D. LOI N°2014-201 DU 24 FÉVRIER 2014 PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS D'ADAPTATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE DANS LE DOMAINE DE LA SANTÉ

Parmi les mesures d'applications prévues, seul est intervenu, en application de l'article 1 er de la loi, le décret en Conseil d'Etat n° 2014-1347 du 10 novembre 2014 relatif aux plafonds de garantie des contrats d'assurance souscrits par les ostéopathes et les chiropracteurs. Est également prévu, bien qu'il n'ait pas été prévu par la loi, le décret n° 2014-1359 du 14 novembre 2014, pris pour l'application de son article 6 et relatif à l'obligation de certification des logiciels d'aide à la prescription médicale et à la dispensation.

Votre commission regrette le retard pris par le Gouvernement pour la publication des mesures d'application de l'article 3 de la loi qui vise à assurer un meilleur encadrement des produits de tatouage et des produits cosmétiques. Même si ses conséquences pratiques sont limitées par la diffusion des meilleures pratiques au sein des populations concernées, ce retard contribue à placer la France en difficulté au regard de ses obligations européennes et apparait paradoxal dès lors que le Gouvernement insiste sur la nécessité pour la Parlement d'adopter le plus rapidement possible les textes de transposition des normes européennes.

E. LOI N° 2014-288 DU 5 MARS 2014 RELATIVE À LA FORMATION PROFESSIONNELLE, À L'EMPLOI ET À LA DÉMOCRATIE SOCIALE

Transposant, pour partie, l'accord national interprofessionnel du 14 décembre 2013 relatif à la formation professionnelle, la loi du 5 mars 2014 a profondément réformé le système français de formation professionnelle, ses outils et ses modalités de financement. Elle a également modifié sa gouvernance, aux niveaux national et régional, afin de renforcer le rôle des partenaires sociaux dans le pilotage et la déclinaison territoriale de cette politique. Elle avait également pour objectif de rationaliser les circuits de collecte et d'affectation de la taxe d'apprentissage et a apporté plusieurs ajustements à l'encadrement, par le code du travail, de cette voie de formation initiale en alternance.

Cette loi comportait enfin un second volet relatif à la démocratie sociale, et a notamment fixé les règles relatives à la mesure, à compter de l'année 2017, de la représentativité, sur la base de leurs effectifs d'adhérents des organisations professionnelles d'employeurs dans les branches et au niveau national et interprofessionnel. Elle a établi un fonds mutualisé destiné au financement des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs, par le biais d'une contribution versée par les entreprises. Elle a enfin défini des règles relatives à la transparence des comptes des comités d'entreprise.

Plus d'un an après sa publication, la plupart des dispositions de la loi du 5 mars 2014 sont entrées en vigueur dans les délais impartis par le législateur , et de nombreuses mesures réglementaires ont été adoptées. Ainsi, durant cette période, vingt-quatre décrets et plusieurs arrêtés d'application ont été publiés. Au total, sur 85 mesures attendues, 62 sont intervenues, soit un taux de 73 %.

Le compte personnel de formation (CPF) , dispositif permettant à tout salarié ou personne à la recherche d'un emploi d'accumuler des droits à la formation en fonction de son activité, de les utiliser quelle que soit sa situation professionnelle et d'acquérir des compétences faisant l'objet d'une certification au travers de formations reconnues éligibles par les partenaires sociaux, est actif depuis le 1 er janvier 2015 28 ( * ) . Le conseil en évolution professionnelle (CEP) , destiné à sécuriser les transitions professionnelles et à apporter un soutien aux salariés souhaitant élaborer un nouveau projet professionnel, peut être mis en oeuvre par Pôle emploi, les Cap emploi, l'Apec, les missions locales et les Opacif, ainsi que par des organismes désignés par chaque conseil régional, sur la base d'un cahier des charges fixé par un arrêté du 16 juillet 2014 29 ( * ) et établi en concertation avec les partenaires sociaux et les régions. Enfin, la réforme, pour les entreprises, de l' obligation légale de financement de la formation professionnelle et du fonctionnement des organismes collecteurs paritaires agréés (OPCA) a été précisée par le décret n° 2014-1420 du 24 octobre 2014 30 ( * ) qui, conformément aux annonces faites par le Gouvernement lors de l'examen parlementaire de la loi, répartit la contribution des entreprises entre le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), le congé individuel de formation, les actions de professionnalisation, le compte personnel de formation et, pour celles de moins de trois cents salariés, le plan de formation.

Toutefois, les dispositions d'application de deux mesures importantes de cette loi n'ont toujours pas été prises, alors qu'il s'agit de questions d'importance qui constituaient, au sein de ce texte, une rupture par rapport aux pratiques antérieures.

La première porte sur le contrôle de la qualité des actions de formation . Introduit par le Sénat, l'article 8 de la loi confie au financeur d'une action de formation, que ce soit un Opca, un Opacif, l'Etat, les régions, Pôle emploi ou l'Agefiph, la mission de s'assurer de la capacité du prestataire retenu à « dispenser une formation de qualité ».

Trop souvent, jusqu'à présent, ces organismes se sont limités à financer des formations sans effectuer de vérifications sur les formateurs, laissant ouverte la possibilité d'abus ou de fraudes à leur détriment mais également à celui des stagiaires. De même, l'article 34 du texte renforce les exigences attendues des organismes qui délivrent des formations inscrites au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP), notamment en matière de contrôle des structures de formation qui dispensent la formation qu'ils ont élaborée. La première de ces mesures est conditionnée à la définition de critères d'appréciation par un décret en Conseil d'État, et la seconde à un cahier des charges défini par arrêté. Il est regrettable qu'ils ne soient pas parus.

Le sort des biens mis à la disposition de l'association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) par l'Etat n'a pas encore connu la résolution souhaitée. Sur ce point, le Sénat, sur proposition de son rapporteur Claude Jeannerot, avait obtenu que ces biens puissent être cédés à titre gratuit par l'Etat aux régions, dès lors qu'ils sont utilisés par l'Afpa dans le cadre de ses missions de service public. Un arrêté du 22 septembre 2014 31 ( * ) est venu définir le projet de site qui doit être soumis préalablement au transfert de propriété de l'Etat à la région. Toutefois, l'arrêté fixant la liste des immeubles éligibles à ces transferts n'est toujours pas paru, alors que l'Afpa traverse toujours, malgré le soutien apporté par l'Etat, d'importantes difficultés financières et n'est pas en mesure d'assurer l'entretien de ces biens.

Les articles 24 et 25 de la loi ont également simplifié et rationalisé le pilotage des politiques de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles , tant au niveau national que régional. Le conseil national de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (Cnefop), défini par le décret n°2014-965 du 22 août 2014, a ainsi remplacé le conseil national de l'emploi et le conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie. Le comité paritaire interprofessionnel national pour l'emploi et la formation, dont la composition est fixée par le décret n° 2014-966 du 22 août 2014, fixe quant à lui les orientations politiques paritaires en matière de formation et d'emploi et assure leur suivi et leur coordination avec les politiques menées par les autres acteurs.

Le Cnefop trouve sa traduction au niveau des territoires dans les comités régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelle (Crefop) dont les missions, la composition et le fonctionnement ont été précisés par le décret n° 2014-1055 du 16 septembre 2014, en tenant compte des spécificités des territoires ultra-marins.

Votre commission a toutefois constaté que les Crefop n'avaient pas été tous été mis en place en décembre 2014, contrairement aux engagements du Gouvernement. Dans le cadre de son avis sur le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, votre commission, soutenue par la commission des lois compétente au fond, a souhaité modifier la gouvernance du Crefop, aujourd'hui co-présidé par le préfet de région et le président de région, afin de confier sa présidence à ce dernier. La région doit en effet devenir chef de file sur son territoire pour coordonner l'action des divers intervenants du service public de l'emploi.

A l'article 26, un rapport devait être remis par le Gouvernement au Parlement dans un délai de six mois suivant la promulgation de la loi, afin d'examiner les conditions de mise en oeuvre du développement professionnel continu des professionnels de santé et formuler des recommandations concernant sa gouvernance et sa réalisation. Ce rapport n'a toujours pas été remis au Parlement.

Le décret en Conseil d'Etat prévu à l' article 27 n'est toujours pas pris. Ce décret revêt pourtant une grande importance car il doit assurer la compensation financière des compétences transférées aux régions depuis le 1 er janvier 2015 par l'Etat dans les domaines suivants :

- le transfert des centres de formation des apprentis (CFA) nationaux ;

- la mise en situation d'emploi des publics fragiles ou spécifiques ;

- l'accès aux compétences clefs et actions ciblées sur les détenus et la lutte contre l'illettrisme ;

- le financement des dispositifs de validation des acquis de l'expérience (VAE) ;

- la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle (travailleurs handicapés, apprentis en rupture de contrat, personnes détenues et Français établis hors de France) ;

- l'orientation professionnelle.

Le calcul du droit à compensation des compétences transférées s'effectue sur la base des moyennes actualisées des dépenses des trois années d'exécution précédant le transfert. Ce droit à compensation a été estimé fin 2014 par la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) à environ 202,7 millions d'euros. Pour information, la répartition régionale des enveloppes a été communiquée à l'Association des régions de France, puis la Commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC) qui s'est prononcée le 18 novembre 2014 sur le montant de cette compensation.

Par ailleurs, suite à l'adoption d'un amendement d'un député, l'article 27 prévoyait un rapport du Gouvernement, sur les conséquences en matière d'effort de formation du passage de l'obligation de dépenser à l' obligation de former , avec un examen particulier de la situation des entreprises de 20 à 299 salariés. Ce rapport n'a toujours pas été remis, mais la date-butoir est fixée au 31 décembre 2015.

A l'article 28, un décret était prévu pour fixer les modalités du fonctionnement de l' Institut national de formation , notamment les modalités de contrôle et de tutelle exercées par l'Etat et l'Union nationale des caisses de sécurité sociale sur cet organisme, la composition et le fonctionnement de son conseil d'administration, ainsi que les modalités de nomination de son directeur et agent comptable. Ce texte n'est toujours pas intervenu, mais l'article 28 n'entre en vigueur qu'au 1 er janvier 2016.

L'article 29 définit les règles de la représentativité patronale . La première mesure de l'audience des organisations professionnelles d'employeurs au niveau des branches professionnelles et au niveau national et interprofessionnel devant être réalisée à compter de l'année 2017, le Gouvernement n'a pris aucune des mesures réglementaires prévues à cet article. Toutefois, le décret n° 2015-262 a été édicté dès le 5 mars 2014 afin de créer la sous-commission de la restructuration des branches professionnelles de la commission nationale de la négociation collective prévue également à cet article.

L'article 31 fixe les principales règles du fonds paritaire chargé de financer de manière transparente les partenaires sociaux , qui devait être créé par un accord national interprofessionnel agréé ou, à défaut, par voie réglementaire. Cet article définit également les règles d'affectation de crédits différenciées selon la nature des organismes destinataires et des missions qu'ils poursuivent et instaure des mécanismes de contrôle interne et externe. Faute d'accord entre partenaires sociaux, le pouvoir réglementaire est finalement intervenu pour définir les modalités de fonctionnement du fonds paritaire à travers le décret n° 2015-87 du 28 janvier 2015 relatif au financement mutualisé des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs. Ce décret en Conseil d'Etat définit notamment la composition, les compétences et les règles de fonctionnement du conseil d'administration de l'association paritaire chargée de la gestion du fonds qui a été créé en début d'année. Par ailleurs, le décret n° 2014-1718 du 30 décembre 2014 relatif à la contribution au fonds institué par l'article L. 2135-9 du code du travail, a fixé le taux de la contribution des entreprises, dans le respect de la fourchette prévue par la loi, à 0,016 % des rémunérations versées, et a prévu que la contribution des entreprises sera calculée sur la base des salaires versés à compter du 1 er janvier 2015. Avant le 1 er octobre de chaque année, le fonds devra remettre au Gouvernement et au Parlement un rapport sur l'utilisation de ses crédits, selon des modalités qui seront fixées par voie réglementaire.

La transparence des comptes et de la gestion des comités d'entreprise a été profondément renforcée par l'article 32. Cette question revêt une importance particulière pour votre commission, qui a adopté le 2 octobre 2013 la proposition de loi n° 679 visant à établir un contrôle des comptes des comités d'entreprise, à l'initiative de notre collègue Catherine Procaccia, et dont les principales dispositions ont été reprises dans la loi du 5 mars 2014. Le décret n° 2015-357 du 27 mars 2015 relatif aux comptes des comités d'entreprise et des comités interentreprises a précisé le contenu de la procédure d'alerte qui peut être déclenchée par le commissaire aux comptes lorsqu'il relève, à l'occasion de l'exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation du comité. Il a ainsi fixé les conditions d'information du secrétaire et du président du comité d'entreprise par le commissaire aux comptes, le délai de réponse du secrétaire du comité, les conditions et délais de la tenue de la réunion du comité lorsque le secrétaire du comité n'a pas répondu au commissaire aux comptes.

Ce décret a également fixé :

- le contenu de la convention que doivent conclure les comités d'établissement et le comité interentreprises ;

- les coûts supportés par le comité interentreprises ;

- les modalités de désignation du secrétaire et du trésorier ;

- le délai pour approuver les comptes annuels.

Le décret n° 2015-358 du 27 mars 2015 relatif à la transparence des comptes des comités d'entreprise oblige quant à lui les comités d'entreprise, quelles que soient leurs ressources, à établir des comptes annuels, cette obligation varie toutefois en fonction de leurs ressources annuelles, du nombre de leurs salariés et du total de leur bilan. Ainsi, les comités d'entreprise sont soumis, selon leur taille, à une comptabilité ultra-simplifiée (ressources inférieures à 153 000 euros), une comptabilité avec présentation simplifiée (ressources supérieures à 153 000 euros et obligation de ne pas remplir au moins deux des trois critères suivants : compter cinquante salariés en équivalent temps plein ; disposer d'un bilan de 1,55 million d'euros et posséder 3,1 millions d'euros de ressources), une comptabilité de droit commun dans tous les autres cas.

Le décret prévoit que la commission des marchés, dont l'objet est de proposer au comité des critères pour le choix des fournisseurs et des prestataires et la procédure des achats de fournitures, de services et de travaux, est obligatoire notamment lorsque les marchés sont supérieurs à 30 000 euros.

Le décret précise également le contenu du rapport que doivent élaborer les comités d'entreprise, présentant des informations qualitatives sur leurs activités et leur gestion financière.

Par ailleurs, le décret détermine le contenu de la convention de transfert de gestion qui est obligatoire en cas de transfert au comité central d'entreprise ou au comité interentreprises de la gestion des activités sociales et culturelles communes aux établissements ou aux entreprises concernées.

Enfin, le décret détermine les conditions dans lesquelles les obligations comptables s'appliquent au comité central d'entreprise.

En revanche, le Gouvernement n'a toujours pas pris le décret en Conseil d'Etat qui devait transposer les règles de transparence financière des comités d'entreprise à la caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières , aux caisses mutuelles complémentaires et d'action sociale des industries électriques et gazières et au comité de coordination mentionnés à l'article 47 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz. Votre commission regrette ce retard, car cette question avait été centrale lors de l'examen de la proposition de loi précitée n° 679 visant à établir un contrôle des comptes des comités d'entreprise.

A l'article 34, un arrêté du ministre chargé de la formation professionnel est toujours en attente pour définir le cahier des charges des organismes ou instances qui demandent l'enregistrement au répertoire national de la certification professionnelle des certificats de qualification professionnelle qu'ils ont créées.

Enfin, le Gouvernement n'a pas pris avant le 5 mars 2015 d'ordonnance pour adapter à Mayotte les dispositions prévues dans la présente loi, comme l'y autorisait l'article 35.


* 28 Grâce aux décrets n os 2014-1119 et 2014-1120 du 2 octobre 2014, 2014-1156 du 9 octobre 2014, 2014-1717 du 30 décembre 2014 et 2015-172 du 13 février 2015.

* 29 Arrêté du 16 juillet 2014 fixant le cahier des charges relatif au conseil en évolution professionnelle prévu à l'article L. 6111-6 du code du travail, NOR : ETSD1414403A.

* 30 Décret n° 2014-1240 du 24 octobre 2014 relatif aux organismes paritaires agréés mentionnés aux articles L. 6332-1, L. 6333-1 et L. 6333-2 du code du travail.

* 31 Arrêté du 22 septembre 2014 relatif au projet de site préalable au transfert de propriété de l'Etat à titre gratuit aux régions d'un ou plusieurs immeubles utilisés par l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, NOR : ETSD1420535A.

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