II. RÉNOVER LE CONSEIL D'ÉCOLE ET EXPÉRIMENTER UNE NOUVELLE ORGANISATION POUR DONNER UN NOUVEAU SOUFFLE À L'ÉCOLE PRIMAIRE

A. RENOUER UNE RELATION DE CONFIANCE AU SEIN DU CONSEIL D'ÉCOLE

Au vu des avis recueillis sur le fonctionnement des conseils d'école, votre rapporteur estime que des améliorations substantielles peuvent être apportées par la voie réglementaire.

1. Clarifier les attributions du conseil d'école

Votre rapporteur estime tout d'abord nécessaire de procéder à une clarification les attributions et les compétences du conseil d'école , telles que définies par les articles L. 401-1 et D. 411-2 du code de l'éducation.

Comme l'ont souligné différents intervenants, le caractère ambigu de certaines attributions du conseil d'école tend à susciter la confusion de ses membres, notamment des parents d'élèves, et peut être à l'origine d'oppositions diverses . En effet, des dispositions entretiennent une certaine confusion quant au caractère décisionnel ou non des avis du conseil d'école. Si, comme l'affirmait le représentant du SGEN-CFDT « personne n'est dupe du rôle du conseil d'école » 29 ( * ) , il paraît nécessaire, comme le réclamait Mme Valérie Marty, d'en « formaliser davantage le fonctionnement et de clairement distinguer les matières dans lesquelles il est décisionnaire, où un vote sanctionnerait clairement une décision » 30 ( * ) .

Votre rapporteur note également que la liste des domaines sur lesquels le conseil d'école est consulté ou peut rendre un avis tend à s'étendre, jusqu'à constituer un véritable catalogue .

Enfin, certaines compétences dévolues au conseil d'école peuvent difficilement être efficacement exercées par lui . C'est le cas de sa consultation sur l'utilisation des locaux scolaires en dehors des heures d'ouverture de l'école. Comme le relevait Mme Anne Bernussou, directrice de l'éducation à la mairie de Versailles, « c'est éventuellement possible pour les utilisations annuelles, mais impossible sur les utilisations ponctuelles » 31 ( * ) , auquel cas seul l'avis du directeur d'école est pris en compte.

En conséquence, votre rapporteur estime nécessaire que les dispositions de l'article D. 411-2 fassent l'objet d'une simplification . Une nouvelle rédaction distinguerait utilement les compétences pour lesquelles le conseil d'école possède une compétence décisionnaire, et ainsi « approuve » ou « adopte » :

- le règlement intérieur de l'école, sur proposition du directeur de l'école ;

- son règlement intérieur ;

- le projet d'école, sur proposition du conseil des maîtres et à l'élaboration duquel il est associé ;

- le programme d'actions et le bilan des réalisations du conseil école-collège, sur le rapport du professeur des écoles membre du conseil école-collège ;

- les demandes d'utilisation régulière des locaux scolaires en dehors des heures d'ouverture de l'école, sur proposition du maire, et autorise le directeur à décider d'une utilisation ponctuelle des locaux scolaires, selon des principes fixés par le conseil d'école.

Ces décisions feraient l'objet d'un vote, dont les résultats seraient consignés au procès-verbal.

Deuxièmement, en s'inspirant de la rédaction de la circulaire applicable aux établissements relevant de l'association pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) 32 ( * ) , le conseil d'école serait obligatoirement consulté pour avis sur « toutes les questions ayant trait au fonctionnement et à la vie de l'école », notamment « les structures pédagogiques », « l'organisation du temps et du calendrier scolaires », « les actions particulières permettant d'assurer une meilleure utilisation des moyens alloués à l'école et une bonne adaptation à son environnement », etc.

Recommandation n° 1 : Clarifier les attributions et les compétences du conseil d'école, en distinguant les matières pour lesquelles il formule un avis et celles où il rend une décision

2. Reconnaître les collectivités territoriales comme des partenaires à part entière de l'école

La loi du 8 juillet 2013 prévoit dans son rapport annexé de « redynamiser le dialogue entre l'école et (...) les collectivités territoriales », reconnaissant que ces dernières « jouent un rôle déterminant dans le bon fonctionnement du système éducatif ». Si la représentation des collectivités territoriales au sein des conseils d'administration des EPLE a été confortée, leur place au sein du conseil d'école n'a pas été substantiellement modifiée.

Votre rapporteur estime qu'il est nécessaire de tirer les conséquences de la nouvelle organisation du temps scolaire et du rôle déterminant que jouent désormais les communes - et, le cas échéant, les EPCI - dans la vie de l'école .

Le projet éducatif territorial (PEDT) , créé par la loi du 8 juillet 2013 à l'article L. 551-1 du code de l'éducation, marque la pleine association des collectivités territoriales à l'élaboration de l'offre éducative dans le premier degré . Le PEDT, conclu entre le maire ou le président de l'EPCI et les services d'État, vise à assurer la cohérence de l'offre éducative au sens large, « avant, pendant et après l'école, organisant ainsi, dans le respect des compétences de chacun, la complémentarité des temps éducatifs » 33 ( * ) .

En conséquence, la commune ou l'EPCI concerné doit trouver toute sa place au sein du conseil d'école. Divers aménagements, essentiellement de nature réglementaire, pourraient ainsi être envisagés afin que le conseil d'école joue pleinement son rôle d'instance de concertation et dialogue.

Le conseil d'école ne doit pas être un « tribunal » où l'élu est mis en difficulté , mais doit au contraire lui permettre d'apporter de vraies réponses aux interrogations des membres de la communauté éducative. Il convient donc de prévoir que toute question adressée au maire doive être explicitement inscrite à l'ordre du jour de la réunion et communiquée préalablement à la réunion, sous peine d'être irrecevable. En effet, de nombreux élus observent que les « questions diverses » inscrites à l'ordre du jour « sortent parfois du cadre du conseil d'école » et sont l'occasion pour certains parents d'élèves d'attaquer et de mettre en difficulté la municipalité 34 ( * ) .

Aucune disposition ne prévoit l'envoi du procès-verbal de la réunion à la mairie préalablement à sa diffusion. Beaucoup de maires et de maires adjoints rencontrés par votre rapporteur ont pointé les difficultés soulignées par cet état de fait, relevant de nombreux cas de procès-verbaux erronés ou inexacts, voire porteurs de contre-vérités, ainsi diffusés. Quoique non prévu par les dispositions réglementaires, l'envoi préalable du procès-verbal de la réunion à la mairie a lieu dans certaines communes 35 ( * ) . Outre la courtoisie dont témoignerait cette pratique, elle est le gage d'une relation de confiance entre l'école et sa commune. Votre rapporteur estime nécessaire de prévoir la relecture, avant sa diffusion, du procès-verbal de la réunion du conseil d'école par l'élu concerné . Ce dernier ne signerait pas le procès-verbal mais pourrait formuler des observations qui, si elles n'étaient pas prises en compte, figureraient sur l'exemplaire définitif et diffusé.

Comme l'ont souligné les parents d'élèves comme les enseignants rencontrés, l'absence du maire ou de son représentant tend à priver la réunion du conseil d'école de son intérêt. Si, dans les petites communes, les élus font preuve d'une grande assiduité, cela est moins vrai dans les communes comptant un grand nombre d'écoles. Ainsi que l'ont mis en évidence plusieurs élus, l'obligation de réunir le conseil d'école dans les quinze jours suivant la proclamation des résultats des élections des représentants de parents d'élèves conduit à l'organisation simultanée de plusieurs réunions de conseils d'école, rendant de ce fait impossible la venue du représentant de la commune. Il semblerait ainsi nécessaire de relâcher cette exigence.

Compte tenu de l'imbrication croissance des activités scolaires et périscolaires, qui ont souvent lieu dans les mêmes locaux, votre rapporteur estime nécessaire que la composition du conseil d'école reflète cette réalité, et permette à ses membres d'embrasser l'ensemble du temps de vie de l'enfant dans l'école. Par conséquent, votre rapporteur estime nécessaire de prévoir que l'élu puisse être accompagné par le responsable du service scolaire de la commune , lorsque ce dernier existe. Du fait de l'importance des activités périscolaires, et de l'intérêt que ces dernières suscitent au sein des conseils d'école, un responsable des activités périscolaires, désigné par le maire, devrait devenir membre à part entière de l'instance .

Enfin, il paraît également souhaitable que soit entrepris un effort de formation des élus, maires et adjoints chargés de l'éducation , notamment au lendemain des élections, afin de leur présenter leurs interlocuteurs au sein de l'éducation nationale ainsi que son organisation et son fonctionnement.

Recommandation n° 2 : Rendre effectif le partenariat entre l'école et les collectivités territoriales, en confortant leur place au sein du conseil d'école

3. Favoriser la participation des parents d'élèves

Votre rapporteur soutient le renforcement du partenariat entre l'éducation nationale et les parents d'élèves , dont l'association à la vie de l'école est la raison première du conseil d'école.

En faisant de la « promotion de la "coéducation" (...) un des principaux leviers de la refondation de l'école », le rapport annexé de la loi du 8 juillet 2013 place la participation des parents d'élèves parmi les priorités de la politique éducative.

Votre rapporteur salue les initiatives de formation mises en oeuvre à destination des parents d'élèves , et particulièrement de leurs représentants, dans le cadre des espaces « parents » mis à leur disposition dans les établissements, en application de l'article 65 de la loi du 8 juillet 2013. La circulaire n° 2013-142 du 15 octobre 2013, intitulée « renforcer la coopération entre les parents et l'école dans les territoires », va dans le même sens, sans pour autant prévoir de dispositions spécifiques de formation à l'intention des représentants de parents d'élèves à l'exercice de leur fonction.

Votre rapporteur reprend à son compte quelques-unes des propositions formulées par Mme Valérie Corre, députée, dans son rapport d'information sur les relations entre l'école et les parents 36 ( * ) :

- « s'assurer que tous les représentants des parents reçoivent une formation sur leurs droits et devoirs » ;

- « faire du partenariat avec les parents et de la coéducation un axe fort des projets d'école (...) et des projets éducatifs territoriaux » ;

- « expliciter les objectifs pédagogiques et les méthodes d'évaluation auprès des parents d'élèves » ;

- « faciliter et mieux encadrer les rencontres parents-élèves », notamment en « permettant, à titre expérimental, aux parents d'accompagner leurs enfants dans les classes de l'école élémentaire » ;

- « multiplier les temps d'échanges et les « rituels » qui permettent de rassembler, de manière conviviale, les membres de la communauté éducative » ;

- « étendre le dispositif de la « mallette des parents », dans un premier temps, aux « classes charnières » et, à terme, le généraliser à l'ensemble des classes ».

La formation des représentants des parents d'élèves, notamment ceux qui n'appartiennent pas aux fédérations historiques d'associations de parents d'élèves, doit être développée. Votre rapporteur cite ainsi la proposition, émise par les représentants du Syndicat des enseignants (SE-UNSA), de faire établir et diffuser par le ministère de l'éducation nationale une notice sur le rôle, les droits et les attributions de chacun des membres du conseil d'école 37 ( * ) .

Il conviendrait également de simplifier l'organisation des élections des délégués de parents d'élèves afin d'encourager la participation de ces derniers, par exemple en faisant à celles-ci une large publicité, dès la rentrée et en expérimentant le vote électronique. Des consignes claires devraient être émises aux IEN et aux directeurs d'école afin d'éviter la constitution de listes uniques et de favoriser ainsi le respect du pluralisme.

Enfin, afin de limiter l'immixtion de la politique locale dans les réunions du conseil d'école, citée à plusieurs reprises comme étant une des causes importantes de conflit, votre rapporteur prône l'étude de la création d'une incompatibilité entre la fonction de représentants des parents d'élèves au conseil d'école et celle de membre du conseil municipal. Une exigence analogue pèse sur les DDEN, l'article L. 241-4 du code de l'éducation prévoyant que « lorsqu'ils exercent un mandat municipal, les délégués départementaux de l'éducation nationale ne peuvent intervenir dans les écoles situées sur le territoire de la commune dans laquelle ils sont élus, ni dans les écoles au fonctionnement desquelles cette commune participe ».

Recommandation n° 3 : Favoriser la participation des parents d'élèves à la vie de l'école ainsi qu'aux instances de concertation

4. F ormer les équipes éducatives à la relation avec les parents d'élèves

Enfin, votre rapporteur estime nécessaire la formation des enseignants et des directeurs d'école aux enjeux de la relation avec les parents d'élèves ainsi qu'à la communication avec ces derniers .

Des directeurs d'école ont confié que certains de leurs collègues, particulièrement ceux en début de carrière, étaient souvent « désemparés » ou se trouvaient « démunis » face à des parents d'élèves revendicatifs, corroborant les constats dressés précédemment 38 ( * ) .

La formation initiale au sein des écoles supérieures du professorat de l'éducation (ÉSPÉ) devrait intégrer cette priorité . Les représentants des fédérations de parents d'élèves rencontrés, notamment de l'Union nationale des associations autonomes de parents d'élèves (UNAAPE) et de la PEEP 39 ( * ) , se sont dits prêts à intervenir au sein des ÉSPÉ afin de se présenter et de sensibiliser les futurs enseignants aux enjeux des relations avec les parents d'élèves.

Un grand nombre d'intervenants ont insisté sur la nécessité de renforcer la formation des directeurs d'école à l'animation et à la conduite des réunions et aux relations avec les partenaires de l'école. Ces éléments sont explicitement visés par une circulaire en date du 1 er décembre 2014 relative à la formation des directeurs 40 ( * ) . Les interlocuteurs de votre rapporteur ont souligné la nécessité d' ancrer cette formation dans la pratique du métier et dans l'analyse de cette dernière .

Pour autant, votre rapporteur considère que la formation à la relation avec les parents d'élèves ne peut faire l'économie d'importants efforts en matière de formation continue des personnels et la diffusion de bonnes pratiques . À l'occasion des déplacements de votre rapporteur, de nombreux directeurs d'école ont salué l'organisation de tables rondes leur permettant d'échanger sur leurs pratiques professionnelles et d'apprendre des expériences de leurs homologues.

Recommandation n° 4 : Mieux former les équipes éducatives à la relation avec les parents d'élèves


* 29 Audition du 24 mars 2015.

* 30 Audition du 25 mars 2015.

* 31 Déplacement à la DSDEN des Yvelines du 13 mars 2015.

* 32 Circulaire n° 2261 du 23 septembre 2014 relative à l'organisation et au fonctionnement des instances des établissements d'enseignement français à l'étranger relevant de l'AEFE.

* 33 Circulaire n° 2014-184 du 19 décembre 2014, instruction pour la promotion de la généralisation des projets éducatifs territoriaux sur l'ensemble du territoire.

* 34 Les conseils d'école - résultats d'un questionnaire réalisé par l'Association des maires adjoints à l'éducation des Yvelines (AME 78), juin 2015.

* 35 En réponse à l'enquête précitée de l'Association des maires adjoints à l'éducation des Yvelines, seulement 30,95 % des élus déclaraient valider le procès-verbal de la réunion et 9,52 % occasionnellement.

* 36 Pour une coopération éducative au service de la réussite des élèves, rapport d'information n° 2117 de Mme Valérie Corre, au nom de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, juillet 2014.

* 37 Audition du 24 mars 2015.

* 38 Voir notamment Les relations parents-enseignants à l'école primaire, Jean-Louis Auduc, Centre régional de documentation pédagogique de l'académie de Créteil, 2007.

* 39 Auditions des 24 et 25 mars 2015.

* 40 Circulaire n° 2014-163 du 1 er décembre 2014 relative au référentiel métier des directeurs d'école.

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