrifiants non éco labellisés dans les zones écologiquement sensibles, à l'interdiction de la distribution aux consommateurs de sacs de caisse à usage unique en plastique non biodégradable, à la détermination des usages du plastique pour lesquels l'incorporation de matières d'origine végétale est obligatoire et aux modalités de certification du matériel génétique support de la voie mâle - qui doit entrer en vigueur le 1 er janvier 2015.

Il est à noter que les deux décrets relatifs aux sacs en plastique et aux usages du plastique ont suscité des réserves quant à leur euro-compatibilité de la part de la commission européenne.

- Mise en application de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques (commission de l'économie).

Plus de cinq années après la publication de la loi, une mesure d'application est encore attendue relative aux modalités de mise en oeuvre de la taxe pour la collecte, le transport, le stockage et le traitement des eaux pluviales .

Quant aux supports techniques relatifs aux ouvrages des services publics de distribution d'eau et d'assainissement et aux redevances perçues par l'État en raison de l'occupation de son domaine public par les ouvrages des services d'eau potable et d'assainissement exploités par les collectivités territoriales, les décrets attendus sont intervenus mais ils nécessitent eux-mêmes encore la publication de certaines dispositions réglementaires.

4 ans de retard

- Mise en application de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 , portant réforme de la protection juridique des majeurs (commission des lois).

Près de cinq ans après la promulgation de la loi, une seule des trois mesures réglementaires d'application attendues a été prise cette année (la fixation du barème national pour le calcul de l'indemnité versée au mandataire judiciaire à la protection des majeurs) .

Sont donc encore attendues :

- les mesures réglementaires d'application relatives aux conditions de versement des capitaux revenant à la personne protégée sur un compte spécifique ; ce texte était déjà annoncé en cours de finalisation l'an passé ;

- la désignation de personnes pour assister le greffier dans son contrôle des comptes de tutelle ; la désignation d'un agent du Trésor ayant achoppé pour des raisons exclusivement budgétaires, il est maintenant envisagé de donner cette nouvelle compétence aux huissiers de justice.

Il est évident que ces retards peuvent avoir des conséquences directes sur des situations humaines déjà difficiles et risque de laisser des marges de manoeuvre excessive aux mandataires judiciaires.

2 ans de retard

- Mise en application de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique (commission des lois).

Pour la commission, il y a eu là longtemps, surtout au regard de la priorité que le Gouvernement semblait attacher à cette loi, « Un calendrier réglementaire à la peine » marqué par un récent rattrapage .

Quant aux retards concernant plus particulièrement les lois ou les amendements d'origine sénatoriale, ils sont évoqués ci-après.

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