B. L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET LA RECHERCHE : L'OBJECTIF DE L'EXCELLENCE

1. Des relations déjà fortes

La coopération entre établissements français et marocains en matière de recherche et d'enseignement supérieur est ancienne et profonde. Si elle n'a pas eu le temps de visiter d'unité mixte, la délégation a eu l'opportunité de pouvoir s'entretenir non seulement avec M. Lahcen Daoudi, ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Formation des Cadres mais également avec les présidents de toutes les universités marocaines, réunis pour un conseil mensuel.

Tous ont apporté le témoignage de la profondeur des relations nouées avec des établissements français. Comme l'a souligné un de nos interlocuteurs, il n'existe pas d'université marocaine qui n'entretienne pas de relations avec la France. Ainsi, par exemple, la seule unité mixte internationale de l'université de Marrakech l'associe à l'Institut de Recherche pour le développement (IRD).

De même, en 2014, le CNRS comptait, avec le Maroc pour partenaire, 4 Laboratoires internationaux associés (LIA), 4 Groupements de recherche internationaux (GDRI), 7 Projets internationaux de coopération scientifique (PICS) et 51 projets d'échanges bilatéraux.

Autre indicateur de l'intensité des relations universitaires et de recherche, 54 % des co-publications marocaines se font avec la France.

Conformément à la Convention de partenariat pour la coopération culturelle et le développement entre les deux pays, établie en juillet 2003, depuis 2012, le ministère de l'Enseignement supérieur, en partenariat avec l'Institut Français du Maroc, ont convenu de lancer chaque année un appel à projets dans le domaine de l'enseignement supérieur afin de soutenir le développement des filières de formation innovantes dans les établissements marocains publics d'enseignement supérieur. Cet appel à projet s'adresse aux établissements qui souhaitent développer leur offre de formation dans le cadre d'un partenariat avec un ou plusieurs établissements français, avec une priorité pour ceux en provenance des établissements nouvellement créés ou excentrés géographiquement.

Campus France constitue un instrument précieux de cette coopération. Service de l'Institut Français du Maroc, il a pour triple mission de fournir aux étudiants tous les renseignements sur les études en France, de les accompagner dans la construction de leur projet d'études et de faciliter les demandes de pré-inscription auprès des établissements de l'enseignement supérieur français qui lui sont connectés ainsi que les demandes consulaires. La délégation a visité deux des trois espaces Campus France existants, à Rabat et à Casablanca . Elle a été frappée par la qualité de l'accueil réservé aux candidats à la poursuite d'études en France et par le professionnalisme des équipes.

Faciliter le déroulement des études en France est essentiel ; mettre en réseau les étudiants et diplômés marocains de l'enseignement supérieur français est tout aussi fondamental afin de les accompagner dans la construction de leurs réseaux professionnels et de leur rendre plus simple l'accès à l'actualité du Maroc, notamment dans le domaine économique. Fort de 5 000 membres, dont 60 % résident en France et 40 % au Maroc, le Club France Maroc joue, à cet égard, un rôle très utile. Pont entre la France et le Maroc, il témoigne de la profondeur des liens tissés au fil du temps et qui ne peuvent qu'être approfondis, dans la mesure où la France constitue la première destination étrangère des étudiants marocains.

2. Un nouveau partenariat

Ancienne, la coopération universitaire connaît aujourd'hui de nouveaux développements, notamment au sein de structures associant grandes écoles françaises et universités marocaines, ou même par création ex nihilo de centres marocains d'écoles françaises. Elle témoigne des nouvelles orientations de partenariat entre nos deux pays dans le domaine de l'enseignement supérieur au-delà de la réalisation des études en France ; celle-ci passe par la définition de cursus partagés, afin de mettre en oeuvre une véritable co-diplomation. La délégation n'oublie pas que par le nombre, l'université publique reste et restera de loin, compte tenu de l'absence de frais de scolarité, le principal vecteur de l'enseignement supérieur au Maroc, ce qu'a souligné la présidente de l'université publique de Rabat lors d'un échange avec la délégation. Au contraire, parce que c'est en son sein que la majorité de la jeunesse marocaine se forme et se prépare à l'entrée dans la vie active. La dénomination même du ministère en charge de ce secteur (« ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Formation des cadres ») souligne l'importance de l'enjeu, aussi bien en termes politiques qu'économiques.

Certaines structures existent déjà, d'autres sont en phase de concrétisation.

L' Université Euro-Méditerranéenne de Fès (UEMF) a été créée en novembre 2012 et a commencé à fonctionner à la rentrée 2014. Labellisée par l'Union pour la Méditerranée (UpM), elle constitue une université à caractère régional dont la mission est la promotion d'échanges, de dialogue interculturel et de partenariats académiques et culturels dans la région euro-méditerranéenne ainsi que la formation et la recherche de haut niveau.

L'INSA Euro-Méditerranée à Fès appartient au réseau constitué par six écoles françaises - Lyon, Rennes, Rouen, Strasbourg, Toulouse, Centre-Val de Loire - et qui est devenu le premier ensemble français de formation d'ingénieurs. Cette grande école est une construction conjointe du groupe INSA et de l'UEMF.

Sur le plan politique, cette université régionale a vocation, comme l'a souligné son président, M. Mostapha Bousmina , « l'Université base son fonctionnement sur des valeurs d'ouverture sur le monde, d'inclusion, de modération et de tolérance et de partage ». Faire prendre conscience aux jeunes générations qu'il existe un futur commun au sein d'une région charnière entre l'Europe, dont la population dépasse 500 millions d'habitants, et l'Afrique et son milliard d'habitants, constitue un enjeu majeur.

Son enseignement repose sur six piliers :

- le multilinguisme, puisque chaque étudiant doit parvenir à maîtriser au moins deux langues en plus de sa langue maternelle ;

- le multiculturalisme, qui se traduit par des cours transversaux (enseignements généralisés de l'histoire, civilisations et patrimoine euro-méditerranéens pour toutes les formations et à tous les cycles) ;

- l'utilisation massive du numérique ;

- l'obligation de mobilité régionale et internationale, à raison d'un an dans un pays et six mois dans un autre ;

- l'implication sociales des étudiants, qui doivent mener des projets, par exemple de lutte contre l'analphabétisme, et acquièrent des crédits ECTS ( European Credits Transfer System) ;

- le développement de l'esprit d'initiative, d'innovation, de création et de transfert, dans le cadre d'une démarche d'entrepreneuriat.

À terme, l'UEMF ambitionne de compter 6 000 à 7 000 étudiants. Quel que soit son succès dans l'avenir, sa conception témoigne de la volonté du Maroc de constituer un hub universitaire régional.

Cette ambition préside aussi à la création de l' Université privée internationale de Rabat et de l' École centrale de Casablanca , que la délégation a visitées.

Telle qu'elle se présente elle-même, l' Université internationale de Rabat (UIR) « a l'ambition d'être un acteur incontournable dans le développement de l'économie du savoir principalement au Maroc et plus généralement en Afrique. Ouverte sur le monde, l' UIR véhicule des valeurs universelles d'excellence, de solidarité, d'équité ». Établissement privé, fondé par Noureddine Mouaddib , ancien professeur permanent à l'école Polytechnique de Nantes, elle a signé plusieurs conventions de partenariats pour intégrer, dans son réseau, des grandes écoles et des pôles universitaires performants au niveau national et international. Ces différents partenariats visent à offrir aux étudiants une double diplomation ou co-diplomation des diplômes délivrés par l'UIR. Ils se traduisent par l'accueil des étudiants de l' UIR dans les établissements partenaires pour au moins un semestre et la mise en oeuvre des activités de recherche. En outre, au moins 30 % des volumes horaires d'enseignement dispensés à l' UIR le sont par le détachement d'enseignants-chercheurs en poste chez nos partenaires. Créée avec l'idée qu'il faut répondre à la demande et que les étudiants Marocains ne peuvent pas tous aller en France, cette nouvelle structure, premier partenariat public-privé, devrait à terme accueillir 5 000 étudiants.

L' École centrale de Casablanca participe également de cette volonté d'excellence. Elle témoigne du souci du Maroc de disposer de cadres de niveau international et de la volonté de l'école de poursuivre son ouverture à l'international. Pour l'école parisienne, cette implantation dans un pays d'avenir s'insère « dans un processus de transformation destiné à faire de Centrale Paris, bien au-delà de l'École internationale qu'elle est déjà, une véritable marque internationale, puissante, rayonnante, compétitive » et, qui, après Pékin, lui a fait choisir deux nouvelles implantations, Casablanca et Hyderabad.

L'École centrale Casablanca :
la concrétisation des liens unissant centrale Paris et le Maroc

Centrale Paris et le Maroc entretiennent depuis longtemps des liens étroits, avec une communauté de 312 Centraliens travaillant dans le pays et 145 étudiants marocains en cycle ingénieur sur notre campus.

Initiée à la demande du Royaume du Maroc, l'École centrale Casablanca s'inscrit dans le plan marocain pour le développement de l'industrie, matérialisé par le Pacte National pour l'Émergence Industrielle 2009-2015, et répond à l'objectif que Centrale Paris s'est donné de former un plus grand nombre d'ingénieurs généralistes à forte culture internationale et de haut niveau scientifique et technique, futurs leaders et experts dans le lancement et le pilotage de projets innovants.

Entièrement financée par l'État marocain, l' École centrale Casablanca sera construite sur le modèle pédagogique de l' École centrale Paris et accueillera des promotions d'une centaine d'élèves-ingénieurs. Le Maroc disposant déjà de classes préparatoires renommées et d'écoles d'ingénieurs, sa formation sera fortement positionnée sur l'ingénierie de projet.

Source : Rapport d'activités 2013 de l'École centrale de Paris

Quel que soit la nature juridique de la structure ou son mode de financement, la France peut capitaliser sur l'ancienneté des liens tissés avec ses partenaires marocains mais sans perdre de vue la condition sine qua non de la réussite : le Maroc est en droit d'attendre de la France non seulement un enseignement de qualité mais le même niveau d'excellence qu'en France. La France y a d'ailleurs doublement intérêt : d'abord parce que la même formation assurée au Maroc coûte moins cher qu'en France, ce qui permet d'élargir la base de la politique de coopération éducative. Mais aussi parce ce réseau d'écoles ou d'instituts supérieurs constitue une vase pour toucher l'Afrique francophone subsaharienne.

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