TROISIÈME PARTIE -
EXAMEN EN COMMISSION

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MERCREDI 29 AVRIL 2020

M. Philippe Bas , président . - Chaque année, les commissions permanentes sont appelées à dresser le bilan de l'application des lois dont elles ont été saisies au cours de la précédente session. L'examen de ce rapport peut sembler quelque peu décalé par rapport à l'actualité, mais, aussi prégnante que soit la crise, nous nous devons de poursuivre l'accomplissement de nos missions.

En particulier, la vérification approfondie de l'adéquation entre les lois votées et les mesures d'application que le Gouvernement a l'obligation de prendre est une dimension importante de notre mission de contrôle de l'action du Gouvernement.

Au cours de la session 2018-2019, 19 textes ont été examinés au fond par notre commission, soit environ 40 % des lois promulguées.

Le moins que l'on puisse attendre du Gouvernement, qui nous presse en appliquant la procédure accélérée dans une grande majorité de cas, est qu'il prenne lui-même les mesures réglementaires d'application dans des délais courts.

Sur ces 19 lois, 12 ont été d'initiative parlementaire, soit 63 % : il s'agit de la proportion la plus élevée depuis la révision constitutionnelle de 2008 ! Gardons toutefois à l'esprit que le recours à des textes déposés par la majorité de l'Assemblée nationale constitue parfois une commodité d'action législative que le Gouvernement s'octroie.

Il est particulièrement remarquable que la majorité de ces textes d'initiative parlementaire - 7 sur 12 - ait émané du Sénat, alors même que le nombre de textes déposés par nos collègues est très nettement inférieur à celui des propositions de loi présentées par les députés - 162 pour le Sénat contre 429 pour l'Assemblée nationale lors de l'exercice 2018-2019. Les propositions de loi déposées au Sénat ont donc eu une propension plus forte à atteindre le terme du processus législatif. Par comparaison, lors de la session 2017-2018, un seul texte d'initiative sénatoriale avait été adopté.

Reste que cette évolution favorable ne doit pas occulter un autre phénomène : l'explosion du nombre de mesures adoptées par voie d'ordonnances. Dans l'ensemble, malgré le recul partiel du Gouvernement dans la détermination de l'ordre du jour législatif des assemblées, nous n'assistons pas à un renforcement global du Parlement.

Au 31 mars dernier, 15 lois sur 19 étaient entièrement applicables, 14 étant d'application directe, la loi restante ayant reçu toutes les mesures d'application nécessaires. Des mesures réglementaires sont encore à prendre pour quatre textes.

Il apparaît que le niveau d'activité de notre commission n'a pas faibli au cours de la session 2018-2019 : nous avons examiné 38 textes au fond, en plus de tous nos travaux de contrôle, parfois très lourds à l'instar de ceux qui sont menés en ce moment.

Alors que le taux d'application des lois examinées par notre commission avait atteint 91 % pour la session 2017-2018, je regrette de constater qu'il tombe cette année à 50 % : sur 205 mesures d'application requises, 104 sont toujours attendues, ce qui n'est pas satisfaisant. Dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, le Gouvernement a pris en trois semaines nombre d'ordonnances, de décrets et d'arrêtés : preuve que, lorsqu'il s'en donne la peine, il peut agir vite... Il faudrait que cette mobilisation s'étende au-delà de l'état d'urgence.

Enfin, l'inflation législative est restée forte, puisque les 19 lois dont nous avons été saisis totalisent 332 articles, quand elles n'en comportaient que 218 en début de navette, soit un coefficient multiplicateur de 1,53. Cela n'est pas un problème en soi, mais certains textes ont enflé dans des proportions plus importantes encore : c'est le cas de la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, passée de 57 à 110 articles en cours de discussion législative.

Avant de conclure, je tiens à insister sur quatre mesures d'application très importantes qui n'ont pas été prises à ce jour : celle relative à la titularisation des apprentis en situation de handicap, sur laquelle notre collègue Catherine Di Folco a attiré l'attention de M. Olivier Dussopt la semaine dernière, quand nous l'avons auditionné ; le décret sur le recours ponctuel au télétravail dans la fonction publique, que le contexte sanitaire rend manifestement prioritaire ; l'allégement de la formation initiale des policiers municipaux ayant déjà été policiers ou gendarmes ; enfin, la mise en oeuvre de l' open data des décisions de justice, dont la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice ne fait que redéfinir le cadre juridique existant depuis trois ans, mais qui n'a jamais été mis en oeuvre faute de parution des textes réglementaires requis.

Mes chers collègues, en l'absence d'opposition de votre part, je considère que vous m'autorisez à transmettre ce bilan à notre collègue Valérie Létard, vice-présidente du Sénat, pour qu'il soit réuni aux rapports des autres commissions.

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