CONTRIBUTIONS DES GROUPES

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Groupe Union pour un Mouvement Populaire

Il est un point sur lequel nos analyses rejoignent celles de la rapporteure de la mission : il est grand temps de supprimer les allègements de cotisations.

Ce n'est pas tant qu'ils soient responsables de tel ou tel travers de notre économie mais bien plutôt qu'après 20 ans d'une politique ininterrompue et qui concernera bientôt la quasi-totalité des salariés, le moment est venu de prendre acte qu'il faut financer notre protection sociale autrement.

En s'attachant à dresser le bilan des politiques d'allègements de cotisations sociales patronales, menées par les gouvernements successifs au fil des alternances, la mission commune d'information se fixait pour objectif d'interroger la relation entre le mode de financement de la protection sociale dans notre pays et l'emploi.

Comparée à ses principaux partenaires européens, la France affiche une triple singularité : elle présente un niveau de protection et par là-même de dépenses sociales élevé, qu'elle finance par des cotisations assises sur les salaires, le bas de l'échelle des salaires étant fixé par la puissance publique à un niveau relativement élevé et concernant de ce fait une part très importante de la population active.

Cette singularité ne manque pas de se traduire par un niveau de chômage lui aussi élevé, en particulier, mais pas seulement, pour les moins-qualifiés.

Ce n'est pas un hasard si les allègements sont nés en 1993, année où notre pays a réalisé, qu'il était entré de plain-pied, à armes inégales, dans la mondialisation des échanges. Ce qui était possible en économie relativement fermée ne l'était plus dans la concurrence internationale.

Des évaluations convergentes quant à l'efficacité des allègements

Aucune des personnes entendues par la mission n'a contesté les effets sur l'emploi des allègements de cotisations.

S'il n'existe pas « d'expérience » naturelle permettant d'en isoler les effets, les effets sur l'emploi ont été observables et observés. Dans une économie qui crée et détruit chaque jour quelque 10 000 emplois, il n'est pas possible - mais est-ce nécessaire ? - de distinguer emplois créés et emplois sauvegardés.

Au cours de la période de réduction du temps de travail puis de convergence des Smic, cette politique a sans doute eu des effets plus limités. Pour une raison simple : le Smic a pratiquement doublé en valeur nominale depuis 1993 sous le double effet de la convergence des Smic et de la pratique des « coups de pouce » du Gouvernement. Sur la même période, les différents prélèvements sociaux ont aussi progressé, en particulier les cotisations de retraite complémentaires. Selon le vocable communément utilisé, d'offensifs, les allègements sont devenus défensifs.

La fausse question du ciblage

Les statistiques de l'Acoss illustrent bien que les allègements de cotisations sur les bas salaires bénéficient plus fortement aux entreprises...qui versent des bas salaires, c'est-à-dire majoritairement aux petites entreprises et aux entreprises du secteur des services.

Ces secteurs seraient abrités du grand vent de la concurrence internationale. Dans la compétition internationale, il est peu de secteurs que l'on peut considérer comme abrités. Le phénomène des travailleurs détachés a apporté cette concurrence au plus près des consommateurs et des emplois de l'artisanat souvent décrits comme « non délocalisables ».

Sous l'effet des consommations intermédiaires, le secteur des services entre dans les coûts de l'industrie qui a souvent externalisé toutes les fonctions qui ne relevaient pas strictement de son coeur de métier, contribuant ainsi à brouiller les frontières entre les secteurs.

On ne peut imaginer de ciblage sectoriel, au demeurant interdit par la règlementation communautaire relative à la concurrence, sans effets distorsifs sur l'économie ou encouragement à la recherche d'effets d'aubaine.

Les allègements doivent être répartis de la manière la plus uniforme et la plus neutre possible pour l'économie, dans la mesure où nous sommes passés d'une politique de l'emploi à une politique qui doit prendre en considération les problématiques de compétitivité.

Une compétitivité-prix indissociable de la compétitivité hors-prix

Nous partageons le constat, posé notamment par le rapport Gallois, que certains secteurs de l'économie française souffrent d'un positionnement inadapté dans la concurrence internationale et d'un déficit d'investissement et d'innovation et que leurs difficultés ne se résument pas au seul coût du travail.

Pour autant, s'il n'est pas question de réduire la question de la compétitivité à la compétitivité-prix, on ne peut l'évacuer totalement. Dans la crise récente, à 29,7 % de la valeur ajoutée en 2013, le taux de marge des entreprises françaises a atteint un niveau historiquement bas qui pénalise l'investissement.

L'allègement des cotisations doit « redonner de l'oxygène » aux entreprises.

Une modernisation nécessaire du financement de la protection sociale

La modernisation du financement de la protection sociale est un processus inachevé. La compensation des allègements de cotisations a certes contribué à une fiscalisation accrue mais elle s'est faite par à-coups, sans stratégie d'ensemble.

Il y a peu d'assiette susceptible de fournir une alternative crédible aux salaires autre que la consommation. La taxation de la consommation reste inférieure en France à la moyenne européenne. L'Europe connaît actuellement une période de très faible inflation qui rend peu probable une répercussion intégrale sur les prix d'une augmentation de la TVA.

Le précédent Gouvernement avait mis en place une TVA « emploi » ou « antidélocalisation » qui prenait acte d'un transfert de cotisation sociale vers l'impôt.

Après sa suppression, un avatar est venu la remplacer rapidement sous la forme nouvelle du crédit d'impôt compétitivité emploi, Cice, financé en grande partie par l'augmentation de TVA mais sous une forme plus complexe et moins visible, qui laisse subsister, en apparence, les cotisations.

Nous plaidons pour une réforme de simplification des flux financiers entre l'Etat et la sécurité sociale, d'affectation d'un relèvement des taux de TVA à la sécurité sociale et d'intégration des allègements dans les barèmes.

Cette réforme doit s'accompagner d'un effort accru de maîtrise des dépenses de protection sociale : nombre de nos partenaires dépensent 3 à 4 points de PIB de moins sans afficher des performances plus médiocres en termes de santé publique ou de redistribution.

Un débat sans fondement sur les contreparties

Si les allègements sont en fait un barème progressif de cotisations sociales, il n'y a pas de justification à leur rechercher des contreparties de la part des entreprises.

Les entreprises ont supporté quelque 15 milliards d'euros de prélèvements obligatoires supplémentaires en 2013. Il est difficile, dans ces conditions, de parler de « cadeaux aux entreprises » avec les allègements dont l'emploi devrait être tracé à l'euro près.

Si notre pays veut faire valoir ses atouts dans la mondialisation, il ne doit pas transférer aux entreprises une fonction redistributive qui incombe l'Etat. A l'Etat, le financement des prestations de solidarité et le soutien au revenu des plus modestes, aux entreprises la création de valeur et le partage, quand ils existent, des profits.

Groupe socialiste et apparentés

La mission commune d'information devait permettre de dresser le bilan des politiques d'allègement de charges sociales, engagées depuis 1993 avec les premiers allègements dits « Balladur ». Elle est parvenue à retracer le cheminement historique, mais aussi économique et social, qui a conduit la France à faire des allègements de cotisations sociales la première des politiques publiques de l'emploi, tout en faisant la synthèse des évaluations, déjà réalisées et maintes fois commentées, de leur impact sur l'emploi.

Un constat partagé : des allègements de charges comme politique de l'emploi, qu'il convient de moderniser

Nous partageons le constat de départ présenté par le rapport : les allègements sont apparus, au début des années 1990, comme le remède nécessaire pour lutter contre un chômage endémique, notamment des personnes sans qualification, tout en conservant un Smic relativement élevé permettant de garantir un revenu digne aux travailleurs et sans remettre en cause notre modèle social protecteur.

Nous partageons également l'idée, largement consensuelle entre les experts entendus par la mission, que le ciblage de ces allègements sur les bas salaires permet certes d'en maximiser l'impact sur l'emploi, mais emporte également des conséquences en termes de spécialisation de l'économie sur des segments d'emploi non qualifiés, et de déformation de l'échelle des salaires vers les bas salaires, qu'il est nécessaire de réorienter aujourd'hui.

C'est au demeurant ce à quoi s'est employé le Gouvernement depuis 2 ans.

Un financement garanti de la protection sociale

Nous contestons en revanche l'idée selon laquelle les allègements de cotisations auraient fragilisé notre système de protection sociale et son financement.

La diversification des recettes de la sécurité sociale va de pair avec l'universalisation des prestations, elle en est la conséquence logique et il n'est pas illégitime que des prestations de solidarité soient financées par l'impôt et non par des cotisations sociales assises sur les salaires.

Au demeurant, le financement de la protection sociale par l'impôt est antérieur aux allègements de cotisations et a été engagé avec la création de la CSG qui repose à 60 % sur les salaires et dont nul ne peut contester qu'il s'agit d'une ressource de qualité, stable et à assiette large, pour la sécurité sociale.

Le financement de la protection sociale n'est pas remis en cause. Il est certes complexe, les prestations le sont aussi, mais la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 a apporté une clarification bienvenue dans les recettes. Seule la TVA est aujourd'hui partagée entre l'Etat et la sécurité sociale.

Les cotisations sociales, avec 60 %, occupent une part encore prépondérante dans les recettes.

Quant au contenu des prestations, il a globalement progressé ces vingt dernières années et les efforts récents ont consisté en une maîtrise indispensable et intelligente des dépenses qui préserve la qualité de notre protection sociale.

Le Cice et le pacte de responsabilité : une politique qui associe emploi et compétitivité

Les allègements de charges ont eu, depuis 20 ans, un impact quantitatif sur l'emploi qui, s'il fait l'objet d'estimations différentes, n'est guère contesté dans son principe. En revanche, l'effet sur la qualité des emplois d'une part, à savoir l'échelle des salaires et le niveau de qualification, et sur l'économie en générale, à savoir la spécialisation des entreprises sur des secteurs non porteurs, est davantage critiqué.

C'est en partant de ce double constat que le Gouvernement a décidé, dès la fin de l'année 2012 suite à la remise du rapport de Louis Gallois sur le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi, de mettre en oeuvre une politique ambitieuse de baisse des charges des entreprises, dont l'ampleur et le périmètre renouvelle les politiques menées jusqu'alors.

Cette politique s'est organisée en deux temps : le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (Cice), instaurée dès la troisième loi de finances rectificative pour 2012 ; puis le pacte de responsabilité et de solidarité, dont les mesures sont en passe d'être définitivement adoptées dans le cadre des projets de lois de finances rectificative pour 2014 et de financement rectificatif de la sécurité sociale pour 2014.

Ces mesures présentent, par rapport aux allègements existants, trois ruptures majeures qui en compensent les effets pervers constatés. Tout d'abord, ces mesures visent une échelle de salaires beaucoup plus large que les allègements précédents. Ainsi, le Cice correspond à une baisse du coût du travail uniforme, quel que soit le niveau du salaire, jusqu'à 2,5 Smic. Ainsi, plus des deux tiers de la masse salariale des entreprises (65,7 %) entre dans l'assiette de calcul du Cice. De même, le pacte de responsabilité prévoit une baisse des cotisations patronales familiales étendue jusqu'à 1,6 Smic, ainsi qu'un allègement des cotisations des travailleurs indépendants gagnant jusqu'à 3,8 Smic.

Ensuite, ces mesures sont, pour la première fois, complétées par des mesures en faveur du pouvoir d'achat des travailleurs modestes : c'est le pacte de solidarité, qui prévoit des allègements des cotisations salariales pour les salariés entre 1 et 1,3 Smic. Ainsi, la politique de l'offre est combinée avec des mesures de relance de la consommation par l'amélioration du pouvoir d'achat des salariés.

Elles sont également allées de pair avec une réforme de la formation professionnelle qui vise au développement des qualifications des salariés.

Enfin, leur financement n'est plus assuré par des compensations de l'Etat à la sécurité sociale, mais par des baisses de dépenses. Cela en favorise la lisibilité, mais aussi la pérennité et la soutenabilité du point de vue de l'équilibre de nos comptes publics.

Au total, le groupe socialiste s'oppose vivement à l'idée selon laquelle le pacte de responsabilité et de solidarité, Cice compris, serait à la fois un prolongement des politiques antérieures et un compromis insatisfaisant entre emploi et compétitivité. Au contraire, il renouvelle profondément la stratégie d'allègement du coût du travail pratiquée depuis vingt ans en associant emploi et compétitivité par un élargissement significatif de l'assiette des salaires concernée, et en la combinant à des mesures de relance du pouvoir d'achat.

Le pacte est le produit du « chemin de crête » emprunté par le Gouvernement pour, dans le même temps, restaurer la compétitivité dégradée de nos entreprises en leur permettant d'investir et d'alléger le coût du travail des salariés qualifiés, améliorer la situation de l'emploi dans un contexte de chômage croissant et rétablir l'équilibre de nos finances publiques. Ce chemin est étroit, mais il est indispensable de l'emprunter avec responsabilité. Le pacte proposé par le Gouvernement en est la première des traductions.

Groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC

Les allègements de charges, au-delà du débat de politique économique, suscitent de vives réactions politiques comme notre mission d'information s'en est tristement fait l'écho en ne parvenant pas à adopter un rapport qui satisfasse une majorité suffisante de ses membres.

La faute en incombe-t-elle au Sénat ?

Il est vrai que la configuration politique de la Haute assemblée, dans un contexte électoral intense, complique les conditions du débat parlementaire. Il est tout aussi vrai que face à un tel défi, la recherche du consensus s'impose avec d'autant plus de force que le Sénat, privé du fait majoritaire, reste le lieu privilégié du débat.

Les travaux de la Mission d'information ont été d'une grande qualité et d'une grande richesse. Malheureusement, la question des allègements de charges dépasse le simple cadre de l'arbitrage de politique économique car il oppose en réalité des cultures politiques très différentes.

Pour synthétiser, on peut dresser deux types idéaux des positions en présence:

- Les partisans de la sacralisation de la cotisation comme mode privilégié de financement d'une protection sociale toute aussi sacralisée et les contempteurs de la baisse des charges ;

- Les partisans d'une remise à plat complète du mode de financement de la protection sociale au regard de l'impact que le niveau actuel des charges fait peser sur la compétitivité des entreprises et donc sur l'emploi.

Cette crispation est rendue d'autant plus sensible que la prochaine mise en oeuvre du pacte de responsabilité fait de l'allègement des charges un marqueur politique fort a priori en faveur ou en opposition au Gouvernement. Dès lors, les conditions d'ouverture au dialogue étaient manifestement insuffisantes pour permettre d'établir un rapport commun.

Toujours est-il que sur le fond du sujet, les allègements de charges sont aux politiques publiques ce que la boîte de Schrödinger est à la physique contemporaine. Il est impossible de savoir ce qu'il se passe dans la boîte avant qu'elle ait été ouverte. Aussi, il est impossible d'avoir a priori un jugement sur l'efficacité des allègements de charges. Cette efficacité dépend de l'objectif visé aussi bien que du contexte économique. C'est précisément l'objet de la présente contribution.

Les allègements de charges : un levier ambivalent de nos politiques publiques

Les allègements de cotisations sociales salariales ou patronales sont devenus depuis deux décennies l'un des outils les plus communément employés en matière de politique de l'emploi .

Armé de ses 30 milliards d'euros de baisses de charges en trois ans, le Pacte de responsabilité du Président de la République et du Premier Ministre confirme de fait qu'il existe un consensus transpartisan quant aux effets attendus de pareils allègements.

Une ambiguïté demeure cependant : les allègements de charges sont-ils un levier direct de soutien à l'emploi ou doivent-ils, pour être pleinement efficace, soutenir en premier lieu l'investissement pour permettre dans un second temps à l'entreprise d'embaucher ?

La vocation originelle : le soutien à l'emploi peu qualifié

Les allègements de charges demeurent cependant ambivalents dans leurs effets. Ils ont été historiquement employés soit comme des leviers en faveur de l'emploi peu qualifié, soit comme une compensation du fait du renchérissement du coût du travail dans le cadre de la réduction du temps de travail dès 1998.

La vocation originelle des allègements de charges sociales est le soutien à l'emploi et principalement à l'emploi peu qualifié. Son efficacité a été économiquement démontrée dès la mise en oeuvre des allègements Juppé de 1993 et de Robien en 1995.

En effet, les modalités actuelles du financement de la protection sociale en France reposent trop largement sur les cotisations de telle sorte qu'elles renchérissent le coût du travail. Cet effet sur la valeur de l'heure travaillée pénalise aussi bien la compétitivité des entreprises engagées sur les marchés internationaux que les actifs à la recherche d'un emploi ou les salariés qui ne voient pas leur rémunération progresser. Dès lors, la baisse des charges, notamment ciblée sur les bas salaires a permis de soulager le coin fiscalo-social qui pèse sur les entreprises et donc de compenser l'absence de qualification par la baisse du coût de l'heure travaillée.

La baisse des charges revient donc, à prestations sociales égales, à laisser à l'Etat ou aux autres cotisants le soin de prendre en charge le financement de la protection sociale contre un effort de stimulation de l'emploi.

L'inflexion de la fin des années 1990 et la compensation du coût salarial du passage aux 35 heures

Dès la mise en oeuvre de la première loi dite « Aubry » de 1998, les allègements de charges sont apparus, non plus comme des outils de soutien à l'emploi, mais comme une compensation du renchérissement du coût du travail.

En effet, le passage de la durée légale hebdomadaire de travail de 39 à 35h entre 1998 et 2000 reposait sur un principe simple : 35 heures travaillées payées 39 heures . En plus de ce premier surcoût pour l'employeur, la diminution de la durée légale a entrainé mécaniquement un besoin accru en heures supplémentaires. Les baisses de charges ont donc eu pour vocation de soulager les entreprises au regard de la hausse importante du Smic observable entre 1998 et 2005. Ces allègements de charges représentent à l'heure actuelle un montant annuel de 22 milliards d'euros.

Il est à noter qu'il n'existe aujourd'hui aucun consensus dans la littérature économique sur les effets positifs ou négatifs du passage aux 35 heures en France. Toujours est-il que notre pays fait désormais face à un paradoxe particulièrement ironique en cette période de forte dégradation du marché du travail : nous allégeons les charges des entreprises afin qu'elles emploient leur masse salariale dans un cadre horaire légal inférieur à la moyenne européenne.

Dès lors, il y a une contradiction entre les deux générations d'allègements de charges : la première génération ciblait une population spécifique avec pour objectif de maximiser sa compétitivité-prix sur le marché du travail ; la seconde a été plus générale mais a rigidifié le marché et les coûts supportés par les entreprises du fait de la hausse des heures supplémentaires.

Il n'existe pas d'études économétriques à l'heure actuelle permettant d'analyser l'impact de la seconde génération d'allègements sur la première. D'un trait, il est concrètement impossible de dresser le bilan sur l'emploi de ces baisses de charges.

La nécessaire relance de l'investissement par la baisse des charges dès lors que l'on cesse de stigmatiser les objectifs de marges des entreprises

Du point de vue patronal, le niveau actuel des cotisations employeurs minore la capacité de l'entreprise à réaliser une marge et donc à investir, à se développer et indirectement, à améliorer les conditions de travail de leurs salariés. Le taux de marge national est actuellement de l'ordre de 28% soit dix points de moins que la moyenne européenne qui s'étalonne généralement autour de 38%.

Cette faiblesse historique et structurelle des marges de nos entreprises explique la faiblesse de notre taux d'investissement privé, mais également les difficultés de croissance de nos entreprises, notamment des PME, et l'insuffisant développement des secteurs d'avenir à haute valeur ajoutée. Le taux de marge est ainsi l'horizon de nos faiblesses en matière de compétitivité économique, quelle que soit sa composante : prix, qualité ou intérêt de l'entrepreneur.

Or, d'après les récentes études de la conjoncture de l'Insee, il apparait que les entreprises sont à l'heure actuelle en situation de surcapacité d'emploi. En effet, les mesures adoptées depuis deux ans à l'initiative du Gouvernement de Jean-Marc Ayrault à l'instar du Cice, des contrats de génération, des contrats d'avenir ou encore de la transposition législative de l'accord national interprofessionnel de 2013 ont conduit les entreprises à favoriser le maintien de l'emploi dans l'entreprise plutôt qu'un ajustement net de leur masse salariale sur la quantité de postes disponibles .

Dans ces conditions, des allègements de charges de première génération (ciblées sur les bas salaires) n'auraient que peu d'effets. Soit l'entreprise est dans une logique de montée en gamme, auquel cas elle aura besoin d'employer des personnes très qualifiées et donc rémunérées à un niveau supérieur au Smic, soit elle emploiera des personnes moins qualifiées pour bénéficier des allègements de charges mais dans ces conditions il est impossible de distinguer l'effet d'aubaine du réel effet sur l'emploi.

La politique d'abaissement des charges prévue par le Gouvernement dans le cadre de la mise en oeuvre du pacte de responsabilité ne saurait donc se satisfaire de la redite de dispositifs qui étaient adaptés à la situation des années 1990.

Comment rendre efficace du point de vue de l'emploi et de l'investissement un allègement massif de charges dans le cadre du pacte de responsabilité ?

Le constat initial est que les allègements de charges ne sauraient constituer à eux seuls une clé universelle vers le retour de la compétitivité, de l'emploi et de la croissance en France. Les allègements de charges doivent s'inscrire dans un cadre structurel d'ensemble qui comprendrait :

- Une réflexion sur la durée légale du temps de travail et sur la remise en cause des 35 heures ;

- Une réflexion sur le financement le plus adéquat de la protection sociale dans une économie mondialisée ;

- Un plan de réduction de la fiscalité des entreprises ;

Le groupe UDI-UC partage ce diagnostic et rappelle que le parti UDI a mis en avant un nombre important de propositions sous la forme d'un contre-pacte de responsabilité dévoilé en avril dernier. Concernant la question spécifique de l'efficacité des allègements de charges, trois propositions de ce pacte alternatif pourraient inspirer la conduite à venir du Gouvernement et ainsi maximiser l'effet des allègements à venir :

Un préalable : rétablir à 39 heures la durée légale du travail hebdomadaire.

Les exonérations de charges Aubry et Fillon au titre des bas salaires, soit 22 milliards d'euros, seraient néanmoins maintenues pour soutenir l'effort vers les emplois les moins qualifiés.

Coté employeur, supprimer immédiatement la cotisation famille.

Cette mesure remplacera le Cice et représentera au moins 30 milliards d'euros. Elle serait financée par une augmentation du taux normal de la TVA de 3 points en 2015. Ce taux vise principalement les produits importés de telle sorte qu'il soutiendra opportunément la montée en gamme des produits nationaux.

Coté salarié, baisser toutes les cotisations salariales, pour un montant d'environ 1,2 Smic net (soit 22 milliards).

Cette mesure constituera une contrepartie au rétablissement de la durée légale du travail à 39 heures. Notons qu'au fil des années les régimes dérogatoires aux 35 heures se sont d'ores et déjà multipliés. En outre, accroître en parallèle la flexibilité dans les horaires d'ouverture des commerces le dimanche et en semaine permettra aussi d'accorder des suppléments de salaires.

Nous inscrivons ces propositions dans une politique globale de rénovation du paritarisme. Les politiques sociales sont aujourd'hui des politiques publiques d'intérêt général qui dépassent largement le seul cadre de la relation de travail. Aussi considérons nous que la plupart des systèmes de financement doivent être aujourd'hui assurés par la solidarité nationale et gérés directement par la puissance publique.

La France ne peut plus se contenter de politiques économiques à la marge. Seule une vision d'ensemble, nécessitant le courage politique de réformes structurelles, permettra de retrouver la confiance, la compétitivité, l'emploi et une croissance soutenable pour notre pays.

Groupe communiste républicain et citoyen

Les sénatrices et sénateurs du groupe Communiste Républicain et Citoyens soutiennent le rapport présenté par Michelle DEMESSINE dans le cadre de la Mission Commune d'Information destinée à évaluer l'impact réel des exonérations de cotisations sociales, notamment sur l'emploi.

Le rejet de son rapport et sa non publication, interrogent les membres du groupe CRC sur la nature de ces rapports issus de l'initiative parlementaire. Cela conduit à penser que seuls des rapports consensuels pourraient être rendus publics, alors même que les sujets abordés peuvent porter ou contester des choix politiques eux-mêmes non consensuels.

Ce rapport, et les propositions qu'il contient présentent l'avantage de démontrer qu'aucune étude n'atteste du bienfondé économique et social des dispositifs d'exonérations de cotisations sociales comme levier capable de favoriser l'emploi. Le fait que les économistes, les chercheurs et les sociologues ne puissent pas affirmer de manière unanime et constante que les exonérations de cotisations sociales sont de nature à favoriser la création d'emploi, justifie que l'on se penche sur ces mécanismes.

En effet, tout le monde s'accorde à dire qu'il s'agit de mécanismes coûteux pour la sécurité sociale et pour les comptes publics. Sur les dix dernières années, le montant cumulé des exonérations de cotisations sociales atteindrait les 210 milliards d'euros. Or ces milliards d'euros de recettes sociales volontairement supprimées ne sont pas sans conséquence pour les comptes sociaux. La compensation de l'Etat étant tardive et partielle. Chaque année, les lois de financement de la sécurité sociale contiennent des articles prévoyant que la compensation ne sera pas intégrale, laissant à la charge de la sécurité sociale, une perte de recette évoluant entre 2 et 3 milliards d'euros. C'est-à-dire que chaque année, la majorité parlementaire (le groupe CRC votant systématiquement contre cette disposition) décide de générer une dette au sein de la sécurité sociale afin de permettre au budget de l'Etat d'économiser quelques milliards.

Il est étonnant que celles et ceux qui prônent une gestion rigoureuse, au point de la voir devenir austéritaire, décident de creuser ainsi annuellement les déficits de la sécurité sociale. Alors même que les crédits qu'ils décident de supprimer ne sont pas de nature fiscale. La part patronale de cotisations sociales ayant historiquement une signification particulière. Elles constituent une part de rémunération des salariés. Une part socialisée et mutualisée versée par les employeurs. Réduire la part patronale de cotisations sociales, sans augmenter les salaires en contrepartie, revient donc à réduire la rémunération due aux salariés en échange de leur travail.

Et pour quels résultats en matière d'emploi ? Le tenant de cette politique d'exonérations de cotisations sociales la justifie par le fait qu'elle permettrait de créer des emplois ou tout du moins d'en sauvegarder. Or cette affirmation rend impossible le contrôle de l'efficacité de ces mesures.

Le groupe CRC constate pour sa part que la Cour des Comptes, de manière constante, dans ses rapports, souligne que les exonérations de cotisations sociales, parce qu'elles sont généralement consenties sur les bas salaires, tendent à tirer les salaires vers le bas. Cela générerait des trappes à bas salaires, maintenant les travailleurs dans la précarité, conduisant à d'importantes dépenses sociales supplémentaires.

En outre, de nombreuses études soulignent que les exonérations de cotisations sociales conduisent à une modification même de la structure des emplois crées. Si les employeurs peuvent occasionnellement profiter de l'effet d'aubaine que génère les exonérations de cotisations sociales pour recruter ou conserver des emplois peu qualifiés, cela se fait au détriment d'emplois qualifiés et correctement rémunérateurs.

Si ces études peuvent être contestées, celles conduisant à des déclarations inverses peuvent l'être tout autant. Dans le contexte actuel, où les recettes se font rares et ou les deniers publics doivent être mobilisés avec justesse, une approche prudente devrait être de mise. En 20 ans d'existence et de généralisation des exonérations, la courbe des emplois industriels ne s'est pas inversée, tout au contraire. Les principaux bénéficiaires de ces mécanismes, comme l'atteste la ventilation des bénéficiaires du Cice, n'étant par ailleurs des employeurs non soumis à la concurrence internationale et donc non soumis à la prétendue baisse de la compétitivité en raison du coût du travail en France, devrait là encore nous interroger collectivement sur l'efficacité réelle de ces exonérations.

D'autant que la valeur ajoutée depuis 20 ans a largement profité au capital au détriment du travail autant que le coût du capital est aujourd'hui largement supérieur à celui du travail.

C'est pourquoi le groupe CRC soutient les propositions contenues dans le rapport d'information, notamment celle concernant la remise à plat des allègements de cotisations sociales et la nécessaire rénovation des mécanismes de financement de la sécurité sociale via l'instauration d'une modulation de cotisations sociales en fonction de la politique salariale des entreprises. Celles qui jouent le jeu de l'emploi et favorise le travail, la reconnaissance des compétences et des qualifications, favorisent l'investissement et la formation ne doivent pas supporter le poids de celles qui font clairement le choix de la rentabilité à court terme et de la priorité donnée au capital.

Groupe écologiste

Cette mission commune d'information, créée à la demande du groupe CRC, était d'autant plus bienvenue que le gouvernement s'apprête à instaurer un dispositif similaire aux exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires : le Crédit d'impôt compétitivité emploi. Lors de la présentation du rapport, le groupe écologiste s'est félicité de la qualité du travail accompli par la rapporteure Michelle Demessine. La pertinence et la richesse des informations et des arguments présentés méritent d'être salués.

Le rapport pointe l'absence de preuves tangibles de l'efficacité des exonérations

Alors que les exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires existent depuis une vingtaine d'années, aucune évaluation satisfaisante n'en a été faite jusqu'ici. En 2006, le Conseil d'orientation pour l'emploi a évalué le nombre d'emplois qui seraient détruits par la suppression des allègements dits « Fillon » à 800 000, sans que l'on ne connaisse précisément le nombre d'emploi réellement créés par les différents dispositifs qui se sont succédé.

La création du Crédit d'impôt compétitivité emploi va doubler les sommes d'ores-et-déjà engagées puisqu'à plein régime, son coût sera d'environ 20 milliards d'euros par an, soit le coût des exonérations de cotisations sociales. L'observatoire français des conjonctures économiques estime que la niche fiscale permettra en 5 ans - après 85 milliards d'euros de dépense fiscale - de créer 150 000 emplois. La direction générale du Trésor estime quant à elle que le Pacte de responsabilité et de croissance - dont le crédit d'impôt compétitivité emploi est la mesure phare - créerait 190 000 emplois en 3 ans mais entraînerait la disparition de 250 000 autres durant la même période en raison de la réduction des dépenses publiques qu'il requiert.

La question qu'il faut se poser n'est pas seulement celle du nombre d'emplois créés ou conservés grâce à ces dispositifs, mais de l'efficacité de cette dépense fiscale en comparaison des autres usages qui auraient pu être faits des sommes concernées. Or, aucune démonstration n'a été faite que le « multiplicateur » des recettes auxquelles l'Etat renonce ainsi est supérieur à celui d'une embauche directe par l'Etat, dans une collectivité territoriale ou au recours à un contrat aidé.

Les 20 milliards d'euros dépensés annuellement pour le Crédit d'impôt compétitivité emploi ou pour les exonérations de cotisations sociales auraient pu permettre à l'Etat d'embaucher près de 950 000 personnes au Smic, avec un coût super-brut (salaire brut + charges patronales à taux plein) de 1761 euros mensuels par emploi. S'ils avaient été utilisés pour financer des emplois aidés à hauteur de 60%, ce sont 1,5 million de postes qui auraient ainsi pu être créés. Or il se trouve qu'il existe en ce moment même des secteurs d'activité publics et para-publics qui ont besoin de personnel comme la justice, la santé et l'action sociale.

« Coût du travail » et « charges sociales » : le sens des mots

On connaît le but annoncé de ces mesures : abaisser le coût du travail. L'idéologie véhiculée par l'utilisation répétée de mots comme «coût  du travail» et «charges sociales» est de considérer les salariés et le financement de la protection sociale comme des poids morts de l'économie, des obstacles dans la course à la compétitivité dans laquelle la France serait engagée.

Or, plus qu'un « coût », le travail est aussi et avant tout l'origine de la création de richesse d'une société. Les « charges » pointées du doigt servent en réalité à financer des hôpitaux et à payer des retraites. Une part importante de ces retraites est dépensée pour payer des services à la personne, qui créent de nombreux emplois pour les salariés peu qualifiés et permettent d'éviter le recours systématique au placement en institution. La santé est un secteur de pointe, amené à prendre de plus en plus d'importance à mesure que notre population vieillit. Il serait absurde de considérer les dépenses de santé comme une « charge » pour notre pays.

Le coût du travail : bouc émissaire du manque de compétitivité

Au-delà des considérations politiques qui la sous-tendent, l'analyse faisant du coût du travail le talon d'Achille de l'économie française comparée à ses principaux partenaires européens semble peu étayée. D'abord parce que le coût du travail ne s'apprécie pas uniquement en fonction du montant des charges patronales mais avec tous les éléments qui influent sur la négociation des salaires. La différence entre ce que coûte un salarié à son employeur et le revenu dont il dispose finalement, y compris l'impôt sur le revenu, est nommée coin fiscalo-social. Or l'impôt sur le revenu en France est plutôt faible comparé à ses voisins, ce qui compense la part importante des charges et explique que l'Allemagne ait un coin fiscalo-social supérieur à celui de la France selon l'étude Taxing Wages de l'OCDE.

Ensuite, un pays comme la France ne peut baser sa compétitivité sur des faibles coûts du travail. Le niveau de vie - et le niveau de salaire qui en découle - d'un pays comme le nôtre est bien plus élevé que celui d'un pays à revenu intermédiaire, sans même évoquer les pays en voie de développement. Au sein de l'Union européenne, les Pays Baltes affichent des niveaux de Smic proches de 300 € par mois tandis qu'en Bulgarie et Roumanie, le minimum légal est inférieur à 200 €.

La solution pour notre pays est connue : monter en gamme et innover pour se placer sur des segments et produits pour lesquels la compétitivité « hors-coût » domine. A ce titre, il est capital d'imposer des normes de qualité sanitaire et environnementale exigeantes pour inciter nos producteurs locaux à faire de la qualité et les protéger d'une concurrence déloyale. Par exemple, moduler les éco-contributions en fonction de la facilité de recyclage de leurs produits permettrait d'inciter nos producteurs à innover en matière de maîtrise de fin de vie des produits. Ceci leur conférerait un temps d'avance face à une évolution inéluctable des économies développées.

Enfin, la majorité des emplois à bas salaires subventionnés se situent dans des activités de service qui ne sont pas les plus exposées à la concurrence internationale. L'Insee fait le classement des secteurs qui ont le plus recours à des travailleurs à bas ou très bas salaires : En premier lieu vient les services aux particuliers, dont le secteur de l'hôtellerie-restauration où les bas salaires représentent plus de 40% des effectifs. Vient ensuite le secteur de l'administration avec 36% de bas salaires, notamment du fait de l'important nombre de contrat aidés dans les collectivités territoriales, puis viennent les services aux entreprises. On voit donc que ces dispositifs bénéficient avant tout aux activités de services et pas à l'industrie manufacturière.

L'Europe du travail

Plus de la moitié du commerce extérieur de la France se fait avec d'autres pays de l'Union européenne, dont la plus grande part avec des pays aux niveaux de salaires quasi-similaires. Il reste cependant des disparités de niveaux de vie importantes au sein de l'Union européenne. Les écologistes souhaitent oeuvrer à la convergence des conditions de travail et des rémunérations pour promouvoir un commerce respectueux des droits des salariés.

L'harmonisation européenne sur les points fondamentaux du droit du travail - dont le salaire minimum, qui serait alors rapporté au coût de la vie - constituerait un véritable progrès pour l'avènement d'une Europe véritablement solidaire. Une telle harmonisation permettrait de mettre fin au dumping social qui sévit au sein de l'Union, de même que la création d'un impôt européen sur les sociétés permettrait de mieux lutter contre le dumping fiscal et la planification fiscale agressive de certaines multinationales.

Des emplois précaires sans perspectives d'évolution

Le salaire minimum, en tant que revenu devant garantir un niveau de vie décent, est largement remis en cause par le recours massif aux contrats à temps partiel. Le Smic horaire est bien entendu respecté, mais en ne travaillant qu'une dizaine d'heures par semaine, il ne permet pas de survivre sans les instruments de protection sociale. Selon l'Insee, le travail temporaire subi affectait 1,35 millions de personnes en 2012, dont plus de 70% de femmes. Ces contrats précaires ne constituent pas des emplois viables à subvenir aux besoins des employés, et ils sont pourtant subventionnés au même titre qu'un emploi à temps plein.

Si les écologistes s'opposent aux exonérations de charges sur les bas salaires, c'est aussi pour éviter les effets de seuil et de « trappe à bas salaire » que ces mesures entraînent. Ceci revient à récompenser les entreprises qui ont la politique salariale la moins ambitieuse. Cette stagnation des salaires est souvent due à une rotation de l'emploi - ou turn-over - très intensive, elle-même la conséquence de conditions de travail difficiles.

Encourager la multiplication de ces emplois instables, sans possibilités d'évolution de carrière et incapables de subvenir aux besoins fondamentaux des salariés est aux antipodes d'une politique écologiste en matière de travail.

Des pistes alternatives de financement du système de protection sociale

En 2011, la France était au premier rang des pays de l'Union en termes de cotisations sociales rapportées au PIB. Le niveau de ces charges renchérit les produits fabriqués en France comparé à ses concurrents et avantage les entreprises employant peu, le capital étant proportionnellement moins taxé que le travail.

Les pays scandinaves - dont beaucoup vantent le modèle social - taxent bien plus la consommation que la France, notamment le Danemark qui dans les années 80 a décidé d'augmenter de 3 points son niveau de TVA en contrepartie d'une quasi-suppression des charges sociales.

Cela a été considéré comme socialement acceptable car l'impôt sur le revenu et les minimas sociaux permettent au Danemark de figurer parmi les pays les plus performants en termes de réduction des inégalités par la fiscalité comme indiqué dans le rapport Growing Unequal ? de l'OCDE.

Dans un contexte où les risques d'inflation sont faibles, la possibilité d'un transfert progressif des cotisations sociales vers une taxe sur la valeur ajoutée des entreprises mérite que l'on s'y intéresse. Une telle taxe a l'avantage de taxer les produits locaux comme les produits importés, l'augmentation de son importance relative à celle des cotisations sociales améliore la compétitivité des entreprises résidentes.

La TVA a l'image d'un impôt dégressif, car la propension marginale à consommer des ménages pauvres est plus importante que celle des ménages aisés. Cependant, la modulation des taux de TVA permet de moins taxer la consommation des biens de première nécessité et de taxer davantage les produits de luxe et de prestige. Cette modulation est donc un moyen de rendre la TVA moins injuste.

Une solution durable : partage du travail et revenu universel d'existence

L'impasse écologique dans laquelle nous précipite le consumérisme effréné amène les écologistes à remettre en cause les dogmes sur le temps de travail. La productivité d'une heure travaillée en France a été multipliée par 2,7 entre 1970 et aujourd'hui. Parallèlement, le taux de chômage a plus que doublé et plus de 3,5 millions de personnes dépendent des minimas sociaux pour survivre. Alors que l'on produit deux fois plus de richesse par habitant chaque année, le temps de travail annuel moyen n'a diminué que d'un quart.

L'avènement d'une société basée sur le gaspillage, l'obsolescence programmée et des dépenses massives de marketing est une dérive qu'il convient de stopper. Pour les écologistes, il est temps de repenser nos modes de production et de consommation pour redonner la priorité aux échanges humains. Il faut considérer que si l'on veut un travail pour tous, le temps de travail diminue à la mesure des gains de productivité acquis.

Cette nécessaire baisse du temps de travail, et la prise en compte des nombreuses personnes en situation de précarité amènent les écologistes à envisager un autre modèle de société basé sur l'instauration d'un revenu universel d'existence. Ce revenu serait accordé sans condition à tous les citoyens. Il favoriserait l'autonomie des étudiants et serait un outil de lutte contre les inégalités ainsi que la stigmatisation dont souffrent aujourd'hui les chômeurs.

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Conclusion

Ce rapport a souligné le manque de précision des évaluations dont dispose la puissance publique pour des mesures qui mobilisent des sommes considérables depuis 20 ans. En effet, l'absence d'expérimentation rend impossible la preuve que la politique retenue était plus efficace qu'une autre. Par contre, le rapport explique les effets pervers que ces mesures entraînent et l'impact limité qu'elles ont sur les difficultés de l'industrie française.

Partageant les principales analyses de ce rapport, Jean Desessard, au nom du groupe écologiste, a voté pour son adoption.

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