B. DES ÉQUILIBRES FINANCIERS FRAGILES

Le budget de l'INI dépasse désormais les 30 millions d'euros (33,8 millions d'euros de ressources en 2014).

Il est marqué par des déséquilibres répétés d'année en année au point que les budgets de l'INI ont donné lieu régulièrement à des observations très critiques du contrôleur budgétaire et comptable ministériel.

La progression des dépenses, relativement modérée mais dans un contexte qui a favorisé sa maîtrise, a été plus rapide que celle de ses recettes alors même que celles-ci ont fait l'objet d'un effort de dynamisation de la part de l'établissement quand les dépenses de l'INI se sont trouvées contenues par des reports de charges liés aux hésitations relatives au devenir de l'établissement.

Un effet de ciseaux s'est produit qui a conduit à solliciter le fonds de roulement de l'établissement pour combler les déficits et financer des dépenses de fonctionnement récurrentes.

Par ailleurs, la structure des dépenses mérite quelques observations, en raison, notamment, des mécanismes de financement de l'INI, qui sont fondés sur des données de comptabilité analytique 3 ( * ) . L'analyse des dépenses, pour autant que les données transmises par le ministère en réponse aux questions de votre rapporteur spécial la permette, tend à faire ressortir que le poids prépondérant des dépenses de personnel est principalement lié à des effectifs non-médicaux, dont un volet important est affecté à des missions dites de support, tandis que les dépenses d'investissement, pourtant nécessaires, ont longtemps stagné au détriment de la nécessaire adaptation des installations de l'INI.

1. Les dépenses de l'INI, une progression dans un contexte globalement favorable à leur maîtrise

Votre rapporteur spécial considère qu'il serait inapproprié de présenter l'INI comme un opérateur dispendieux. La visite de l'établissement à laquelle il a procédé le 10 octobre dernier suffirait à en convaincre tout un chacun.

On doit même d'une certaine manière s'inquiéter des conditions dans lesquelles l'établissement remplit ses missions, c'est-à-dire au mieux de capacités qu'il faudrait sans doute développer pour répondre plus pleinement aux besoins de ses usagers et mieux exploiter les atouts de l'INI.

Pour autant, dans un contexte de contrainte budgétaire, il est toujours possible de juger l'évolution des dépenses de l'INI avec plus ou moins d'exigence et il est normal de rechercher des voies d'amélioration.

a) Des difficultés de se rallier sans supplément d'expertise aux diagnostics tendant à réduire fortement les effectifs de l'INI

Il est fréquent d'entendre que l'Institution nationale des Invalides bénéficierait d'un personnel particulièrement, voire excessivement, nombreux et de ratios d'encadrement des patients anormalement élevés.

De fait, le ratio de personnel par lit ressort comme sensiblement supérieur aux normes en vigueur et le taux d'encadrement des patients et pensionnaires excède des valeurs moyennes constatées dans certains établissements analogues.

Mais il ne faut pas conférer a priori à ces comparaisons une excessive significativité.

Outre que les normes en usage peuvent faire l'objet de critiques sur tel ou tel point, elles paraissent sans réelle pertinence pour certaines unités de l'INI du fait des particularités de l'établissement.

En soi, elles ne permettent pas d'apprécier la situation de l'INI, et doivent être complétées par des analyses plus fines tenant compte des conditions réelles d'activité.

Cependant, il convient de rappeler les orientations stratégiques du précédent contrat d'objectifs et de performance de l'INI qui, pour les dépenses de support, en appelaient à réduire certaines surcapacités.

Aux yeux de votre rapporteur spécial, celles-ci, à supposer qu'une étude fine les confirme, appellent, de toute façon, des rationalisations structurelles visant à profiter mieux des opportunités de mutualisation que l'ouverture plus franche de l'INI à son environnement devraient permettre d'exploiter davantage.

Quant aux effectifs de soin, leur envergure doit dépendre, c'est l'évidence, de l'évolution de l'offre de santé proposée par l'INI.

b) Les dépenses de l'INI ont progressé dans un contexte a priori favorable à leur maîtrise

Sur le long terme, les charges de l'INI ont sensiblement progressé, malgré des efforts d'investissement très fluctuants.

Elles correspondent pour 95 % à des charges de personnel et de fonctionnement, cette proportion pouvant fluctuer en fonction de la réalisation du programme d'investissement, qui, dans les faits se révèle évolutive.

Les dépenses de l'INI sont ainsi étroitement tributaires, dans leur évolution, de sa masse salariale.

Or, celle-ci a été relativement dynamique alors que certains éléments étaient favorables à des économies.

(1) Une dynamique des dépenses structurellement dépendante des charges de personnel

Comparées aux 28,472 millions d'euros de 2005 , les dépenses de l'INI en 2015 , telles que comptabilisées dans le compte financier de l'établissement, ont atteint 36,9 millions d'euros , soit une augmentation apparente, de date à date, de 30 % (+ 2,6 % par an) .

Toutefois, au cours de cette période, des modifications structurelles sont intervenues si bien que l'évolution décrite qui s'est produite dans un périmètre changeant n'est pas significative de l'évolution réelle de la masse salariale. La principale modification a été le transfert de 57 ETP lors de l'année 2010 du fait de l'intégration du CERAH, année où le plafond d'emplois de l'établissement a été porté de 403 à 460 unités 4 ( * ) .

Sur une période plus homogène, entre 2010 et 2014 , les charges de l'INI ont progressé de 2,0 % par an .

Au total, les seules charges de personnel ont représenté 71,5 % des dépenses du compte de résultat de 2015 où elles s'élevaient à 25,7 millions d'euros sur un total de dépenses (hors investissement) de 35,9 millions d'euros.

Ces dépenses déterminent donc largement les évolutions des charges de l'établissement même si les dépenses de fonctionnement méritent une attention particulière d'autant qu'une sorte d'effet de vases communicants semble s'être produit par lequel la contention relative des dépenses de personnel a pu exercer des effets inflationnistes sur les charges de fonctionnement supportées par l'INI.

(2) Une augmentation continue des charges de personnel mais également de certaines dépenses de fonctionnement

Les dépenses de personnel ont connu une augmentation constante mais, selon la période considérée, d'autres charges ont également été dynamiques au point qu'il faut se demander s'il n'existe pas une sorte d'effet de vases communicants entre les dépenses de personnel et certaines dépenses de fonctionnement de sorte que celles-ci paraissent réduire les économies dégagées sur les premières.

• Les charges de personnel sont principalement composées de rémunérations de personnel non médical (personnels infirmiers, aides-soignants, spécialistes de la rééducation, personnels des services de soutien, ingénieurs et techniciens, en particulier pour le CERAH).

Les personnels de l'INI

L'état des ressources humaines de l'INI peut être appréhendé à partir des données suivantes :

• 436 ETP passés à 430,9 au 1 er mars 2015 dont 93,3 contractuels ;

• Effectifs physiques : 452 dont 107 contractuels (23,7 % des emplois) ;

• Médecins, pharmaciens, dentistes : 20 ETP ;

• Personnels paramédicaux : 290 ETP ;

• CERAH : 50 ETP ;

• Administration et support : 95 ETP ;

• Personnel du service de santé des armées : 8 ETP ;

• Personnels physiques par catégorie : catégorie A : 115 ; catégorie B : 112 ; catégorie C : 217, ouvriers de l'État : 8 ;

• Le quart des effectifs (122 emplois), est composé d'aides-soignants, le nombre d'infirmiers civils de soins généraux de catégorie A s'élève à 49 tandis que pour ceux qui ont opté pour le maintien en catégorie B, ils sont au nombre de 24 (pour un total de 72 emplois).

On relève le niveau relativement élevé des personnels affectés aux fonctions de support , services à propos desquels le ministère déclare que la politique de rationalisation a été poursuivie ces dernières années.

En toute hypothèse, si l'on additionne les charges sociales liées aux rémunérations des personnels non médicaux, cette catégorie de dépenses atteint près de 90 % des dépenses de personnel de l'INI.

Les rémunérations nettes des personnels médicaux s'élèvent, quant à elles, à 1,5 million d'euros. Elles ne représentent que 11,7 % des mêmes rémunérations versées au personnel non médical et 4,4 % du total des dépenses de l'INI.

Pour la période allant de 2010 à 2014 , couverte par un référentiel comptable homogène, si l'on y observe une augmentation des dépenses de l'INI de 2,5 millions d'euros , hors dotations aux amortissements, provisions et charges exceptionnelles (soit une croissance de 8,2 % ), on peut attribuer aux 1,8 million d'euros de progression des charges de personnel (+ 7,8 % ) les trois quarts de l'augmentation des dépenses de l'établissement.

L'augmentation de la masse salariale brute a été de 1,9 % par an , ce qui, compte tenu des objectifs de diminution des dépenses publiques, peut être considéré comme relativement élevé. Il convient toutefois de rappeler qu'en soi une progression de cet ordre n'a rien de discordant par rapport aux différentes cibles fixées à l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) non plus qu'avec l'évolution des prix. Par ailleurs, l'alourdissement des charges sociales, en lien notamment avec la question du financement des retraites doit être considéré.

On relèvera, par ailleurs, que cette contribution est un peu inférieure au poids relatif des dépenses de personnel dans les charges de l'INI, ce qui témoigne moins d'économies sur ce poste de dépenses que du dynamisme d'autres charges, qui, dans une certaine mesure ont pris le relais des dépenses de personnel.

En bref, s'il a pu arriver que, dans le passé, la politique salariale de l'INI puisse faire l'objet de critiques de la part du contrôle budgétaire et comptable ministériel, sous certaines réserves exposées ci-après, une forme de normalisation a été enclenchée, qu'il convient de poursuivre.

Toutefois, elle n'enlève rien au constat d'une contribution majeure des dépenses de personnel à l'évolution des charges de l'établissement.

• La progression des dépenses de l'INI s'explique également par le dynamisme des dépenses de fonctionnement.

Entre 2010 et 2015, les charges de fonctionnement ont augmenté de 12,3 % (+ 2,5 % par an), soit un rythme nettement plus rapide que celui du total des charges de l'INI (amortissements compris), dont l'alourdissement aura été de 5,5 % sur la période. L'inflation des charges de fonctionnement a également été plus forte que celle des dépenses de personnel (+ 7,3 %).

Les différentes catégories de charges de fonctionnement ont fluctué d'une année à l'autre dans des proportions parfois importantes mais ce sont les services extérieurs qui ont connu la plus forte progression.

Les frais de restauration ont, en particulier, beaucoup progressé. Ils comptent pour un tiers des services extérieurs. Ils se sont alourdis d'un quart de leur niveau initial entre 2010 et 2014 de 1,3 à 1,6 million d'euros). De même les frais de nettoyage ont nettement augmenté, de 18 % entre 2012 et 2014. Il est vrai qu'en 2012 ils avaient atteint un bas niveau historique. Pour autant, leur progression dépasse les 2 % par an. Une mise en évidence des frais de transport s'impose du fait de l'éventualité d'un alourdissement de ce poste de dépenses à l'avenir (voir infra ). Ils s'élevaient à 105 303 euros en 2010 puis avaient baissé pour atteindre 93 304 euros en 2011. Depuis, ils ont nettement progressé. Avec 136 000 euros en 2014, ils ont cru de 46 % de date à date.

L'établissement indique avoir en portefeuille un très grand nombre de procédures de marché public pour ses fournitures extérieures. Par ailleurs, l'Institution dit avoir engagé depuis plusieurs années dans le cadre du contrat d'objectifs et de performance (COP) une démarche de rationalisation et de modernisation de sa fonction achats.

Les procédures mutualisées employées pour les achats extérieurs de l'INI

L'INI n'utilise pas le programme AIDA mais, comme le service de santé des armées (SSA), l'INI a adhéré (en mars 2010) au GIP RESAH-IDF (Réseau des acheteurs hospitaliers d'Île-de-France) qui est l'un des principaux opérateurs spécialisés dans la mutualisation et la professionnalisation des achats du secteur sanitaire et médico-social public et privé non lucratif.

Actuellement l'INI a adhéré à près de 400 marchés du RESAH. Ces marchés portent sur tous les segments propres au milieu hospitalier :

Fournitures :

- Usage unique stérile ;

- Usage unique non stérile ;

- Hygiène ;

- Électricité ;

- Diététique ;

- Médicaments ;

- Dispositifs médicaux ;

- Fournitures d'atelier (électricité, plomberie, quincaillerie...).

Prestations de service :

- Vérifications et contrôles techniques ;

- Intérim paramédicaux ;

- Location et entretien du linge...

Lorsque le RESAH ne dispose pas d'offre ou que l'offre ne correspond pas aux besoins de l'INI, l'UGAP (Union des groupements d'achats publics) est sollicitée. Ainsi, l'INI passe commande à l'UGAP si celle-ci dispose d'une offre correspondant aux besoins. Cela concerne les achats suivants :

- Assurance flotte automobile, y compris le véhicule auto-école ;

- Entretien de la flotte automobile ;

- Location des photocopieurs ;

- Postes de travail informatique ;

- Une partie de l'infrastructure réseaux du schéma directeur des systèmes d'information ;

- Mobiliers ;

- Fournitures de bureau...

Depuis la mise en oeuvre de cette démarche, l'INI indique avoir pu dégager des économies substantielles.

Celles-ci ne ressortent pas comme particulièrement documentées dans les données fournies à votre rapporteur spécial.

L'optimisation des achats extérieurs par l'INI reste donc un objectif à atteindre, d'autant plus que certains services extérieurs devraient être davantage sollicités à l'avenir dans le cadre du nouveau projet de l'établissement, en particulier les services de transport.

En toute hypothèse, il ne faudrait pas que les efforts de l'INI pour maîtriser sa masse salariale soient altérés pas des coûts trop vite croissants des services externalisés.

(3) Un contexte plutôt favorable à des économies de dépenses

L'augmentation des charges de l'INI s'est produite dans un contexte plutôt favorable à une maîtrise des dépenses .

• Il en est allé ainsi pour la masse salariale dont la croissance est intervenue dans un environnement où, pourtant, un certain nombre d'éléments étaient réunis pour favoriser une plus forte maîtrise.

Ainsi, les effectifs employés ont légèrement diminué , passant de 446 en 2010 à 439 en 2015 (- 7 emplois, soit une diminution des effectifs de 1,5%) 5 ( * ) .

Le coût du travail par personne employée a ainsi progressé plus vite que la masse salariale totale (+ 2,1 % par an) .

Par ailleurs, l'adaptation des mesures de revalorisation du dernier protocole concernant la fonction publique hospitalière du 2 février 2010, dit « Bachelot », a tardé à intervenir, allégeant d'autant les coûts de personnel de l'établissement qui devraient connaître un ressaut dans les exercices à venir quand l'ensemble du protocole sera mis en oeuvre.

Le calendrier a été le suivant :

- infirmiers en soins généraux et spécialisés : septembre 2010 dans la fonction publique hospitalière (réforme LMD « Licence Master Doctorat » : classement en catégorie A avec revalorisations indiciaires en 2010, 2012 et 2015). Transposition au ministère de la défense et notamment à l'INI, fin juillet 2014 , en raison des difficultés liées aux modalités de mise en oeuvre de cette transposition (question du droit d'option, c'est-à-dire du maintien en catégorie B contre le bénéfice du départ en retraite au titre de la catégorie active) ;

- cadres de santé : 2012 dans la fonction publique hospitalière (revalorisations indiciaires en 2012 et 2015) et transposition en mars 2015 pour les cadres de santé du ministère de la défense ;

- techniciens paramédicaux dans la spécialité ergothérapie : août 2015 dans la fonction publique hospitalière (réforme LMD : classement en catégorie A avec revalorisation indiciaire) et transposition en cours au ministère de la défense.

La lenteur de la transposition du protocole doit être observée ainsi que le décalage entre son application dans la fonction publique hospitalière et à l'INI.

• Par ailleurs, même s'il est difficile à appréhender avec une totale pertinence, le plan de charge de l'INI a plutôt connu une stabilisation, voire une baisse, au cours de la période sous revue.

En toute hypothèse, des fluctuations parfois amples ont touché l'activité de l'INI. Certaines années ont même été marquées par une chute dans certains départements. Il en a été ainsi, en particulier, pour le centre des pensionnaires en 2012 qui, cette année-là, avait perdu 2 555 journées par rapport à l'année 2010, soit une baisse considérable de l'activité du centre de près de 10 %. Au-delà, un certain redressement s'est produit sans pour autant que le centre retrouve le niveau d'activité de début de période.

Ces évolutions ont prolongé une tendance installée de longue date.

Le centre des pensionnaires qui, au milieu des années 2000, accueillait de 91 personnes a vu ses capacités d'accueil réduites de 8 lits (83 lits théoriques) et son activité tourne désormais autour de 80 personnes accueillies. La baisse d'activité trouve une traduction concrète dans les évolutions de l'indicateur de performance publié dans les annexes budgétaires. Ainsi, pour 2014, le coût de la journée d'un pensionnaire à l'INI avait atteint 397 euros mais avait dès 2015 connu une forte augmentation pour se situer à 418 euros. Cette augmentation de 5,3 % d'une année à l'autre a été due à la baisse de fréquentation constatée. La réduction des capacités d'accueil du centre des pensionnaires mise en oeuvre au cours de la période la plus récente semblant n'avoir pas été suivie des ajustements d'effectifs qui, théoriquement, auraient pu l'accompagner.

Quant au centre médico-chirugical , au milieu des années 2000, il réunissait cinquante-deux lits dans son service de médecine physique et de réadaptation, trente-quatre lits de chirurgie et six lits dans son unité d'évaluation sensori-cognitive (92 lits au total).

Actuellement, le nombre des lits a été ramené à quarante-huit en médecine physique et de réadaptation, vingt-quatre lits en chirurgie et deux lits en soins de suite post opératoire auxquels il convient d'ajouter quatorze lits théoriques, mais en réalité dix lits en hospitalisation de jour (84 lits dont 10 en hôpital de jour).

Il faut également relever que la prise en charge des urgences qui, selon la Cour des comptes avait été fixée comme une perspective de l'INI, n'a finalement pas été mise en oeuvre sinon de façon très exceptionnelle ou, encore, l'externalisation du laboratoire d'analyses médicales.

• Enfin, pour quitter le champ des dépenses courantes, les dépenses d'investissement ont été modérées pendant la période dans le contexte d'une suspension de la réalisation du schéma directeur d'infrastructures à la suite d'un audit interministériel en 2014.

Celui-ci avait pourtant été défini en fonction du contrat d'objectifs et de performance 2009-2014 sur la base de diagnostics concluant pour certaines installations à forts enjeux de sécurité à leur obsolescence.

Les investissements avaient nettement progressé en 2013 atteignant un pic, à 4,6 millions d'euros contre une moyenne de 1,6 million d'euros entre 2010 et 2012. L'année 2014 a connu un repli sensible du fait de la décision mentionnée. Les dépenses d'investissement sont retombées à 6 % du total des dépenses de l'INI (2,1 millions d'euros). En 2015, un léger sursaut les a portées à 2,8 millions d'euros. Le compte financier en compte 2,79 millions d'euros tandis qu'en 2005, ils s'étaient élevés à 3,67 millions d'euros. Sur un plan plus méthodologique, on peut être amené à s'interroger sur les conditions dans lesquelles l'établissement recense ses besoins de renouvellement de ses actifs. Il paraît suivre une politique d'inscription comptable de ses amortissements qui conduit à minorer ses charges réelles.

Le ralentissement des investissements a pu être justifié par les tutelles, dans le passé, par l'absence de besoins.

En réalité, cette justification ne peut être considérée comme valide au vu de la réalisation concrète des investissements qui s'est accompagnée d'un report de satisfaction de besoins élémentaires.

La préparation du nouveau schéma pluriannuel de stratégie immobilière de l'INI en cours d'achèvement témoigne d'ailleurs abondamment des retards accumulés.

Il apparaît finalement que les vraies guides de la politique d'investissement de l'INI ont été, et sa situation financière, et les mesures de suspension prises à la suite des observations du contrôle de gestion appliqué à l'établissement.

En conclusion, les niveaux successifs des investissements annuels ont été inférieurs, de beaucoup, aux besoins , situation intenable à terme et qui appelle des correctifs.

2. Un mode de financement complexe et insuffisant pour couvrir les charges de l'INI

Le mode de financement de l'INI ressort comme complexe et marqué par une dualité des dotations budgétaires qui suscite parfois quelques confusions.

En toute hypothèse, le financement de l'INI s'est révélé insuffisant pour assurer un équilibre satisfaisant de son fonctionnement courant, débouchant sur des incidents regrettables.

a) Un mode de financement complexe, source de confusions

Les recettes courantes de l'établissement sont structurées par deux subventions versées, l'une, par le ministère de la défense (la subvention pour charges de service public imputée sur le programme 169 de la mission « Anciens combattants), l'autre par le ministère des affaires sociales et de la santé (dite « dotation annuelle de financement » - DAF).

Selon les comptes financiers annuels, la première était de 11,839 millions d'euros en 2014 et la seconde de 11,827 millions d'euros .

À elles deux, elles représentaient 70 % des ressources courantes de l'établissement.

Par rapport aux valeurs mentionnées ci-dessus, le projet de loi de finances pour 2017 maintient à peu près inchangé le niveau de la subvention versée par le ministère de la défense (11,8 millions d'euros). Il en irait de même pour la DAF.

La dotation versée par le ministère des affaires sociales et de la santé n'a vocation qu'à couvrir les charges du centre médico-chirurgical au profit des assurés sociaux à l'exclusion des autres activités de l'INI.

Son régime est fixé par le code de la sécurité sociale qui prévoit son inclusion dans l'ONDAM ainsi que ses modalités de revalorisation .

L'article R. 174-23 du code de la sécurité sociale dispose que la DAF est calculée sur la base de la dotation versée l'année précédente modulée selon un taux prenant en compte les coûts et l'activité de l'INI . L'arrêté annuel pris en ce sens peut être révisé en cours d'année pour tenir compte d'évolutions de toute nature.

Ces dispositions feraient l'objet d'une application peu rigoureuse de la part du ministère de la santé.

Le service du contrôle budgétaire et comptable ministériel près le ministère des anciens combattants dans une note à la direction du budget du 27 mars 2012 mentionne les réticences de la direction de l'hospitalisation et de l'offre de soins qui « gèle de facto, depuis 2005, le montant de la dotation annuelle de fonctionnement servie à l'Institution » , au motif que l'INI s'inscrirait de manière insuffisante dans le schéma régional d'organisation sanitaire.

Votre rapporteur spécial considère que ce motif ne saurait justifier l'inertie de la DAF quand les textes organisent sa revalorisation.

Dans ces conditions, selon les réponses apportées au questionnaire de votre rapporteur spécial, la DAF serait sous-évaluée.

Cette sous-évaluation, si elle devait être vérifiée par confrontation avec la réalité des coûts exposés par l'INI, doit être corrigée.

En toute hypothèse, la dualité des dotations budgétaires versées à l'INI pour assurer son fonctionnement favorise des situations plus ou moins conflictuelles.

Celles-ci paraissent d'autant plus promptes à se développer que, d'une part, les modalités de calcul guidant la dotation du ministère de la santé supposent des appréciations comptables toujours complexes et paraissent, admettre quelques marges d'appréciation.

En outre, il faut tenir compte des différences de « cultures » entre les deux financeurs.

Il apparaît en particulier que le ministère de la santé souhaiterait appliquer à l'INI ses principes habituels de tarification qui supposent une tarification sur la base des activités, et non sur la base des coûts.

Une telle évolution vers l'application par le ministère de la santé d'une tarification à l'acte, si elle devait voir le jour, devrait à tout le moins tenir compte des particularités des activités de soin de l'INI.

Au total, dans ce cadre dual, une sorte de jeu de rôles a pu prévaloir avec des effets particulièrement regrettables.

L'INI avait, semble-t-il, pris l'habitude de budgéter une dotation du ministère de la santé conforme à ses demandes mais, en pratique, loin de correspondre à celle finalement attribuée à l'INI.

Il en était résulté une forme d'insincérité budgétaire dénoncée comme telle par le service du contrôle budgétaire et comptable ministériel.

Il semble difficile de renoncer à un système de financement dual qui reflète la réalité de l'activité de l'INI. Pour autant, celui-ci ne doit pas déboucher sur des concurrences entre administrations visant à reporter les charges de financement l'une sur l'autre. Votre rapporteur spécial n'a pas qualité pour se prononcer sur l'opportunité d'une modification des modalités de détermination de la DAF versée par le ministère de la santé. Il souhaite que, au moins dans la période intercalaire correspondant à la mise en place du nouveau projet de l'INI, les conditions qui prévalent réglementairement aujourd'hui, soient mieux respectées.

b) Une insuffisance structurelle de financement

Depuis quelques exercices, les moyens de l'établissement sont marqués par une certaine stabilité en niveau malgré les efforts entrepris pour diversifier les ressources.

• L'INI a entrepris un effort de diversification de ses ressources propres dont, toutefois, la portée pratique ne doit pas être surestimée.

Quatre postes de recettes alternatives aux dotations ministérielles liées aux activités de l'établissement apportent des moyens significatifs.

Il s'agit :

- au titre du centre des pensionnaires , du forfait soins et des redevances pour, respectivement, 3,2 et 1,6 millions d'euros (4,8 millions d'euros) ;

- au titre du centre médico-chirurgical , d'un poste « produits des activités » pour 3,7 millions d'euros ;

- au titre du CERAH , de 1,1 million d'euros.

Au total, ces 9,6 millions d'euros comptent pour un peu plus de 28 % des ressources de l'INI .

Les modalités de contribution des usagers de l'INI

Le décret n° 92-105 du 30 janvier 1992 fixe les modalités selon lesquelles les pensionnaires contribuent à leur hébergement. Il est prévu qu'ils versent une redevance en fonction de leurs revenus à laquelle s'ajoutent éventuellement des frais accessoires comme ceux de blanchisserie et de téléphone. Au 30 juin 2016, la redevance journalière moyenne est de 62,04 euros .

Les hébergés 6 ( * ) paient une contribution journalière (prestation hôtelière et soins de confort), dont le montant est approuvé en conseil d'administration. Pour l'année 2016, cette participation s'élève à 143 euros/jour .

On rappelle que le coût moyen de la journée d'un pensionnaire de l'INI a été estimé à 418 euros en 2015.

L'écart entre la contribution des pensionnaires et celle des hébergés, en défaveur de ces derniers mériterait d'être mieux justifié.

S'agissant de la prise en charge par le centre médicochirurgical (CMC), les bénéficiaires de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et victimes de la guerre sont pris en charge quel que soit leur motif d'hospitalisation au soit au titre des soins médicaux gratuits, soit par le régime général d'assurance maladie dont ils dépendent. Ils ne participent qu'à hauteur des frais accessoires (téléphone, etc.).

Pour les patients de droit commun du CMC, les frais d'hospitalisation restant à leur charge dépendent du motif d'hospitalisation. Dans la majorité des cas, ces frais sont supportés par les différents régimes d'assurance maladie dont ils dépendent. Seul le forfait journalier hospitalier reste à leur charge ainsi que, très rarement, le ticket modérateur. Ces frais résiduels sont la plupart du temps couverts par une assurance maladie complémentaire.

Aux produits ci-dessus énumérés s'ajoute un forfait soins versé par la Caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS) dont le niveau atteignait 111 euros en 2014.

Si les produits résultant du volume d'activités de l'établissement ont connu une augmentation, au contraire des dotations ministérielles qui ont subi une légère érosion au cours de cette période, leur part dans le financement de l'INI demeure minoritaire (28,4 %) et les ressources qu'ils apportent sont soumises à des variations annuelles importantes.

Celles-ci touchent plus particulièrement les produits d'activités du centre médical qui, après un pic en 2011 (environ 4 millions d'euros), ont connu une brusque diminution l'année suivante (3,2 millions et même 2,8 millions en 2013) pour se redresser en 2014.

Par ailleurs, une part importante de l'augmentation des ressources propres de l'INI est venue des recettes du CERAH (+ 678 600 euros) qui a contribué aux deux tiers de cet accroissement. Or, malgré le dynamisme du centre, les recettes du CERAH ne sont pas extensibles à merci. Au demeurant, ses recettes pour l'année 2015 avaient été inscrites en réduction sensible par rapport aux réalisations de 2014 (750 000 euros contre 1 111 351 euros selon les informations transmises à votre rapporteur spécial).

Autrement dit, en moyenne, les ressources propres de l'INI financent au mieux quelque 25 % de l'activité de l'établissement et ne sont guère malléables.

Incidemment, votre rapporteur spécial s'interroge sur la justification de l'application de contributions journalières inégales entre les pensionnaires et les personnes hébergées tandis que les conditions dans lesquelles la contribution des pensionnaires est modulée en fonction de leur revenu paraissent appeler une certaine attention.

• Les recettes de l'INI sont moins dynamiques que ses dépenses.

Même si entre 2010 et 2014 une progression des ressources en nominal doit être relevée (+ 4,6 % environ pour 1,5 million d'euros), elle correspond à une légère érosion une fois l'inflation prise en compte.

En outre, les ressources de l'établissement connaissent des fluctuations certaines au point que leur niveau de 2014 n'était supérieur à celui atteint en 2011 que de 240 000 euros. Quant aux recettes du budget initial de l'établissement de 2016, elles sont moins élevées que celles de 2015 et même de 2014.

Cette inertie des ressources est attribuable au faible dynamisme des dotations versées par les ministères, c'est à dire de la dotation versée par le ministère de la santé pour couvrir les coûts du centre médico-chirurgical mais aussi de la subvention pour charges de service public en provenance du programme 169 de la mission « Anciens combattants ».

La première a été très légèrement revalorisée jusqu'en 2013 pour être stabilisée par la suite à 11,827 millions d'euros. Quant à la subvention du programme 169, elle a suivi une trajectoire baissière continue. De 12,387 millions d'euros en 2010, elle est passée à 11,8 millions en 2014 pour se redresser un peu lors de l'exécution 2015 (12,1 millions d'euros).

Force est donc de constater que si la DAF versée par le ministère de la santé a subi les effets d'un gel peu justifiable, de son côté, la subvention pour charges de service public versée par le ministère de la défense a été peu dynamique.

À ce constat s'ajoute celui d'une cessation pendant plusieurs exercices de toute attribution de dotation particulière pour financer les investissements.

En effet, à partir du budget pour 2012, la composante des soutiens de l'État destinée au financement de l'investissement a disparu, au motif alors énoncé d'un défaut de besoin particulièrement contestable.

Au total, on constate qu'entre 2010 et 2015 les dépenses courantes de l'INI ont progressé de 2,6 millions d'euros, soit une croissance de 8,5 % (+ 1,6% par an) à comparer avec des ressources qui n'ont progressé que de 1,6 million d'euros 5,0 % soit une moyenne annuelle inférieure à 1 %.

Dans ces conditions, la section de fonctionnement de l'INI a vu ses équilibres se dégrader.

Et, malgré le ralentissement des investissements, il a fallu de plus en plus compter sur le fonds de roulement de l'INI, déjà sollicité par les déficits courants de l'établissement, pour assurer leur financement.

3. Le fonds de roulement a été largement sollicité ces dernières années

Le fonds de roulement de l'INI s'élevait à 25,234 millions d'euros à la fin de l'exercice 2010 . Il s'élèverait aujourd'hui à environ 16 millions d'euros.

En 2011, il avait été porté à 26,584 millions d'euros (+ 1,3 million d'euros) et avait encore progressé en 2012 pour se situer à 26,863 millions d'euros .

Il atteignait alors environ une année pleine de charges de fonctionnement de l'établissement.

Depuis , le fonds de roulement a été considérablement sollicité pour financer les besoins de financement récurrents de l'INI alors même que les investissements ont dû être contenus.

Les documents budgétaires annexés aux projets de loi de finances n'informent pas sur le niveau du fonds de roulement de l'INI, ce qui doit être regretté.

Toutefois, selon les informations transmises à votre rapporteur spécial, le fonds de roulement de l'INI a reculé très significativement pour ne plus réunir que 16,6 millions d'euros après les prélèvements effectués depuis l'exercice 2013. Celui-ci, et les exercices suivants, a prolongé l'extinction du versement à l'INI de tout soutien à l'investissement.

Après le prélèvement de 1,2 million d'euros enregistré dans les comptes de 2015, le budget initial pour 2016 prévoyait un prélèvement de 4,685 millions d'euros. Pour 2017, une nouvelle ponction du fonds de roulement est programmée.

Votre rapporteur spécial relève que le fonds de roulement de l'INI avait été calibré dans la perspective du financement des investissements nécessaires. Or, les différents prélèvements ont largement excédé les investissements réalisés et le fonds de roulement a été ponctionné pour couvrir des déficits courants dont la responsabilité n'incombe pas tant à une quelconque dérive des charges qu'à l'inertie des dotations versées par les ministères.

L'état du fonds de roulement de l'INI peut faire l'objet d'appréciations diverses.

D'un côté, il ressort comme largement suffisant pour couvrir les besoins théoriques de disponibilités financières. Sur la base d'un coût quotidien de fonctionnement de l'ordre de 80 000 euros, le niveau du fonds de roulement dépasse de beaucoup les ressources nécessaires pour couvrir trois mois d'activité. Le niveau de la trésorerie de l'INI (différence entre le fonds de roulement disponible et le besoin de fonds de roulement) était d'ailleurs élevé en 2014 (20,5 millions d'euros) et produisait des revenus pour l'établissement.

D'un autre côté, les besoins de financement correspondant aux investissements prévus dans le cadre du futur projet d'établissement excèderont nettement le disponible de sorte que l'INI devra compter pour les financer sur une reprise de la politique d'attribution de subventions d'investissement en provenance du budget général. C'est d'ailleurs ce que programme le projet de loi de finances pour 2017 qui porte une nouvelle subvention d'investissement de 5 millions d'euros. Mais, avec ce niveau, il ressort que la sollicitation du fonds de roulement de l'INI rejoindra un niveau tout juste suffisant pour satisfaire aux critères de prudence financière.

À l'avenir, il faudra veiller à ce que l'INI n'ampute pas sa capacité de financement par des prélèvements destinés à financer son fonctionnement courant, ce qui suppose une consolidation des ressources versées par les ministères et de poursuivre autant que possible la mise à niveau de ses ressources propres.


* 3 Il n'est pas sûr que les coûts des différentes activités de l'INI puissent être strictement observés dans la mesure où un suivi entièrement strict de ces coûts supposerait des contrôles systématiques renouvelés fréquemment. Un tel contrôle finirait pas coûter cher et pourrait se révéler démotivant pour des équipes distraites de leurs missions. Le recours à des procédés indirects de calcul, même s'ils peuvent admettre quelques imprécisions est préférable et donne des indications généralement fiables. En toute hypothèse, alors que cela pourrait être logique l'INI n'est pas découpée en budgets annexes correspondant à ses différents activités.

* 4 En réalité, selon les informations transmises à votre rapporteur spécial, le transfert effectif aurait été un peu moindre, de 55 agents.

* 5 Sur plus longue période, à périmètre constant, les effectifs de l'INI ont augmenté de 9 unités.

* 6 Le statut des hébergés est précisé à l'article D. 568 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Il s'agit de mutilés qui sont recueillis par l'INI mais n'ont pas pour autant le statut de pensionnaire. La durée de leur séjour est, théoriquement, limitée à 8 jours mais elle peut être renouvelée s'il y a lieu.

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