N° 729

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2012-2013

Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 juillet 2013

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires européennes (1) sur l' Union européenne face au chômage des jeunes ,

Par M. Dominique BAILLY,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Simon Sutour, président ; MM. Alain Bertrand, Michel Billout, Jean Bizet, Mme Bernadette Bourzai, M. Jean-Paul Emorine, Mme Fabienne Keller, M. Philippe Leroy, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Georges Patient, Roland Ries, vice-présidents ; MM. Christophe Béchu, André Gattolin, Richard Yung, secrétaires ; MM. Nicolas Alfonsi, Dominique Bailly, Pierre Bernard-Reymond, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Gérard César, Mme Karine Claireaux, MM. Robert del Picchia, Michel Delebarre, Yann Gaillard, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Joël Guerriau, Jean-François Humbert, Mme Sophie Joissains, MM. Jean-René Lecerf, Jean-Jacques Lozach, Mme Colette Mélot, MM. Aymeri de Montesquiou, Bernard Piras, Alain Richard, Mme Catherine Tasca.

INTRODUCTION

Le taux de chômage des 15-24 ans au sein de l'Union européenne représente le double de celui constaté pour l'ensemble de la population active, alors même que des déficits de main d'oeuvre dans certains secteurs sont constatés dans la plupart des Etats membres. En présentant en décembre 2012 une série de mesures concernant l'emploi des jeunes, la Commission européenne a contribué à faire de cette problématique une des priorités d'action de l'Union européenne pour les années à venir. Le souhait du Conseil européen de créer un fonds spécifique - l'Initiative pour l'emploi des jeunes - pour financer la mise en place d'un mécanisme de garantie pour la jeunesse au sein des Etats membres est venu confirmer cette tendance. Il s'agit d'éviter que la jeunesse européenne devienne une « génération perdue ».

Cette nouvelle ambition sociale répond également aux objectifs de la stratégie Europe 2020 d'améliorer la formation des jeunes Européens. L'Union européenne entend de la sorte contribuer au retour de la croissance économique. Ce faisant, elle donne une autre tonalité à son action, trop facilement résumée jusque-là à la lutte contre les déficits publics et l'endettement.

Il n'en reste pas moins un certain nombre de questions en suspens, auxquelles le Conseil européen des 27 et 28 juin 2013 n'a que partiellement répondu. Il en est ainsi du financement ou du calendrier retenu pour la mise en place du mécanisme de garantie pour la jeunesse. Celui-ci ne saurait, par ailleurs, être envisagé comme la seule réponse à la montée du chômage chez les 15-24 ans. Le présent rapport met ainsi en perspective les autres pistes de travail avancées par la Commission européenne pour un traitement efficace du chômage des jeunes ainsi que les propositions des Etats membres, à l'image du New Deal proposé par la France et l'Allemagne. L'avis politique qui lui est joint insiste sur les mesures que l'Union européenne pourrait porter en vue de compléter ces initiatives.

I. LE PAQUET EMPLOI DES JEUNES DE LA COMMISSION EUROPÉENNE

A. LA GÉNÉRATION PERDUE ?

Établi à 23,5 % au sein de l'Union européenne, le taux de chômage des jeunes est deux fois supérieur au taux de chômage global. Il est supérieur à 25 % au sein de 11 États membres (dont la France), dépassant 50 % en Croatie, en Espagne et en Grèce. La crise économique que traverse le continent est, certes, la première cause de cette situation. Au regard de leur position d'entrants sur le marché du travail, l'emploi des jeunes est très sensible à la conjoncture économique. Lors des périodes de ralentissement économique, la position des jeunes actifs tend à se dégrader plus rapidement que celle des anciens.

Taux de chômage des jeunes au sein de l'Union européenne (mars 2013)

Pays

Taux de chômage des jeunes

Pays

Taux de chômage des jeunes

Allemagne

7,6 %

Italie

38,4 %

Autriche

7,6 %

Lettonie

24,8 %

Belgique

22,4 %

Lituanie

24,8 %

Bulgarie

29,2 %

Luxembourg

19,7 %

Chypre

32,3 %

Malte

14,7 %

Croatie

51,6 %

Pays-Bas

10,5 %

Danemark

14,5 %

Pologne

28,0 %

Espagne

55,9 %

Portugal

38,3 %

Estonie

21,9 %

République tchèque

19,5 %

Finlande

19,9 %

Roumanie

22,2 %

France

26,5 %

Royaume-Uni

20,2 %

Grèce

62,5 %

Slovaquie

34,5 %

Hongrie

29,7 %

Slovénie

20,6 %

Irlande

30,3 %

Suède

25,1 %

(Source : Eurostat )

Le coût du traitement du chômage des jeunes (jusqu'à 29 ans) est estimé à 153 milliards d'euros par an au sein de l'Union européenne, soit 1,2 % de son produit intérieur brut (PIB). 5,627 millions d'Européens de moins de 25 ans sont présents sur le marché du travail sans trouver d'emploi. Le taux de chômage de longue durée est ainsi particulièrement élevé chez les jeunes. 30,1 % d'entre eux sont sans emploi depuis plus de 12 mois. Seuls 29,7 % des jeunes de moins de 25 ans au chômage en 2010 ont pu trouver un emploi en 2011.

La qualité des emplois occupés par les jeunes est, en outre, sujette à caution. 42 % des jeunes Européens disposent d'un contrat temporaire (soit quatre fois plus que pour l'ensemble de la population active), 32 % exercent un emploi à temps partiel (soit près de deux fois le taux observé pour l'ensemble de la population active).

La question de l'emploi des jeunes est, bien évidemment, indissociable de celle de la formation. 54,2 % des jeunes Européens ayant quitté prématurément le système éducatif se retrouvent ainsi sans emploi. La part de jeunes interrompant leur formation s'établit, quant à elle, à 14 %, soit un jeune sur 6. La Stratégie Europe 2020 a fixé de ramener ce chiffre à 10 %. L'augmentation constante du chômage des jeunes au sein de l'Union européenne tient à cet égard à un sous-investissement chronique de certains États membres envers cette catégorie de la population.

L'adéquation de la formation aux réalités du marché du travail constitue également une source d'inquiétude, alors que 2 millions de postes sont vacants au sein de l'Union européenne. 73 millions d'emplois devraient être à pourvoir au sein de l'Union d'ici 2020, compte tenu des départs en retraite.

En faisant de la lutte contre le chômage des jeunes une priorité, l'Union européenne tente de jeter les bases d'une relance de la croissance. Elle démontre également que sa politique économique ne saurait être résumée à la seule défense de l'équilibre budgétaire. Il convient à cet effet de saluer les contours d'un plan assez large visant tout à la fois la réinsertion de jeunes en rupture avec le système éducatif et le monde du travail, mais aussi le contenu même des formations en insistant notamment sur le niveau des stages ou le développement de l'apprentissage.

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