IV. POUR UN NOUVEAU DÉPART DANS LE RESPECT DE LA VOCATION DE L'INI

Selon les informations réunies par votre rapporteur spécial au cours de sa mission de contrôle budgétaire, l'horizon de l'INI semble désormais sur le point de se dégager dans un contexte où il serait conduit à devenir un acteur du projet « Service de santé des armées 2020 ».

Le rôle qui semble se dessiner à l'avenir pour l'INI présente des novations importantes pour le projet médical de l'établissement, tout en préservant sa vocation d'accueil prolongé des invalides et mutilés dont, hélas, la population tend à se renouveler, évolution que l'INI doit pleinement prendre en considération.

Dans ce contexte évolutif, scandé au cours même de la mission de contrôle budgétaire de votre rapporteur spécial par l'adoption du projet médical de l'INI pour les années à venir par le conseil d'administration de l'établissement dans son vote du 17 juin 2016, il reste des incertitudes à dissiper et des conditions à réunir afin que l'INI, fidèle à sa tradition, continue à accomplir pleinement ses missions ainsi rénovées.

A. POUR UN NOUVEAU PROJET D'ÉTABLISSEMENT PASSANT PAR UNE REDÉFINITION DE L'OFFRE DE SOINS AMBITIEUSE ET RESPECTUEUSE DE LA DEMANDE

1. Plusieurs scénarios semblent avoir été envisagés

Le rapport des trois inspections générales mentionné ci-dessus et déclenché à la suite des observations du contrôleur budgétaire et comptable ministériel sur les équilibres du schéma immobilier de l'établissement n'avait, semble-t-il pas envisagé l'hypothèse d'une fermeture complète de l'INI.

Votre rapporteur spécial emploie sur ce point les précautions qui s'imposent puisqu'en dépit de ses demandes répétées ce rapport ne lui a pas été transmis, ce qu'il déplore très vivement.

Il semble que plusieurs hypothèses aient alors été envisagées :

- pour le centre des pensionnaires : soit une réduction de sa capacité d'accueil autour d'une cinquantaine de lits et sa relocalisation dans un bâtiment unique, soit le maintien de ses capacités actuelles d'accueil pour un coût estimé, pour le ministère de la défense, de l'ordre de 30 millions d'euros ;

- pour l'offre médicale : un transfert des actes de chirurgie, l'INI conservant, et même développant, les soins de suite (de 48 à 80 lits), ou l'arrêt total des activités de soin de l'établissement qui auraient été confiées à d'autres hôpitaux.

Les effets sur l'emploi de ces différents scénarios paraissent avoir été appréhendés dans les termes suivants : une cible de 50 lits pour le centre des pensionnaires aurait entraîné la nécessité de reconvertir une cinquantaine de personnes ; il en serait allé de même dans le projet de fermeture du bloc chirurgical avec augmentation de l'activité de réadaptation. Enfin, la cessation de toutes les activités médicales de l'INI (y compris celles du CERAH) aurait supposé la reconversion de 250 personnes.

Au total, la question centrale tournait autour du niveau de l'offre de soins de l'INI et de sa nature, question d'autant plus aigüe dans un contexte de redéfinition du format du service de santé des armées que l'INI, comme le Val-de-Grâce, dont ce fut la principale raison de la fermeture, devait faire face à des besoins d'investissement importants afin de mettre à niveau ses prestations et, en particulier, son offre de soins.

Ces différentes questions sont sur le point de recevoir des réponses.

Votre rapporteur spécial s'en félicite tout en regrettant les délais pris pour formuler le cadre d'un nouveau projet. Il est vrai que la haute valeur symbolique de l'Institution et la nécessité d'un changement de culture acceptée par les différentes parties prenantes ont sans doute joué. Mais il faut souhaiter que le processus, désormais engagé, ne se heurte pas à de nouveaux obstacles et que sa phase de concrétisation s'engage maintenant en pratique.

2. Le nouveau projet d'établissement de l'INI s'inscrit dans un mouvement d'ouverture de l'INI sur son environnement

Le nouveau projet d'établissement de l'INI comporte un projet médical dont la définition permettra l'engagement d'aménagements immobiliers importants.

a) Un nouveau projet médical recentré sur les avantages comparatifs de l'INI et ouvert sur son environnement

Aucune des hypothèses envisagées dans le rapport des inspections et rappelées ci-dessus ne serait appliquée à la lettre. Toutefois, une voie moyenne semble avoir été suivie.

Elle implique que l'INI occupe une place bien déterminée dans un « parcours du blessé » où elle apporterait tout le poids de ses avantages comparatifs, à savoir ses capacités à prendre en charge la réadaptation fonctionnelle. Dans ce contexte, l'initiative heureuse d'ouvrir un centre spécialisé dans le traitement des troubles psychiques doit être soulignée.

Au total, dans les grandes lignes qui sont les siennes aujourd'hui, le nouveau projet médical de l'INI doit être approuvé.

Le nouveau projet médical de l'INI

Le plan de réforme du projet médical comporte de nouveaux axes stratégiques et un plan de mise en oeuvre opérationnel qui se décline comme suit :

Un projet répondant aux attentes du ministère de la défense

- intégration au schéma opérationnel mis en oeuvre par le service de santé des armées (SSA) ;

- légitimation du projet de l'INI ;

- co-développement du post-rôle 4 ;

- prise en charge du blessé dans un hôpital d'instruction des armées ;

- accompagnement du blessé jusqu'à l'autonomie.

Un projet conforme aux orientations des tutelles


• Intégration des acteurs de la réhabilitation qui constitueront pour partie la maison des blessés demandée par le ministre associant l'INI :

- aux cellules d'aide aux blessés ;

- à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONAC-VG) ;

- au cercle sportif INI.


• Ouverture territoriale pour sa mise en oeuvre et concernant :

- la prise en charge des paraplégiques partagée avec le SSA ;

- la création d'un centre des amputés traumatiques.


• Vrai projet inter-établissements avec :

- le SSA en priorité et majoritairement ;

- des partenaires civils (hôpital de Garches).

Les grands principes du projet reposent sur :


• La création d'un post-rôle 4 au sein du SSA pour les militaires blessés en opération, dispositif stratégique permettant d'assurer un parcours performant et complet de la phase initiale à la gestion des séquelles, et intégrant :

- la complexité des blessures de guerre ;

- les blessures physiques et/ou psychiques (intégration des troubles psychiques post-traumatiques) ;

- les spécificités professionnelles.


• La prise en charge médicale et socio-professionnelle :

- l'INI, a un rôle de référent national au sein d'une filière de réadaptation et de réinsertion.


• La co-localisation et la synergie des acteurs de la réinsertion :

- multiplicité des acteurs : ONAC-VG, cellules d'aide aux blessés, action sociale des armées (ASA), cercle sportif (CSINI) ;

- intérêt et vocation historique du site des Invalides.


• Ouverture potentielle aux autres bénéficiaires :

- membres de la communauté de défense ;

- agents de l'État blessés dans l'exercice de leurs fonctions ;

- police, pompiers ;

- victimes d'attentats (pouvant être bénéficiaires à terme d'une pension militaire d'invalidité (PMI) au titre de l'article L115) ;

- assistance publique hôpitaux de Paris (APHP) ;

- international : collaborations.

Le nouveau projet médical de l'INI :

Son fondement repose sur le centre des pensionnaires, associé à un pôle de « Réhabilitation post-traumatique de la Défense ».


• Les bases du nouveau projet :

- redéfinition de la mission du Centre médico-chirurgical, qui implique l'arrêt des activités de courts séjours (temps opératoire de la chirurgie) ;

- création d'une nouvelle offre de soins amenant à la création d'un centre de prise en charge des syndromes post-traumatiques.


• Spécificités :

- une mise en oeuvre en commun avec le SSA ;

- une ouverture territoriale de recours et de résilience partagée.

En imbrication forte avec les missions de la Plateforme Hospitalière Militaire Île-de-France (PHM-IF), il constitue un projet commun avec :


• Une logique des parcours des militaires blessés selon un schéma global :

- aigu => Plateforme hospitalière Militaire Île-de-France (PHM-IF) ;

- rééducation, réadaptation et réinsertion à moyen et long terme => INI.


• Une coordination et une gouvernance à développer :

- parcours des patients ;

- parcours des professionnels ;

- stratégies logistiques.

La composition du centre de réhabilitation post-traumatique :

Médecine Physique de rééducation et réadaptation :

- secteur conventionnel avec 40 lits ;

- transformation du service de chirurgie : service de soins de suite post-opératoires (SSPO), soit 10 lits à terme en cible ;

- unité Sensori-Cognitive (USC) en hôpital de jour ;

- plateau technique partagé redéfini avec 10 lits en hôpital de jour et les activités médico-techniques recentrées sur le besoin (dentisterie, radiologie, pharmacie) ;

- service de réadaptation psychique de 20 lits avec son plateau dédié adapté et un plateau technique spécifique.

Le Centre d'Études et de Recherches sur l'Appareillage des Handicapés (CERAH) :

- maintien du site et des missions de Woippy (57) ;

- transfert du site de Créteil pour la fabrication et la recherche sur le site de l'INI, au niveau du plateau technique et permettant à terme la création d'un centre pour amputés, référent régional avec celui de Garches.

On relèvera qu'un évènement majeur interviendrait avec la fermeture du bloc opératoire de l'INI . Cette décision a été au coeur de discussions légitimes.

Il faut en effet prendre en considération l'expérience acquise dans le domaine de la chirurgie des escarres par les équipes chirurgicales et, plus largement, dans celui des suites de traumatisme médullaire. Par ailleurs, les difficultés de transport des blessés et invalides hébergés par l'INI sont incontestables et supposent une vigilance absolue.

Néanmoins, certaines données doivent être prises en compte. En premier lieu, force est de constater que les conditions d'utilisation du bloc opératoire présentent des anomalies. Historiquement, deux-cents opérations y étaient pratiquées contre une norme générale fixant un seuil de cinq cents actes. Dans les dernières années, une inflexion a encore aggravé la situation puisque désormais, ce ne sont plus qu'environ cent opérations qui seraient réalisées au point que le bloc chirurgical n`est plus mobilisé que deux jours par semaine. Au demeurant, la sécurité les entourant ne serait pas au niveau requis, du fait, notamment, de l'absence d'équipements de réanimation suffisants. En second lieu, votre rapporteur spécial a reçu des assurances sur l'existence d'offres alternatives accessibles dans des conditions suffisantes de sécurité pour les patients. Il lui a été fait valoir que l'hôpital militaire Percy ou encore l'établissement de Garches pourrait les accueillir en cas de besoin sans que les délais de route n'exposent les patients à des dangers supplémentaires.

Dans ces conditions, tout en saluant le travail des équipes de l'INI, qui pourront continuer à oeuvrer dans leurs spécialités, il apparaît raisonnable et justifié de procéder à la fermeture d'une unité pour laquelle existent des solutions alternatives.

Il faudra, dans ce cadre, veiller à la mise en oeuvre d'un système de transport de la plus haute qualité.

b) Des investissements immobiliers d'une réelle ampleur

Le prochain schéma pluriannuel de stratégie immobilière de l'INI reprendra intégralement le nouveau schéma directeur d'infrastructure en cours de rédaction, en application du nouveau projet médical voté au conseil d'administration du 17 juin 2016 et du futur projet d'établissement qui devrait être soumis au vote du prochain conseil d'administration prévu à la en octobre 2016.

L'encadré ci-dessous développe les investissements immobiliers nécessaires. Ils revêtent une réelle ampleur. Mais, c'est pour avoir été reportés que ces investissements doivent désormais être entrepris. Par ailleurs, même s'ils s'inscrivent dans le projet de l'INI, on voit mal comment les travaux décrits auraient pu être évités.

En revanche, il faut plaider pour que les réalisations demeurent compatibles avec une certaine diversité des modes d'occupation des espaces historiques occupés par l'établissement et, bien entendu, pour que les coûts soient tout à fait maîtrisés et fidèles aux estimations initiales (voir infra pour celles-ci).

Le nouveau schéma pluriannuel de stratégie immobilière de l'INI

Ce nouveau SPSI, au même titre que le précédent, comportera les deux mêmes volets.

Volet de remise à niveau des installations techniques

Ce volet a été établi après le diagnostic des installations techniques réalisé depuis 2009 qui a conclu à leur obsolescence (notamment les installations électriques et les moyens de production de froid). Leur remise à niveau se poursuit avec la remise aux normes prévue des deux ascenseurs et le changement de l'armoire à haute tension du bâtiment central.


• Volet de modernisation et de recomposition du patrimoine hospitalier

Les orientations

Ce volet a été établi à partir des orientations suivantes :

- poursuite de la mise en sécurité incendie ;

- mise en conformité de l'accessibilité aux personnes handicapées (création de liaisons verticales) ;

- prise en compte de l'évolution de l'offre de soins prévue dans le nouveau projet médical et de l'évolution de l'état physique des patients (notamment grand handicap, vieillesse, dépendance) ;

- rationalisation et simplification des circuits des patients et des circuits logistiques ;

- passage à un taux de 80 à 90 % de chambres à un lit avec sanitaires dans le centre médico-chirurgical (CMC) ;

- regroupement du centre des pensionnaires sur deux sites, facilitant leur prise en charge ;

- intégration de l'antenne du Centre d'Études et de Recherches sur l'Appareillage des Handicapés (CERAH) de Créteil (plateau d'analyse de la marche et laboratoires de fabrication de prothèses) et déploiement des locaux administratifs dans ceux libérés (bâtiment 08) par l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC-VG).

Les travaux prévus

Rationalisation et optimisation des flux et des soins

Le projet prévoit d'affecter les pensionnaires les plus jeunes et les plus autonomes au sein du bâtiment central ( 30 places ) et de conserver le bâtiment Robert de Cotte pour les plus anciens ( 50 places ).

Le bâtiment sud, occupé actuellement par les services administratifs et logistiques, accueillera le pôle de psychiatrie de postcure et d'accompagnement à la réinsertion de 20 lits . Ce bâtiment accueillera tous les lieux de vie nécessaires au bien-être de la patientèle et un plateau technique dédié ainsi qu'un appartement thérapeutique. La crèche, dont une remise aux normes est prévue, et la pharmacie, qui sera redimensionnée, occuperont également le bâtiment sud au rez-de-chaussée (RDC). Ce bâtiment abritera également dix chambres d'hébergement au profit des familles de pensionnaires et d'hospitalisés.

Une remise aux normes (incendie et accessibilité des personnes à mobilité réduite) d'une grande partie du bâtiment 08 (ex-ONAC-VG) attribué à l'INI, avec notamment la création d'un ascenseur et une adaptation des sanitaires, est prévue. Ce bâtiment recevra 90 % des services administratifs et logistiques auparavant logés au sein du bâtiment sud et les cellules d'aide aux blessés des armées (Air et Marine).

L'occupation du bâtiment central, dédié au centre médico-chirurgical, sera rationalisée. L'hospitalisation sera regroupée au 1 er étage. Le rez-de-chaussée sera dédié à l'activité externe et ambulatoire et au plateau technique commun. Les locaux seront également rationalisés avec, entre autres, la création d'une zone accueil/secrétariat unique.

La mise en conformité incendie

Toutes les préconisations de la préfecture de police de Paris seront prises en compte dans les travaux prévus : désenfumage, reprise des évacuations, recoupement des escaliers, etc.

La préconisation la plus lourde consistera à recouper les combles et à débarrasser toutes les installations techniques obsolètes présentes. Cette opération nécessitera, pour le bâtiment central de l'INI, la destruction de toutes les chambres situées au 1 er étage.

Accessibilité aux personnes handicapées et dignité des patients

Toutes les préconisations établies pour l'amélioration de l'accessibilité aux personnes handicapées sont prises en compte dans les travaux. De plus, l'Institution a prévu, grâce à l'augmentation de chambres à un lit avec sanitaires, de respecter les exigences de la haute autorité de santé (HAS) en matière de dignité des patients. L'INI avait réussi à lever la réserve sur ce sujet émise en 2008 en procédant, notamment, à la mise en place de paravents télescopiques dans les chambres, mais cette solution avait été présentée à la HAS comme provisoire, compte tenu des travaux à venir.

Intégration de l'antenne du Centre d'Études et de Recherches sur l'Appareillage des Handicapés (CERAH)

Les zones de marche et notamment la plateforme d'analyse de la marche seraient situées au rez-de-chaussée du bâtiment central dans les locaux occupés actuellement par le bloc opératoire. La solution consistant à positionner ces zones dans le bloc opératoire s'est imposée car la hauteur sous plafond y est suffisante et le local ne doit pas être exposé à la lumière du jour. Les box de consultation et les locaux de fabrication de prothèses seraient implantées dans l'aile d'hospitalisation « Morand » toujours au RDC.

Adaptation des locaux libérés par l'ONAC-VG

Le rez-de-chaussée de ce bâtiment serait occupé par les cellules d'aide aux blessés de l'armée de l'Air et de la Marine. Le reste des locaux devrait accueillir les services administratifs et logistiques ainsi que deux logements concédés par nécessité absolue de service actuellement situés dans le bâtiment sud, destiné à accueillir le pôle de psychiatrie de postcure et d'accompagnement à la réinsertion.

Les locaux modulaires

Pour mettre en oeuvre l'ensemble des travaux, la mise en place de locaux modulaires provisoires est nécessaire pour éviter l'arrêt d'activité, tant pour le centre des pensionnaires que pour le CMC.

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