N° 329

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 février 2019

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le service militaire adapté ,

Par MM. Nuihau LAUREY et Georges PATIENT,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Vincent Éblé , président ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Yvon Collin, Bernard Delcros, Mme Fabienne Keller, MM. Philippe Dominati, Charles Guené, Jean-François Husson, Georges Patient, Claude Raynal , vice-présidents ; M. Thierry Carcenac, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Joyandet, Marc Laménie , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Julien Bargeton, Jérôme Bascher, Arnaud Bazin, Yannick Botrel, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Mme Frédérique Espagnac, MM. Rémi Féraud, Jean-Marc Gabouty, Jacques Genest, Alain Houpert, Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Nuihau Laurey, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Sébastien Meurant, Claude Nougein, Didier Rambaud, Jean-François Rapin, Jean-Claude Requier, Pascal Savoldelli, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel .

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
ET RECOMMANDATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Les principales observations

Le service militaire adapté ou SMA a pour mission principale de faciliter l'insertion dans la vie active des jeunes adultes - 18 à 26 ans - volontaires en situation d'échec et/ou en voie de marginalisation et résidant dans les départements et collectivités d'outre-mer . À cet effet, le SMA propose, sous statut de volontaire dans les armées et dans un cadre militaire, un parcours socioprofessionnel destiné à renforcer l'employabilité des bénéficiaires. Il s'articule autour d'une remise à niveau dans les savoirs de base, d'une éducation citoyenne, d'une formation aux premiers secours et d'une préformation professionnelle.

En 2009, le gouvernement a décidé de lancer le plan « SMA 6000 », consistant en un doublement des effectifs alors accueillis, soit 3 000 jeunes par an. Cet objectif a finalement été atteint en 2017 .

Dans ce contexte, les crédits du SMA ont connu une augmentation de plus de 60 % depuis 2010, atteignant 222,42 millions d'euros en crédits de paiement (CP) en 2017. L'évolution est particulièrement contrastée en fonction des types de dépenses. Ainsi, depuis 2014 , les dépenses de personnel sont restées quasiment stables (+ 2 %), tandis que les dépenses d'investissement ont connu une baisse de 41 %. Ces évolutions mettent en évidence un réel risque d'effet d'éviction des dépenses de fonctionnement et d'investissement lié à l'augmentation des effectifs , potentiellement préjudiciable à la qualité des formations dispensées par les unités.

Le coût moyen, en prenant en compte les volontaires stagiaires et les volontaires techniciens, d'une formation au SMA s'élevait à 36 740 euros en 2017. Si les comparaisons révèlent un annuel coût proche du service militaire volontaire ou supérieur à l'Établissement public d'insertion (EPIDE), elles doivent être nuancées par la spécificité du SMA et les surcoûts liés aux outre-mer. De même, le coût du SMA est également à comparer au « coût social évité », en termes d'aides sociales et d'externalités négatives. Au total, selon une évaluation demandée en 2014 par le ministère des outre-mer et réalisée par un cabinet de conseil, le fait d'investir fortement dans une année de SMA pour un jeune génère en fait une économie dès la cinquième année, chiffrée à 26,5 millions d'euros pour une cohorte de 6 000 bénéficiaires.

Le SMA se distingue par son mode de recrutement « par le bas », qui vise à sélectionner les profils les plus éloignés de l'emploi. Le respect de ce principe se matérialise principalement par la forte proportion de bénéficiaires en situation d'illettrisme (38 % des stagiaires en 2016) et de non-diplômés (1/3 des promotions).

Le taux d'insertion des volontaires stagiaires, qui constitue le principal indicateur de performance du dispositif, atteint des niveaux particulièrement satisfaisants, entre 77 et 74 % sur les 7 dernières années , eu égard aux caractéristiques socio-économiques des outre-mer et des jeunes sélectionnés. Les résultats montrent en outre une tendance à l'augmentation de la qualité de l'insertion révélée, dans la quasi-totalité des territoires, par la part croissante des emplois durables.

Le doublement des effectifs de volontaires stagiaires dans le cadre de « SMA 6000 » n'a toutefois pas suffisamment pris en compte les évolutions sociodémographiques propres à chaque territoire. Le SMA connait ainsi des difficultés de recrutement dans les Antilles, en raison de l'épuisement des « viviers ». Réciproquement, certains territoires, comme Mayotte, la Nouvelle Calédonie ou la Polynésie française connaissent une forte demande, se traduisant par des taux de sélectivité anormalement élevés.

La mise en oeuvre de « SMA 6000 » a également entrainé une importante mise sous tension des effectifs encadrants. Le taux d'encadrement, qui s'élevait à 25 % en 2010 a connu une baisse de 10 points sur la période 2010-2017. Ces quatre dernières années, cette baisse a concerné l'ensemble des unités, à l'exception de La Réunion, dont le taux d'encadrement est resté stable. De l'avis général, les taux d'encadrement du SMA ont aujourd'hui atteint un niveau plancher, susceptible de mettre en péril ses résultats et la sécurité de ses activités.

La ministre des Outre-mer a défini, en février 2018, un nouvel objectif dénommé « SMA 2025 », lequel vise à favoriser l'employabilité durable des volontaires plutôt que celle à court-terme. Ceci constitue une évolution particulièrement bienvenue, et conforme à l'objectif du SMA et de la politique de l'État en outre-mer, visant à favoriser le développement endogène de ces territoires.

Des différences importantes caractérisent le futur service national universel (SNU) du SMA, tant dans son objet que ses modalités, même si des synergies pourront utilement être trouvées.

Les principales recommandations

Recommandation n° 1 : afin d'assurer une meilleure adéquation de la taille des unités aux réalités sociales et démographiques propres à chaque territoire d'outre-mer, réévaluer la taille des cohortes de volontaires recrutés dans chacune des unités du SMA.

Recommandation n° 2 : afin de consolider ses résultats et de garantir la sécurité de ses activités, augmenter les taux d'encadrement des unités du SMA, en prenant en compte la nouvelle définition de la taille des promotions.

Recommandation n° 3 : afin de garantir l'« employabilité durable » des stagiaires du SMA, envisager un allongement progressif de la durée des formations.

Recommandation n°4 : dans le cadre de « SMA 2025 », renforcer prioritairement le suivi des volontaires du SMA au-delà des 6 mois, et le différencier par type de formation et de débouché, afin de veiller à l'amélioration réelle de l'employabilité des stagiaires sur le long-terme.

Recommandation n° 5 : parallèlement à la montée en puissance du service national universel, affirmer la singularité et l'indépendance du SMA, dispositif centré sur l'insertion professionnelle, tout en mettant en oeuvre une importante coordination et des actions conjointes entre les deux.

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