B. L'ACTUALITÉ DU CONSEIL DE L'EUROPE ET DE SON ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE

Les sessions plénières de l'APCE donnent systématiquement l'occasion de faire le point sur l'actualité du Conseil de l'Europe et de son Assemblée parlementaire. Elles s'enrichissent, régulièrement, de votes désignant des responsables du Conseil de l'Europe ou des membres de la Cour européenne des droits de l'Homme.

La session de printemps n'a pas dérogé à la règle. Elle s'est néanmoins singularisée par la discussion de propositions concrètes d'aménagements du Règlement, sur le rapport de M. Egidijus Vareikis (Lituanie - PPE/DC), au nom de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles.

1. Le rapport d'activité du Bureau et de la Commission permanente

À l'occasion de la première séance de la session de printemps, le lundi 8 avril 2019, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a examiné le rapport de M me Boriana Åberg (Suède - PPE/DC), faisant office de rapport d'activité du Bureau et de la Commission permanente.

Au cours de la discussion générale, la rapporteure a tout d'abord évoqué les missions d'observation électorale décidées par le Bureau, insistant tout particulièrement sur cette expérience qui permet de mieux comprendre le rôle de l'APCE dans la défense des valeurs fondamentales du Conseil de l'Europe.

Abordant ensuite la question budgétaire, M me Boriana Åberg a commenté la teneur des échanges à ce sujet entre le Secrétaire général du Conseil de l'Europe et le Bureau de l'APCE. Elle a explicité la nature du plan d'urgence élaboré sous l'égide du Secrétaire général pour ajuster les dépenses de l'Organisation à l'absence de contribution de la Fédération de Russie, ce plan devant entrer en vigueur mi-2019 et être mis en oeuvre pour trois ans, de manière à absorber l'ampleur de la diminution budgétaire et reconstituer la trésorerie.

La rapporteure a souligné que les non-paiements de la Fédération de Russie, dont le montant s'élève à 100 millions d'euros, auront des conséquences, parmi lesquelles la possible décision de déclencher l'application de l'article 9 du Statut sur la suspension des droits de représentation d'un État au Comité des Ministres ainsi qu'à l'Assemblée parlementaire. Elle a précisé que la mise en oeuvre du plan d'urgence conduirait à des coupes opérationnelles et des coupes dans le personnel, de l'ordre de 14 %, ce qui devrait se traduire par le licenciement de 250 personnes. La Cour européenne des droits de l'Homme devrait se trouver moins frappée par ces mesures, à la différence des deux directions générales qui traitent des principales activités du Conseil de l'Europe.

M me Boriana Åberg a ensuite mentionné la formation d'un nouveau groupe politique à l'APCE, intitulé « Nouveaux démocrates européens, l'Europe des nations et Liberté ». Après avoir souligné que, règlementairement, tout groupe politique doit promouvoir et respecter les valeurs du Conseil de l'Europe, elle a indiqué qu'à deux reprises le Bureau avait reporté sa décision de reconnaître ce nouveau groupe politique en raison de doutes sur ce critère, des discours de haine antisémite et islamophobe ayant été prononcés par certains de ses membres.

Rappelant, enfin, le calendrier du prix Vaclav Havel 2019, la rapporteure a souhaité rendre hommage, en conclusion, aux hommes et femmes qui résistent avec courage pour défendre les droits de l'Homme et pour rendre publique la façon dont ceux-ci sont violés dans leurs pays.

2. Deux débats majeurs pour l'avenir du Conseil de l'Europe et de son Assemblée parlementaire

Depuis plusieurs mois, l'Assemblée parlementaire mène de nombreuses réflexions sur son avenir et sur les évolutions à envisager pour sortir de la crise née de la suspension des droits de la délégation russe, en 2014, et de la suspension consécutive des contributions de la Fédération de Russie au budget du Conseil de l'Europe, en juin 2017. La session de printemps a donné lieu à des débats intenses sur certains aspects de ces réflexions, afin d'amorcer le retour à une situation normale.

a) Un débat d'urgence pour esquisser une sortie de crise

Dans le prolongement des travaux de la commission ad hoc du Bureau de l'APCE présidée par M. Michele Nicoletti en 2018, deux rapports avaient été confiés l'an passé à la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, d'une part, pour faire évoluer les règles de représentation, les droits de vote et les sanctions - rapport de M me Petra De Sutter (Belgique - SOC) -, et à la commission des questions politiques et de la démocratie, d'autre part, pour réfléchir au sens et aux missions de l'APCE dans les années à venir. Ce second rapport, attribué à M. Tiny Kox (Pas-Pas - GUE), a vu son calendrier d'examen accéléré après que l'Assemblée parlementaire s'est prononcée, aux deux tiers de ses membres, dès l'ouverture de la session de printemps, pour son inscription à son ordre du jour sous forme de débat d'urgence.

Le mercredi 10 avril 2019, l'APCE a donc débattu et adopté, sur le rapport de M. Tiny Kox, une résolution et une recommandation sur les défis d'avenir, le rôle et la mission de l'Assemblée parlementaire.

En ouverture de la discussion générale, le rapporteur a insisté sur le 70 ème anniversaire du Conseil de l'Europe. Il a rappelé que l'Europe, en 1949, était en ruine et que des responsables politiques courageux avaient décidé de reconstruire un continent uni, meilleur, par le dialogue et la coopération, en se fondant sur un nouveau traité, portant Statut du Conseil de l'Europe, et sur un document unique en son genre, adopté un an après la création de ce Conseil de l'Europe, à savoir la convention européenne des droits de l'Homme. Il a souligné que ce n'est que quarante ans plus tard que l'Europe avait été véritablement unifiée, à la fin de la guerre froide.

M. Tiny Kox a mis en exergue que, désormais, les citoyens des 47 États membres du Conseil de l'Europe sont protégés par une convention et, sur la base de celle-ci, une Cour qui rend des arrêts contraignants. Il a ajouté que, grâce à plus de 200 conventions thématiques, l'Europe était aujourd'hui un endroit meilleur qu'il y a 70 ans, y voyant là un motif de fierté.

Il a considéré que l'Assemblée parlementaire avait joué un rôle important depuis le début, en ce qu'elle avait été le moteur politique du Conseil de l'Europe en impulsant de nombreuses conventions importantes pour le quotidien de beaucoup de personnes. Il a constaté que des divisions étaient malgré tout apparues, du fait de conflits dans et entre les États et de la contestation de plus en plus ouverte des arrêts de la Cour, sans que les membres de l'APCE aient été en mesure de trouver des solutions pour les surmonter.

Évoquant la crise actuelle du Conseil de l'Europe, consécutive à l'annexion illégale de la Crimée par la Fédération de Russie, il s'est référé à la décision du Bureau de l'APCE de créer, en 2018, une commission ad hoc incluant des représentants des 47 délégations des États membres et les groupes politiques, pour réaffirmer l'unité européenne et défendre la sécurité et la démocratie en Europe. Il a indiqué que cette commission avait recensé la contribution de l'ensemble de ses membres à une réflexion sur le rôle et les missions de l'Assemblée parlementaire.

Sur cette base, le rapporteur a rappelé qu'il avait été mandaté par la commission des questions politiques et de la démocratie, ainsi que le Bureau, pour réfléchir sur les principaux défis à relever pour l'avenir. Il a alors fait état de ses nombreuses auditions pour parvenir à ses conclusions, y compris celle du Président de la Commission européenne, M. Jean-Claude Juncker, au cours desquelles il avait reçu un accueil positif et favorable à l'égard de ses propositions.

Résumant ces dernières, il les a déclinées à travers cinq thèmes principaux : identité, rôle et missions de l'Assemblée parlementaire ; rationalisation des travaux ; amélioration du suivi ; amélioration du dialogue entre l'APCE et le Comité des Ministres ; renforcement des relations de l'APCE avec l'Union européenne et d'autres organisations internationales. Il a estimé que ses suggestions donnaient une direction sans pour autant constituer un aboutissement.

Le rapporteur s'est attardé sur sa proposition ayant plus particulièrement appelé l'attention de tous, à savoir le renforcement du dialogue entre l'Assemblée parlementaire et le Comité des Ministres. Il a relevé qu'existait un besoin patent de permettre des initiatives conjointes entre ces deux organes statutaires du Conseil de l'Europe pour renforcer la capacité de l'Organisation à réagir plus efficacement dans les situations où un État membre violerait ses obligations ou ne respecterait pas les valeurs communes.

Il a jugé à cet égard que les outils de l'APCE et du Comité des Ministres avaient atteint leurs limites, raison pour laquelle les textes soumis au vote de l'Assemblée parlementaire envisageaient de mettre en place, pour ce genre de situations, une procédure de réaction conjointe à l'initiative de l'un ou de l'autre de ces deux organes ou du Secrétaire général, sans préjudice des pouvoirs dont est investi chacun d'entre eux.

M. Tiny Kox a fait état d'un accueil positif du Secrétaire général du Conseil de l'Europe et du Président du Comité des Ministres à l'égard de cette approche, une action rapide apparaissant nécessaire pour concrétiser cette nouvelle procédure. Il s'est déclaré convaincu, ce faisant, de renforcer la position de l'APCE tout en étant utile au Comité des Ministres pour relever les défis de l'avenir. Il a donc appelé l'Assemblée à adopter les textes proposés, estimant qu'ils pourraient jouer un rôle important à la conférence ministérielle d'Helsinki, mi-mai.

M. Olivier Becht (Haut-Rhin - UDI, Agir et Indépendants) a relevé l'unanimité des membres de l'APCE sur le constat de crise la plus grave que traverse actuellement le Conseil de l'Europe. Lui déniant un caractère conjoncturel, lié à l'annexion de la Crimée par la Fédération de Russie, il lui a attribué un caractère structurel, y voyant une crise des valeurs qui ont présidé à la fondation de l'Organisation et qui ont uni l'Europe après 1945. À l'appui de sa démonstration, il a observé qu'un grand nombre d'États s'écartent du chemin des valeurs et du respect de la démocratie, des droits de l'Homme et de l'État de droit.

S'interrogeant sur les moyens de sortir de cette crise, il a prôné le dialogue et considéré que le travail du rapporteur allait dans le bon sens, pour renforcer non seulement la collaboration entre les différents organes statutaires, mais aussi pour sanctionner les États qui s'écartent des valeurs communes. Il a néanmoins considéré que cela ne suffirait pas.

M. Olivier Becht, s'inscrivant dans une démarche prospective, a commencé par rappeler qu'en 1945, les pays européens s'étaient unis autour de valeurs et aussi de projets leur permettant de se transcender. Il a jugé que de tels projets ne manquent pas actuellement, au niveau de l'Union européenne, mais aussi au niveau des 47 États de la grande Europe. Ces projets lui ont paru pouvoir porter sur des questions technologiques, pour exister face aux États-Unis et à la Chine, ou sur les défis de l'intelligence artificielle, des neuro-technologies et du réchauffement climatique, avec à chaque fois des solutions qui respectent les droits humains et la notion même d'être humain.

Il a conclu en souhaitant que la réflexion n'omette pas les projets, cette méthode ayant fait la preuve de son efficacité. Il a souligné que ce sont les projets, et seulement les projets communs, du Conseil de l'Europe avec la Russie, la Turquie et tous les États membres, qui permettront réellement de sortir de la crise actuelle.

M. Sylvain Waserman (Bas-Rhin - Mouvement Démocrate et apparentés) , constatant la crise politique et financière actuelle, a estimé que le statu quo conduirait directement le Conseil de l'Europe dans l'impasse. Il a remercié le rapporteur de proposer un cheminement possible, à un moment clé pour l'Organisation.

Considérant qu'il était tout aussi précieux de réaffirmer les valeurs et missions du Conseil de l'Europe que d'envisager des solutions concrètes, pragmatiques et nouvelles pour surmonter la crise, il s'est félicité de la possibilité d'un pouvoir d'initiative de l'APCE pour engager des démarches conjointes à l'encontre d'un État membre ayant manqué à ses obligations et s'écartant du contrat politique et éthique qui le lie aux autres États membres. Il a souligné à cet égard qu'un pouvoir d'initiative, pour une assemblée parlementaire, représentait un droit et un pouvoir d'influence nouveaux.

Il s'est déclaré rassuré par le fait que cette possibilité s'exerce sans préjudice des pouvoirs et des responsabilités existants, propres à chaque organe statutaire. Il y a vu le gage de davantage d'efficacité et de crédibilité, contrairement aux pistes envisagées par la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles en octobre 2018, relevant davantage du « bricolage ». Déclarant voter avec conviction les préconisations du rapporteur, il a fait valoir que la voix des parlementaires serait d'autant plus forte que leurs votes seraient unis et nombreux.

En conclusion, il a jugé que la situation de crise obligeait à la responsabilité et à un certain pragmatisme, donc au refus du statu quo et à une adhésion volontariste aux propositions du rapporteur.

M me Nicole Trisse (Moselle - La République en Marche), présidente de la délégation française, a observé que, depuis qu'elle siège à l'Assemblée parlementaire, c'est-à-dire depuis octobre 2017, elle n'avait jamais connu le Conseil de l'Europe autrement qu'en crise : une crise institutionnelle, doublée d'une crise morale et maintenant d'une crise budgétaire, qui posent clairement la question de l'avenir de l'Organisation. Elle a indiqué que, par conviction et dans un souci de responsabilité, elle s'était investie dans toutes les initiatives de l'APCE pour chercher les voies de sortie à une situation qui n'a que trop duré.

Rappelant que la commission ad hoc du Bureau, présidée par M. Nicoletti, avait dressé, dès juin 2018, des constats et tracé des pistes de travail, puis que la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, ainsi que celle des questions politiques et de la démocratie avaient été saisies des suites à y donner, elle s'est félicitée des propositions de solutions innovantes qui en avaient découlé et a félicité les rapporteurs à cet égard.

Jugeant que ce débat d'urgence n'était pas dicté par le désir de bâcler une sortie de crise pour un motif financier, mais reflétait plutôt une prise de conscience de l'urgence de la situation, elle a appelé à apporter des solutions pour éviter qu'une crise existentielle ne s'ajoute aux crises précédentes. Pour ce faire, elle a souhaité que les tensions bilatérales ne prennent pas le dessus sur les valeurs, les règles et les principes fondateurs du Conseil de l'Europe.

Après avoir indiqué qu'elle était scandalisée par le fait que la Russie ait violé le droit international en annexant illégalement la Crimée, elle s'est montrée tout aussi ferme dans sa résolution à préserver l'unité du formidable forum de dialogue paneuropéen que constitue le Conseil de l'Europe, estimant que l'un n'était pas exclusif de l'autre.

Elle a alors déclaré son adhésion complète au mécanisme prévu dans les projets de résolution et de recommandation en discussion, afin d'accomplir un premier pas, si important. Il lui a semblé qu'une procédure de réaction conjointe, susceptible d'être engagée à l'initiative de l'APCE, du Comité des Ministres ou du Secrétaire général, constituait la bonne formule dans la mesure où cette procédure ne modifiait en rien les pouvoirs respectifs des organes statutaires du Conseil de l'Europe, mais permettait au moins de dialoguer, même s'il ne s'agissait sans doute pas d'une solution miracle.

Considérant qu'il serait trompeur d'attribuer au Conseil de l'Europe une vocation qu'il n'a pas, car il n'est pas le Conseil de sécurité de l'ONU et il ne lui revient pas de faire respecter le droit international public, elle a estimé qu'il était en revanche de la responsabilité des membres de l'APCE de veiller à ce que l'ensemble des populations du continent européen puissent avoir accès aux conventions protégeant leurs droits, à commencer par la convention européenne des droits de l'Homme. Elle y a vu une bonne raison de voter les textes en discussion, lesquels constituaient à ses yeux une formidable opportunité de s'inscrire dans la fidélité aux engagements pris lors de l'adhésion au Conseil de l'Europe.

b) La modification de certaines dispositions du Règlement

Lors de sa séance du 11 avril 2019 au matin, l'APCE a débattu, sur le rapport de M. Egidijus Vareikis (Lituanie - PPE/DC), au nom de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, de la modification de certaines dispositions de son Règlement. Ce débat, d'une portée plus ciblée et limitée que celui qui s'était tenu en octobre 2018 au sujet des droits de vote et du processus décisionnel, s'est déroulé dans une atmosphère bien différente et, in fine , conclusive.

Après que l'Assemblée parlementaire eut rejeté la demande de renvoi en commission proposée par M. Martin Graf (Autriche - NI), le rapporteur a ouvert la discussion générale en indiquant que les modifications du Règlement de l'APCE proposées dans son rapport étaient essentiellement des précisions, des compléments et des révisions, afin que les règles de l'Assemblée parlementaire correspondent mieux à la pratique.

Il a rappelé que la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles avait été invitée à procéder à des changements règlementaires dans le cadre des suites à donner aux conclusions de la commission ad hoc du Bureau sur le rôle et la mission de l'Assemblée parlementaire, en 2018. Il a indiqué s'être attentivement penché sur les propositions formulées par les délégations nationales et les groupes politiques à cette occasion, même si toutes les propositions relatives à la contestation des pouvoirs, aux droits de représentation ou de participation, aux droits de vote des membres et aux procédures de vote avaient fait l'objet d'un travail séparé, examiné en octobre 2018 mais renvoyé à la commission par la plénière.

Détaillant le contenu de la réforme du Règlement proposée, il a indiqué qu'elle concernait les conditions de formation et de disparition des groupes politiques, les conditions de nomination des rapporteurs des commissions, le mandat de la commission sur l'élection des juges à la Cour européenne des droits de l'Homme et la procédure relative à l'élection des juges à cette même Cour, le statut du Président sortant de l'APCE, l'élection des Bureaux des commissions, la procédure d'examen des propositions de résolutions et de recommandations, l'organisation des débats en séance plénière, notamment sous l'angle du temps de parole et des questions aux orateurs invités.

Le rapporteur s'est plus particulièrement attardé sur deux points précis.

S'agissant, en premier lieu, des groupes politiques de l'Assemblée, et plus particulièrement des procédures relatives à leur formation et à leur dissolution, il a estimé que les débats ayant entouré la constitution et la reconnaissance, en septembre 2017, du groupe des Démocrates Libres et, aujourd'hui, la demande de reconnaissance du groupe des Nouveaux Démocrates Européens / Europe des Nations et des Libertés, avaient mis en lumière certaines lacunes du cadre juridique régissant ces acteurs essentiels de la procédure. Il a donc indiqué que la commission du Règlement proposait, en conséquence, d'ajouter un nouveau critère aux conditions de formation des groupes politiques, à savoir que tous les membres d'un même groupe doivent relever d'une identité politique commune. Il lui a paru essentiel que l'APCE puisse agir, débattre et décider sur la base des idées et positions exprimées par les représentants des grandes familles politiques européennes.

Il a donc précisé que tout nouveau groupe politique devra désormais déposer un programme, une charte ou une déclaration politique qui précise ses objectifs, ainsi que ses statuts ou son règlement intérieur, ceux-ci devant être conformes à la convention européenne des droits de l'Homme. Il a également détaillé les nouveaux seuils de membres et de nationalités exigés pour la constitution des groupes, ainsi que les modalités de disparition ou de dissolution introduites, avec leurs conséquences pratiques.

Pour ce qui concerne, en second lieu, le nombre de rapports dont peut être chargé un même membre de l'APCE, il a souligné que plusieurs délégations souhaitant favoriser une plus grande diversité de rapporteurs et l'implication d'un plus grand nombre de parlementaires dans la rédaction des rapports avaient proposé de plafonner le nombre de rapports confiés aux parlementaires.

Le rapporteur a conclu en indiquant que la réforme tendait aussi à mettre en oeuvre la résolution 2248 (2018) concernant la procédure d'élection des juges à la Cour européenne des droits de l'Homme, arguant que sur le principe la décision avait été prise par l'APCE en 2018.

M. Olivier Becht (Haut-Rhin - UDI, Agir et Indépendants) a trouvé parfaitement normal que l'Assemblée parlementaire puisse toiletter son Règlement et l'adapter au fil du temps. Il a déclaré partager les préoccupations concernant le nombre de membres nécessaires pour former un groupe politique, estimant un seuil nominal plus adapté qu'un pourcentage.

Il a ensuite souhaité appeler l'attention du rapporteur sur la rédaction des dispositions concernant le vote des membres de la commission sur l'élection des juges, lorsqu'ils ont la nationalité des candidats auditionnés. Comprenant l'objet de cette mesure, visant à éviter un possible conflit d'intérêts lié à la nationalité des personnes auditionnées pour devenir juges à la Cour de Strasbourg, il a souligné que la rédaction proposée n'empêchait pas les membres de la commission originaires du pays dont la liste est examinée d'exprimer leurs préférences en commission, ce qui constituait une situation hybride.

Après avoir indiqué qu'il avait lui-même été magistrat pendant plusieurs années, il a précisé qu'au sein des juridictions françaises, en cas de soupçon de conflit d'intérêts, les personnes concernées ne participent pas aux délibérations sur les dossiers examinés. Faisant le parallèle, il a observé que, dans le dispositif soumis à l'approbation de l'Assemblée parlementaire, les membres de la commission originaires du pays dont la liste est examinée peuvent participer à la discussion, donner leurs préférences et influencer les autres membres de la commission ; ils sont donc simplement empêchés de voter, ce qui manque de cohérence.

Il a donc qualifié cette règle de doublement dérangeante, non pas seulement pour la commission, mais également pour l'APCE, puisque le texte retire à ces membres le droit de voter au sein de la commission, mais maintient leur droit de vote en séance plénière. Il a appelé l'Assemblée parlementaire à préciser la règle pour ainsi pleinement éviter les conflits d'intérêts.

3. L'élection des juges de Malte et de la Turquie à la Cour européenne des droits de l'Homme

Au cours de cette session de printemps, l'Assemblée parlementaire était appelée à élire un juge à la Cour européenne des droits de l'Homme au titre de Malte et un autre au titre de la Turquie.

Le mardi 9 avril 2019, les membres de l'APCE ont voté à scrutin secret, le résultat de leurs votes conduisant à :

- s'agissant de Malte, 89 voix pour M me Lorraine Schembri Orland, cette dernière étant ainsi élue juge à la Cour européenne des droits de l'Homme à la majorité absolue des suffrages exprimés, M me Abigail Lofaro recueillant 64 voix et M me Victoria Buttigieg 21 voix ;

- pour ce qui concerne la Turquie, 111 voix pour M me Saadet Yüksel, cette dernière devenant ainsi juge à la Cour européenne des droits de l'Homme à la majorité absolue des votes exprimés, 48 voix se portant sur M. Necati Polat et 17 voix sur M me Esra Gül Dardaðan Kibar.

L'élection de la juge turque à la Cour européenne des droits de l'Homme, lors de cette session de printemps, est intervenue après trois procédures restées antérieurement infructueuses.

4. La remise du Prix du Musée de l'Europe et du Prix de l'Europe

Comme chaque année, deux récompenses symboliques ont été décernées lors de la session de printemps de l'Assemblée parlementaire.

a) Le Prix du Musée de l'Europe

Le Prix du Musée de l'Europe est attribué chaque année depuis 1977 par l'APCE. Il a pour but d'encourager la contribution des musées à une meilleure compréhension de la riche diversité de la culture européenne. Il est décerné par la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias sur la base de recommandations formulées par le Forum européen du musée.

L'établissement lauréat reçoit, lors de la session de printemps de l'APCE, une statuette en bronze de Joan Miró, qu'il conserve durant un an, ainsi qu'un diplôme. Les précédents récipiendaires de cette distinction étaient le musée sur l'enfance en temps de guerre de Sarajevo, en Bosnie-Herzégovine (2018), le Centre caribéen d'expressions et de mémoire de la traite et de l'esclavage de Guadeloupe, en France (2017), et le Centre européen de la solidarité de Gdansk, en Pologne (2016).

L'édition 2019 du Prix du Musée du Conseil de l'Europe a été attribuée au Musée de la communication de Berne, en Suisse. Cet établissement a été jugé extrêmement interactif, multi-sensoriel, participatif, accessible, ludique, ouvert et démocratique. Il est conçu comme un lieu d'expérimentation concernant les interactions, les relations et les processus sociaux. Il traite en outre de questions émergentes liées à la communication d'aujourd'hui, telles que la valeur de la vérité, l'impact du mensonge, le respect de la vie privée, le piratage de données confidentielles, la compréhension et la communication - ou leur absence - dans une société de diversité culturelle, ainsi que de la question de la mémoire.

La cérémonie de remise du Prix du Musée 2019 s'est déroulée le 9 avril, à l'Hôtel de Ville de Strasbourg.

b) Le Prix de l'Europe

Au cours de la partie de session de printemps, l'Assemblée parlementaire a aussi attribué le prix de l'Europe 2019. Créé par l'APCE en 1955, il s'agit de la plus haute distinction qui puisse être décernée à une ville européenne pour ses actions dans le domaine européen (jumelages, manifestations, échanges, etc.). Ce Prix est constitué d'un trophée itinérant, d'une médaille, d'un diplôme et d'une bourse pour un voyage d'études auprès des institutions européennes de jeunes de la commune lauréate.

La sous-commission du Prix de l'Europe est chargée d'examiner les candidatures pour les quatre distinctions (Prix de l'Europe, Plaquette d'honneur, Drapeau d'honneur et Diplôme européen) et elle soumet ses choix à la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable pour approbation.

La plus haute distinction du Prix, octroyée chaque année par l'Assemblée parlementaire pour récompenser la municipalité qui assure de manière particulièrement active la promotion de l'idéal européen, a été attribuée cette année à la ville de Donostia / San Sebastián, en Espagne 2 ( * ) . Le chef-lieu administratif du Gipuzkoa, l'un des trois territoires de la Communauté autonome du Pays basque en Espagne, compte six jumelages officiels avec Wiesbaden (Allemagne), Trente (Italie), Plymouth (Royaume-Uni), Reno (États-Unis), Daira De Bojador (Maroc) et Marugame (Japon). D'autre part, le service de l'éducation et de la promotion sociale de la municipalité organise de nombreux échanges de jeunes entre les écoles de la ville et des établissements scolaires d'autres villes européennes.

Lors de cette remise de Prix par l'APCE, sept Plaquettes d'honneur, sept Drapeaux d'honneur et huit Diplômes européens ont également été décernés. Plusieurs villes françaises ont été distinguées à cette occasion : en effet, la Plaquette d'honneur a été attribuée à Meudon et Suresnes, tandis que le Drapeau d'honneur l'a été à Angers.


* 2 Cinq autres villes, à savoir Bamberg en Allemagne, Boleslawiec en Pologne, Issy-les-Moulineaux en France, Izmir en Turquie et Münster en Allemagne avaient aussi été présélectionnées, et elles ont été félicitées pour leurs réalisations.

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