3. Une prise de conscience croissante

Il faut donc que les autorités africaines, qui portent la responsabilité de leur appareil de défense, parviennent à mettre en place un système d'articulation effectif entre les décisions prises à Addis-Abeba par l'Union africaine et leur application au sein des CER. La communication est très importante dans le domaine de la sécurité : il faut informer les populations et leur expliquer les choix faits par les instances dirigeantes afin qu'elles s'approprient leurs décisions et participent à leur mise en oeuvre pérenne. Un tel effort permettrait également de redonner confiance aux populations dans l'action politique, encore trop souvent perçue comme l'oeuvre d'une oligarchie détachée des attentes de la société.

Le Commissaire à la paix et à la sécurité, M. Lamamra , l'a clairement exprimé lors de notre rencontre en soulignant que « nous avons, les uns et les autres, accueilli comme nécessaire, voire même salutaire, l'intervention française, qui a permis d'éviter la catastrophe qui se dessinait, mais, en nous-mêmes, nous avons clairement senti qu'une telle action aurait dû et aurait pu être le fait de troupes africaines », ajoutant que l'Afrique « ne peut tout simplement pas continuer à s'en remettre à des interventions étrangères, si bien intentionnées qu'elles puissent être » pour régler ses problèmes.

Pour beaucoup de responsables africains, l'intervention française au Mali a eu l'effet d'un électrochoc : elle a permis la prise de conscience de la nécessité pour les États africains d'améliorer leur capacité militaire de façon autonome et cohérente.

Si les partenaires de l'Afrique n'ont pas vocation à continuer à intervenir militairement dans des pays qui ont acquis leur indépendance, il y a plus de cinquante ans, ils peuvent contribuer aux côtés des États africains à mettre sur pied des forces militaires à même d'assurer la paix et la sécurité du continent.

C'est l'intérêt des États africains, c'est aussi le nôtre. Dans ce domaine, la France, qui conduit depuis les indépendances une politique de coopération militaire active, a un rôle de premier plan à jouer.

Déjà présente en matière de formation par le développement des écoles nationales à vocation régionale (ENVR), la France met en place une coopération bilatérale militaire efficace afin d'aider les pays du continent à forger leur autonomie en matière de sécurité. Il faut encourager le développement des capacités locales à former les cadres africains, civils comme militaires, et inciter nos partenaires à bâtir des outils moins ambitieux mais soutenables en promouvant, par exemple, la contractualisation dans les modèles d'armée.

Il nous faut adopter une stratégie militaire africaine afin d'aider le continent dans sa transition vers la mise en place d'une politique de sécurité efficace. L'autonomie de financement, la formation, la réhabilitation des militaires, le retour de la confiance dans l'armée et la mobilisation des populations locales sont les enjeux auxquels doit répondre l'architecture de paix et de sécurité africaine car, comme l'affirme Pascal Canfin, ministre délégué au développement : « Il n'y pas de développement possible sans sécurité, mais il n'y aura pas de sécurité durable sans développement ». 24 ( * )


* 24 Discours lors de la conférence de Bruxelles le 15 mai 2013 intitulée « Ensemble pour le renouveau du Mali ».

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