RECOMMANDATIONS

POUR LE DÉVELOPPEMENT MAÎTRISÉ, EN TOUTE TRANSPARENCE, DE LA BIOLOGIE DE SYNTHÈSE

1. Favoriser un environnement public porteur pour la biologie de synthèse

- Identifier les biotechnologies et, singulièrement, la biologie de synthèse, comme stratégiques pour la science - recherche fondamentale comme appliquée - la formation, la technologie, les applications industrielles et de services ;

- Prévoir des financements publics pour la formation et la recherche dans le secteur de la biologie de synthèse, en lien avec la biologie systémique, en la désignant expressément dans le programme des Investissements d'avenir comme dans les programmes ANR, des universités et organismes de recherche ;

- Concentrer les moyens et organiser des coopérations de recherche en réseau à partir de quelques plates-formes « locomotives » allant de la recherche fondamentale à la recherche appliquée, dans une démarche intégrée : Paris-Ile-de-France (Genopole d'Evry notamment), Toulouse, Bordeaux, Grenoble, Strasbourg ;

- Décloisonner les formations initiales nécessaires au développement de la biologie - systémique et de synthèse - et favoriser les formations interdisciplinaires. Connecter ces formations aux plates-formes : biologie, chimie, biochimie, mathématiques, informatique mais aussi sciences humaines et sociales pour les questions liées à la gouvernance, à l'éthique, à la propriété industrielle, au modèle économique, à l'impact sanitaire, environnemental et sociétal ;

- Favoriser, dans l'initiative de la Commission européenne « Horizon 2020 », en y intégrant explicitement la biologie de synthèse, la mise en réseau européenne et en développant les programmes Eranet ;

- Instituer un congrès annuel de la biologie de synthèse en France, à visée internationale, pour favoriser les échanges et promouvoir les bonnes pratiques, notamment sur les différents plans où se posent des questionnements éthiques.

2. Mettre en place une filière complète et intégrée

- Accompagner la mise en place d'une véritable filière, allant de la recherche fondamentale aux applications industrielles, en passant par la formation, la recherche partenariale, la valorisation, les pépinières de start up , jusqu'à la production de lignes-pilotes pour l'industrie ;

- Anticiper et définir les secteurs d'applications à soutenir en priorité pour la santé, l'environnement, l'énergie, la chimie verte, en fonction de nos expertises spécifiques ;

- S'assurer d'un cadre juridique équilibré qui préserve l'accès public aux connaissances portant sur le vivant tout en permettant la brevetabilité des inventions créatrices d'emplois, en veillant à son harmonisation aux niveaux européen et international ; favoriser dans ce cadre les initiatives coopératives des chercheurs et/ou entreprises mettant en commun des données sur le vivant et constituant un répertoire public ouvert à tous ;

- Réexaminer , dans cet esprit, les accords ADPIC (Accords sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce), pour réfléchir à la possibilité d'un régime spécifique, adapté aux inventions du secteur des biotechnologies ;

- Remédier aux incohérences de la directive 98/44 du 6 juillet 1998 sur le régime juridique des innovations biotechnologiques, pour prévenir les dérives liées à une pratique abusive de la brevetabilité et clarifier le régime de l' open access biology adapté de l' open source ;

- Favoriser la veille européenne et motiver les vocations scientifiques des jeunes, avec un registre européen de briques du vivant et un « iGEM » européen ; lui adjoindre une compétence en biologie systémique afin que la complexité du vivant soit mieux perçue et que les organismes ne soient pas considérés comme un simple jeu de construction.

3. Analyser et maîtriser les risques liés à la biologie de synthèse

- Introduire , dans les programmes de recherche appliquée et partenariale de la BS, des actions de recherche et de formation liées à la biotoxicité, à l'écotoxicité, à la biosécurité, à l'impact sociétal en impliquant les SHS ;

- Veiller à l'application de la réglementation existante (OGM, nanotechnologies, chimie...) pour la recherche fondamentale et appliquée et contrôler son adéquation aux avancées de la biologie de synthèse.

Dans cet esprit, intégrer les risques naturels dans le champ d'application de l'initiative de la Commission européenne « Horizon 2020 » ;

- Garantir la transparence de cette analyse des risques et du résultat des contrôles, en les mettant en ligne, en prévoyant, par exemple, la publication du rapport de la Délégation générale pour l'Armement sur les options en bio-sûreté ;

- Promouvoir la création d'un cadre international pour l'évaluation et la régulation des risques identifiés, justifié par le caractère transfrontières de la BS et adapté à sa spécificité : domaine émergent, de rupture et très évolutif ;

- OEuvrer pour la mise en place d'une instance permanente au niveau mondial, dans l'esprit du GIEC, pour réfléchir aux questions de normalisation, biosécurité et bio-sûreté, préalablement à toute mise sur le marché de produits issus de la biologie de synthèse ;

- Procéder , tous les trois ans, dans le cadre d'une mission d'évaluation de l'OPECST, à l'examen de ces mécanismes d'analyse et de maîtrise des risques, en vue éventuellement de recommander des adaptations de la réglementation. Cette mission d'évaluation récurrente de l'OPECST devrait être inscrite dans la loi pour garantir sa régularité.

4. Favoriser une discussion publique sereine sur les enjeux de la biologie de synthèse

- Organiser des débats publics en concertation avec l'ensemble des parties concernées (scientifiques de la BS et des SHS, politiques, instituts de recherche, Europe, ONG, entreprises, syndicats...), ainsi qu'à intervalles réguliers, des conférences des citoyens, pour tenir compte des évolutions de la BS ;

- Encourager et développer dès le plus jeune âge l'intérêt pour la science et la technologie, préalable à des échanges sereins sur des sujets aussi complexes que la biologie de synthèse, en mettant en place une pédagogie attractive et en cessant de considérer les sciences uniquement comme un vecteur de sélection ;

- Raviver la curiosité et la crédibilité de l'approche scientifique en se fondant sur l'expertise des Centres de culture scientifique, technique et industrielle (CCSTI) et d'Universcience, en généralisant les initiatives comme « La main à la pâte », « Maths à modeler », « Les p'tits débrouillards » ;

- Assurer un enseignement scientifique dès le plus jeune âge, en rétablissant les heures d'enseignement en mathématiques et en sciences, réduites dans l'enseignement primaire comme dans les collèges et lycées ;

- Impliquer les médias dans cette démarche, en prévoyant, comme le fait la Royal Society au Royaume-Uni, une formation régulière sur l'état de l'art de la recherche et les enjeux posés par le développement de la biologie de synthèse, et le développement d'émissions pluralistes sur les sciences émergentes comme la BS ;

- Définir , en tenant compte du résultat de ces consultations et débats, un plan de développement à 5, 10, 15 ans, en toute transparence, en confiant à l'OPECST, dans le cadre de la mission d'évaluation mentionnée précédemment, la charge d'apprécier les conditions de sa mise en oeuvre et de recommander éventuellement certaines évolutions ;

- Généraliser ce procédé à l'ensemble des disciplines scientifiques et technologiques émergentes, où l'on peut percevoir l'ébauche d'une inquiétude du public, afin que celle-ci soit prise en compte dans la transparence et le respect des citoyens ;

- Réaliser , dans le cadre de la mission d'évaluation de l'OPECST précitée, ainsi qu'à l'occasion d'auditions publiques intermédiaires, un suivi des progrès de la sensibilisation du public aux enjeux de la BS.

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