C. L'ADAPTATION DU CADRE RÈGLEMENTAIRE POUR UNE MEILLEURE RÉACTIVITÉ SANITAIRE

La Commission européenne a utilisé les possibilités offertes par la législation de l'Union pour permettre une réponse plus rapide et plus efficace face à la crise.

1. L'assouplissement des règles de concurrence
a) Les aides d'État

Les règles régissant la concurrence et les aides d'État ont été assouplies, sur la base de l'article 107, paragraphe 3, point b du TFUE.

Dans une communication du 19 mars 2020 22 ( * ) complétée le 3 avril et le 8 mai 2020, la Commission européenne a présenté les assouplissements temporaires des conditions dans lesquelles les États membres peuvent soutenir leurs entreprises nationales. Cette aide peut notamment prendre la forme de subventions directes, de garanties sur les prêts contractés par des entreprises auprès d'une banque, d'avances remboursables et d'avantages fiscaux. De nombreux États membres ont saisi cette opportunité pour soutenir la recherche privée contre le coronavirus. Ainsi, la France a présenté un programme-cadre d'un montant de 7 milliards d'euros, éventuellement cofinancé par les fonds structurels européens, attribués sous forme de subventions directes, d'avances remboursables et d'avantages fiscaux.

b) Les ententes

La Commission a publié, le 8 avril dernier, une communication présentant le cadre temporaire pour l'appréciation des politiques anticoncurrentielles 23 ( * ) dans les coopérations mises en place entre les entreprises pour réagir aux situations d'urgence découlant de la pandémie de COVID-19.

Cette communication s'appuie sur l'article 101 du TFUE et contient les critères de priorisation et d'évaluation de certaines coopérations nécessaires et mises sur pied dans l'urgence. Il ne s'agit pas d'un assouplissement des règles de concurrence en matière d'ententes mais d'un guide destiné aux entreprises voulant se coordonner rapidement pour atténuer les effets de la crise, en augmentant la production ou en adaptant celle-ci, par exemple en réaffectant des stocks ou en reconvertissant des chaînes de production, sans risque de poursuites. Cette communication instaure également la pratique des lettres administratives de compatibilité pour garantir la sécurité juridique des entreprises.

Plus spécifiquement, dans le secteur de la santé, le 8 avril dernier, la Commission a délivré une première lettre administrative de compatibilité à l'association « Medicines for Europe », regroupant plusieurs entreprises spécialisées dans la production de médicaments génériques et biosimilaires. La demande portait sur un projet de coopération entre producteurs pharmaceutiques visant à remédier au risque, grave et imminent, de pénurie de médicaments hospitaliers critiques pour le traitement des patients en soins intensifs atteints du coronavirus. La Commission européenne, en période de pandémie, a considéré que cette coopération temporaire apparaissait justifiée au regard des règles de concurrence de l'Union européenne.

2. Une facilitation de la mobilité des patients et des professionnels de santé

La Commission a préconisé aux États membres une interprétation souple des dispositions relatives à la libre circulation des patients et des professionnels de santé.

Concernant le premier point, la Commission a publié le 3 avril dernier une communication précisant les modalités de la coopération transfrontière pour la prise en charge de patients atteints de la COVID-19. Elle préconise tout d'abord aux États membres un assouplissement des mesures prévues par la directive 2011/24/UE relative à l'application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers. Si la directive prévoit qu'une autorisation délivrée par le pays d'origine est obligatoire pour garantir la prise en charge des soins effectués dans un autre État membre, la Commission recommande une approche pragmatique de cette disposition pour tenir compte notamment de l'urgence à soigner les patients atteints de la COVID-19.

Durant la pandémie, 130 patients français ont, par exemple, été transférés en Allemagne en soins intensifs. L'Allemagne a accepté de prendre en charge le coût des soins intensifs pour les patients d'autres pays européens qui ne pouvaient être traités dans leurs pays d'origine en raison du manque de place.

De plus, dans sa communication du 30 mars 2020 24 ( * ) , la Commission préconise un assouplissement des mesures administratives pour faciliter la mobilité des professionnels de santé au sein de l'Union européenne. Le 7 avril, une équipe composée de médecins et d'infirmiers roumains et norvégiens - la Norvège étant membre de l'Espace économique européen - a été envoyée à Milan et à Bergame pour soutenir les équipes médicales sur place, dans le cadre du mécanisme européen de protection civile. En outre, malgré les restrictions et contrôles aux frontières, les personnels soignants ont pu continuer à circuler d'un État membre à l'autre. Ce fut le cas entre l'Allemagne et la France, mais aussi entre la Belgique et la France.

3. Une facilitation des essais cliniques et de la mise à disposition de traitements

La Commission européenne a publié, mardi 28 avril, une communication 25 ( * ) présentant ses recommandations pour garantir les conditions de sécurité dans lesquelles se déroulent les essais cliniques. Elle recommande notamment la vérification à distance des données sources pour faciliter l'autorisation de mise sur le marché de médicaments contre le coronavirus, ce qui a permis de contourner les difficultés pour se rendre dans les hôpitaux.

La Commission a également présenté, le 19 juin dernier, une proposition de règlement 26 ( * ) relatif à la conduite d'essais cliniques réalisés avec des médicaments contenant des organismes génétiquement modifiés ou consistant en de tels organismes et destinés à traiter ou prévenir la COVID-19. La législation de l'Union européenne sur les OGM comprend la directive 2009/41/CE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés et la directive 2001/18/CE relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement.

En effet, certains des vaccins en cours de développement contre la COVID-19 reposent sur des virus génétiquement modifiés et sont susceptibles de relever de la définition des OGM. La législation de l'Union européenne sur les essais cliniques est sans préjudice des deux directives mentionnées ci-dessus. Or, les délais nécessaires pour la mise en conformité des essais en cours avec ces deux directives peut prendre beaucoup de temps. Dès lors, la Commission a souhaité que les essais cliniques liés à la COVID-19 puissent se poursuivre sans tenir compte des dispositions des deux directives relatives aux OGM, tant que la pandémie durera.

Par ailleurs, la Commission a reporté d'un an l'entrée en vigueur du règlement (UE) n° 2017/745 relatif aux dispositifs médicaux 27 ( * ) pour permettre aux entreprises de s'adapter à la nouvelle réglementation. En effet, ce règlement devait entrer en vigueur le 20 mai 2020. La Commission souhaite ainsi éviter toute pénurie sur le marché, dans un contexte marqué par la pandémie.

Enfin, la Commission a accordé une autorisation conditionnelle de mise sur le marché du Remdésivir pour une durée d'un an.


* 22 https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52020XC0320(03)&from=FR

* 23 https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52020XC0408(04)&from=en

* 24 https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52020XC0330(03)&from=EN

* 25 https://ec.europa.eu/health/sites/health/files/files/eudralex/vol-10/guidanceclinicaltrials_covid19_en.pdf

* 26 https://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2020:0261:FIN:FR:PDF

* 27 http://www.senat.fr/europe/textes_europeens/e14731.pdf

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