B. COMMENT CONVAINCRE ?

1. Personnaliser le suivi

Le décalage entre la perception de la vaccination par ceux qui la pratiquent et la population générale a été souligné à maintes reprises. Des études plus poussées en matière de sociologie de la vaccination devraient permettre de mieux orienter les politiques de santé publique afin d'éviter toute politisation excessive des enjeux, comme cela fut le cas lors de la campagne de vaccination contre la grippe H1N1.

Aux cours des auditions conduites par votre rapporteur, la question de savoir si l'obligation vaccinale, qui ne porte que sur trois maladies, sert aux progrès de la vaccination a été posée. Certains jugent qu'une obligation qui n'existe que pour quelques vaccins nuit à la crédibilité des autres et proposent donc de la supprimer. Telle n'est pas l'opinion majoritaire de la commission des affaires sociales.

Des instruments permettant à chacun de savoir quelles sont les recommandations vaccinales qui s'appliquent à sa situation sont utiles au suivi des vaccinations. Un carnet vaccinal électronique qui vienne appuyer les informations données par les professionnels de santé irait dans ce sens. Votre rapporteur a été particulièrement intéressé par le projet du Pr Jean-Louis Koeck, médecin des armées, qui a créé avec une équipe comprenant plusieurs autres médecins un carnet de vaccination électronique et un site internet offrant une information experte et personnalisée aux particuliers et aux professionnels de santé. Le point essentiel est en effet de ne pas avoir un simple recueil comptable du nombre de vaccinations, mais bien de pouvoir suivre l'évolution des recommandations vaccinales, dont la Cour des comptes note que la succession rapide est susceptible de désorienter tant les particuliers que les professionnels de santé. Cette information scientifiquement exacte et transparente (les noms des experts et leurs déclarations d'intérêt sont disponibles sur le site internet) alliée aux nouvelles technologies rendant la consultation particulièrement simple (internet et application mobile) et accessible à tout moment, ainsi que la notification des rappels par courriel ou SMS, font pleinement entrer la vaccination dans le XXI e siècle.

L'absence de suivi est en effet particulièrement grave en matière de vaccination car la couverture immunologique ne peut être garantie. Ainsi pour les jeunes filles choisissant la vaccination contre le papillomavirus, responsable du cancer du col de l'utérus dont plus de 14 % des femmes seraient porteuses, avec une prévalence allant jusqu'à près de 20 % chez les 25-29 ans 1 ( * ) . Il serait responsable de 3 000 à 3 500 morts par an. Trois doses sont actuellement préconisées pour assurer la couverture immunologique. Or, malgré 34 millions d'euros de dépenses par l'assurance maladie, une part importante des jeunes filles ne va pas au bout du processus. Elles se trouvent ainsi sans protection suffisante et la dépense publique a été effectuée sans efficacité réelle.

Votre rapporteur regrette donc que l'initiative d'intérêt général que constitue le carnet vaccinal électronique, conçu par des professionnels de santé dans l'intérêt des patients et sans financement des laboratoires pharmaceutiques, ne reçoive pas plus d'écho au ministère de la santé. La création, longtemps repoussée, du dossier médical personnel ne semble pas avoir favorisé les initiatives les plus innovantes, et il serait souhaitable que les autorités sanitaires apportent enfin leur soutien à un carnet de vaccination électronique constitué à partir d'une base experte.

L'état des vaccinations pourrait par ailleurs être utilement vérifié à l'occasion de la journée défense et citoyenneté. En effet, un certificat médical de moins de six mois doit être présenté à cette occasion par le jeune homme ou la jeune femme convoqués. Il serait utile que ce certificat comporte un état de la situation vaccinale. A défaut de certificat, une visite médicale gratuite est proposée, qui devrait également comporter un volet vaccination.

2. Eduquer à la vaccination

Une formation à la santé dès l'école, non dans le cadre d'un cours magistral, mais sous la forme la plus participative et collective possible, permettant aux enfants de comprendre l'intérêt et l'importance de la vaccination semble à votre rapporteur un moyen important de lutte contre la désinformation circulant sur Internet. Que cet enseignement revête une forme dynamique et ouverte est essentiel pour faire pièce au rejet de la vaccination lié au refus de se soumettre à l'autorité, et pour encourager l'exercice de l'esprit critique face aux différents messages véhiculés par des groupes aux intentions diverses. L'étude de la situation des pays en développement, où l'accès à la vaccination demeure une question primordiale de survie, devrait elle aussi permettre de rappeler l'importance des enjeux associés à ces questions. De même, une approche du fonctionnement des vaccins dans l'organisme, de leur histoire et de leur mode de fabrication devrait permettre de dissiper une partie des fantasmes circulant dans l'opinion publique.

La mise en place de cet enseignement suppose qu'un temps spécifique soit dégagé dans les programmes. Il implique aussi la formation des enseignants. Votre rapporteur souhaite que la réforme annoncée de leur parcours puisse intégrer cette dimension d'éducation à la santé, à la prévention et au vaccin.

Comme l'ont souligné les chercheurs auditionnés par votre rapporteur, il importe non seulement d'agir sur la formation du public mais aussi, spécifiquement, sur celle des professionnels de santé, au premier rang desquels les médecins et infirmières qui sont appelés à pratiquer la vaccination. Au cours des études médicales et d'infirmière, la part faite à la vaccination semble devenue trop peu importante pour susciter l'adhésion des étudiants puis des jeunes professionnels qui, spécialement chez les infirmières, se font très peu vacciner et ont dès lors tendance à peu vacciner eux-mêmes.


* 1 Epidémiologie de l'infection à HPV, J.-C Boulanger, H Sevestreb, E Bauvillea, C Ghighib, J.-P Harlicota, J Gondrya, Gynécologie Obstétrique & Fertilité, Volume 32, 3, Mas 2004, Pages 218-223.

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