B. RÉPONDRE À CERTAINES DÉFAILLANCES

1. Réviser la gestion des crédits d'action sociale

L'ONAC-VG a pour mission de développer des actions de solidarité au profit de ses ressortissants .

Chaque année, la loi de finances inscrit un montant alloué à l'ONAC-VG au sein de l'action 3 « Solidarité » du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ». Cette somme, dont l'emploi est retracé par une sous-action intitulée « Action sociale en faveur du monde combattant : office national des anciens combattants (ONAC-VG) » croît chaque année et est fixée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014 à 21,9 millions d'euros, en hausse de 1,3 million d'euros par rapport à 2013 (+ 6,3 %).

Ces crédits de solidarité constituent une subvention d'action sociale inscrite au budget de l'Office pour lui permettre de remplir sa mission de solidarité envers les anciens combattants et victimes de guerre. Ils participent à trois principales actions :

- les dispositifs d'aides individuelles assurées par l'Office à travers ses services départementaux et assimilés ;

- l'aide à la rééducation professionnelle au profit d'anciens militaires en OPEX devenus ressortissants de l'ONAC-VG ;

- le dispositif d'aide différentielle en faveur du conjoint survivant (ADCS).

Tableau n° 14 : Montant des crédits d'action sociale

(en millions d'euros)

2008

2009

2010

2011

2012

Ressources
2013

Action sociale individuelle

État

17,57

16,97

18,74

18,70

20,67

20,44

Fonds propres

1,04

1,22

0,61

1,34

1,46

ND

Total

18,61

18,19

19,35

20,04

22,13

20,44

Action sociale collective

État

0,36

0,34

0,39

0,03

0,01

0,01

Fonds propres

0

0

0

0,04

0,03

ND

Total

0,36

0,34

0,39

0,07

0,04

0,01

Prêts

État

0

0

0

0

0

0

Fonds propres

0,43

0,44

0,40

0,30

0,30

0,30

Total

0,43

0,44

0,40

0,30

0,30

0,30

Subventions offices outre-mer et associations

État

0,66

0,67

0,53

0,49

0,5

0,5

Fonds propres

0

0

0

0,03

0,03

ND

Total

0,66

0,67

0,53

0,52

0,53

0,50

Total

État

18,59

17,98

19,66

19,22

21,18 23 ( * )

20,95 24 ( * )

Total

Fonds propres

1,47

1,66

1,01

1,71

1,82

0,30

TOTAL

20,06

19,64

20,67

20,93

23,00

21,25

(a minima)

Source : réponse au questionnaire budgétaire dans le cadre de la loi de finances pour 2014

Les dépenses de solidarité ont eu tendance ces dernières années à augmenter, suivant en ceci les abondements supplémentaires votés afin de faire face à plusieurs engagements dont essentiellement la revalorisation régulière du montant de l'ADCS. Ainsi, on constate un accroissement de 9,32 % des dépenses de solidarité constatées entre 2011 et 2012 (20,78 millions d'euros à 22,71 millions). Elle s'explique pour plus de 75 % de son montant par l'augmentation des dépenses de l'ADCS dont les versements pour 2012 s'élevaient à 6,075 millions d'euros.

Ces crédits permettent également le versement de subventions aux associations et groupements nationaux d'anciens combattants et victimes de guerre afin qu'ils puissent développer une action sociale auprès de leurs adhérents. Ainsi, ces subventions aux associations apparaissent stables depuis 2009 à hauteur de 460 000 euros , chiffrage identique en 2012. Cependant le nombre d'associations bénéficiaires est passé durant cette période de 33 en 2009 à 22 en 2012.

La gestion de ces crédits appelle plusieurs réflexions de votre rapporteur spécial.

a) Une chaîne d'attribution des aides perfectible

Le fonctionnement de ces aides et la détermination de la politique menée en la matière paraissent peu lisibles. La variété des interventions financières est grande . Il s'agit de secours d'urgence , qui peuvent permettre de répondre à des situations exceptionnelles, d'aides pour permettre de pallier des difficultés financières ponctuelles (participation au financement d'une mutuelle, participation à des frais d'obsèques...), de participations financières pour compenser la perte d'autonomie (participation aux frais d'une aide-ménagère, participation aux frais de maintien à domicile...).

Les interventions financières d'action sociale peuvent aussi prendre la forme de prêts sociaux et d'avances remboursables consentis sans intérêt pour une durée maximale de deux ans.

Pour prendre l'exemple de l'ADCS, il faut rappeler qu'elle fut créée par l'instruction du 31 août 2007 du directeur général de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre, à la suite d'un engagement du ministre chargé des anciens combattants en 2006 à l'occasion des débats sur la loi de finances pour 2007.

Dans un récent rapport 25 ( * ) remis au Parlement sur les possibilités d'extension de cette aide, le dispositif actuel était jugé « juridiquement fragile ». On se retrouve ainsi devant des interventions d'action sociale dont le nombre pour 2012 était évalué à près de 58 000, qui se fondent sur le principe d'une intervention subsidiaire aux dispositifs légaux généraux.

Dans le cas de la majorité des aides, hors ADCS, et secours attribués, chaque service local fait l'objet annuellement de l'attribution d'une enveloppe par les services de la direction centrale en fonction de l'activité du département des années précédentes. La direction générale fixe également des instructions en matière d'objectifs de consommation d'enveloppes pour certaines aides. Ainsi des efforts particuliers ont été demandés en matière d'aide au maintien à domicile des ressortissants (29 % des interventions au premier semestre 2013).

Les demandes d'interventions arrivent aux services départementaux, soit par le réseau associatif des anciens combattants, soit par le réseau des assistants sociaux, soit par les intéressés eux-mêmes.

Il s'ensuit alors une phase d'instruction par les services qui, après étude du dossier - en particulier analyse des ressources du demandeur -, transmettent les dossiers de demande à la commission départementale d'action sociale de l'ONAC-VG qui se prononce sur la base du rapport et peut attribuer une aide dont le montant est plafonné à hauteur de 800 euros.

Si le bien fondé des aides individuelles ne peut être contesté, le processus d'attribution manque de lisibilité et souffre de plusieurs faiblesses.

En premier lieu, lors de la phase d'instruction de la demande, les services instruisent le dossier sur le fondement des données fournies par les ressortissants. Il n'existe pas de possibilité de mise en relation directe de l'ONAC-VG avec les autres administrations afin en particulier de s'assurer du caractère subsidiaire de la demande ;

Par ailleurs, sans remettre en cause le rôle des commissions départementales d'action sociale, on peut s'interroger sur les risques de traitement différencié des demandes entre services en fonction de critères propres à certaines commissions départementales ou également aux moyens consommés par un département.

b) Des évolutions souhaitables dans la gestion des crédits de solidarité

Il apparaît que plusieurs pistes d'amélioration doivent être suivies pour s'assurer d'une optimale utilisation de ces crédits .

(1) Structurer des pôles solidarité - action sociale

Le projet annuel de performances pour 2014 de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » mentionne pour la première fois la nécessité de professionnaliser « la chaîne de la filière Solidarité de l'Office grâce à la mise en place de pôles thématiques et en développant les partenariats avec les autres acteurs du secteur qu'ils soient publics ou associatifs » rejoignant ainsi une préconisation de votre rapporteur spécial.

Cette remarque, qui apparaît pour la première fois dans ce document, rejoint l'idée de votre rapporteur spécial de constituer un ou plusieurs pôles solidarités qui, à l'instar des pôles interdépartementaux déjà constitués, permettraient de mieux uniformiser les politiques de traitement des demandes d'aides et d'instruction des dossiers.

Ceci devrait être mis en oeuvre par un pôle central « Solidarité » ou un pôle pilote qui veillerait à une sécurisation juridique des différents dispositifs d'action sociale et à la diffusion de bonnes pratiques dans le traitement et la prise en compte des demandes. Il existe actuellement, au sein du service central, un département de la solidarité qui devrait ainsi être conforté dans son rôle. Un tel dispositif devrait permettre d'atteindre l'objectif d'une plus grande uniformité dans l'attribution des aides sans pour autant remettre en cause le processus d'attribution par la commission départementale puisque, d'une part, ces aides sont plafonnées et que, d'autre part, les rejets sont susceptibles d'appel au niveau de la direction centrale de l'ONAC-VG.

L'échelon du service départemental conserverait ainsi un rôle essentiel dans l'accueil et le premier traitement des demandes. En tout état de cause, une partie non négligeable du travail d'action sociale constitué par l'aide et la facilitation des démarches administratives de certains ressortissants ne peut être que du ressort du service de première proximité.

(2) Rechercher des pistes de mutualisation avec les services locaux d'action sociale

La question se pose de la délégation aux réseaux locaux d'action sociale d'une partie de l'action sociale menée au sein de l'ONAC-VG. Si techniquement un tel rapprochement serait envisageable, il ne serait aujourd'hui pas favorable aux ressortissants dans la mesure où le réseau de proximité de l'ONAC-VG ne limite pas ses prestations à la délivrance d'aides financières et de secours, mais fournit également une aide aux démarches administratives et une action d'assistance sociale .

Cependant, deux phénomènes conduisent à souhaiter que des synergies puissent être envisagées entre l'ONAC-VG et les services sociaux locaux . D'une part, une partie des dossiers de demande d'aides et de secours sont signalés par le réseau « traditionnel » d'action sociale. D'autre part, lors de la constitution des dossiers pour les demandes d'aides et de secours, il a été souligné que l'administration de l'ONAC-VG n'a pas la possibilité de directement recueillir auprès des autres organismes sociaux les informations nécessaires concernant les ressortissants.

Dans ces conditions, une mission de réflexion devrait être engagée au sein du pôle central ou pôle pilote « Solidarité » afin que des pistes de mutualisation avec les services locaux d'action sociale et d'amélioration des pratiques de travail soient proposées. Il pourrait s'agir d'une orientation figurant au cahier des charges du prochain COP 2014-2018.

Recommandation n° 7 : Constituer une organisation de l'ONAC-VG par pôle concernant l'action sociale et engager une réflexion sur les mutualisations possibles avec les acteurs locaux débouchant sur des propositions concrètes.

(3) Clarifier la question de la sous-traitance de l'action sociale aux associations

Une partie de la subvention globale allouée à l'ONAC-VG pour ses actions de solidarité est reversée à des associations qui développent une action sociale à l'attention de leurs propres adhérents .

Même si cette pratique constitue une action sociale au profit de populations qui appartiennent au monde combattant, et qu'au surplus les subventions ne sont accordées, selon l'ONAC-VG, qu'aux seules associations qui justifient d'une activité d'au moins 90 % d'action sociale , on ne peut pas se satisfaire de la transparence qu'offre ce mécanisme de subventions en cascade.

Pour la clarté et la sincérité budgétaire, il serait plus opportun que de tels crédits soient clairement identifiés dans le projet de loi de finances . L'action 3 du programme 169 comporte une sous-action intitulée « Subventions aux associations et oeuvres diverses » qui comprend principalement des moyens dédiés au fonctionnement d'associations d'anciens combattants. Deux hypothèses s'offrent pour améliorer la transparence sur le versement de ces subventions d'action sociale aux associations. Soit les crédits actuellement dédiés à l'action sociale des associations sont inscrits au sein de la sous-action existante, soit une nouvelle sous-action permettrait d'identifier clairement ces subventions. La deuxième solution serait la plus souhaitable.

Par ailleurs, dans un contexte budgétaire contraint, ce renforcement de la transparence conduirait à identifier de façon claire les bénéficiaires des subventions. Dans la perspective des améliorations proposées visant à encadrer l'action sociale de l'ONAC-VG, il serait souhaitable que cet opérateur concentre directement l'essentiel des moyens financiers d'action en la matière.

Dans ce contexte, le 30 octobre dernier, les membres de la commission permanente ont proposé au conseil d'administration de revoir les modalités de gestion de ces crédits. Un dispositif d'intervention directe de l'ONAC-VG sur la base de dossiers portés par les associations pourrait être substitué au dispositif de subventions sociales aux associations.

Les crédits jusque-là accordés aux associations pour prolonger leurs actions de solidarité seraient gérés par les commissions mémoire et solidarité des conseils départementaux de l'Office au sein desquelles les associations sont représentées.

Recommandation n° 8 : Améliorer la transparence du versement des subventions aux associations au travers d'un aménagement de la maquette budgétaire dès la loi de finances pour 2015 ou par la gestion directe de ces aides par l'Office.

2. Des outils de pilotage qui ne permettent pas une gestion optimale de l'établissement
a) Mesurer l'action des services départementaux

Votre rapporteur spécial, afin d'appréhender la réalité du travail de l'Office et pour évaluer la répartition de celui-ci entre les différentes structures de l'ONAC-VG souhaitait pouvoir établir l'activité de chaque service départemental au travers de données statistiques simples et exploitables.

Au terme de son contrôle, il lui a été indiqué que, contrairement à ce qui avait été prévu dans le contrat d'objectifs et de moyens 2009-2013, l'ONAC-VG n'est pas parvenu à mettre formellement en place dans tous ses services départementaux le référentiel Marianne . Ce dernier, lancé initialement en janvier 2005 au travers d'une charte Marianne, visait à garantir la qualité de l'accueil au sein des administrations, qu'il soit physique, par téléphone, par courrier ou par courriel.

Il est certes possible d'avoir, au travers de témoignages, une idée de la spécificité du travail effectué par les services et du service rendu aux usagers. Cependant, le recueil de l'ensemble des données relatives au traitement des échanges avec les usagers et aux suites qui leur sont données apparaît aujourd'hui indispensable à votre rapporteur spécial pour évaluer la qualité du service rendu.

En effet, l'ONAC-VG étant chaque année doté en loi de finances d'une subvention pour charges de service public, il se doit de répondre aux exigences d'un service public de qualité et donc mesurer à la fois son niveau d'activité et les suites données à une demande adressée par un ressortissant ou un usager du service public.

Recommandation n° 9 : Fixer dans le cadre du prochain COP un calendrier précis et détaillé de la mise en conformité de l'ensemble des services de l'ONAC-VG avec le référentiel Marianne.

b) Améliorer le recensement des ressortissants de l'ONAC-VG

Il est surprenant de constater que l'Office ne connait pas de manière précise le nombre de ses ressortissants et leur répartition.

La dernière étude sur l'évolution prospective du nombre de ressortissants et de leur ayants cause est aujourd'hui vieille de plus de quinze ans . Malgré plusieurs demandes émanant de l'ONAC-VG 26 ( * ) , il semble que pour l'heure aucune étude prospective n'ait été engagée. Le directeur de de la mémoire, du patrimoine et des archives indique que « l'insuffisance de données concernant le nombre, la composition et la répartition des ressortissants, ayant droit et bénéficiaires, rend difficile l'ajustement des moyens humains, matériels et financiers, ainsi que la fiabilisation des projections pluriannuelles et l'évaluation budgétaire des risques de contentieux.» 27 ( * ) Il conclut sur la nécessité d'actualiser l'étude menée en 1998. Il est indiqué que « le contrôle général des armées sera de nouveau sollicité pour actualiser l'étude menée en 1998 » .

Une telle étude semble indispensable car, comme l'indiquait le directeur général de l'ONAC-VG dans la note mentionnée, « les évaluations prospectives sont obsolètes du fait notamment de l'augmentation de l'espérance de vie et de la profonde évolution des réglementations » .

Cette obsolescence de données pénalise le fonctionnement de l'ONAC-VG mais également le contrôle des crédits alloués annuellement à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Fréquemment, dans l'analyse des crédits de cette mission, on note des évaluations qui varient grandement d'une année à l'autre, en particulier concernant l'évaluation de la dépense fiscale et une étude actualisée des ressortissants de l'ONAC-VG en fonction tant des nouveaux critères réglementaires que des évolutions démographiques naturelles permettrait d'asseoir les estimations sur des bases plus fiables.

À l'occasion de la réalisation de la prochaine étude, il serait également utile de déterminer la périodicité nécessaire pour l'actualisation des données ainsi que d'envisager d'autres moyens permettant une connaissance plus fine des populations .

Recommandation n° 10 : Demander sans délai au contrôle général des armées l'établissement d'une étude mettant à jour celle réalisée en 1998 sur l'évolution prospective des ressortissants et proposant un mécanisme pérenne de mise à jour.


* 23 Ce montant comprend la subvention versée par l'État pour le financement de l'action sociale en 2012 (20,1 millions d'euros), ainsi qu'un report de crédits 2010-2011 d'un montant de 1,07 million d'euros.

* 24 Ce montant comprend la subvention versée par l'État pour le financement de l'action sociale en 2013 (20,6 millions d'euros), ainsi qu'un report de crédits de 0,35 million d'euros issu de l'exercice antérieur.

* 25 Rapport remis au Parlement en exécution de l'article 98 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 relatif à l'extension de l'aide différentielle aux conjoints survivants aux personnes résidant hors de France.

* 26 Une note du directeur général de l'ONAC-VG du 9 mars 2012 adressée au secrétaire général de l'administration indiquait que dans la perspective de la préparation du prochain contrat d'objectifs et de performance une étude comparable à celle conduite en 1998 par l'inspection générale du secrétariat aux anciens combattants était nécessaire. Il était en outre indiqué que l'Office était « régulièrement interrogé sur le nombre de ses ressortissants en vue de nécessaires projections financières et de l'évolution des besoins budgétaires ».

* 27 Courrier de réponse adressé au rapporteur le 4 juillet 2013.

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