Rapport d'information n° 692 (2020-2021) de M. Roger KAROUTCHI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 16 juin 2021

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N° 692

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 juin 2021

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur les aides à la presse écrite ,

Par M. Roger KAROUTCHI,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal , président ; M. Jean-François Husson , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet , vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel , secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Mme Nadine Bellurot, M. Christian Bilhac, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel .

AVANT PROPOS

En application de l'article 58-2 de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001, la commission des finances du Sénat avait sollicité la Cour des comptes en novembre 2012 afin qu'elle effectue une enquête sur les aides à la presse. Les conclusions de celle-ci, circonscrites à la presse écrite, avaient été rendues publiques en juillet 2013. Le document ciblait plusieurs difficultés :

- un risque d'effet d'aubaine ;

- une dépendance des éditeurs à ces subventions ;

- l'absence d'incitation à des choix économiques rationnels dans un contexte de développement de nouvelles habitudes de lecture, désormais tournées vers le numérique ;

- une certaine opacité quant aux montants accordés et aux bénéficiaires de ces différents dispositifs.

Relayant ce constat, la commission des finances avait adopté un rapport présentant plusieurs pistes d'amélioration 1 ( * ) dont :

- un encouragement à la transition du postage vers le portage au travers d'un rééquilibrage des tarifs de ces deux modes de distribution, favorisé par une baisse de l'aide au transport postal ;

- une amélioration de la gouvernance des aides via la communication du montant annuel des aides accordées à chaque titre de presse et un approfondissement de la contractualisation avec les entreprises bénéficiant de subventions.

Les observations de la Cour des comptes et de la commission des finances du Sénat n'ont été que faiblement suivies par le Gouvernement . Seule une réforme de l'aide au portage a été réellement mise en oeuvre, sans pour autant régler la question du coût exorbitant de l'aide au transport postal ( cf infra ). La structure même du régime des aides n'a été que peu bouleversée afin de tenir compte des nouvelles modalités d'accès à la presse.

L'examen du régime des aides fait donc toujours apparaître un ensemble disparate de dispositifs, dont certains semblent dépassés ou trop faiblement dotés pour être réellement efficaces. L'intervention de l'État reste également éclatée au sein de plusieurs programmes, affaiblissant la lisibilité de son action.

C'est à l'aune de ce constat, établi à l'occasion de l'examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » en loi de finances et en loi de règlement et dans un contexte marqué par la faillite de la société de distribution Presstalis, que le rapporteur spécial a souhaité effectuer une mission de contrôle budgétaire sur ce sujet, afin de cibler les faiblesses du régime actuel et de tracer des perspectives pour sa modernisation, en vue de mieux prendre en compte la mutation des habitudes de lecture, exacerbée par la crise sanitaire.

L'ESSENTIEL

L'examen du régime des aides à la presse écrite fait apparaître un ensemble disparate de dispositifs, dont certains semblent dépassés ou trop faiblement dotés pour être réellement efficaces. L'intervention de l'État reste également éclatée au sein de plusieurs programmes, affaiblissant la lisibilité de son action.

C'est à l'aune de ce constat, établi à l'occasion de l'examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » en loi de finances et en loi de règlement et dans un contexte marqué par la faillite de la société de distribution Presstalis, que le rapporteur spécial a souhaité effectuer une mission de contrôle budgétaire sur ce sujet, afin de cibler les faiblesses du régime actuel et tracer des perspectives pour sa modernisation, en vue de mieux prendre en compte la mutation des habitudes de lecture, exacerbée par la crise sanitaire.

I. DES AIDES BUDGÉTAIRES ET FISCALES DÉDIÉES À L'ENSEMBLE DE LA FILIÈRE

A. UNE DISPERSION DES AIDES BUDGÉTAIRES

Profondément révisé à partir de 2012, le régime des aides à la presse est désormais structuré autour de trois types de subventions :

- les aides à la diffusion ;

- les aides au pluralisme ;

- les aides à la modernisation.

- Le dispositif est censé couvrir l'ensemble de la filière, de l'éditeur au point de vente.

L'action 02 du programme 180 « Médias » de la mission « Médias, livre et industries culturelles » concentre les crédits dédiés au financement de ces dispositifs. 118,1 millions d'euros (AE=CP) sont ainsi prévus en loi de finances pour 2021.

Répartition des crédits de paiement par sous-action
au sein de l'action 02 « Aides à la presse » en loi de finances pour 2021

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Le montant inscrit au sein du programme 180 ne résume pas, pour autant, les crédits budgétaires dédiés au secteur de la presse écrite. Le programme 134 « Développement des entreprises et régulations » de la mission « Économie » vient, en effet, compléter le programme 180 en intégrant la compensation versée à La Poste pour sa mission de distribution de la presse (87,8 millions d'euros prévus en AE et en CP en loi de finances pour 2021), qui est considérée comme une aide indirecte à la presse.

Le fonds de garantie de l'Institut de financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) est, par ailleurs, ouvert aux diffuseurs de presse, aux éditeurs de titres d'information politique et générale (IPG) ou éligibles au Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) ainsi qu'aux éditeurs de presse culturelle. Il permet d'apporter une garantie de l'État aux emprunts contractés par ces entreprises. Cette garantie est en général de 50 % du montant du crédit , dans la limite d'une part en risque de l'IFCIC de 1 million d'euros.

B. TROIS TYPES DE SUBVENTIONS DISTRIBUÉES À UN NOMBRE CROISSANT D'ACTEURS

Les aides versées à la presse écrite répondent à deux principes :

- la conditionnalité : les éditeurs sont tenus de signer une convention-cadre avec l'État dès lors que le montant des aides perçues dépasse 1 million d'euros ou plus de 20 % du chiffre d'affaires du titre. Cette obligation n'est aujourd'hui qu'imparfaitement respectée, sur les 38 titres concernés, seuls 22 ont signé ce document ;

- le plafonnement par titre de presse.

1. Les aides à la diffusion

Les aides à la diffusion - 39,4 millions d'euros en AE et en CP prévus en loi de finances pour 2021 - regroupent deux dispositifs :

- une aide au portage ;

- une compensation de la réduction des cotisations sociales portant sur les rémunérations des vendeurs-colporteurs de presse et des porteurs salariés.

L'aide au portage représente 67,3 % des crédits dédiés aux aides à la diffusion prévus en loi de finances pour 2021.

765,15 millions d'exemplaires ont été portés en 2019 au titre de la presse d'information politique et générale. Le taux de portage, soit le nombre de titres portés par rapport au total des abonnements s'établissait à 78,16 %.

2. Les aides au pluralisme

Les aides au pluralisme - 23,2 millions d'euros en AE et en CP prévus en loi de finances pour 2021 - recouvrent trois types de subventions :

- l'aide aux publications nationales d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires ;

- l'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces (QFRPA) ;

- l'aide au pluralisme de la presse périodique régionale et locale (PPR).

Deux nouveaux dispositifs ont, par ailleurs, été adoptés en loi de finances pour 2021.

Le premier vise, sous la forme d'une aide, les titres ultramarins, afin de tenir compte de leurs difficultés et de leurs spécificités. L'éloignement de la métropole et l'insularité (coûts et délais d'acheminement supplémentaires) comme les facteurs démographiques, sociaux et économiques propres à ces territoires constituent autant de fragilités pour ce secteur.

Le second consiste en une aide spécifique aux services de presse en ligne (SPEL) afin de garantir la coexistence de plusieurs stratégies associant presse imprimée, bi-médias et « tout-en-ligne », et maintenir ainsi la diversité des supports, condition indispensable du pluralisme de la presse. 4 millions d'euros sont ainsi prévus.

3. Les aides à la modernisation

Les aides à la modernisation - 55,5 millions d'euros en AE et CP prévus en loi de finances pour 2021 - couvrent un champ assez large :

- l'aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information politique et générale ;

- l'aide à la modernisation de la distribution de la presse ;

- l'aide à la modernisation des diffuseurs de presse ;

- le fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) ;

- le fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse (FSEIP).

L'aide à la modernisation de la distribution de la presse -27,8 millions d'euros, soit plus de 50 % des aides à la modernisation - était fléchée jusqu'en 2020 vers Presstalis , l'une des deux sociétés commerciales de messagerie de presse, en charge pour le compte des éditeurs des missions logistiques (réception, répartition, traitement, livraison), commerciales (conseil et assistance à la distribution de titres, suivi du réseau des agents de la vente, collecte des données de ventes) et financière. France Messagerie qui lui a succédé après sa liquidation judiciaire en juillet 2020 recueille désormais ces fonds. Presstalis bénéficiait également d'un redéploiement de crédits de 9 millions d'euros en provenance du FSDP.

4. Le cas de la presse en ligne

Les règles en matière d'aide n'établissent aucune différence de traitement entre les SPEL, selon qu'ils sont ou non tout en ligne, dès lors qu'ils sont reconnus par la commission paritaire des publications et agences de presse. 1 142 services de presse en ligne sont aujourd'hui reconnus.

L'amélioration de la prise en compte des SPEL au sein de la loi de finances pour 2021 peut apparaître tout aussi tardive qu' insuffisante . Les montants dédiés au titre de cette nouvelle aide ne représentent même pas 10 % des aides à la presse contenues au sein du programme 180, qui semble principalement orienté vers un soutien à la presse papier , dont l'avenir reste incertain. La proportion des aides accordées aux SPEL ne reflète pas, enfin, le rapport SPEL / titres imprimés. Il existait 1 SPEL pour 37 titres imprimés en 2010. Ce ratio est passé à 1 SPEL pour 7 titres imprimés en 2017. Elle rend de fait inefficient le principe de neutralité des supports de diffusion dans l'attribution des fonds.

415 entités ont bénéficié en 2019 du régime des aides à la presse, qu'il s'agisse d'aides directes ou à des tiers (modernisation et distribution), pour un montant de 77,4 millions d'euros.

Nombre de bénéficiaires des aides à la presse et montants versés
entre 2011 et 2019

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

C. UNE DÉPENSE FISCALE AUX EFFETS INCERTAINS

La loi de finances pour 2021 prévoit également une dépense fiscale en faveur de la presse de l'ordre de 161 millions d'euros. Ce montant n'intègre pas la totalité des dispositifs mis en oeuvre : amendement « Charb », dispositifs adoptés en loi de finances rectificative pour 2020 et loi de finances pour 2021.

La dépense fiscale prend la forme d'exonération ou de réduction de certaines taxes (TVA, contribution économique territoriale), d'abattements pour certaines professions (journalistes, colporteurs) et de crédits d'impôt en faveur des particuliers (souscription au capital, premier abonnement, mécénat) et des entreprises (régime spécial de provisions réglementées pour l'investissement - PPI - et souscription au capital).

Ces mesures fiscales sont, en dépit des réserves régulièrement exprimées par la commission des finances du Sénat ou la Cour des comptes sur leur efficacité, régulièrement prorogées voire développées, à l'instar du crédit d'impôt pour un premier abonnement adopté en troisième loi de finances rectificative pour 2020.

II. UNE DOUBLE CRISE QUI INCITE À UNE RÉVISION EN PROFONDEUR DU RÉGIME DES AIDES À LA PRESSE ÉCRITE

Hors dépenses fiscales, les aides à la presse représentaient, avant la mise en place de nouveaux dispositifs dans le cadre du Plan de relance, 21,4 % du chiffre d'affaires du secteur, soit une progression de 6 points sur les dix dernières années.

Il y a lieu de s'interroger dans ces conditions tant sur le risque qu'une telle dépendance aux fonds publics peut faire peser sur l'indépendance de la presse que sur la pertinence des dispositifs mis en place. Ceux-ci permettent, en effet, de maintenir sous perfusion un secteur sans l'inciter réellement à mener à bien les choix industriels nécessaires en vue de s'adapter aux nouvelles habitudes de lecture. Un changement de philosophie apparaît indispensable, la crise sanitaire ayant manifestement accéléré une mutation du lectorat.

L'absence d'évolution majeure du régime des aides à la presse conduit en effet inévitablement à la transformation de celui-ci en un mécanisme de rente.

A. LA CRISE SANITAIRE EST VENUE EXACERBER LES DIFFICULTÉS STRUCTURELLES D'UN SECTEUR DÉJÀ FRAGILISÉ PAR L'EFFONDREMENT DE PRESSTALIS

En dépit de la progression des téléchargements, la crise sanitaire est venue exacerber les difficultés rencontrées par le secteur qui se résument principalement à une chute des ventes et à une attrition concomitante des recettes publicitaires.

Répartition du chiffre d'affaires des titres de presse écrite selon les recettes
(1988-2018)

(en pourcentage)

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

La diffusion de l'ensemble des titres de presse, qui était stabilisée autour de 7 milliards d'exemplaires pendant près de vingt ans connaît une forte érosion depuis 2009. Celle-ci est liée en grande partie à la chute de la diffusion de la presse gratuite d'annonces. Il n'en demeure pas moins que tous les types de presse sont concernés. Ainsi en 2018, la diffusion de l'ensemble des titres de presse s'établissait à 3,2 milliards d'exemplaires, soit une baisse de 43,5 % depuis 2009. Entre 2009 et 2018, la plupart des acteurs ont connu une baisse de leur diffusion de 50 %, la presse locale d'information enregistrant une moindre baisse, établie à environ 30 %.

Indice de diffusion de la presse écrite d'IPG nationale et locale
(quotidiens payants et gratuits et magazines hebdomadaires)

(Base 100 en 2007)

2018

2019

2020 (prévision actualisée)

2021 (prévision)

2023 (cible)

72,5

70

64,9

63,2

59,9

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

1. L'impact majeur de la crise sanitaire

La perte de chiffre d'affaires pour l'ensemble du secteur est estimée, par le ministère de la culture, à 1,9 milliard d'euros en 2020, soit une chute de 16 % par rapport à 2019. Circonscrite aux éditeurs de journaux, la perte atteint 559 millions d'euros par rapport à 2019 (- 15 %), les éditeurs de revue et de périodiques enregistrant un recul de 728 millions d'euros (- 16 %).

La presse papier a, dans ce contexte, perdu 23,7 % de ses recettes publicitaires par rapport à 2019, celles-ci dépassant à peine 1,5 milliard d'euros.

Les recettes sont cependant restées stables en ligne, même si des situations contrastées ont pu être observées selon la part de publicité programmatique et l'évolution des audiences de chacun des éditeurs. Reste que ces revenus supplémentaires ne couvrent que 5 % des pertes liées à la baisse de la publicité imprimée.

L'activité presse moyenne d'un magasin spécialisé indépendant a de son côté baissé de 4,2 % par rapport à 2019. L'exercice 2020 a par ailleurs été marqué par la suppression de 1 068 points de vente, soit 4,9 % du total.

Impact de la crise sanitaire sur différents indicateurs en 2020

(en %)

Source : commission des finances du Sénat

2. L'impact budgétaire de la liquidation judiciaire de Presstalis et son remplacement par France Messagerie

L'année 2020 a également été marquée par la liquidation de Presstalis. Son remplacement par France messagerie résout une difficulté conjoncturelle majeure mais ne règle pas définitivement la question de la distribution.

Au-delà des incidences sur le fonctionnement normal du marché, l'effondrement de Presstalis a également un coût budgétaire majeur. En effet, en additionnant les abandons de créances aux crédits accordés en loi de finances initiale puis dans le cadre du troisième collectif budgétaire, l'aide de l'État accordée en vue de la liquidation de Presstalis et du lancement de France Messagerie s'est élevée à 300,58 millions d'euros en 2020.

Crédits dédiés à l'accompagnement de liquidation de Presstalis
et son remplacement par France Messagerie

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La situation du nouvel opérateur apparaît cependant toujours aussi fragile, dépendante de nombreux aléas, qu'il s'agisse des restrictions d'activité liées aux mesures sanitaires ou, plus structurellement, à l'attrition du nombre de lecteurs de journaux papiers.

B. LA RÉVISION DE LA LOI « BICHET » DOIT DÉSORMAIS ÊTRE COMPLÉTÉE PAR UNE RÉVISION DU RÉGIME DES AIDES À LA PRESSE

La loi du 18 octobre 2019 relative à la modernisation de la distribution de la presse est venue modifier en profondeur la loi du 2 avril 1947 relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques (dite « loi Bichet »). Elle révise en premier lieu la régulation du secteur, désormais confiée à l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP).

1. Quel avenir pour la distribution postale de la presse ?

Une évaluation sur le long terme permet de constater une diminution de la part des ventes de titres de presse en magasin au profit de la diffusion postale et du portage. En 2018, plus de 6 000 publications, soit la quasi-totalité des titres inscrits sur les registres de la commission paritaire des publications et des agences de presse (CPPAP), ont été distribuées par La Poste. 887 millions d'exemplaires de journaux et magazines ont été ainsi diffusés en 2019. Il s'agit là du principal canal de diffusion de la presse abonnée.

Les journaux et écrits périodiques ont la possibilité de bénéficier de tarifs préférentiels auprès de La Poste. L'État verse chaque année à La Poste une compensation pour financer le transport postal. Il convient, à ce stade, de relever que de 2009 à 2020, l'État a réduit de plus de 62 % sa contribution. Cette baisse substantielle reste difficilement amortissable. Le coût net de la mission de service public pour La Poste s'est ainsi élevé à 186 millions d'euros en 2019. Ce déficit, constitue, de fait, une aide supplémentaire à la presse.

Au-delà de la question du coût, trois éléments incitent aujourd'hui à une révision de ce soutien :

- une attrition des volumes de presse postés (- 35 % entre 2013 et 2018). Les projections indiquent, par ailleurs, que les volumes de presse postés devraient être divisés par 2,5 d'ici six ans, pour descendre à 300 millions d'exemplaires en 2026, ce qui induit un changement de modèle ;

- une baisse concomitante de la qualité du transport postal , relevé notamment par les éditeurs;

- une inadaptation plus globale de la distribution postale des quotidiens qu'il s'agisse du coût de cette distribution, de son impact écologique voire de son sens à l'heure du numérique.

Réunie à la demande du ministère de la culture, la mission Giannesini propose aujourd'hui de réviser à la hausse la grille tarifaire de La Poste et d'améliorer dans le même temps le soutien aux éditeurs en faveur du transport postal tout en favorisant l'ouverture des réseaux de portage et l'intérêt des éditeurs pour ces structures. Cette réforme apparaît tout aussi nécessaire que couteuse (40 millions d'euros la première année).

2. La nécessité de mettre en oeuvre une aide unique, destinée à accompagner les stratégies industrielles des titres

La distribution ne peut constituer le seul biais en vue d'une réforme des aides à la presse écrite. L'ajustement des tarifs postaux ne saurait, en effet, occulter une réflexion plus poussée sur la corrélation entre la nature des aides et leur modalités d'attribution d'un côté et les défis posés en termes industriels par la mutation de l'accès à l'information et les conséquences de celle-ci sur la vie de titres de presse de l'autre.

La grille d'analyse sous-jacente à la maquette budgétaire tend en effet à souligner une inadéquation entre les enjeux actuels et les réponses, pour parties dépassées qui y sont apportées au plan financier. L'aide à la presse doit désormais être conçue comme une aide à l'investissement et non plus comme un soutien à des titres fragiles, n'ayant pas pu ou su procéder à une révision de leurs modèles ou comme un appui à des messageries qui ne peuvent rien face à la diminution inexorable du lectorat « papier ». Il s'agit de passer d'une logique de rafistolage à celle d'un accompagnement rationnel.

Dans ces conditions, le rapporteur spécial plaide pour la refonte de l'ensemble des aides (distribution, pluralisme, modernisation) versées à plusieurs acteurs de la filière en une aide unique au titre, évolutive en fonction de son niveau d'accessibilité en ligne, de sa participation à la connaissance et au savoir et de son degré d'indépendance. Cet aggiornamento doit également permettre de supprimer les aides obsolètes, à l'instar des aides à l'exportation.

À côté de cette aide unique au titre, subsisterait un programme d'aide à la modernisation des distributeurs de presse, afin de les aider à maintenir leur activité et à s'adapter, une fois encore à l'évolution du lectorat.

3. La question de la qualification IPG

Les aides à la presse sont aujourd'hui principalement concentrées sur la presse d'information politique et générale (IPG). La qualification de presse d'IPG ouvre droit au bénéfice des aides indirectes (postales et fiscales) et des aides au pluralisme, au portage et à la modernisation. 99 % des aides seraient ainsi, selon le ministère de la culture, fléchées vers la presse IPG, au risque de faire passer ce critère comme une « fortification » protégeant certains titres.

Outre les mensuels Marie-Claire et Vanity Fair, les titres jeunesse Okapi et Phosphore, mais aussi Sélection Reader's Digest ont été reconnus, en février dernier, comme des médias IPG. Au regard du lien ténu entre ces publications et la notion d'information politique et générale, il y a lieu de s'interroger sur la validité de ce critère et, in fine , sur le ciblage retenu dans le cadre de l'attribution des aides à la presse.

C. QUEL IMPACT POUR LE PLAN DE RELANCE ?

Le programme 363 - Compétitivité de la mission Plan de relance -prévoit, en 2021, 140 millions d'euros en AE et 70 millions d'euros en CP pour l'ensemble du secteur. Ces crédits permettent de majorer les aides à la presse versées dans le cadre de la mission « Médias, Livre et industries culturelles » de près de 59,3 % et d'abonder le Plan filière présenté par le président de la République le 27 août 2020.

Le plan de relance prévoit en premier lieu d'accompagner la transition écologique du secteur de la presse et les changements de pratique dans l'imprimerie à hauteur de 47 millions d'euros en AE et 23,5 millions d'euros en CP en 2021. Le plan réseau imprimerie (PRIM) devrait ainsi être abondé en vue d'accélérer le départ de 1 553 salariés du secteur de l'imprimerie, soit près de 60 % des effectifs . 22 % des crédits du Plan de relance dédiés à la presse sont donc fléchés vers ce qui relève avant tout d'un gigantesque plan social ciblant les imprimeries et ne correspond pas véritablement à l'objectif de rebond affiché.

L'objectif écologique prend la forme d'un fonds dédié. Reste à déterminer son rôle et son articulation avec les dispositifs existants, le FSDP ayant déjà été mobilisé sur ce sujet début 2021.

La majoration des crédits du FSDP (45 millions d'euros en AE et 22,5 millions d'euros en CP) prévue par le Plan de relance devrait, en principe, favoriser l'accompagnement de la transition vers le numérique des principaux acteurs de la filière, en particulier les éditeurs. Il n'appartient cependant pas à l'État de se substituer aux éditeurs dans la définition d'une offre numérique ou du choix d'un support et de financer ainsi l'intégralité du processus de digitalisation de la presse, sauf à créer une distorsion de concurrence avec d'autres secteurs. L'accompagnement doit donc prendre en compte le degré de digitalisation déjà existant pour chaque titre et être modulé en fonction de celui-ci.

Par ailleurs, l'ouverture de nouvelles lignes de crédits en faveur de la transition numérique ne saurait occulter la mise en place d'autres instruments juridiques en vue de renforcer les ressources des médias de presse écrite présents sur internet (kiosques numériques, droits voisins, publicité numérique). L'aide budgétaire ne peut constituer la seule réponse au défi de la digitalisation.

De manière générale, si le bien-fondé de l'ensemble des mesures prévues par le Plan de relance ne saurait être remis en cause , cette aide d'urgence ne saurait être à terme pérennisée, sauf à renforcer l'addiction du secteur aux fonds publics, qui peut placer les titres de presse dans une situation de dépendance excessive à l'égard de l'État.

LES 10 RECOMMANDATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. La conditionnalité des aides doit être renforcée et aboutir à une véritable contractualisation entre l'État et les groupes de presse concernés par les aides, prenant notamment en compte la taille de ceux-ci pour éviter les effets d'aubaine.

2. L'évolution des habitudes de lecture de la presse écrite doit coïncider avec un soutien plus affirmé aux services de presse en ligne, le régime actuel des aides à la presse pouvant être assimilé à un régime de soutien, à fonds perdus, de la filière papier.

3. La réforme de l'aide à la distribution (révision de la grille tarifaire du transport postal, soutien au portage et régulation de cette activité) proposée par la mission Giannesini doit, en dépit de son coût lors des premiers exercices et d'une interrogation sur la réelle ouverture des réseaux de portage, être rapidement mise en oeuvre si elle permet un désengagement progressif de l'État dans le soutien au transport postal et au postage au profit d'un appui à la modernisation du secteur.

4. L'inscription du soutien au transport postal de la presse au sein du programme 134 de la mission « Économie » ne permet pas de disposer d'une vision globale des aides au secteur. Il apparaît indispensable de produire un document budgétaire unique visant à évaluer l'ensemble des transferts réalisés au bénéfice du secteur de la presse écrite.

5. Procéder d'ici à 2026 à une révision profonde du régime des aides à la presse écrite en vue de la mise en place d'une aide unique au titre, évolutive en fonction de son niveau de son accessibilité en ligne, de sa participation à la connaissance et au savoir et de son degré d'indépendance. Son versement donnerait lieu à la publication d'un document détaillant, par titre et par groupe, le montant de l'aide accordée.

6. Supprimer les aides à l'exportation qui peuvent apparaître obsolètes eu égard au soutien accordé par ailleurs à la transition numérique des titres.

7. Élargir la catégorie IPG aux publications de la connaissance et du savoir. Cet élargissement s'effectuerait à coût constant pour l'État, dans le cadre de la vaste révision du régime des aides prévue par ailleurs.

8. Clarifier le rôle du fonds à la transition écologique afin d'éviter les doublons avec les structures déjà existantes, à l'image du FSDP, et le risque concomitant d'effet d'aubaine.

9. Cibler l'aide à la digitalisation en tenant compte des stratégies déjà menées par les titres et en favorisant les publications ne disposant pas encore des infrastructures ou des revenus publicitaires nécessaires.

10. Favoriser la transition numérique en dépassant la simple logique budgétaire via la mise en place d'autres instruments juridiques destinés à améliorer les ressources des titres (kiosques numériques, publicité numériques, droits voisins).

I. DES AIDES BUDGÉTAIRES DÉDIÉES À L'ENSEMBLE DE LA FILIÈRE...

A. PLUSIEURS DISPOSITIFS D'AIDES SONT DÉDIÉS À LA PRESSE SANS QU'ILS NE RELÈVENT EXCLUSIVEMENT DE LA MISSION « MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES »

1. Le régime d'aides prévu par le programme 180 « Presse et Médias »

Profondément révisé à partir de 2012, le régime des aides à la presse est désormais structuré autour de trois types de subvention :

- les aides à la diffusion ;

- les aides au pluralisme ;

- les aides à la modernisation.

Le dispositif est censé couvrir l'ensemble de la filière, de l'éditeur au point de vente.

Le circuit de distribution de la presse papier

Hors portage et transport postal, le circuit de distribution de la presse est organisé par la loi du 2 avril 1947, dite loi Bichet, révisée en 2011.

La loi Bichet repose sur quatre principes :

- tout éditeur est libre de diffuser ;

- les éditeurs doivent adhérer à une coopérative qui permet une mutualisation des coûts et organise les moyens de distribution. La participation au capital de ces coopérative est réservée aux personnes physiques et morales propriétaires de périodiques, qui ont pris l'engagement de conclure un contrat de transport, de de groupage ou de distribution ;

- les coopératives peuvent confier l'exécution de certaines opérations matérielles à des sociétés commerciales de messagerie, au sein desquelles elles doivent détenir une participation majoritaire ;

- les éditeurs ne peuvent vendre qu'au sein d'un réseau agréé de marchands de journaux.

La distribution est, de fait, organisée autour de trois niveaux :

- niveau 1 : sociétés coopératives (Coopérative de distribution des quotidiens, coopérative de distribution des magazines, Messageries lyonnaises de presse - MLP) et sociétés commerciales de messagerie de presse (Presstalis puis France Messagerie et MLP). Les messageries réalisent pour le compte des éditeurs des missions logistiques (réception, répartition, traitement, livraison), commerciales (conseil et assistance à la distribution de titres, suivi du réseau des agents de la vente, collecte des données de ventes) et financières (récupération et remontée des produits des ventes, mission ducroire). Jusqu'à sa liquidation en juillet 2020, Presstalis assurait 74 % de la vente au numéro (331 éditeurs) et les MLP 26 % de la vente au numéro (550 éditeurs environ) ;

- niveau 2 : dépositaires de presse (66 dépôts sont répartis sur le territoire). La distribution de la presse sur le territoire métropolitain est organisée autour de 59 zones de desserte exclusives. 41 ont été attribuées à des dépositaires de presse Presstalis disposait jusqu'à sa liquidation des dépôts de la société d'agence et de diffusion - SAD (Paris, Ajaccio, Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Nantes, Rennes, Toulouse et Tours) et de la SOPROCOM (Avignon, Bastia, Crépy-en-Valois, Fréjus, Le Mans et Nancy). Les MLP possède une filiale, Forum Diffusion Presse , qui détient des participations majoritaires dans le capital de deux dépôts situés à Croissy-Beaubourg et à Poitiers, et est membre du groupement « Alliance Distribution », auquel sont affiliés 22 dépôts de province ;

- niveau 3 : diffuseurs , à savoir les marchands de journaux.

La France compte environ 900 éditeurs regroupés au sein de trois coopératives, chargées d'organiser la distribution de 4 700 titres.

Source : commission des finances du Sénat

L'action 02 du programme 180 « Médias » de la mission « Médias, livre et industries culturelles » concentre les crédits dédiés au financement de ces dispositifs. 118,1 millions d'euros (AE=CP) sont ainsi prévus en loi de finances pour 2021.

Répartition des crédits de paiement par sous-action
au sein de l'action 02 « Aides à la presse » en loi de finances pour 2021

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Montant des aides à la presse à la presse écrite prévues en 2021
au sein du programme 180

(en euros)

Action

Montant

Sous-action 01 « Aides à la diffusion »

39 387 903

Aide au portage de la presse

26 500 000

Exonération de charges patronales pour les vendeurs-colporteurs et porteurs de presse

12 887 903

Sous-action 02 « Aides au pluralisme »

23 225 000

Aide aux publications nationales d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires

14 355 000

Aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces

1 400 000

Aide au pluralisme des titres ultramarins

2 000 000

Aide au pluralisme de la presse périodique régionale et locale

1 470 000

Aide aux services de presse en ligne

4 000 000

Sous-action 03 « Aides à la modernisation »

55 473 422

Aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information politique et générale

150 000

Aide à la modernisation de la distribution de la presse

27 850 000

Aide à la modernisation des diffuseurs de presse

6 000 000

Fonds stratégique pour le développement de la presse

16 473 422

Fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse

5 000 000

Total

118 086 025

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La loi de finances pour 2021 prévoit une progression des crédits en faveur des aides à la presse de 7,2 millions d'euros (+ 6,46 %).

Ces nouveaux crédits sont fléchés vers les aides au pluralisme :

- 1,2 million d'euros affectés à l'aide aux publications nationales d'information politique et générale à faibles ressources ;

- 2 millions d'euros dédiés à une nouvelle sous-action consacrée à l'aide au pluralisme des titres ultramarins. Celle-ci prend le relais d'une aide mise en place en 2020 par décret. Une aide spécifique de 1,3 million d'euros est ainsi accordée à une quinzaine de titres de la presse ultramarine. Par ailleurs, la loi de finances prévoit l'extension aux territoires ultramarins de l'aide prévue pour la diffusion des quotidiens et des hebdomadaires d'information politique et générale (IPG) à l'étranger. 0,7 million d'euros est ainsi attribué afin de prendre en compte le coût du transport des titres. Il convient de rappeler à ce stade que la perte des investissements publicitaires au sein des titres ultramarins serait, en 2020, de l'ordre de 55 %, soit environ 20 millions d'euros. Les campagnes de Santé publique France, estimées à 0,5 million d'euros, n'ont pas compensé ces pertes.

- 4 millions d'euros dédiés à une nouvelle sous-action instituée en faveur de l'aide aux services de presse en ligne. Cette nouvelle enveloppe permet de rompre avec la priorité accordée à l'imprimé pour le versement des aides à la presse.

Les exercices 2021 et 2022 sont, par ailleurs, marqués par une aide complémentaire conséquente via la mission « Plan de relance » ( cf infra ).

415 entités ont bénéficié en 2019 du régime des aides à la presse, qu'il s'agisse d'aides directes ou à des tiers 2 ( * ) , pour un montant de 77,4 millions d'euros.

Nombre de bénéficiaires des aides à la presse et montants versés
entre 2011 et 2019

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

2. Des dispositifs répartis au sein d'autres programmes

Le montant inscrit au sein du programme 180 ne résume pas, pour autant, les crédits budgétaires dédiés au secteur de la presse écrite. Le programme 134 « Développement des entreprises et régulations » de la mission « Économie » vient, en effet, compléter le programme 180 en intégrant la compensation versée à La Poste pour sa mission de distribution de la presse (87,8 millions d'euros prévus en AE et en CP en loi de finances pour 2021), considérée comme une aide indirecte à la presse.

L'inscription du soutien au transport postal de la presse au sein du programme 134 de la mission « Économie » ne permet pas de disposer d'une vision globale des aides au secteur. La Cour des comptes avait également souligné, en février 2018, la nécessité de produire un document budgétaire unique visant à évaluer l'ensemble des transferts réalisés au bénéfice de ce secteur 3 ( * ) . Dans une réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial, le Gouvernement indique que ce rattachement pourrait intervenir à compter du projet de loi de finances pour 2022. Le rapporteur spécial sera vigilant quant à cette mise en oeuvre nécessaire en vue de renforcer la lisibilité de la dépense publique en faveur de la presse écrite.

Par ailleurs, à la suite du succès de l'appel à projets « médias de proximité » lancé en 2015, un fonds pérenne de soutien aux médias d'information sociale de proximité a été créé l'année suivante 4 ( * ) . Doté de 1,58 million d'euros en 2021, il soutient plusieurs types de médias : publications de presse, sites internet de presse, radios, télévisions, web-télévisions et web-radios. Sur les 224 médias candidats en 2019, 141 ont été soutenus en 2020 pour des subventions dont le montant maximum était de 18 045 euros. Une majorité d'entre eux sont des sites de presse en ligne.

Évolution du fonds pérenne de soutien aux médias d'information de proximité
entre 2015 et 2020

Montants versés (en euros)

Nombre de bénéficiaires

2016

1 498 098

108

2017

1 581 200

132

2018

1 581 540

126

2019

1 581 650

130

2020

1 526 702 5 ( * )

141

Total

7 769 190

637

Source : direction générale des médias et des industries culturelles

Le ministère de la culture a, par ailleurs, lancé en mars 2018 un plan de soutien des actions d'éducation aux médias. 6 millions d'euros par an sont fléchés vers ce plan. Un fonds de 4,5 millions d'euros est dédié au soutien des acteurs de l'éducation aux médias et à l'information - EMI (associations ou de médias locaux). Ce fonds finance les appels à projet présentés par les directions régionales des affaires culturelles (DRAC). Les projets éligibles sont en priorité à destination des 11-13 ans qu'ils soient scolarisés ou accueillis dans d'autres structures (instituts médico-éducatifs, protection judiciaire de la jeunesse, établissements de soins, école de la seconde chance ou établissements pour décrocheurs scolaires). Le ministère a, en outre, lancé, en 2019, un appel à projets national doté d'une enveloppe de 1,5 million d'euros en vue notamment de développer des modules d'EMI dans le cadre du service national universel (SNU), d'intensifier la participation des bibliothèques et de faire émerger des projets innovants et créatifs.

Le Pass Culture intègre, par ailleurs, un volet presse, permettant aux jeunes éligibles de pouvoir s'abonner à un périodique. .

3. Le rôle de l'IFCIC

Le fonds de garantie de l'Institut de financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) est ouvert aux diffuseurs de presse, aux éditeurs ayant obtenu le certificat d'inscription délivré par la CPPAP et bénéficiant de la qualification d'information politique et générale ou éligible au Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) ainsi qu'aux éditeurs de presse culturelle. Il permet d'apporter une garantie de l'État aux emprunts contractés par ces entreprises.

Cette garantie est en général de 50 % du montant du crédit, dans la limite d'une part en risque de l'IFCIC de 1 million d'euros. Le taux de garantie peut être porté au maximum à 70 % du concours bancaire obtenu par l'entreprise pour un crédit d'un montant maximum de 150 000 euros , ou en faveur des entreprises de presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale, dans la limite d'une part en risque de 1 million d'euros. Peuvent bénéficier de la garantie les concours bancaires tels que les crédits confirmés, les crédits à moyen et long terme, les crédits-bails, les contrats de location financière et les engagements par signature. Le dispositif a été bonifié en 2020 pour faire face aux conséquences de la crise sanitaire et de la liquidation judiciaire de Presstalis ( cf infra ).

L'IFCIC avait également mis en place, sur crédits publics, un fonds d'avances remboursables participatives aux entreprises de presse (FAREP). Ce fonds était initialement ouvert aux PME (au sens du droit de l'Union européenne) de moins de 3 ans, avant que l'objet du financement ne soit élargi aux dépenses de développement de ces entreprises en 2016. En premier lieu dédié aux sites de presse tout en ligne d'information politique et générale, le dispositif a été étendu en 2016 à l'ensemble des éditeurs de presse et SPEL répondant aux critères d'éligibilité du FSDP, presse IPG mais également presse en ligne professionnelle, scientifique et culturelle. Le fonds a été fusionné en 2017 avec les autres dispositifs sectoriels de prêt de l'IFCIC. Les prêts sont remboursables sur une durée comprise entre 12 et 84 mois incluant une éventuelle période de franchise en capital (jusqu'à 24 mois).

B. LES AIDES À LA DIFFUSION

Les aides à la diffusion - 39,4 millions d'euros en AE et en CP prévus en loi de finances pour 2021 - regroupent deux dispositifs :

- une aide au portage ;

- une compensation de la réduction des cotisations sociales portant sur les rémunérations des vendeurs-colporteurs de presse et des porteurs salariés ( cf infra ).

L'aide au portage représente 67,3 % des crédits dédiés aux aides à la diffusion prévus en loi de finances pour 2021.

765,15 millions d'exemplaires ont été portés en 2019 au titre de la presse d'information politique et générale. Le taux de portage, soit le nombre de titres portés par rapport au total des abonnements s'établissait à 78,16 %.

Nombres d'exemplaires portés (hors abonnements collectifs et transports
par compagnies aériennes)

(en millions d'exemplaires)

Famille de presse

2011

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Progression 2011-2019

Presse quotidienne nationale

59,11

61,37

62,31

60,35

54,93

51,4

47,8

42,7

- 27,8 %

Presse quotidienne régionale

759

751,21

744,94

731,07

711,49

699,98

685,51

646,49

- 14,8 %

Presse quotidienne départementale

73,72

73,81

73,61

72,11

70 ,66

68,64

59,1

64

- 13;2 %

Presse magazine

2,12

6,81

7,57

9,6

9,9

8,9

7,62

9,29

+ 338,2 %

Presse hebdomadaire régionale

2,3

2,49

2,6

2,61

2,6

2,61

2,59

2,67

+ 16,1 %

Total

896,25

895,69

891,03

875,74

849,58

831,53

802,62

765,15

-14,6 %

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Évolution du taux de portage entre 2011 et 2019

Source : Commission des finances du Sénat d'après les données transmises par la direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Institué en 2014, le fonds d'aide au portage de la presse a été réformé en 2017 6 ( * ) et en 2019 7 ( * ) avec pour ambition d'inciter davantage à la mutualisation des réseaux de portage entre les éditeurs de la presse locale et ceux de la presse nationale. Celle-ci se heurte à plusieurs écueils :

- l'horaire de fin de l'impression de la presse quotidienne nationale (en particulier sportive) sur un site adapté à son format auquel s'ajoute le temps de transport nécessaire pour arriver sur les lieux de routage de la presse quotidienne régionale, n'est pas forcément compatible avec les horaires de départ des tournées de la presse quotidienne régionale ;

- si France Messagerie 8 ( * ), offre à la presse quotidienne nationale (PQN) une solution couvrant 100 % du territoire, la presse quotidienne régionale (PQR) ne peut offrir que des solutions de distribution. La PQR n'est, en outre, pas soumise au même cadre social que la PQN et que France Messagerie pour son impression et sa distribution ;

- les éditeurs de PQR ont, par ailleurs, pu considérer que porter les abonnés d'autres titres, notamment de la PQN, faisait peser un risque sur leur propre lectorat.

Titres portés en 2019 par réseau de portage

Réseau

Exemplaires des titres du groupe portés

Exemplaires des titres tiers portés

% d'exemplaires tiers portés

Alsace de portage (DNA)

-

-

-

La Dépêche

21 719 169

1 621 530

6,9 %

Mediaportage (L'Alsace)

-

-

-

Midi Libre

24 674 878

1 481 857

5,7 %

Nordispresse (La Voix)

89 310 073

1 826 587

2 %

Ouest Plus Service
(Ouest France)

180 509 724

2 515 732

1,4%

Presse Portage (NRCO)

17 284 034

1 195 727

6,5 %

Figaro Service

12 829 665

11 310 075

46,9 %

Azur Distribution (Nice-Matin)

19 653 335

1 262 234

6,3 %

Pyrénées Presse

6 578 580

60 117

0,9%

Proximy (Le Parisien-Les Échos, ex-SDVP)

35 061 119

21 236 219

37,7 %

Sapeso (Sud-Ouest)

34 513 726

966 661

2,7 %

Sud Presse Distribution (La Provence)

11 443 848

1 208 439

9,5 %

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Le fonds d'aide au portage comprend deux sections, la première dédiée à l'aide aux éditeurs et la seconde à l'aide aux réseaux de portage.

Les éditeurs éligibles à l'aide sont ceux éditant un titre d'information politique et générale au maximum hebdomadaire, ou une publication qui apporte régulièrement des informations et des commentaires sur l'actualité de l'ensemble des disciplines sportives. L'aide est calculée sur la base de la progression du taux de portage entre l'année n-4 et l'année n-1. La progression de ce taux est ensuite multipliée par une valeur de référence, fixée annuellement par arrêté qui détermine ainsi le taux d'aide à l'exemplaire de chaque titre. Ce taux s'applique ensuite au volume total des exemplaires portés en année n-1.

Les titres bénéficiaires de l'aide aux publications à faibles ressources publicitaires ou de l'aide aux quotidiens à faibles ressources de petites annonces reçoivent une bonification au titre du portage .

L'aide aux réseaux de portage vise en principe le portage de titres édités par d'autres groupes de presse que le titre principalement porté et concerne ainsi les réseaux de la PQR mais aussi les réseaux de portage indépendants. L'aide est calculée sur la base de la progression du taux de portage pour compte de tiers entre l'année n-5 et l'année n-1. Une valeur de référence définie par arrêté détermine ensuite le taux à l'exemplaire qui permet, comme dans le cas de l'aide aux éditeurs, de définir l'aide accordée.

La réforme prévoit notamment la mise en place d'un mécanisme de sauvegarde pour l'aide aux éditeurs et aux réseaux de portage. Ce dispositif est destiné à permettre à ceux dont le portage diminue de lisser la baisse du soutien public dans le temps, via une diminution de l'aide limitée à 90 % du montant perçu l'année précédente.

La réforme prévoit également l'introduction d'un plafond afin qu'aucun éditeur ou aucun réseau de portage ne puisse toucher plus de 110 % de l'aide perçue l'année précédente.

Un principe de dégressivité a par ailleurs été introduit au sein de l'aide aux réseaux à partir de 15 millions d'exemplaires tiers portés, afin qu'une éventuelle augmentation de la part de l'aide consacrée aux réseaux ne constitue pas un effet d'aubaine pour les acteurs dominants du secteur.

La diminution de la dotation de l'enveloppe de 4,5 millions d'euros en 2018 puis de 5 millions d'euros en 2019 a principalement concerné la presse régionale (quotidienne et hebdomadaire), qui perçoit 71 % des crédits. Cette baisse accompagne celle enregistrée des volumes portés. Afin d'amortir cette diminution, les crédits ont été maintenus à leur niveau de 2019 en loi de finances pour 2020 et 2021 (26,5 millions d'euros).

Évolution du fonds d'aide au portage depuis 2010

Année

Montant total
(en millions d'euros)

Montant Section 1 (éditeurs)

Montant Section 2 (réseaux)

Nombre de bénéficiaires

Bénéficiaires Section 1 (éditeurs)

Bénéficiaires Section 2 (réseaux)

2010

67 236 257

138

2011

66 691 329

140

2012

44 243 995

133

2013

37 584 830

135

2014

37 676 588

34 686 584

2 990 004

150

136

14

2015

35 999 654

32 296 159

3 703 495

122

109

13

2016

35 257 279

31 343 944

3 913 335

125

114

11

2017

35 941 769

31 877 350

4 064 419

125

112

13

2018

31 496 062

27 941 957

3 554 105

128

115

13

2019

26 500 000

23 505 004

2 994 996

132

120

12

2020

26 500 000

23 555 326

2 944 674

140

126

14

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses de la direction générale des Médias et des industries culturelles au questionnaire du rapporteur spécial

Il convient d'attendre désormais les effets de la réforme de la loi Bichet introduite par la loi n° 2019-1063 du 18 octobre 2019 relative à la modernisation de la distribution de la presse ( cf infra ). Aux termes de celle-ci, bien qu'elle ne soit pas en charge de la régulation proprement dite des réseaux de portage, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) est chargée d'accentuer le processus de rationalisation des flux logistiques et de mise en oeuvre de synergies industrielles.

C. LES AIDES AU PLURALISME

Les aides au pluralisme - 23,2 millions d'euros en AE et en CP prévus en loi de finances pour 2021 - recouvrent trois types de subventions :

- l'aide aux publications nationales d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires ;

- l'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces (QFRPA) ;

- l'aide au pluralisme de la presse périodique régionale et locale (PPR).

1. L'aide aux publications nationales à faibles ressources publicitaires

Initialement circonscrite aux quotidiens nationaux lors de sa création en 1986, l'aide a été étendue, dans le contexte de l'attentat contre Charlie Hebdo, à l'ensemble des titres de presse d'information politique et générale (IPG), sans distinction de périodicité 9 ( * ) . La loi de finances pour 2021 prévoit une dotation de 14,355 millions d'euros.

Le dispositif vise :

- les titres qui bénéficient structurellement de recettes publicitaires faibles compte tenu de leur positionnement éditorial ;

- les titres qui traversent de façon conjoncturelle des difficultés financières.

Le fonds vise deux types de publications :

- les quotidiens nationaux ;

- les publications nationales, hebdomadaires à trimestrielles.

S'agissant des quotidiens , l'aide est divisée en trois sections :

- la première section du fonds vise les quotidiens répondant à certaines conditions relatives au prix de vente, à la diffusion et au tirage moyens et, enfin, au pourcentage de recettes de publicité dans leurs recettes totales (moins de 25 %) ;

- la deuxième section bénéficie à des quotidiens qui ne sont pas éligibles à la première section sur la base du critère du prix ;

- la troisième section concerne des quotidiens qui ont bénéficié d'une aide au titre de la première section pendant au moins trois années mais ne peuvent plus en bénéficier du fait de leur prix ou de leurs recettes publicitaires, et dont les recettes de publicité représentent moins de 35 % des recettes totales de l'entreprise.

Le fonds concernant les publications est lui-même divisé en deux sections :

- la première section bénéficie aux publications répondant à certaines conditions relatives au prix de vente, à la diffusion et au tirage moyens et, enfin, au pourcentage de recettes de publicité dans leurs recettes totales (moins de 25 %). Le montant de l'aide attribuée à une entreprise éditrice ne peut, cependant, dépasser 30 % des charges d'exploitation de l'exercice correspondant à l'année de l'attribution de l'aide ;

- la deuxième section vise à des publications qui ont bénéficié d'une aide au titre de la première section pendant au moins trois années mais ne peuvent plus en bénéficier du fait de leurs recettes publicitaires, et dont les recettes de publicité représentent moins de 35 % des recettes totales de l'entreprise.

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Évolution de l'aide depuis 2010

Montant

Nombre
de bénéficiaires

2010

13 155 000 €

8

2011

9 155 000 €

7

2012

9 155 000 €

7

2013

9 155 000 €

7

2014

9 155 000 €

7

2015

9 155 000 €

7

2016

9 155 000 €

7

2017

10 368 644 €

8

2018

10 126 268 €

8

2019

10 269 548 €

7

2020

10 395 933 €

8

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Évolution des aides aux publications hors quotidiens

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

2. L'aide aux quotidiens à faibles ressources de petites annonces

Instituée en 1989 10 ( * ) et dotée depuis 2011 d'une enveloppe d'un montant de 1,4 million d'euros, l'aide aux quotidiens à faibles ressources de petites annonces (QFRPA) a pour objet de concourir au maintien du pluralisme et à la préservation de l'indépendance des titres concernés.

Elle est composée de deux sections :

- la première vise les quotidiens locaux répondant à certaines conditions relatives au prix de vente (l'édition locale la plus diffusée doit être vendue à un prix inférieur à 130 % du prix de vente moyen des quotidiens régionaux), à la diffusion (maximum 60 000 exemplaires en moyenne), au tirage (maximum 70 000 exemplaires en moyenne) et au pourcentage de recettes de petites annonces dans leurs recettes publicitaires totales (moins de 5 %) ;

- la seconde vise les quotidiens locaux qui ne sont pas éligibles à la première section notamment du fait de la part des recettes de petites annonces dans leurs recettes publicitaires totales, mais qui répondent tout de même à un certain nombre de conditions relatives au prix de vente, à la diffusion et au tirage moyens ainsi qu'au pourcentage de recettes de petites annonces dans leurs recettes publicitaires totales (moins de 15 %), et dont plus du quart de la diffusion payée est assurée par voie d'abonnement postal.

Pour le calcul de l'aide attribuée à chaque titre, un taux unitaire de subvention est déterminé par le directeur général des médias et des industries culturelles.

La dotation accordée en loi de finances à la première section s'élève à 1,316 million d'euros. La seconde section dispose d'une enveloppe de 84 000 euros.

13 quotidiens sont concernés par ce dispositif.

Aide aux quotidiens à faibles ressources de petites annonces
en 2018 et 2019

(en euros)

Titres

2018

2019

Section 1

Dordogne Libre

40 747

40 755

L'Écho

161 049

156 645

L'Éclair Pyrénées

50 374

49 851

La Marseillaise

53 325

55 333

La Nouvelle République des Pyrénées

78 282

78 768

La Presse de la Manche

167 158

168 147

La République des Pyrénées

223 519

224 945

Le Journal de la Haute-Marne

168 545

167 921

Le Petit bleu de l'Agenais

56 025

55 994

Libération Champagne

29 861

29 012

Nord Littoral

61 344

61 059

Presse Océan

225 771

227 570

Section 2

Centre Presse

84 000

84 000

Total

1 400 000

1 400 000

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire

Évolution de l'aide depuis 2010

Première section

Deuxième section

Total

Montant

Bénéficiaires

Montant

Bénéficiaires

Montant

Bénéficiaires

2010

1 765 798 €

15

112 710 €

1

1 878 508 €

16

2011

1 316 000 €

15

84 000 €

1

1 400 000 €

16

2012

1 316 000 €

17

84 000 €

1

1 400 000 €

18

2013

1 316 000 €

14

84 000 €

1

1 400 000 €

15

2014

1 316 000 €

15

84 000 €

1

1 400 000 €

16

2015

1 316 000 €

15

84 000 €

1

1 400 000 €

16

2016

1 316 000 €

14

84 000 €

1

1 400 000 €

15

2017

1 316 000 €

14

84 000 €

1

1 400 000 €

15

2018

1 316 000 €

12

84 000 €

1

1 400 000 €

13

2019

1 316 000 €

12

84 000 €

1

1 400 000 €

13

2020

1 316 000 €

12

84 000 €

1

1 400 000 €

13

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

3. L'aide au pluralisme de la presse périodique régionale et locale

Mise en place en 1996 11 ( * ) et réformée à plusieurs reprises, l'aide est réservée aux publications d'information politique et générale à diffusion régionale, départementale ou locale, de langue française ou régionale, hebdomadaires ou d'autres périodicités plus longues, jusqu'à trimestrielle.

Le dispositif est borné et devrait prendre fin au 31 décembre 2022. Il est doté, depuis 2017, d'un montant de 1,47 million d'euros.

Il comporte trois sections :

- la première section concerne les hebdomadaires. Le montant des crédits affectés à la première section ne peut être inférieur à 85 % de la dotation globale du fonds. Le montant de l'aide versé au titre de la première section est calculé proportionnellement au nombre moyen d'exemplaires vendus au numéro, dans la limite d'un plafond de 20 000 exemplaires et d'un plancher de 2 000 exemplaires.

- la deuxième section est ouverte aux hebdomadaires qui, répondant aux conditions fixées pour bénéficier de la première section, peuvent en outre justifier des conditions supplémentaires (avoir 50 % au moins des exemplaires pesant moins de cent grammes et avoir une diffusion payée effective par abonnement postal représentant au moins 50 % de leur diffusion totale payée). La diffusion prise en compte ne peut toutefois être supérieure à 10 000 exemplaires par parution. L'aide versée au titre de cette section est cumulable avec celle versée au titre de la première section ;

- la troisième section vise les publications autres que les hebdomadaires. La répartition du montant global annuel de l'aide est réalisée proportionnellement au nombre d'exemplaires effectivement vendus, dans la limite d'un plafond de 200 000 exemplaires et d'un plancher de 20 000 exemplaires.

Pour l'année 2019, et comme en 2017 et 2018 :

• 93,7 % des crédits ont été affectés à la première section, soit 1 378 000 euros ;

• 2,9 % des crédits ont été versés au titre de la deuxième section, soit 42 000 euros ;

• 3,4 % des crédits ont été accordés au titre de la troisième section, soit 50 000 euros.

Évolution du montant de l'aide au pluralisme de la presse périodique régionale et locale

Année

Montant

Nombre de bénéficiaires

1re section

2e section

3e section

Total

2010

1 420 000 €

209

10

209

2011

1 420 000 €

207

12

207

2012

1 420 000 €

210

11

210

2013

1 420 000 €

206

19

206

2014

1 420 000 €

211

21

211

2015

1 420 000 €

199

17

199

2016

1 425 705 €

214

22

4

218

2017

1 470 000 €

234

35

10

244

2018

1 470 000 €

238

38

10

248

2019

1 470 000 €

243

38

11

254

2020

1 470 000 €

238

40

11

250

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

4. Les apports de la loi de finances pour 2021

Deux nouveaux dispositifs ont, par ailleurs, été adoptés en loi de finances pour 2021.

Le premier vise, sous la forme d'une aide, les titres ultramarins , afin de tenir compte de leurs difficultés et de leurs spécificités. L'éloignement de la métropole et l'insularité (coûts et délais d'acheminement supplémentaires) comme les facteurs démographiques, sociaux et économiques propres à ces territoires constituent autant de fragilités pour ce secteur.

Le second consiste en une aide spécifique aux services de presse en ligne (SPEL) afin de garantir la coexistence de plusieurs stratégies associant presse imprimée, bi-médias et « tout-en-ligne », et maintenir ainsi la diversité des supports, condition indispensable du pluralisme de la presse. 4 millions d'euros sont ainsi prévus.

D. LES AIDES À LA MODERNISATION

Les aides à la modernisation - 55,5 millions d'euros en AE et CP prévus en loi de finances pour 2021 - couvrent un champ assez large :

- L'aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information politique et générale ;

- L'aide à la distribution de la presse ;

- L'aide à la modernisation des diffuseurs de presse ;

- Le fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) ;

- Le fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse (FSEIP).

1. Un dispositif en voie d'extinction : l'aide à la modernisation sociale

La loi de finances rectificative pour 2004 12 ( * ) a mis en place une aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information politique et générale incarnant le soutien de l'État à la résorption des sureffectifs observés dans les services de fabrication des journaux quotidiens. Ce dispositif fait écho au plan de modernisation sociale mis en place au terme de négociations collectives impliquant tous les acteurs du secteur de l'imprimerie en 2004 et 2005.

L'aide vient financer deux mécanismes :

- le régime exceptionnel de cessation d'activité de la presse parisienne (RECAPP) 13 ( * ) qui se matérialise par le départ à partir de 50 ans pour les ouvriers et employés, et après 55 ans pour les cadres nés avant le 31 décembre 1955 assorti d'une interdiction de recrutement dans les entreprises concernées durant 3 ans. L'État prenait en charge 46,4 % du coût total du plan ouvert jusqu'au 31 décembre 2011, le montant de cette participation ne pouvant être supérieur à 75,4 millions d'euros et le nombre de salariés concernés ne pouvant dépasser 586 personnes ;

- un dispositif équivalent cette fois-ci dédié à la presse quotidienne régionale 14 ( * ) : l'État prenant encore en charge 46,4 % du coût total du plan, le montant de cette participation ne pouvant excéder 116 millions d'euros et le nombre de salariés concernés étant plafonné à 1 800 personnes.

Une commission de contrôle de l'aide à la modernisation sociale a été mise en place en 2009 afin de vérifier la bonne mise en oeuvre des deux dispositifs. Cette commission a été supprimée en 2012 au profit d'opérations de contrôle, sur pièces et sur place, confiées à des corps d'inspection de l'État 15 ( * ) . Ce contrôle a été ouvert, en 2014, à des experts extérieurs 16 ( * ) .

Compte tenu de la moindre entrée de potentiels bénéficiaires au sein des deux dispositifs mais aussi des effets des différentes réformes de retraites adoptées entretemps, le coût pour l'État a été ramené à 186,9 millions d'euros (68,7 millions d'euros pour la PQN et 118,2 millions d'euros pour la PQR) contre 191,4 millions d'euros initialement envisagés.

Montants versés par l'État au titre du financement des deux dispositifs de soutien à la modernisation sociale

(en millions d'euros)

Année

Montant

Année

Montant

2006

9,5

2013

17,8

2007

12,3

2014

10,7

2008

14,1

2015

6,9

2009

24,9

2016

1,7

2010

29,9

2017

1,0

2011

28,2

2018

0,5

2012

23,4

2019

0,0

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

2. L'aide à la modernisation de la distribution de la presse : un mode de financement connexe pour France Messagerie

L'aide à la distribution de la presse comprend trois niveaux, dont le dernier créé par décret en 2020 vise spécifiquement les difficultés induites par la liquidation de Presstalis ( cf infra ) 17 ( * ) .

La première section de l'aide vise la distribution de la presse quotidienne nationale d'information politique et générale vendue au numéro en France. Deux catégories de publications sont concernées :

- les quotidiens nationaux d'information politique et générale, de langue française, paraissant au moins cinq fois par semaine et bénéficiant du certificat d'inscription délivré par la commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) ;

- les publications nationales de périodicité au minimum hebdomadaire, présentant le caractère d'information politique et générale, imprimées sur papier journal pour au moins 90 % de leur surface et dont le prix de vente et la durée de présentation à la vente de chaque numéro sont comparables à ceux des quotidiens nationaux.

La répartition de l'aide au sein de cette première section entre les titres bénéficiaires est effectuée au prorata du nombre d'exemplaires vendus au numéro dans l'année n-1 par chacun des titres. Les ventes par quantité sont exclues de ce décompte. Le nombre d'exemplaires est arrêté annuellement sur la base d'une déclaration fournie par le titre bénéficiaire et certifiée par le Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP) en se référant à toutes sources professionnelles disponibles.

L'aide versée aux quotidiens nationaux dans le cadre de cette section est, en pratique, reversée à France Messagerie, qui a succédé à Presstalis, dans la mesure où elle demeure la seule messagerie qui distribue les quotidiens nationaux. La loi de finances pour 2021 prévoit une dotation de 27 millions d'euros.

La deuxième section concerne la distribution de la presse française à l'étranger, afin de renforcer son audience. La dotation prévue en loi de finances pour 2021 s'élève à 0,85 million d'euros. L'aide est ciblée sur des zones géographiques déterminées par le directeur général des médias et des industries culturelles. Les titres éligibles font partie de la presse d'information politique et générale (IPG). La rentabilité des titres à l'étranger est particulièrement difficile à maintenir en raison des frais de transport par avion. Ce mode de routage est pourtant impératif pour les titres IPG, en raison de leur périodicité qui les rend très sensibles aux délais de mise en vente. Reste une interrogation sur l'opportunité du maintien de cette aide face à la baisse constatée ces dernières années des exportations tant en valeur qu'en volume. L'année 2018 a ainsi enregistré une diminution de - 12,4 % en volume et de - 10 % en valeur (- 7,8 % en volume et - 6 % en valeur pour les titres IPG).

3. L'aide à la modernisation des diffuseurs de presse
a) Une crise latente exacerbée par la pandémie et la liquidation de Presstalis

Le nombre de points de vente spécialisés est passé de 28 579 en 2011 à un peu moins de 20 917 aujourd'hui.

Évolution du nombre de points de vente de 2011 à 2020

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

28 579

27 497

26 816

25 866

24 877

24 134

23 217

22 564

21 985

20 917

Source : Commission des finances du Sénat d'après le Conseil supérieur des messageries de presse

Cette diminution concerne pour l'essentiel les territoires : 75 % des pertes concernent des points de vente situé en dehors du réseau parisien (691 points de vente perdus en 2017, 578 en 2016). La dynamique est cependant la même dans Paris avec la disparition de 310 points de vente entre 2011 et 2017 (721 points de vente actifs en 2017). Seul, le réseau des kiosques parisiens présente une stabilité sur la période. Le réseau des magasins traditionnels est, quant à lui, en diminution sensible (- 40 % entre 2011 et 2017).

Évolution du nombre de points de vente de 2015 à 2020

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Enseignes presse

2 887

2 820

2 645

2 560

2 454

2 238

Maison de la presse

660

645

675

680

679

677

Mag Presse

959

933

804

755

700

663

Kiosques

548

555

522

500

454

466

Relay

720

687

644

625

621

432

Réseau traditionnel

16 892

16 285

15 721

15 252

14 805

14 229

Librairies papèteries

1 745

1 575

1 436

1 346

1 261

1 205

Presse & connexes

991

932

913

855

832

802

Tabac & Presse (hors bars)

7 620

7 539

7 421

7 330

7 202

7 045

Bars (dont tabac)

5 465

5 259

5 043

4 870

4 705

4 444

Alimentation (autres que superettes)

1 071

980

908

851

805

733

Enseignes non presse

3 480

3 474

3 433

3 393

3 358

3 273

Enseignes culturelles

126

130

142

147

152

150

Rayons intégrés d'hypermarchés

962

980

994

993

989

986

Rayons intégrés de supermarchés

1 632

1 640

1 607

1 595

1 565

1 522

Supérettes sous enseigne

591

573

548

533

543

519

Stations service

165

147

139

124

107

96

Points de vente thématiques 18 ( * )

4

4

3

1

2

2

Autres points de ventes

1 618

1 555

1 418

1 359

1 368

1 177

Points de vente quotidiens

865

797

735

707

751

658

Autres (campings, universités...)

753

758

683

652

617

519

Total

24 877

24 134

23 217

22 564

21 985

20 917

Dont point de ventes complémentaires (PVC) 19 ( * )

1 990

1 891

1 881

1 902

1 999

1 890

Source : Commission des finances du Sénat d'après le Conseil supérieur des messageries de presse

L'installation de rayons de presse dans les supérettes d'une surface de vente inférieure à 400 m² n'a de son côté pas enrayé cette tendance baissière. Seulement trois projets d'installation de presse en supérette ont été agréés en 2018. Les créations de points de ventes ont, de fait, surtout concerné les « points de vente complémentaires » (PVC) à offre réduite (entre 50 et 150 titres), présents notamment dans les grandes surfaces alimentaires mais dont le chiffre d'affaires annuel moyen (15 000 euros) est largement inférieur à celui des points de ventre traditionnels (150 000 euros).

Évolution du nombre de création de points de vente
de 2015 à 2020

2015

2016

2017

2018

2019

2020

361

369

369

298

338

219

Source : Commission des finances du Sénat d'après le Conseil supérieur des messageries de presse

La fermeture de points de vente engendre un effet de concentration du réseau : les 1 000 premiers diffuseurs ne représentaient que 4,3 % du réseau en 2018 mais réalisaient 23 % du chiffre d'affaires du secteur. Les 5 000 premiers diffuseurs réalisaient plus de 60 % des ventes.

Les conditions de travail contribuent à cette diminution du nombre de points de vente. Ceux-ci sont ouverts en moyenne 13 heures 30 par jour et 80 heures par semaine. 4 à 6 heures sont consacrées aux seules opérations de mise en place des produits et de gestion des stocks et des invendus. Par ailleurs, l'accroissement du nombre de produits à traiter via les produits hors presse (DVD, multimédias, livres, encyclopédies, etc.) et la progression des taux d'invendus (40 % en 2007, 45 % en 2014, 51 % en 2017) engendrent un encombrement croissant des linéaires, qui nuit à la bonne exposition des titres et fragilise les ventes.

Cette situation de grande difficulté a été renforcée en 2020 par la crise sanitaire et l'effondrement de Presstalis. La première a débouché sur une diminution de la fréquentation (- 40 %) et des ventes (- 20 % sur les seules ventes de presse et - 40 % sur les recettes du point de vente toutes activités confondues) aux mois de mars et avril 2020. Le redressement judiciaire de Presstalis prononcé le 12 mai a quant à lui induit un manque d'approvisionnement pendant plusieurs semaines et une baisse des marges. Cette double crise a conduit à la fermeture de 1 068 points de vente en 2020. Afin de faire face à cette double crise, une aide de 19 millions d'euros en faveur des diffuseurs indépendants et spécialistes a été adoptée à l'occasion de l'examen de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 ( cf infra ).

b) Une aide externalisée

L'aide à la modernisation des diffuseurs de presse a été instituée en loi de finances rectificative pour 2004. Elle consiste en une subvention directe, accordée sous certaines conditions aux diffuseurs qui souhaitent informatiser ou moderniser le mobilier de leur point de vente. Il s'agit, par ce biais, d'accompagner le réseau des diffuseurs de presse aux fins d'amélioration de leurs performances commerciales. Le champ de l'aide couvre les projets de rénovation de l'espace de vente et, depuis 2005, les projets de modernisation informatique (¾ des investissements financés en 2017).

En 2019, 2 871 subventions ont été attribuées (+ 21 % par rapport à 2018) pour un montant d'aide moyen de 1 875 euros . La loi de finances pour 2021 prévoit une enveloppe de 6 millions d'euros, soit le montant retenu depuis la loi de finances pour 2017. Ces crédits sont complétés par une dotation d'un montant équivalent prévue dans le cadre du Plan de relance ( cf infra ).

Nombre de subventions et montants versés au titre de l'aide
à la modernisation de la diffusion depuis 2012

( en millions d'euros )

Montant inscrit en loi de finances

Nombre de subventions versées

Montant des attributions

Montant des versements

2012

5,64

1 111

3,1

2,7

2013

4

2 038

5,56

5,4

2014

4

1 604

4,46

4,2

2015

3,8

1 825

4,82

3,8

2016

3,68

1 775

4,83

4

2017

6

2 881

6,54

5,33

2018

6

2 368

4,65

5,03

2019

6

2 871

5,38

3,68

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

La gestion du dispositif a été externalisée dans le cadre d'une concession de service public (CSP). La société Deloitte Conseil est ainsi en charge de la distribution de l'aide depuis le 4 juillet 2019. Sa commission s'élève à 6,45 % toutes taxes comprises.

c) Une aide non financière : la réforme de la loi Bichet

La réforme de la « loi Bichet » ( cf infra ) permet de redonner aux diffuseurs de presse un droit de regard sur le choix des titres (assortiment) et sur les quantités fournies (plafonnement) . Les titres d'information politique et générale (IPG) ne sont soumis à aucune restriction ou règle d'assortiment et disposent d'un droit d'accès absolu au réseau de diffusion de la presse.

S'agissant des publications CPPAP, un accord interprofessionnel devrait déterminer ces règles d'assortiment et de plafonnement des quantités servies aux points de vente. Cet accord devra être validé par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP). Les titres non CPPAP et les titres CPPAP non retenus dans les assortiments seront quant à eux librement choisis par les diffuseurs de presse, en fonction du potentiel commercial du point de vente et de ses capacités d'exposition des titres.

L'ARCEP a mis en place un comité de suivi de l'assortiment, dont la première réunion s'est tenue le 13 février 2020. Les premières négociations, sous l'égide de ce comité ou entre professionnels, n'ont pas abouti à de réels résultats. Les organisations professionnelles représentatives (OPR) des éditeurs et des marchands de presse (auxquelles s'est associé le syndicat des dépositaires) ont abouti à la rédaction et la signature d'un accord interprofessionnel relatif à l'assortiment et à la régulation des quantités. Cet accord comprenait également un volet traitant de la distribution du « hors presse » et des titres non CPPAP, afin de s'assurer que ceux-ci ne puissent obtenir plus de droits que les titres CPPAP soumis à assortiment. La loi n° 2019-1063 relative à la modernisation de la distribution de la presse prévoit pour le hors CPPAP que leur distribution relève de conventions entre le marchand et les éditeurs, ou entre les représentants des marchands et ceux des éditeurs. Si l'accord a pu réunir les OPR - Alliance de la presse d'information générale (APIG), Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM), Fédération nationale de la presse spécialisée (FNPS) et Culture Presse pour les marchands -, les Messageries lyonnaises de presse n'ont pas approuvé le projet rendant impossible son agrément par l'ARCEP. En cas d'échec, l'ARCEP devra définir elle-même les règles d'assortiment qu'elle juge les plus adaptées.

L'ARCEP a, par ailleurs, mis en place un comité de concertation de la distribution de la presse (CoCoDiP) 20 ( * ) dans lequel siègent des représentants d'associations professionnelles d'éditeurs de presse, de sociétés de distribution de la presse et d'associations de diffuseurs afin d'entretenir un dialogue permanent entre le régulateur et le secteur.

4. Le Fonds stratégique pour le développement de la presse : une action entravée par Presstalis
a) Un fonds dédié aux projets innovants

Créé en 2012 21 ( * ) puis modernisé en 2014 et en 2016, le Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) accorde des subventions ou des avances remboursables à des projets d'investissements innovants.

Le FSDP est gouverné par un comité de pilotage, rassemblant les représentants des différentes familles de presse éligibles au dispositif. Ce comité propose l'attribution des aides. Un club des innovateurs est également intégré au sein du Fonds.

Des avances à taux bonifiés pouvant aller jusqu'à 70 % doivent permettre au secteur de faire face à de nouveaux défis, sans pour autant qu'une doctrine d'attribution des fonds ne soit précisée. Le taux de base est fixé à 40 %, le taux bonifié à 60 % bénéficie désormais également aux titres particulièrement fragiles et jugés précieux pour le pluralisme (publications nationales à faibles ressources publicitaires, quotidiens régionaux, départementaux et locaux à faibles ressources de petites annonces) ainsi qu'aux PME qui occupent moins de 25 personnes et qui ont plus de 3 ans. Le taux d'aide « super-bonifié » à 70 % a été créé pour les seuls médias émergents (soit des PME qui occupent moins de 25 personnes et qui ont moins de 3 ans).

Le périmètre des dépenses éligibles intègre pour les seuls médias émergents, au-delà des dépenses techniques, les dépenses de salaires directement afférentes à la conception éditoriale

Sont éligibles au FSDP, les publications d'information politique et générale (IPG), jusqu'à présent limitées aux publications de périodicité au maximum trimestrielle. Parallèlement, les services de presse en ligne qui développent l'information professionnelle ou qui favorisent l'accès au savoir et à la formation, la diffusion de la pensée, du débat d'idées, de la culture générale et de la recherche scientifique sont également couverts par le Fonds.

Le fonds stratégique pour le développement de la presse bénéficie également aux projets en vue d'assurer le rayonnement du traitement de l'actualité française et internationale par la presse française dans les pays francophones où l'accès en est limité par le niveau de vie et de diffusion des technologies numériques. L'aide prend la forme de remboursements partiels de frais de prospection et de promotion à l'étranger ainsi que ceux liés au manque à gagner dû à la baisse des prix de vente.

La direction générale des médias et des industries culturelles détermine les zones ou les actions prioritaires 22 ( * ) .

Aucune aide n'a été accordée en 2019 au titre du rayonnement de la presse française à l'étranger en raison, notamment, du protocole de conciliation avec Presstalis ( cf infra ). La même raison avait conduit à réduire l'intervention du FSDP à 21 000 euros en 2018. 450 000 euros avaient été versés en 2017.

b) La levée de l'hypothèque Presstalis et l'aide accordée dans le cadre du Plan de relance permettent de redynamiser le fonds

Afin de tenir compte des difficultés rencontrées par Presstalis, une partie des crédits du FSDP ont été réorientés vers l'aide à la distribution de la presse quotidienne nationale, ensuite reversée à Prestalis. 9 millions d'euros devaient ainsi être reversés chaque année entre 2018 et 2021 à cette société. En contrepartie, les éditeurs associés de la Coopérative de Distribution des Magazines et de la Coopérative de Distribution des Quotidiens renonçaient à présenter des dossiers de demande d'aide au FSDP pendant la même période. Suite à la disparition de Presstalis, la condition a finalement été levée en 2020 pour les éditeurs représentants les ventes en montant les plus faibles, et pour l'ensemble des éditeurs dès 2021. Le nombre de projets aidés a néanmoins considérablement augmenté en 2019 avec 120 dossiers aidés (86 en 2018). La totalité des crédits disponibles, soit 11 millions d'euros, a ainsi été attribuée.

Ce faisant, le Gouvernement a rompu avec une tendance baissière qui pouvait interroger quant à la réalité des ambitions accordées à ce fonds. En effet, au-delà de la ponction de 9 millions d'euros, les crédits accordés à ce dispositif tendaient à être rabotés : baisse de 4,91 % à périmètre constant entre 2019 et 2018 et diminution annoncée de 5,19 % entre 2020 et 2018. Le Fonds fait ailleurs l'objet de mesures de gel budgétaire systématiques depuis 2012. Elles ont concerné 27 % des crédits en 2019, ce qui fragilise un peu plus son efficacité.

Subventions accordées par le FSDP depuis 2012

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Total

Projets soutenus

140

176

117

78

71

93

77

120

70

942

Aides attribuées (en millions d'euros)

20,95

21,10

22,89

10,11

11,17

17,05

9,21

10,99

15,09

138,56

Aide moyenne (en euros)

149 669

119 886

195 625

129 297

157 370

183 348

119 636

91 592

215 530

147 097

Source : direction générale Médias et industries culturelles, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

La troisième loi de finances rectificative pour 2020 (5 millions d`euros) et le Plan de relance (45 millions d'euros en 2021 et 2022 dont 22,5 millions d'euros en 2021) ont, dans le même temps, sensiblement réévalué la dotation accordée au FSDP. Les taux d'aide sont ainsi augmentés de 10 points de façon transitoire afin de soutenir l'investissement des entreprises de presse durement affectées pendant la crise liée à la pandémie. Le décret n° 2020-1152 du 9 décembre 2020 portant réforme du fonds stratégique pour le développement de la presse et du fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse facilite dans le même temps, la dématérialisation des procédures et le raccourcissement des délais de paiements. Le groupe Libération a ainsi pu bénéficier d'un financement à hauteur de 60 % en vue de l'acquisition de 190 ordinateurs portables destinés à toute sa rédaction, afin de permettre à celle-ci d'adopter le système d'édition du Washington Post , Arc Publishing .

Il apparaît désormais indispensable, compte tenu de la nouvelle dynamique du fonds, qu'une clarification de la doctrine d'attribution des subventions soit mise en oeuvre. Le rapporteur spécial relève que cette opacité peut, en effet, entretenir un soupçon de clientélisme.

5. Le Fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse (FSEIP)

Créé en 2016, le Fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse (FSEIP) dispose de trois outils :

- des bourses d'émergence ;

- des aides à des programmes d'incubation ;

- des aides à des programmes de recherche.

Les bourses d'émergence permettent aux entrepreneurs de presse de préciser leur concept éditorial et d'approfondir leur étude de faisabilité économique. Elle est d'un montant unitaire d'au maximum 50 000 euros. Cette bourse permet de contourner l'obligation d'inscription auprès de la commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP). Elle concerne les PME de moins de 3 ans et composées de moins de 25 personnes

Nombre et montant des bourses d'émergence attribuées
depuis 2016

Année

Nombre

Montant versé

2016

36

1 493 000

2017

19

670 800

2018

24

945 000

2019

24

756 000

2020

18

1 826 000

Total

143

5 690 800

Les programmes d'incubation dédiés aux médias émergents (presse et audiovisuel) et aux fournisseurs de solutions (technologiques, graphiques, commerciales...) destinées aux médias doivent permettre des échanges entre entrepreneurs et le lancement de projets collectifs, de fluidifier les collaborations entre éditeurs et fournisseurs de solutions dédiées, de faire bénéficier les entreprises émergentes de services administratifs, juridiques, sociaux, comptables, financiers mutualisés et de leur donner accès à des ateliers thématiques, des programmes d'accélération, des réseaux d'experts et de tuteurs.

Ces programmes d'incubation peuvent être portés par des incubateurs généralistes ou des groupes de presse. À travers l'hébergement, le conseil et la formation, ils renforcent la visibilité et donc l'attractivité de l'entrepreneuriat de presse et, plus largement, des médias.

Depuis 2016, 25 programmes d'incubation ont été soutenus pour un total de 5 708 604 euros :

- 10 programmes en 2017 pour 2 357 337 euros ;

- 9 programmes en 2018 pour 2 002 737 euros ;

- 6 programmes en 2019 pour 1 348 530 euros.

Le FSEIP lance également des appels à projets pour des programmes de recherche. Ceux-ci visent au développement et à la diffusion de l'innovation pour l'ensemble du secteur à travers de thématiques précises : monétisation de l'information, exploitation de big data , gestion de la relation client (CRM) prédictive, data journalisme, murs de paiement et micropaiements, kiosques, plateformes d'échanges et enchères en temps réel. Les premiers programmes ont été soutenus en 2018 : quatre projets ont ainsi été retenus pour un total de 627 152 euros. 5 projets ont été soutenus en 2020 pour un montant total de 1 409 207 euros.

E. LE CAS DE LA PRESSE EN LIGNE

La loi de finances pour 2021 prévoit la mise en place d'une aide spécifique au pluralisme des SPEL dotée de 4 millions d'euros, reconnaissant ainsi une évolution du lectorat et du mode d'accès à l'information. L'indicateur 2.1 du programme 180 « Presse et médias » illustre cette tendance.

Nombre total de visites des sites d'actualité / information généraliste

(en milliards)

2018

2019

2020 (prévision actualisée)

2021 (prévision)

2023 (cible)

17,62

18,25

26,1

26

26

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

1 142 services de presse en ligne (SPEL) sont reconnus par la CPPAP. 414 traitent de l'information politique et générale (IPG), parmi lesquels 184 SPEL « tout en ligne » (« pure players ») qui enregistrent une réelle dynamique depuis 2011. En 2019, 147 SPEL « tout en ligne » d'IPG étaient recensés. En 2019, la CPPAP a examiné 547 dossiers de SPEL, dont près de 59 % de demandes de reconnaissance de sites « tout en ligne ». 173 ont effectué concomitamment une demande afin de bénéficier de la qualité d'IPG.

Évolution du nombre de sites de presse en ligne
depuis 2011

Sites de presse en ligne reconnus par la CPPAP

Sites de presse tout en ligne reconnus par la CPPAP

2011

69

18

2012

145

52

2013

169

74

2014

246

144

2015

273

131

2016

246

143

2017

248

154

2018

256

129

2019

342

190

2020 (estimation)

277

141

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Les règles en matière d'aide n'établissent aucune différence de traitement entre les services de presse en ligne, selon qu'ils sont ou non tout en ligne, dès lors qu'ils sont reconnus par la CPPAP. Le décret n° 2016-1161 paru le 26 août 2016 renforce, cependant, précisément le soutien à l'émergence dans le secteur de la presse . Il concerne au premier chef les services « tout en ligne ». Sont ainsi prévus :

- un taux d'aide bonifié au FSDP (70 % des dépenses éligibles) pour les médias émergents ;

- la création de bourses de 50 000 euros pour les entreprises de presse émergentes. En 2018, 21 aides sur les 24 accordées concernaient des éditeurs de presse présents exclusivement en ligne, soit près de 90 % des aides accordées. En montant d'aide, les tout en ligne ont bénéficié de 828 000 euros, soit 88 % du montant total des aides attribuées ;

- une aide aux programmes d'incubation dédiés aux médias émergents (dans la presse et au-delà), afin notamment de rompre l'isolement de l'entrepreneur, de faciliter le lancement de projets collectifs, de faire bénéficier les jeunes pousses des médias de services mutualisés et de renforcer la visibilité et l'attractivité de l'entrepreneuriat de presse ;

- la faculté d'ouvrir des appels à projets sur des programmes de recherche consacrés à des sujets d'innovation intéressant le secteur de la presse dans son ensemble.

En 2019, les éditeurs de presse « tout en ligne » ont déposé 23 dossiers auprès du fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) , représentant 18,3 % des demandes. Parmi les dossiers examinés, 21 ont été déclarés éligibles pour un montant total d'aide accordé de 1 549 429 euros . Ce montant représente 14,1 % du total des aides attribuées. Depuis 2012, 578 projets de services de presse en ligne et bi-médias ont été aidés au titre du FSDP pour un total de 59,5 millions d'euros , soit près de la moitié du total des aides attribuées sur la période. La part des aides dédiée aux projets des SPEL et bi-médias, y compris ceux des éditeurs de presse tout-en-ligne, a ainsi constamment progressé passant de 36 % en 2012 à 65 % en 2019.

Le FSEIP profite également en grande partie aux services de presse en ligne. Plus de 85 % des bourses d'émergence octroyées par ce fonds entre 2016 et 2019 ont été attribuées à des SPEL. Par ailleurs, les programmes d'incubation dédiés aux médias émergents (25 programmes retenus entre 2017 et 2019 soit 5,6 millions d'euros) bénéficient très largement aux SPEL.

Les SPEL bénéficient, par ailleurs, depuis 2014, du soutien de l' Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC). Le périmètre de l'IFCIC est désormais calé sur celui du Fonds stratégique (comprenant donc les SPEL d'IPG ou consacrés pour une large part à l'IPG, SPEL professionnels, scientifiques ou culturels, y compris titres tout en ligne). Les avances octroyées peuvent atteindre jusqu'à 200 000 euros. Les modalités de remboursement sont adaptées à la montée progressive de l'activité avec une durée maximum de 7 ans. En complément, les mêmes sites peuvent également bénéficier, pour leurs crédits bancaires, de la garantie offerte par le fonds « industries culturelles » de l'IFCIC (taux de garantie pouvant atteindre 70 % pour des concours de 150 000 euros ou moins).

Cette prise en compte des SPEL peut apparaître tout aussi tardive qu' insuffisante . Les montants dédiés au titre de cette nouvelle aide ne représentent même pas 10 % des aides à la presse contenues au sein du programme 180, qui semble principalement orienté vers un soutien à la presse papier , dont l'avenir reste incertain ( cf infra ). La Cour des comptes rappelait, de son côté, dans son rapport de 2018 que les aides à l'imprimé représentaient 77 % des aides inscrites au sein du programme 180. La proportion des aides accordées aux SPEL ne reflète pas, enfin, le rapport SPEL / titres imprimés. Il existait 1 SPEL pour 37 titres imprimés en 2010. Ce ratio est passé à 1 SPEL pour 7 titres imprimés en 2017. Elle rend de fait inefficient le principe de neutralité des supports de diffusion dans l'attribution des fonds.

Recommandation n° 2 : L'évolution des habitudes de lecture de la presse écrite doit coïncider avec un soutien plus affirmé aux services de presse en ligne, le régime actuel des aides à la presse pouvant être assimilé à un régime de soutien, à fonds perdus, de la filière papier.

F. LES CONDITIONS D'OCTROI DE CES AIDES

1. Des aides conditionnées

Deux principes encadrent la conditionnalité des aides octroyées.

En premier lieu, les aides sont octroyées conformément à leurs finalités et dans le respect des conditions qu'elles imposent. Les aides à la presse doivent constituer, dans le même temps, un levier pour faire progresser la responsabilité sociale et environnementale des entreprises de presse. C'est à cette fin qu'ont été établies des conventions-cadres avec les entreprises de presse 23 ( * ) .

Ces conventions-cadres sont conclues entre l'État et les personnes morales si celles-ci remplissent une des conditions suivantes :

- elles ont bénéficié d'un montant d'aide supérieur à 1 million d'euros en moyenne annuelle sur les trois années précédentes ;

- le montant des aides perçu représente au moins 20 % du chiffre d'affaires du titre et s'avère supérieur à 0,5 million d'euros en moyenne annuelle sur les trois années précédentes ;

- elles ont bénéficié d'une aide supérieure à 1 million d'euros au titre du fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP).

Les conventions-cadres sont signées pour un délai de trois ans. Elles comportent des engagements qui diffèrent selon la nature des activités des entreprises de presse :

- les éditeurs doivent élaborer une charte déontologique avec les représentants des journalistes et renforcer la transparence vis-à-vis des lecteurs sur la composition du capital et le montant des aides publiques perçues ;

- en ce qui concerne les vendeurs-colporteurs de presse (VCP) et les porteurs, les éditeurs doivent s'engager à renforcer la clarté des contrats et améliorer les conditions d'exercice du métier ;

- les éditeurs doivent, en outre, s'engager à participer loyalement au système coopératif de distribution de la presse.

Des indicateurs précis, chiffrés et standardisés pour l'ensemble des éditeurs sont retracés dans une annexe à la convention-cadre. L'État s'engage, en contrepartie, à accompagner les éditeurs dans leurs projets et à simplifier leurs démarches dans les procédures de demande d'aides directes à la presse.

Un compte-rendu d'exécution retraçant la mise en oeuvre de ces engagements est transmis chaque année. Un système de sanctions est, en outre, prévu, en cas de non-respect des engagements par le groupe de presse : mise en demeure, suspension du versement, annulation. Le montant des aides suspendues ou annulées est proportionné à la gravité des faits reprochés et prend en compte la situation de l'éditeur. Il ne peut excéder 30 % du montant total annuel des aides directes auxquelles l'éditeur est éligible.

Au total 38 titres ont vocation à signer une convention-cadre avec l'État. 22 sont d'ores et déjà signées. S'agissant des 16 conventions cadres non signées :

- 7 sont en phase finale d'élaboration pour la période 2020-2022 ;

- 9 autres conventions sont toujours au stade d'élaboration pour la période 2021-2023.

2. Des aides plafonnées

La plupart des aides directes contiennent des dispositifs de plafonnement, qu'il s'agisse des aides aux publications nationales à faibles ressources publicitaires et à la presse périodique régionale et locale, de l'aide au portage ou des financements accordés par le FSDP.

Une réflexion pourrait également être engagée sur un plafonnement global par groupe. Les aides étant versées aux titres de presse, il existe un risque de financer indirectement des groupes de grande taille auxquels sont adossées ces publications.

Recommandation n°1 : La conditionnalité des aides doit être renforcée et aboutir à une véritable contractualisation entre l'État et les groupes de presse concernés par les aides, prenant notamment en compte la taille de ceux-ci pour éviter d'aubaine.

3. Le ministère de la culture est en charge de la gestion du régime des aides à la presse écrite

Rattaché à la direction générale Médias et industries culturelles du ministère de la culture, le bureau du régime économique de la presse et des métiers de l'information est dédié à la gestion des aides directes à la presse. 11 personnes sont affectées au sein de ce bureau à la gestion des aides , dont 6 sont en charge de la gestion du fonds stratégique pour le développement de la presse et du fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse. Le bureau compte également en son sein un responsable des aides au pluralisme et portage.

Évolution des effectifs chargés des aides directes à la presse
depuis 2010

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

11

11

13

11

13

11

10

11

11

11

11

Source : Direction générale Médias et industries culturelles, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

L'évolution des effectifs depuis 2010 tend à démontrer que la mise en oeuvre de nouveaux dispositifs a ainsi été absorbée à effectifs constants par les services du ministère.

II. ... COMPLÉTÉES PAR UNE DÉPENSE FISCALE AUX EFFETS INCERTAINS

Les mesures fiscales en faveur de la presse sont, en dépit des réserves régulièrement exprimées par la commission des finances du Sénat ou la Cour des comptes sur leur efficacité, régulièrement prorogées voire déclinées, à l'instar du crédit d'impôt sur un premier abonnement adopté en troisième loi de finances rectificative pour 2020 ( cf infra ).

La loi de finances pour 2021 prévoit une dépense fiscale en faveur de la presse de l'ordre de 161 millions d'euros. Ce montant n'intègre pas la totalité des dispositifs mis en oeuvre : amendement « Charb », dispositifs adoptés en loi de finances rectificative pour 2020 et lois de finances pour 2021.

Dépenses fiscales en faveur de la presse

(en millions d'euros)

Type de dépenses

Chiffrage 2019

Chiffrage 2020

Chiffrage 2021

Taux de TVA de 2,10 % applicable aux publications de presse

155

140

150

Déduction spéciale prévue en faveur des entreprises de presse

1

1

1

Réduction d'impôt accordée au titre des souscriptions en numéraire au capital d'entreprises de presse

0

0

0

Exonération de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises dont les établissements vendent au public des écrits périodiques en qualité de diffuseurs de presse spécialisée

4

5

5

Exonération de cotisation foncière des entreprises dont les établissements vendent au public des écrits périodiques en qualité de diffuseurs de presse spécialisée

5

5

5

Total

165

151

161

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

A. UN RÉGIME DE RÉDUCTION OU D'EXONÉRATION DE CERTAINES TAXES

L'article 298 septies du code général des impôts (CGI) prévoit que les ventes, commissions et courtages portant sur les publications de presse bénéficient d'un taux de TVA réduit de 2,10 % en métropole et en Corse et de 1,05 % dans les départements de Guadeloupe, de Martinique et de la Réunion .

Afin de bénéficier de ce dispositif, les publications doivent avoir obtenu un numéro d'inscription à la commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) et une décision favorable du directeur des services fiscaux, prise sur demande des éditeurs intéressés. La publication doit avoir une périodicité au maximum trimestrielle, être payante et présenter un intérêt général, un lien direct avec l'actualité, apprécié au regard de l'objet de la publication, et un apport éditorial significatif. Sont ainsi exclues, notamment, les publications violentes ou pornographiques, non reconnues par la CPPAP. Ces titres sont taxés au taux normal de TVA. Les services de presse en ligne bénéficient de ce dispositif depuis le 1 er février 2014, dès lors qu'ils sont reconnus comme tels par la CPPAP 24 ( * ) .

Le coût de ce dispositif est évalué à 140 millions d'euros en 2020. 1 600 entreprises de presse ont bénéficié de ce dispositif en 2018, le montant de la dépense fiscale atteignant alors 190 millions d'euros. En 2018, le bénéfice de ce taux profitait pour 42,7 % à la presse d'IPG.

Coût et nombre de bénéficiaires du taux réduit de TVA
sur la presse

Année

Montant

(en millions d'euros)

Bénéficiaires

2010

195

2 000

2011

180

1 800

2012

250

1 700

2013

165

1 800

2014

160

1 700

2015

165

1 750

2016

160

1 700

2017

220

1 600

2018

190

1 600

2019

170

nc.

2020

170

nc.

Source : Direction générale Médias et industries culturelles, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Par ailleurs, la loi de finances pour 2018 a clarifié les règles de calcul du taux de TVA dans le cadre d'offres composites , afin de mieux tenir compte de la montée en puissance des kiosques numériques adossés à des opérateurs télécom. Le taux réduit n'est ainsi appliqué qu'aux sommes réellement reversées par les fournisseurs d'accès à internet et les opérateurs télécom à la presse.

Les entreprises de presse bénéficient en outre d'une exonération permanente de contribution économique territoriale (CET). La CET repose sur deux cotisations :

- la cotisation foncière des entreprises (CFE), fondée sur les bases foncières ;

- la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), dont le taux est fixé au niveau national selon un barème progressif.

Les services de presse en ligne sont également concernés par cette exonération. Le dispositif fait l'objet d'une compensation financière par l'État aux collectivités territoriales.

Le coût de la mesure pour l'État était évalué à 9 millions d'euros en 2019.

Coût et nombre des exonérations de CVAE et CFE
pour les entreprises de presse

Année

Dépense fiscale

Montant

(en millions d'euros)

Entreprises bénéficiaires (en nombre)

2017

CVAE

<0,5

50

CFE

4

124

2018

CVAE

<0,5

nc

CFE0

4

nc

2019

CVAE

4

1 370

CFE

5

2020

CVAE

nc.

CFE

5

4 332

Source : Direction générale Médias et industries culturelles, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

B. UN RÉGIME AVANTAGEUX POUR LES ENTREPRISES DE PRESSE

1. La réduction de l'impôt sur les sociétés pour les entreprises de presse

L'article 39 bis A du code général des impôts prévoit un régime spécial de provisions réglementées pour l'investissement (PPI) en faveur des entreprises de presse.

Aux termes de celui-ci, les entreprises de presse éligibles peuvent constituer une provision déductible de leur résultat imposable en vue de faire face aux dépenses suivantes :

- acquisition d'éléments d'actif (mobiliers, matériels, terrains, constructions) nécessaires à l'exploitation de la publication ou service de presse ;

- prise de participation dans des entreprises ayant pour activité principale l'édition d'un journal ou d'une publication, ou l'exploitation d'un service de presse en ligne exerçant dans un domaine similaire ou au sein d'entreprises assurant des prestations de service dans les domaines de l'information, de l'approvisionnement en papier, de l'impression ou de la distribution ;

- constitution de bases de données et acquisition du matériel nécessaire à leur exploitation ou à la transmission de ces données ;

- immobilisations liées à la recherche, au développement technologique et à l'innovation, au profit de leurs publications.

Sont éligibles au bénéfice de la provision spéciale les entreprises qui exploitent :

- un journal quotidien ;

- une publication au maximum mensuelle consacrée pour une large part à l'information politique et générale (IPG) ;

- un service de presse en ligne consacré pour une large part à l'information politique et générale.

Les sommes déduites sont limitées à 30 % du bénéfice de l'exercice concerné pour les publications autres que quotidiennes et pour les services de presse en ligne. Ce seuil est porté à 60 % pour les quotidiens.

Créé à compter de l'exercice 1997, le dispositif a régulièrement été prorogé en loi de finances. L'article 91 de la loi de finances pour 2018 prévoit de prolonger le régime jusqu'au 31 décembre 2020.

Bénéficiaires et coût du dispositif prévu à l'article 39 bis A
du code général des impôts

Année

Montant

(en millions d'euros)

Bénéficiaires (en nombre)

2010

0

0

2011

1

76

2012

7

83

2013

2

93

2014

2

87

2015*

0

82

2016

1

78

2017

1

73

2018

1

68

2019

1

nc.

2020

1

nc.

Source : Direction générale Médias et industries culturelles, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Créé en loi de finances pour 2017, l'article 39 bis B du code général des impôts étend les dispositions de l'article 39 bis A aux entreprises de presse en ligne centrées sur l'information professionnelle ou censées favoriser l'accès au savoir et à `la formation et la diffusion de la pensée, du débat d'idées, de la culture générale et de la recherche scientifique. Le mécanisme couvre également les exercices clos jusqu'au 31 décembre 2020 . Les sommes déduites sont limitées à 30 % du bénéfice de l'exercice concerné.

Le montant de la dépense fiscale s'est établi à 1 million d'euros en 2019, 63 entreprises en ayant bénéficié 25 ( * ) .

La loi de finances pour 2021 proroge ces deux dispositifs de provisions jusqu'au 31 décembre 2023 26 ( * ) . La prorogation du régime spécial de provisions réglementées pour l'investissement doit permettre de continuer à procurer un avantage de trésorerie aux entreprises de presse. Le bénéfice de la provision doit être subordonné au respect du règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013. Celui-ci encadre les aides d'État de faible montant (aides de minimis ), qui sont exemptées de contrôle, le plafond d'exemption de l'aide étant établi à 200 000 euros par entreprise pour une période de trois ans.

2. La réduction d'impôt pour souscription au capital des entreprises de presse
a) Les souscriptions des particuliers

Issu de l'article 19 de la loi n° 2015-443 du 17 avril 2015 portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse, l'article 199 terdecies -0 du code général des impôts prévoit, pour les contribuables domiciliés fiscalement en France, une réduction d'impôt sur le revenu en faveur des particuliers qui souscrivent au capital d'entreprises de presse . Ces entreprises doivent éditer une ou plusieurs publications ou services de presse en ligne d'information politique et générale ou consacrées pour une large part à l'information politique et générale. Les éditeurs de quotidiens sont également éligibles au dispositif.

Le dispositif vise à renforcer l'investissement des particuliers au sein des entreprises de presse et, par conséquent, l'indépendance de celles-ci.

La réduction d'impôt atteint 30 % du montant des versements effectués. Elle peut être portée à 50 % si les versements sont effectués en faveur d'une entreprise solidaire de presse d'information (ESPI) . La loi n° 2016-1524 du 14 novembre 2016 visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias a élargi le bénéfice de la réduction d'impôt aux versements effectués au profit d'une société dont l'objet statutaire est de détenir des participations au capital de sociétés de presse, à l'instar des sociétés d'amis ou de lecteurs.

Les versements ouvrant droit à cette réduction d'impôt sont plafonnés à 5 000 euros par an pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés. Ce plafond est porté à 10 000 euros pour les contribuables soumis à imposition commune.

La réduction d'impôt ne s'applique pas aux titres déjà contenus dans un plan d'épargne en actions ou dans un plan d'épargne salarial.

Initialement borné jusqu'au 31 décembre 2018, le dispositif a été prolongé en loi de finances pour 2019 jusqu'au 31 décembre 2021 27 ( * ) . La même loi de finances prévoit que les titres souscrits soient conservés pendant cinq ans.

La dépense fiscale a été évaluée à moins de 500 000 euros annuels depuis sa mise en oeuvre en 2016. Seuls 274 bénéficiaires ont été relevés en 2019, soit 17,5 % de moins qu'en 2018 . Cette faiblesse de la dépense fiscale comme le nombre réduit des contribuables usant de ce dispositif interroge quant à son efficacité.

Coût et nombre de bénéficiaires de la réduction d'impôt sur le revenu
en faveur des particuliers qui souscrivent au capital d'entreprises de presse

Année

Montant

(en millions d'euros)

Bénéficiaires

2016

<0,5

158

2017

<0,5

261

2018

<0,5

332

2019

<0,5

nc.

2020

<0,5

nc.

Source : Direction générale Médias et industries culturelles, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

La loi de finances pour 2021 prévoit néanmoins de doubler les plafonds applicables pour les versements effectués à partir du 1 er janvier 2021 28 ( * ) . Le doublement du plafond constitue une sorte de dernière chance pour un mécanisme par ailleurs concurrencé par le dispositif également mis en place dans le cadre de la loi de 2015 sur la modernisation de la presse qui élargit le régime fiscal du mécénat prévu à l'article 200 du code général des impôts aux associations oeuvrant pour le pluralisme de la presse ( cf infra ).

Le dispositif a eu surtout pour conséquence d'encourager les éditeurs à adopter le statut d'ESPI à l'image de Charlie Hebdo , Les Jours , L'Humanité ou Alternatives économiques .

b) Les souscriptions des entreprises

Introduit par la loi de finances pour 2007 29 ( * ) , l'article 220 undecies du code général des impôts prévoit que les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt égale à 25 % du montant des sommes versées au titre des souscriptions en numéraire au capital d'entreprises de presse soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun.

Ces entreprises doivent exploiter un journal quotidien ou une publication de périodicité au maximum mensuelle consacrée à l'information politique et générale.

Les souscriptions doivent avoir été réalisées entre le 1 er janvier 2007 et le 31 décembre 2013 . Les entreprises doivent s'engager à conserver les titres auxquels elles souscrivent pendant une durée de cinq ans.

Aucun lien de dépendance ne doit par ailleurs être établi entre l'entreprise souscriptrice et l'entité qui bénéficie de cet investissement. L'entreprise souscriptrice ne doit pas, par ailleurs, bénéficier d'une souscription équivalente de la part d'une autre entreprise, ouvrant ainsi droit à une réduction d'impôt équivalente.

La loi de finances pour 2021 rétablit le principe d'une réduction d'impôt équivalant à 25 % du montant d'une souscription au capital d'une société de presse, qui interviendrait entre le 1 er janvier 2021 et le 31 décembre 2024 30 ( * ) . Il s'agit ainsi de favoriser la reprise de l'investissement au sein des entreprises de presse. Cette souscription ne peut concerner que des publications ou des services de presse en ligne d'information politique et générale 31 ( * ) ou consacrés pour une large part à l'information politique et générale 32 ( * ) . Le bénéfice de la réduction d'impôt doit, par ailleurs, respecter le droit européen applicable aux aides de minimis .

Le rétablissement de ce dispositif n'est pas sans susciter d`interrogation. tant l'efficience du mécanisme original a été rapidement remise en question puisqu'il n'a pas été prorogé au-delà de 2013. La Cour des comptes avait ainsi relevé que la réduction d'impôt pouvait apparaître peu pertinente au regard du faible montant de la dépense fiscale et du nombre réduit de bénéficiaires. Ainsi, en 2013, seules 18 entreprises avaient bénéficié de cette réduction, le montant de la dépense fiscale étant estimé à 1 million d'euros.

Évolution de la dépense fiscale liée à la réduction de l'impôt sur les sociétés
au titre des souscriptions au capital des entreprises de presse

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Nombre d'entreprises bénéficiaires

Non déterminé

Non déterminé

2

47

50

26

18

Montant de la dépense fiscale

(en millions d'euros)

Non significatif

Non significatif

1

Non significatif

Non significatif

Non significatif

1

Source : commission des finances d'après les Rapports Évaluation des voies et moyens tome II (2008-2014)

3. Un mécénat particulier : l'amendement « Charb »

La loi du 17 avril 2015 élargit également le régime fiscal du mécénat prévu à l'article 200 du code général des impôts aux associations oeuvrant pour le pluralisme de la presse (« amendement Charb »). L'article ouvre également la possibilité pour des fonds de dotation de soutenir des associations ou fondations agissant dans le soutien du pluralisme de la presse. Les organismes éligibles sont les associations d'intérêt général, les fonds de dotation d'intérêt général qui exercent des actions concrètes en faveur du pluralisme de la presse et les fonds de dotation qui financent des associations d'intérêt général en faveur du pluralisme de la presse.

À l'heure actuelle, deux associations gèrent des dons dans ce cadre :

- Presse et Pluralisme, pour les publications, créée en décembre 2007, à l'initiative des principaux syndicats de la presse française imprimée. Elle vise à oeuvrer en faveur du pluralisme de la presse payante en France ;

- J'aime l'info, pour les sites de presse en ligne, créée en 2011.

Les donateurs peuvent affecter leurs dons au financement d'une entreprise ou d'un service de presse en ligne spécifique. Cet éditeur doit être, lui-même, éligible au régime de l'article 39 bis A du code général des impôts et donc bénéficier de la qualification IPG. Cependant, pour bénéficier de cette réduction, il ne faut pas qu'il existe de lien économique et financier, direct et indirect, entre le donateur et le bénéficiaire.

Dons aux entreprises de presse éligibles au régime fiscal du mécénat

Dons gérés par l'association Presse et pluralisme

Dons gérés par l'association J'aime l'info

Nombre de bénéficiaires

Montant des dons (en euros)

Nombre de bénéficiaires

Montant des dons (en euros)

2011

19

1 900 000

17

11 629

2012

24

1 700 000

14

95 508

2013

23

2 787 000

30

81 888

2014

39

3 267 000

22

147 402

2015

46

7 370 000 33 ( * )

42

757 340 34 ( * )

2016

49

5 640 000

42

308 593

2017

40

4 223 000

48

469 724

2018

49

4 024 000

55

1 014 897

2019

46

4 855 000

73

1 793 053

2020

48

2 972 000

65

2 043 446

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

C. DES ABATTEMENTS SPÉCIFIQUES POUR CERTAINES PROFESSIONS

1. L'imposition fiscale et sociale des journalistes

L'arrêté du 26 mars 1987 prévoit qu'un abattement de 20 % est appliqué aux taux de cotisations de sécurité sociale « dues par les agences ou entreprises de presse au titre de l'emploi des journalistes professionnels et assimilés mentionnés à l'article L. 311-3-16° du code de la sécurité sociale » .

Par ailleurs, conformément à l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002, les professions prévues à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, parmi lesquelles figurent les journalistes professionnels, peuvent bénéficier d'une déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels (DFS) . Cette déduction est fixée à 30 % dans la limite de 7 600 euros par année civile par salarié et par an.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, sans modifier le mécanisme de la DFS et sans affecter les cotisations salariales a réduit l'effet favorable de cet allègement sur la réduction générale de cotisations des employeurs. De fait, à compter du 1 er janvier 2020, les allègements généraux dont bénéficient les employeurs éligibles à la DFS seront plafonnés à 130 % des allègements auxquels a droit un employeur de droit commun pour un salarié à même niveau de salaire 35 ( * ) .

En outre, aux termes de la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993, lorsque le revenu des correspondants locaux de presse est inférieur à 15 % du plafond de la sécurité sociale, l'affiliation aux régimes sociaux est facultative, ce qui revient à les exempter de cotisations sociales. Si leur revenu est supérieur à ce seuil mais inférieur à 25 % du même plafond, l'affiliation est obligatoire mais l'État prend en charge 50 % des cotisations d'assurance maladie-maternité et d'assurance vieillesse. Cette exonération est compensée au régime social des indépendants (RSI) et à la caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) par le programme budgétaire 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » de la mission « Travail et emploi ».

Coût pour l'État de l'affiliation facultative aux régimes sociaux des correspondants locaux de presse

Année

Montant

(en millions d'euros)

Bénéficiaires (en nombre)

2012

0,1

161

2013

0,1

67

2014

0,1

229

2015

2016

0,048

95

2017

0,034

96

2018

0,03

84

2019

-0,01

nc.

2020 (p)

0,04

nc.

Source : Direction générale Médias et industries culturelles, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

L'article L.242-11 du code de la sécurité sociale prévoit, par ailleurs, une réduction dans la limite de 3,1 points des taux des cotisations d'allocations familiales des travailleurs indépendants non agricoles (dont les correspondants locaux de presse - dont les revenus d'activité sont inférieurs à un seuil fixé par décret.

2. Les cotisations sociales des vendeurs-colporteurs et les porteurs de presse

Depuis la loi n° 91-1 du 3 janvier 1991, le montant des cotisations de sécurité sociale dues par les vendeurs-colporteurs et les porteurs de presse est assis sur une assiette forfaitaire . Un arrêté du 30 juillet 1996 a fixé celle-ci à 4 % du plafond journalier de la sécurité sociale.

Les vendeurs-colporteurs de presse (VCP) exercent leur profession à titre indépendant pour le compte d'un éditeur de presse quotidienne ou assimilée, d'un dépositaire (niveau 2) ou d'un diffuseur (niveau 3), qui est juridiquement leur mandant. Les porteurs de presse salariés sont généralement employés par des sociétés de portage, souvent développées par des quotidiens régionaux.

Pour des raisons de facilité d'organisation, les éditeurs ou les entreprises de portage recourent généralement soit au statut de VCP (environ 10 000 VCP en presse quotidienne régionale - PQR) soit au statut de porteur salarié (environ 12 000 en PQR).

Aux termes de l'article 22 bis de la loi du 3 janvier 1991, une entreprise peut à chaque versement de la rémunération et pour chaque intervenant :

- opter pour l'application de l'assiette forfaitaire des cotisations dues pour les VCP ou porteurs salariés,

- ou, en cas d'accord, calculer les cotisations selon les conditions de droit commun, soit sur les rémunérations effectivement allouées afférentes à l'activité de porteur ou de VCP.

Cette assiette forfaitaire est identique pour les deux statuts et établie par arrêté.

Le même article prévoit, en outre, pour les VCP et les porteurs salariés, l'exonération de versement de charges sociales patronales (hors accidents du travail et maladies professionnelles) pour l'employeur ou le mandant. Le bénéfice de ces exonérations a été ouvert aux porteurs de presse quotidienne gratuite d'information politique et générale en 2009 puis étendu en 2014 aux porteurs de presse hebdomadaire d'information politique et générale.

Le manque à gagner qui en résulte pour les régimes de sécurité sociale est compensé par l'État via le programme 180 et reversé à l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) .

Coût des exonérations de cotisations sociales
pour les VCP et les porteurs salariés

Année

Montant

(en millions d'euros)

2012

17

2013

18,4

2014

18

2015

15,7

2016

14,2

2017

15

2018

15,14

2019

12,10

2020 (p)

9,73

Source : Direction générale Médias et industries culturelles, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

La loi de finances pour 2021 prévoit une dotation de 12,89 millions d'euros. Ce montant repose sur un nombre de porteurs de presse estimé à 14 340 pour la presse payante et 15 220 pour la presse gratuite, ainsi que sur un nombre moyen d'exemplaires portés mensuellement par porteur de 3 123 pour la presse payante et de 1 009 pour la presse gratuite.

Hypothèses retenues pour le calcul de la compensation de l'exonération de cotisations sociales des vendeurs-colporteurs et porteurs de presse en 2021

Estimation des effectifs en 2021

Montant mensuel de l'exonération en 2021

(en euros)

Prévision du montant de l'exonération 2021

(en millions d'euros)

Vendeurs-colporteurs et porteurs de presse payante

14 340

46,31

7,97

Vendeurs-colporteurs et porteurs de presse gratuite

15 220

26,89

4,91

Total

12,89

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

D. UN DISPOSITIF INNOVANT: LE CRÉDIT D'IMPÔT AU TITRE D'UN PREMIER ABONNEMENT

L'article 2 de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 36 ( * ) instaure un crédit d'impôt au titre du premier abonnement à une publication ou à un service de presse en ligne qui présente le caractère de presse d'information politique et générale (IPG).

Le crédit vise un seul abonnement. Initialement destiné à couvrir 50 % du montant de l'abonnement dans la limite de 50 euros et ouvert aux seuls foyers fiscaux dont le montant des revenus n'excède pas pour une part de quotient familial, 24 000 euros, le dispositif a été amendé à l'initiative du Sénat afin de le rendre plus attractif en supprimant la condition de revenus et le plafond de 50 euros tout en ramenant la prise en charge à 30 % du montant de l'abonnement. Il est accordé une fois pour un même foyer fiscal jusqu'au 31 décembre 2022.

Le coût de la dépense fiscale en année pleine est évalué à 60 millions d'euros. Le crédit d'impôt a été déclaré conforme au droit de l'Union européenne en matière d'aides d'État par la Commission européenne le 16 avril 2021 37 ( * ) et a pu entrer en vigueur le 9 mai suivant 38 ( * ) .

Ce dispositif doit permettre d'augmenter le lectorat et faciliter ainsi un redémarrage du marché publicitaire tout en garantissant un flux de trésorerie pour les entreprises de presse.

III. UNE DOUBLE CRISE QUI INCITE À UNE RÉVISION EN PROFONDEUR DU RÉGIME DES AIDES À LA PRESSE ÉCRITE

Les difficultés structurelles rencontrées par le secteur depuis quelques années ont été renforcées par la crise sanitaire. Celle-ci a débouché sur de nouvelles mesures de soutien.

Les aides à la presse représentaient, avant la mise en place de nouveaux dispositifs dans le cadre du Plan de relance ( cf infra ), 21,4 % du chiffre d'affaires du secteur , soit une progression de 6 points sur les dix dernières années.

Il y a lieu de s'interroger dans ces conditions tant sur le risque qu'une telle dépendance aux fonds publics peut faire peser sur l'indépendance de la presse que sur la pertinence des dispositifs mis en place . Ceux-ci permettent, en effet, de maintenir sous perfusion un secteur sans l'inciter réellement à mener à bien les choix industriels nécessaires en vue de s'adapter aux nouvelles habitudes de lecture . Un changement de philosophie apparaît indispensable, la crise sanitaire ayant manifestement accéléré cette mutation du lectorat.

L'absence d'évolution majeure du régime des aides à la presse conduit en effet inévitablement à la transformation de celui-ci en un mécanisme de rente .

A. LA CRISE SANITAIRE EST VENUE EXACERBER LES DIFFICULTÉS STRUCTURELLES D'UN SECTEUR DÉJÀ FRAGILISÉ PAR L'EFFONDREMENT DE PRESSTALIS

1. La crise sanitaire a conforté les nouvelles habitudes de lecture

La diffusion de l'ensemble des titres de presse, qui était stabilisée autour de 7 milliards d'exemplaires pendant près de vingt ans connaît une forte érosion depuis 2009. Celle-ci est liée en grande partie à la chute de la diffusion de la presse gratuite d'annonces. Il n'en demeure pas moins que tous les types de presse sont concernés. Ainsi en 2018, la diffusion de l'ensemble des titres de presse s'établissait à 3,2 milliards d'exemplaires, soit une baisse de 43,5 % depuis 2009.

Entre 2009 et 2018, la plupart des acteurs ont connu une baisse de leur diffusion de 50 %, la presse locale d'information enregistrant une moindre baisse, établie à environ 30 %. L'indicateur 2.1 du programme 180 « Presse et médias » traduit assez nettement cette attrition.

Indice de diffusion de la presse écrite d'IPG nationale et locale (quotidiens payants et gratuits et magazines hebdomadaires)

(Base 100 en 2007)

2018

2019

2020 (prévision actualisée)

2021 (prévision)

2023 (cible)

72,5

70

64,9

63,2

59,9

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

La crise sanitaire est, dans ces conditions, venue aggraver une situation déjà délicate pour la plupart des acteurs de la filière.

a) Des difficultés pour l'ensemble des éditeurs...

La perte de chiffre d'affaires pour l'ensemble du secteur est estimée, par le ministère de la culture, à 1,9 milliard d'euros en 2020 , soit une chute de 16 % par rapport à 2019 39 ( * ) . Circonscrite aux éditeurs de journaux, la perte atteint 559 millions d'euros par rapport à 2019 (- 15 %), les éditeurs de revue et de périodiques enregistrant un recul de 728 millions d'euros (- 16 %).

Toutes les familles de presse ont été fragilisées par la crise sanitaire et la liquidation concomitante de Presstalis. La diffusion de la presse quotidienne nationale en version papier a ainsi chuté de 25 % en 2020, celle de la presse quotidienne régionale de 7 %. La presse hebdomadaire régionale enregistre, quant à elle, un recul de sa diffusion papier de 5 %. Cette décrue se poursuit en 2021. Les ventes au numéro chutent de 22 % pour les quotidiens nationaux sur la période Janvier-Février, celles des quotidiens régionaux de 9 % et celles de la presse hebdomadaire régionale de 7 %.

Les abonnements numériques ne compensent pas pour la presse régionale cette forte attrition de la diffusion papier.

b) ... et la plupart des points de vente

L'activité presse moyenne d'un magasin spécialisé indépendant a de son côté baissé de 4,2 % par rapport à 2019.

Les chiffres transmis par Culture presse au rapporteur spécial mettent en avant, dans le réseau des diffuseurs, une progression des ventes magazines de 1,4 %, qui contraste avec la chute de 17 % des ventes. L'arrêt de toute manifestation sportive, puis une reprise sans public, ont pesé sur les ventes de l'Équipe qui tend à modeler la tendance, mais également des quotidiens hippiques. Cette baisse relative n'a toutefois pas été inversée, la fréquentation des points de vente n'étant pas revenue à son niveau d'avant crise. La perte du nombre de clients est ainsi estimée à 10 %, soit un million de clients en moins chaque jour pour le réseau des magasins indépendants.

L'exercice 2020 a par ailleurs été marqué par la suppression de 1 068 points de vente, 4,9 % du total ( cf. supra ), soit une nette accélération du rythme des fermetures , qui n'avait concerné que 2,6 % des points de vente l'année précédente. Ce mouvement de fermeture a été pour partie ralenti par l'accès de ces commerces aux dispositifs d'aides transversaux mis en place par l'État mais aussi plus largement par le dispositif d'accompagnement de la liquidation de Presstalis et du lancement de France Messagerie ( cf infra ) qui a permis de maintenir les marges des marchands sur leur activité presse.

Impact de la crise sanitaire sur différents indicateurs en 2020

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat

2. Une baisse des recettes publicitaires antérieure à la crise sanitaire

En dépit de la progression des téléchargements, la crise sanitaire est venue exacerber les difficultés rencontrées par le secteur qui se résument principalement à une chute des ventes et à une attrition concomitante des recettes publicitaires.

Les recettes des éditeurs de journaux et magazines proviennent principalement de quatre postes :

- la vente au numéro ;

- les abonnements ;

- les recettes publicitaires ;

- les recettes d'annonces.

Le chiffre d'affaires réalisé par les éditeurs grâce à leurs activités presse (ventes d'exemplaires et recettes publicitaires) aurait baissé de 3,9 % en 2018 par rapport à 2017 pour s'établir à 6,5 milliards d'euros (10,6 milliards d'euros en 2000). Sur les dix dernières années, le chiffre d'affaires de la presse s'est réduit de plus d'un tiers.

Les recettes liées aux ventes (numéros et abonnements) étaient ainsi en baisse de - 3,9 % en 2018, par rapport à l'année précédente. Le chiffre des recettes de ventes a diminué de 23 % : si une stabilité des recettes d'abonnement est observable, elle ne permet pas de compenser une décrue de 38 % des recettes de ventes au numéro.

Part des recettes dans le chiffre d'affaires pour l'ensemble de la presse payante

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017 (p)

2018 (p)

Part des recettes de ventes dans le chiffre d'affaires

65,8%

64,8%

66,6%

67,7%

69,4%

69,6%

70,2%

70,6%

71,1%

Part des recettes de publicitaires dans le chiffre d'affaires

34,2%

35,2%

33,4%

32,3%

30,6%

30,4%

29,8%

29,4%

28,9%

Note : le chiffre d'affaires retenu dans le tableau correspond aux seules activités presse, qui ne constituent qu'une partie du chiffre d'affaires des éditeurs, ces derniers ayant fortement diversifié leurs sources de revenus (événementiel, services aux entreprises, etc.)

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

En 2018, le chiffre d'affaires était réalisé pour environ 71 % par les ventes de journaux ou périodiques (par numéro ou par abonnement) et pour près de 29 % par la publicité (même si celle-ci est en nette baisse de 13 points sur les 10 dernières années). Les recettes des ventes par abonnement deviennent la principale composante du chiffre d'affaires des éditeurs , tendance appelée à progresser au regard des nouveaux modèles économiques des éditeurs de presse.

Part des recettes de ventes dans le chiffre d'affaires par famille de presse

(en %)

Famille de presse

2010

2012

2013

2014

2015

2016

2017 (p)

2018 (p)

Part des recettes de ventes au numéro et par abonnement dans le chiffre d'affaires

Presse Quotidienne Nationale

61,0

64,4

66,8

67,6

67,3

65,9

66,1

65,5

Presse Quotidienne Régionale

61,3

63,9

64,9

66,2

66,8

67,3

68,4

68,9

Presse magazine grand public

75,2

74,8

74,8

75,7

78,2

78,1

78,5

80,3

Presse magazine technique et professionnelle

50,5

51,4

57,1

56,8

54,2

58,1

58,0

56,9

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Il convient par ailleurs de rappeler que de nombreux éditeurs ont diversifié leurs activités ( business to business et business to consumer ) dans l'événementiel ou les services aux entreprises. Le chiffre d'affaires des activités presse tend ainsi à reculer dans le chiffre d'affaires des éditeurs.

a) Une tendance structurellement baissière

Les chiffres transmis par la direction générale Médias et Industries culturelles révèlent avant la crise sanitaire une baisse notable des recettes publicitaires depuis 2011. La part des recettes liées aux publicités et aux annonces dans la presse payante est en effet en constante diminution : établie à près de 35 % du chiffre d'affaires en 2011 elle est ramenée à 28,9 % en 2018.

Le recul des recettes publicitaires (recettes de publicités et d'annonces) est particulièrement net au cours des derniers exercices : - 5,8 % en 2018 par rapport à 2017 puis -4,1 % en 2019 par rapport à 2018.

Si la part des recettes publicitaires dans le chiffre d'affaires de la presse quotidienne nationale a progressé en 2018, elle résulte d'un effet mécanique lié à une forte baisse des abonnements papiers. La baisse des revenus publicitaires la plus prononcée concerne la presse magazine grand public (- 1,8 point), secteur marqué jusqu'alors par une grande stabilité des revenus publicitaires.

Part des recettes publicitaires dans le chiffre d'affaires par famille de presse

(en %)

Famille de presse

2010

2012

2013

2014

2015

2016

2017 (p)

2018 (p)

Part des recettes de publicités et d'annonces dans le chiffre d'affaires

Presse Quotidienne Nationale

39,0

35,6

33,2

32,4

32,7

34,1

33,9

34,5

Presse Quotidienne Régionale

38,7

36,1

35,1

33,8

33,2

32,7

31,6

31,1

Presse magazine grand public

24,8

25,2

25,2

24,3

21,8

21,9

21,5

19,7

Presse magazine technique et professionnelle

49,5

48,6

42,9

43,2

45,8

41,9

42,0

43,1

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Les recettes publicitaires totales reculent, en outre, sans que les recettes de la publicité en ligne, en grande partie captées par les géants du numérique (Google, Facebook, etc.), puissent compenser cette tendance : par exemple, les recettes publicitaires display de la presse sont en baisse (- 2 %) en 2017 alors que le marché du display est en croissance (+ 20 %).

b) Un effondrement en 2020

Le Baromètre Unifié du Marché Publicitaire constate en 2020 une baisse des dépenses de communication (-21,6%) supérieure au recul de l'activité économique. Cette réduction est nettement plus importante que celle constatée en 2009 : -8,5 %.

La presse papier a, dans ce contexte, perdu 23,7 % de ses recettes publicitaires par rapport à 2019 , les recettes publicitaires de la presse papier dépassant à peine 1,5 milliard d'euros. Toutes les familles de presse sont concernées par cette baisse.

Évolution des recettes publicitaires de la presse papier en 2020

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat

Les recettes sont cependant restées stables en ligne, même si des situations contrastées ont pu être observées selon la part de publicité programmatique et l'évolution des audiences de chacun des éditeurs. La presse quotidienne régionale a présenté des performances particulièrement intéressantes : +9 %. Reste que ces revenus supplémentaires ne couvrent que 5 % des pertes liées à la publicité imprimée.

Les perspectives pour 2021 sont également inquiétantes. Les mesures de confinement adoptées fin mars 2021 devraient affecter la reprise. Le rebond de 10 % des recettes publicitaires attendu pourrait être ramené à 8 %. Une baisse de 9 % du nombre d'annonceurs est également attendue, avec un risque croissant de transfert des opérations de communication vers d'autres supports.

Face à l'effondrement des recettes publicitaires mais aussi des flux financiers liés aux petites annonces, privées ou judiciaires et légales ( cf infra ) , l'évolution du chiffre d'affaires tend à montrer une dépendance accrue aux abonnements. Une telle évolution axée autour de la fidélisation du lectorat rend encore plus cruciale la question de la distribution du journal et induit une réflexion sur l'orientation des aides autour de ce sujet.

Répartition du chiffre d'affaires selon les recettes

(en pourcentage)

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

La réforme des annonces judiciaires et légales et ses conséquences

Les annonces légales et judiciaires (AJL) représentent une manne annuelle de 240 millions d'euros pour la presse écrite. Cette recette est appelée à diminuer sensiblement au cours des cinq prochaines années.

Aux termes de la loi n° 55-4 du 4 janvier 1955, la publication des AJL est réservée à la seule presse imprimée. La procédure d'habilitation a cependant été révisée par la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi « Pacte », afin de tenir compte de l'émergence de la presse numérique. Ainsi, les SPEL sont désormais éligibles à la publication d'AJL.

Cette ouverture s'accompagne de la mise en place d'une nouvelle grille de tarification. La loi Pacte prévoit en effet la mise en oeuvre de tarifs forfaitaires dès janvier 2021 pour les annonces relatives à la constitution de sociétés. Ces forfaits doivent prendre la forme d'un tarif fixe, quelle que soit la taille de l'annonce, et différencié selon la forme juridique de la société créée. De plus, des tarifs forfaitaires spécifiques à l'outre-mer seront mis en place afin de tenir compte de la situation particulièrement dégradée de la presse dans ces territoires. D'autres catégories d'AJL pourront faire l'objet d'une tarification forfaitaire au cours des années suivantes. Les AJL ne faisant pas l'objet d'une tarification forfaitaire restent quant à elles facturées à la ligne.

La loi Pacte prévoit dans le même temps la détermination d'une trajectoire quinquennale de dégressivité du tarif de publication des annonces (forfait pour les annonces concernées et tarif au signe pour les autres). La période de 5 ans doit permettre aux éditeurs de faire évoluer leur modèle économique afin de faire en sorte que cette diminution tarifaire leur soit soutenable. Une première baisse des tarifs de 2,1 % a été mise en oeuvre au 1 er janvier 2020 en France métropolitaine. Afin de tenir compte de la situation exceptionnelle causée par la crise sanitaire, la dégressivité des tarifs est suspendue en 2021.

Source : commission des finances du Sénat

3. La liquidation de Presstalis résout une difficulté conjoncturelle majeure mais ne règle pas définitivement la question de la distribution

La loi de finances pour 2020 prévoyait un financement par l'État de Presstalis à hauteur de 27,79 millions d'euros, via l'aide à la distribution.

À la suite de la cessation des paiements de Presstalis en avril 2020, (l'impasse de trésorerie était alors estimée à 50 millions d'euros), l'État s'est engagé pour assurer les besoins de financement de la société avant sa reprise par une nouvelle structure :

- 35 millions d'euros ont été dégagés via un prêt du Fonds de développement économique et social (FDES) ;

- 17 millions d'euros ont, par ailleurs, servi au financement de la période intercalaire permettant aux actionnaires de finaliser leurs négociations pour éviter une liquidation sèche de la société.

La troisième loi de finances rectificative pour 2020 a, également, permis de dégager 68 millions d'euros afin d'amorcer la reprise d'une partie des activités de Presstalis (la partie dépôt étant, à l'exception du site de Paris - Bobigny, liquidée) par la CDQ et la nouvelle société France Messagerie, via la création d'une troisième section de l'aide à la distribution 40 ( * ) . Celle-ci concerne les sociétés coopératives de groupage de presse qui sont associées d'une société agréée de distribution de la presse assurant la distribution de quotidiens nationaux d'information politique et générale. Seule la CDQ, structure de reprise de France Messagerie, est de jure éligible à cette section de l'aide. Un prêt de 12 millions d'euros à la CDQ vient compléter cette aide directe. D'une maturité de 6 ans son remboursement devrait débuter le 1 er janvier 2022.

Ce soutien de l'État a été conditionné à la prise en charge par les éditeurs du coût des départs pour la période 2021-2022 (133 salariés licenciés au niveau 1 auxquels s'ajoutent les 512 postes supprimés au titre de la suppression des activités de dépositaire). Ce coût est estimé à 47 millions d'euros. Une contribution de 2,25 % versée par les éditeurs permet un premier financement à hauteur de 27 millions d'euros. Une nouvelle contribution exceptionnelle, de la part des 30 premiers éditeurs, est instaurée pour les 20 millions d'euros restants.

L'État a également réglé les chèques de qualification dus aux diffuseurs de presse au titre du second semestre 2019 (16,23 millions d'euros) et à hauteur de 11,56 millions d'euros, les chèques de qualification dus aux diffuseurs de presse au titre du premier semestre 2020.

Il convient de rappeler à ce stade que 436 éditeurs de presse ont perdu environ 120 millions d'euros de créances. La troisième loi de finances rectificative pour 2020 prévoit en outre l'octroi d'une aide de 8 millions d'euros aux éditeurs IPG particulièrement touchés par la crise de la distribution de la presse et la faillite de Presstalis. Ce dispositif a bénéficié à 31 éditeurs.

L'aide aux diffuseurs de presse indépendants et spécialistes, accordée dans le cadre de la troisième loi de finances rectificative et dotée de 19 millions d'euros s'inscrit également dans le prolongement de la liquidation de Presstalis.

L'aide aux diffuseurs de presse indépendants et spécialistes

Cette aide exceptionnelle est destinée à répondre aux difficultés des 10 500 diffuseurs et spécialistes face aux mouvements de grève liés à la mise en redressement judiciaire de Presstalis. Trois dispositifs similaires avaient été instaurés en 2009 (50 millions d'euros reversés à 12 500 diffuseurs), 2011 (14 millions d'euros attribués à 10 000 diffuseurs) et 2014 (0,72 million d'euros attribué à 480 entreprises).

Forfaitaire, le montant de l'aide dépend de la zone géographique. Elle vise particulièrement les marchands dépendant des anciens dépôts de Presstalis SAD (Ajaccio, Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Nantes, Rennes, Toulouse et Tours) et SOPROCOM (Avignon, Bastia, Crépy-en-Valois, Fréjus, Le Mans, Nancy), particulièrement concernés par les mouvements sociaux, notamment à Lyon et Marseille.

1 500 euros sont donc attribués aux 6 619 diffuseurs indépendants et spécialistes non rattachés à un dépôt SAD et SOPROCOM. 2 000 euros sont versés aux 3 224 kiosques et aux diffuseurs indépendants et spécialistes qui étaient rattachés à un dépôt appartenant au niveau 2 de Presstalis, en dehors des zones de Lyon et Marseille. 3 000 euros sont enfin versés aux 680 diffuseurs indépendants et spécialistes qui étaient rattachés aux dépôts SAD de Lyon et Marseille.

Au 9 février 2021, 5 925 diffuseurs avaient été payés pour un montant de 10,6 millions d'euros.

Il convient de rappeler à ce stade que les diffuseurs ne sont pas traditionnellement couverts par le régime des aides à la presse.

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire et au questionnaire du rapporteur spécial

L'État a, en outre, renoncé aux créances dues par Presstalis au titre des prêts du Fonds de développement économique et social (FDES) octroyés en 2012 et 2015, le montant de cet abandon de créances est estimé à 86 millions d'euros, dont 7 millions d'euros d'intérêts.

Au final, en additionnant les abandons de créances aux crédits accordés en loi de finances initiale puis dans le cadre du troisième collectif budgétaire, l'aide de l'État accordée en vue de la liquidation de Presstalis et du lancement de France Messagerie s'est élevée à 300,58 millions d'euros en 2020. Un nouvel abandon de créances visant cette fois-ci 90 millions d'euros accordé en 2018 par le FDES aux deux actionnaires de Presstalis, la Coopérative de distribution des magazines (CDM) et la Coopérative de distribution des quotidiens (CDQ) est également envisagé .

Crédits dédiés à l'accompagnement de liquidation de Presstalis et son remplacement par France Messagerie

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Dans le cadre de ses nouvelles missions ( cf infra ), l'ARCEP a, de son côté, élaboré un cahier des charges pour les messageries de presse. Après avoir obtenu l'aval du ministère de la culture, ce document a été publié par décret le 13 avril 2021 41 ( * ) . Il devrait servir de feuille de route aux nouveaux acteurs, à l'instar de France Messagerie. Un agrément définitif devrait être accordé aux distributeurs d'ici la fin 2021 et consolider ainsi la position de France Messagerie.

L'ARCEP a, par ailleurs, favorisé le rapprochement de France Messagerie et des Messageries lyonnaises de presse en vue de la mise en place, en juillet 2022, d'un système d'information commun.

La situation du nouvel opérateur apparaît cependant toujours aussi fragile, dépendante de nombreux aléas, qu'il s'agisse des restrictions d'activité liées aux mesures sanitaires ou, plus structurellement, à l'attrition du nombre de lecteurs de journaux papiers. Rien n'indique aujourd'hui que les moyens dédiés par l'État à la sauvegarde de Presstalis, qui ont pour partie manqué au soutien à une nouvelle stratégie industrielle pour la presse, ne soient pas de nouveau à l'avenir fléchés vers le maintien sous assistance respiratoire de France Messagerie au détriment d'un soutien plus ciblé en faveur de la modernisation.

B. LA RÉVISION DE LA LOI « BICHET » DOIT DÉSORMAIS ÊTRE COMPLÉTÉE PAR UNE RÉVISION DU RÉGIME DES AIDES À LA PRESSE

La loi du 18 octobre 2019 relative à la modernisation de la distribution de la presse 42 ( * ) est venue modifier en profondeur la loi du 2 avril 1947 relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques (dite « loi Bichet ») 43 ( * ) . Elle révise en premier lieu la régulation du secteur.

Elle confie notamment la régulation de la distribution de la presse à l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) en lieu et place du Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP), organisme de droit privé, et de l'Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP), autorité administrative indépendante. L'ARDP a, en conséquence, été dissoute et l'essentiel des compétences de régulation du CSMP a été transféré à l'ARCEP. Au titre de ses nouvelles missions, l'ARCEP doit émettre un avis sur les tarifs de distribution et l'assortiment, élaborer un cahier des charges pour les distributeurs et favoriser le développement de la comptabilité analytique chez les diffuseurs.

L'ARCEP fixe également les règles de répartition , entre toutes les entreprises de presse adhérant aux sociétés coopératives de groupage de presse utilisant les services des sociétés agréées de distribution de presse, des coûts spécifiques et ne pouvant être évités induits par la distribution des quotidiens (mécanisme de péréquation).

Le mécanisme de péréquation

Le mécanisme de péréquation a été mis en place en 2012, sous la forme d'une contribution des sociétés coopératives de groupage. Celle-ci est répartie au prorata des montants annuels respectifs de ventes de ces coopératives. Un acompte provisionnel est ainsi versé mensuellement par chaque coopérative, avant régulation annuelle.

Les surcoûts spécifiques liés à la distribution de la presse étaient estimés à 16,4 millions d'euros en 2019, sur la base des montants constatés en 2018 (soit 1,19 % des ventes en montant fort - VMF - des titres distribués par l'ensemble des éditeurs, toutes coopératives confondues, en 2018). La péréquation est était initialement versée à Presstalis. La liquidation de cette société et la création de France Messagerie ont conduit l'ARCEP à demander le reversement des acomptes provisionnels à France Messagerie, sur la base des montants constatés en 2018.

L'ARCEP devrait procéder à l'automne 2021, via une décision, au calcul du montant définitif de la péréquation au titre de l'année 2020. Elle devrait déterminer une régularisation de l'écart entre les acomptes payés et le montant définitif dû par chaque éditeur au titre de la péréquation. Le montant dû mensuellement par chaque distributeur de presse reste, en attendant, fixé à 1,19% des ventes en montant fort (VMF) totale du mois précédent des titres qu'il distribue.

L'ARCEP a également lancé une consultation pour définir les modalités de calcul des péréquations à venir. Une première consultation publique, lancée le 17 décembre 2020, a permis d'exposer l'approche envisagée pour le futur mécanisme de péréquation. Une seconde consultation publique, qui devrait être lancée au deuxième trimestre 2021, présenterait les hypothèses et la méthode envisagée pour calculer le montant de la péréquation. À la suite de ces deux consultations publiques, l'ARCEP adoptera une décision arrêtant la méthode de calcul de la péréquation retenue. Le nouveau taux unique d'acompte en vigueur sera inscrit dans la décision attendue à l'automne 2021.

Source : commission des finances du Sénat

L'ARCEP a bénéficié pour accomplir ses nouvelles missions du recrutement de 8 ETPT (5 en 2020 et 3 en 2021) et d'un transfert de 225 000 euros (AE = CP) en provenance du programme 308 « Protection des droits et libertés », aux fins d'intégration de l'ARDP en son sein.

La révision de la loi Bichet a également abouti à la création de la commission du réseau de la diffusion de la presse (CRDP) , personne morale de droit privé composée de représentants des éditeurs de journaux et publications périodiques et de personnalités qualifiées en matière de distribution de la presse. La CRDP a pour mission d'autoriser, dans des conditions transparentes et non discriminatoires, l'implantation de tout nouveau point de vente de presse. Elle est également chargée de délivrer un certificat d'inscription aux agents de la vente de presse et d'assurer la gestion du fichier recensant les agents de la vente de presse. Elle peut enfin intervenir dans le cas d'un litige entre acteurs de la distribution de la presse qui implique un point de vente de presse. Cette structure prend le relais de la commission du réseau (CDR) du CSMP.

La loi Bichet révisée intègre également une réforme du statut des vendeurs-colporteurs de presse (VCP) , avec pour objectif principal de favoriser le développement du portage multi-titres. Cette réforme vise, d'une part, à permettre aux VCP d'effectuer la distribution sans vente de titres de presse autres que le titre principal, tout en conservant leur statut de travailleur indépendant et, d'autre part, à élargir le périmètre des publications d'information politique et générale (IPG) pouvant être, à titre principal, vendues par les VCP. Par parallélisme, la définition de l'activité des porteurs salariés de presse, prévue par le même article, a également été révisée.

1. Quel avenir pour la distribution postale de la presse ?

Une évaluation sur le long terme permet de constater une diminution de la part des ventes de titres de presse en magasin au profit de la diffusion postale et du portage .

Nombre d'exemplaires (tout type de presse) vendus par canal

(en milliers)

2000

2010

2016

2017 (p)

2018 (p)

Réseau de vente

2 966 224

2 018 931

1 361 387

1 224 600

1 108 963

Diffusion postale

1 465 814

1 266 761

888 530

856 229

807 860

Diffusion par portage

2 591 483

2 684 619

1 384 463

1 342 040

1 283 794

Total

7 023 520

5 970 310

3 634 380

3 422 869

3 200 617

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Répartition des ventes d'exemplaires (tout type de presse) par canal

(en %)

2000

2010

2016

2017 (p)

2018 (p)

Réseau de vente

42,2 %

33,8 %

37,5 %

35,8 %

34,6 %

Diffusion postale

20,9 %

21,2 %

24,4 %

25,0 %

25,2 %

Diffusion par portage

36,9 %

45,0 %

38,1 %

39,2 %

40,1 %

Total

100,0 %

100,0 %

100,0 %

100,0 %

100,0 %

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

La distribution postale reste dominante pour la presse technique et professionnelle. Les journaux gratuits sont presque exclusivement diffusés par la voie de portage. La presse nationale d'information générale et la presse magazine grand public sont majoritairement diffusées par la vente en kiosque, alors que la presse locale d'information l'est majoritairement par portage.

Répartition par famille de presse-2018

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

L'acheminement et la distribution de la presse constituent , en application de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom 44 ( * ) et de l'article L.2 du Code des postes et des communications électroniques, une mission de service public du groupe La Poste. La presse représente ainsi 22 % du poids de la sacoche des facteurs, 8 % du volume du courrier et 4 % du chiffre d'affaires courrier de La Poste.

En 2018, plus de 6 000 publications, soit la quasi-totalité des titres inscrits sur les registres de la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP), ont été distribuées par La Poste. 887 millions d'exemplaires de journaux et magazines ont été ainsi diffusés en 2019. Il s'agit là du principal canal de diffusion de la presse abonnée.

a) Un sous-financement chronique

Les journaux et écrits périodiques ont la possibilité de bénéficier de tarifs préférentiels auprès de La Poste dès lors qu'ils remplissent les conditions posées par le Code des postes et des communications électroniques 45 ( * ) et sont titulaires d'un certificat d'inscription délivré par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP).

L'accès à ces tarifs réglementés passe par la signature d'un contrat.

4 niveaux de service sont proposés :

- Tarif J+1 - Presse urgente : distribuée 6 jours ouvrés sur 7 en J/J+1 ;

- Tarif J+2 - Presse urgente : distribuée 6 jours ouvrés sur 7 en J+2 ;

- Tarif J+4 - Presse : distribuée 6 jours ouvrés sur 7 dans un délai maximum de J+4 ;

- Tarif J+7 - Presse à tarif économique : distribuée 6 jours ouvrés sur 7 dans un délai maximum de J+7.

Chacune des quatre grilles tarifaires propose, du premier gramme au kilogramme, et pour cinq cas de figure différents, un ensemble de tarifs propre à satisfaire la réglementation en vigueur.

Trois autres tarifs viennent par ailleurs moduler ce coût :

- Tarif presse hors IPG ;

- Tarif presse IPG ;

- Tarif Autre imprimé périodique (AIP).

Ainsi un titre IPG paie 34 % du tarif de service universel correspondant. Cette participation s'établit à 12 % pour un quotidien à faibles ressources publicitaires alors qu'elle est de 69 % pour un magazine.

Du fait de la modicité des tarifs postaux réglementés de presse au regard des coûts affectés à l'activité et du niveau de la participation financière de l'État . La Poste a ainsi supporté, en 2018, un déficit brut de près de 287 millions d'euros avant compensation publique (dont 197 millions d'euros au titre de la presse IPG) 46 ( * ) .

Contribution de La Poste aux aides à la presse en 2018
avant compensation de l'État

(en millions d'euros)

Type de presse

Chiffre d'affaires constaté (tarif de service public)

Chiffre d'affaires potentiel (tarif de service universel)

Avantage tarifaire pour les éditeurs (Contribution de La Poste)

Quotidiens à faibles ressources publicitaires (IPG)

5

43

38

Presse d'information politique et générale

83

242

159

Autres titres CPPAP

204

294

90

Total

292

579

287

Source : La Poste

L'État verse chaque année à La Poste une compensation pour financer le transport postal. Inscrite au sein du programme 134 « Développement des entreprises et régulations » de la mission « Économie », elle s'élève en loi de finances pour 2021 à 87,8 millions d'euros (AE = CP). Il convient, à ce stade, de relever que de 2009 à 2020, l'État a réduit de plus de 62 % sa contribution. Cette baisse substantielle reste difficilement amortissable. En effet, pour compenser une baisse de 20 millions d'euros de la contribution de l'État, il conviendrait de majorer les prix applicables à la presse non IPG de 7,5 %.

Le coût net de la mission de service public pour La Poste s'est ainsi élevé à 186 millions d'euros en 2019. Le déficit , qui reste à la charge de La Poste, constitue, de fait, une aide supplémentaire à la presse .

Ce déficit résulte plus précisément de la conjugaison de plusieurs facteurs :

- les tarifs de presse sont préférentiels et particulièrement abordables, très inférieurs aux tarifs courants du courrier à poids et urgence équivalents ;

- les prix payés par les éditeurs couvrent en moyenne 51 % des coûts ;

- la contribution publique versée à La Poste couvre 19 % des coûts.

Le déficit de l'activité a néanmoins été réduit sur les dix dernières années de plus de moitié sous l'effet de la hausse des tarifs, du maintien d'une partie de la contribution publique et, pour l'essentiel, de la réduction des coûts de La Poste.

Évolution du compte presse de La Poste

(en millions d'euros )

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Évolution. 08/19

Chiffre d'affaires de la mission de service public (hors compensation)

473

401

395

402

404

397

396

397

376

340

300

274

-42%

Coûts attribuables à la mission de service public

1078

1 027

1 002

952

946

952

904

862

861

712

587

564

-48%

Déficit brut

-605

-626

-607

-550

-542

-555

-508

-465

-485

-372

-287

-290

-52%

Compensation du moratoire

0,0

24,5

24,5

27,4

29,2

30,6

1,5

2,5

0,0

0,0

0,0

0,0

Contribution de l'État à La Poste

232,2

229,5

242,0

241,0

232,0

217,0

150,0

130,0

119,0

121,0

111,5

103,8

-55%

Déficit net

-373

-372

-340

-282

-281

-307

-356

-332

-366

-251

-176

-186

-50%

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Le montant de la compensation est aujourd'hui appelé à évoluer, le cadre tarifaire établi pour les années 2016 à 2020 étant arrivé à son terme. La trajectoire d'évolution des tarifs définie prévoyait que les tarifs de La Poste pour la période n'augmenteraient pas au-delà de l'inflation pour les quotidiens à faibles ressources publicitaires. Ils devaient augmenter hors inflation, de 1 % l'an pour la presse d'information politique et générale et de 3 % l'an pour les titres de presse bénéficiant d'un avis favorable de la commission paritaire des publications et des agences de presse (CPPAP) afin de bénéficier du régime économique de la presse (tarifs fiscaux et postaux privilégiés).

b) De nouvelles propositions en cours d'élaboration

Le Gouvernement a confié, à l'automne 2019, à Emmanuel Giannesini, conseiller maître à la Cour des comptes une mission visant à définir différents scénarios d'évolution des tarifs postaux et du soutien public au transport postal de la presse à partir du 1 er janvier 2021. Il s'agissait en premier lieu de réviser la grille tarifaire censée prendre fin en 2020.

Cette réévaluation devait tenir compte de trois éléments :

- un contexte d'attrition des volumes de presse postés (- 35 % entre 2013 et 2018). La baisse vise également les exemplaires bénéficiant des tarifs adaptés : entre 2018 et 2020, ces volumes ont diminué en moyenne de 10,9 % par an, le nombre d'exemplaires diffusés par voie postale passant ainsi de 780,6 millions d'exemplaires en 2018 à 618,9 en 2020. Les projections indiquent, par ailleurs, que les volumes de presse postés devraient être divisés par 2,5 d'ici six ans, pour descendre à 300 millions d'exemplaires en 2026 , ce qui induit un changement de modèle ;

- une baisse concomitante de la qualité du transport postal, relevé notamment par les éditeurs. Celle-ci tient à la réorganisation des tournées des facteurs (15 % des abonnés à la presse quotidienne livrés par La Poste sont susceptibles de recevoir leur journal l'après-midi) et à la multiplication des tournées « à découvert », c'est-à-dire non assurées (évaluées à 2 %) ;

- une inadaptation plus globale de la distribution postale des quotidiens qu'il s'agisse du coût de cette distribution, de son impact écologique voire de son sens à l'heure du numérique.

Plus largement, l es augmentations de tarifs pour la presse non-IPG mises en oeuvre au cours des derniers exercices n'ont, par ailleurs, pas eu de résultats probants : elles n'ont pas amélioré le bilan économique de la mission de service public et ont divisé les familles de presse avec le creusement d'un écart entre les trois tarifs postaux (CPPAP, IPG, Quotidiens à faibles ressources publicitaires [QFRP]) et un risque d'insoutenabilité de la charge postale pour beaucoup de titres non IPG.

Présentées en avril 2020, les premières conclusions de la mission Giannesini n'ont pu être arbitrées, compte tenu de la crise sanitaire, qu'à la rentrée 2020 par le Gouvernement qui a décalé l'entrée en vigueur d'une nouvelle grille tarifaire en 2022. Emmanuel Giannesini a été chargé, dans le même temps, de préparer un projet de protocole tripartite négocié entre les services compétents de l'État, La Poste et les représentants des éditeurs de presse. Ce protocole a été conclu en décembre 2020 et reste dans l'attente d'un arbitrage avant son entrée en vigueur.

Le protocole insiste, en premier lieu, sur une réduction au maximum des volumes de presse postés en J+1 au profit du portage, qui peut répondre à la logique dite du « dernier kilomètre ». La distribution de la presse urgente constitue la principale source du déficit du compte presse de la Poste : la distribution en J+1 est en effet responsable de 72 % du déficit du compte presse. Or elle ne semble plus adaptée, contrairement au portage (qui distribue 80 % des abonnements à la presse IPG soit 810 millions d'exemplaires en 2018). L'activité de portage de presse serait reconnue comme participant d'une mission d'intérêt général entrant dans le champ de la régulation de l'ARCEP. Cette complémentarité renforcée entre portage et postage va dans le sens des partenariats déjà développés par La Poste (Neopresse puis Proximy). La mission souhaite, en outre, la constitution auprès de l'ARCEP d'un Observatoire de la qualité de la distribution de la presse abonnée couvrant à la fois le postage et le portage, réunissant les représentants de la presse et de La Poste.

La Poste, acteur du portage

L'engagement du Groupe La Poste en faveur du portage s'est concrétisé dès septembre 2007 avec la création de sa filiale Neopress et le lancement d'offres de portage matinal multi-titres et multi-segments.

Neopress a ainsi distribué jusqu'à 98 000 exemplaires de presse chaque jour. L'activité confiée par les éditeurs de presse n'ayant toutefois pas été au niveau des attentes, La Poste a été contrainte de repositionner son activité en Ile de France.

Neopress a fusionné en 2014 avec la Société de distribution et de vente du Parisien (SDVP) au sein d'une nouvelle entité, Proximy, détenue à 75 % par le groupe Les Échos, dont elles est une filiale, et à 25 % par La Poste. Proximy est aujourd'hui le premier acteur du portage en France. Elle emploie près de 2 000 salariés répartis sur 22 plateformes et assure la distribution pour 174 000 abonnés et 4 400 points de vente.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par La Poste

L'aide au transport postale serait, de fait, concentrée sur la distribution des exemplaires en zones peu denses, qui reste la cause première du déficit du compte presse de la Poste. Elle reconnaît bien sûr qu'il s'agit là du noyau dur de la mission de service public de l'opérateur, mais propose de chercher à réduire la distribution postale à ce coeur de mission, assumant une forme de démutualisation.

La Poste devrait, par ailleurs, bénéficier d'une compensation au titre de sa mission de service public sur une base réelle et non plus forfaitaire.

La mission prévoit enfin de ne conserver qu'une seule grille tarifaire (tarif CPPAP) maintenue au niveau atteint en 2020 et actualisée de la valeur de l'inflation sur toute la période 2021-2026. Le Groupe La Poste demandait une majoration de 3 % + inflation.

La mission table dans le même temps sur la suppression de l'aide au portage en tant que telle désormais intégrée au sein d'une aide au stock « différenciée à l'exemplaire » , réservée aux titres IPG. Cette aide serait scindée en deux parties, avec une aide à l'exemplaire « posté » et une autre à l'exemplaire « porté ». La première serait calibrée pour neutraliser le surcoût engendré par le passage au tarif CPPAP sur les années 2021-2023, puis dégressive sur la période 2024-2026. L'aide différenciée serait conditionnée, s'agissant de la partie portage, à l'ouverture des réseaux détenus par les éditeurs.

La mise en oeuvre de ces propositions pourrait intervenir à l'occasion du projet de loi de finances pour 2022.

c) Une réforme qui va dans le bon sens mais qui doit être encore précisée

Le rapporteur spécial rappelle que l'inscription des aides au transport postal de la presse au sein du programme 134 de la mission « Économie » ne permet pas de disposer d'une vision globale des aides au secteur. La Cour des comptes avait également souligné, en février 2018, la nécessité de produire un document budgétaire unique visant à évaluer l'ensemble des transferts réalisés au bénéfice de ce secteur. Dans une réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial, le Gouvernement indique que ce rattachement pourrait intervenir à compter du projet de loi de finances pour 2022.

Sur le fond de la réforme proposée, le rapporteur spécial relève qu'elle va dans le bon sens, dès lors qu'elle réduit la mission assignée à La Poste et simplifie une grille des tarifs complexe. Il y a cependant lieu de s'interroger sur la poursuite d'un soutien à fonds perdus au transport postal , alors même que la digitalisation de la presse, la rapidité de la diffusion de l'information comme le coût écologique de la distribution rendent ce mode de distribution en large partie obsolète. La grille tarifaire proposée couvrirait la période 2022-2026. Le rapporteur spécial souhaite qu'il s'agisse de la dernière et que les financements publics soient totalement orientés à cette date vers la modernisation du secteur.

La volonté de valoriser le portage apparaît logique même s'il convient de garder en mémoire l'échec des dernières réformes de l'aide au portage. Les éditeurs de quotidiens à faible ressource publicitaires (QFRP) et des quotidiens à faibles ressources de petites annonces (QFRPA) bénéficient, quant à eux, de tarifs postaux si avantageux qu'ils n'ont aucun intérêt à recourir au portage. Le changement de grille tarifaire postale peut cependant inciter à ce changement de modèle. Par ailleurs, les réseaux de la presse quotidienne régionale (PQR) restent très réticents à s'ouvrir au portage multi-titres par peur de la concurrence. La prise en compte de l'ouverture des réseaux dans l'attribution de la partie portage de l'aide unique devrait permettre de tempérer cette réserve. Il appartient également aux acteurs de ce secteur de prendre conscience du potentiel dont dispose ce type de réseau à l'heure du développement massif de la livraison de petits colis à domicile. Les réseaux de portage ne sauraient en effet servir uniquement de biais pour la livraison de journaux. L'extension des réseaux de portage à d'autres livraisons permettrait de les valoriser. Elle faciliterait de la sorte un désengagement progressif de l'État dans le soutien au portage.

En ce qui concerne la mise en place d'un nouvel observatoire rattaché à l'ARCEP, le rapporteur spécial insiste pour que celui-ci repose sur une base légale. Une telle structure ne peut en effet reposer sur la seule volonté des acteurs de transmettre chiffres et informations. Confier cet observatoire à l'ARCEP implique de donner des moyens d'imposer concomitants au régulateur et notamment un pouvoir de sanction . Cette nouvelle mission ne pourrait par ailleurs pas être opérée à moyens constants pour l'ARCEP. Plus largement, le rapporteur spécial s'interroge sur ce nouvel accroissement à marche forcée des compétences de l'ARCEP , structure qui, a priori , ne bénéficie que d'une culture récente du fonctionnement particulier du secteur de la presse. Sa montée en puissance progressive a déjà été contrariée par la crise sanitaire et la liquidation de Presstalis, impliquant une adaptation plus rapide que prévue.

Reste une interrogation sur le coût de la réforme . Prévue pour être mise en oeuvre entre 2022 et 2026, elle ne permettrait pas, dans un premier temps, de réaliser des économies. La revalorisation de la compensation accordée à La Poste se traduirait en effet par un surcoût de 40 millions d'euros. La réforme devrait cependant permettre une réduction du montant des aides versées à l'horizon 2026.

Recommandation n° 3 : La réforme de l'aide à la distribution (révision de la grille tarifaire du transport postal, soutien au portage et régulation de cette activité) proposée par la mission Giannesini doit, en dépit de son coût lors des premiers exercices et d'une interrogation sur la réelle ouverture des réseaux de portage, être appuyée si elle permet un désengagement progressif de l'État dans le soutien au transport postal et au postage au profit d'un appui à la modernisation du secteur.

Recommandation n° 4 : L'inscription du soutien au transport postal de la presse au sein du programme 134 de la mission « Économie » ne permet pas de disposer d'une vision globale des aides au secteur. Il apparaît indispensable de produire un document budgétaire unique visant à évaluer l'ensemble des transferts réalisés au bénéfice du secteur de la presse écrite.

2. La nécessité de mettre en oeuvre une aide unique destinée à accompagner les stratégies industrielles des titres

Proposée par la mission Giannesini, la mise en place d'une aide au stock « différenciée à l'exemplaire », réservée aux titres IPG répond pour partie aux préconisations de la Cour des comptes formulées en 2013 et 2018, appelant à une simplification des dispositifs des aides à la distribution en vue de la mise en place d'une aide unique globalisée à l'exemplaire, elle aussi circonscrite à la presse IPG.

La distribution ne peut cependant constituer le seul biais en vue d'une réforme des aides à la presse. L'ajustement des tarifs postaux ne saurait en effet occulter une réflexion plus poussée sur la corrélation entre la nature actuelle des aides et leur modalités d'attribution d'un côté et les défis posés en termes industriels par la mutation de l'accès à l'information et les conséquences de celle-ci sur la vie de titres de presse de l'autre.

Cette prise en compte induit un aggiornamento du régime des aides à la presse. La grille d'analyse sous-jacente à la maquette budgétaire tend en effet à souligner une inadéquation entre les enjeux actuels et les réponses, pour parties dépassées qui y sont apportées au plan financier. L'aide à la presse doit aujourd'hui être conçue comme une aide à l'investissement et non plus comme un soutien à des titres fragiles, n'ayant pas pu ou su procéder à une révision de leurs modèles ou comme un appui à des messageries qui ne peuvent rien face à la diminution inexorable du lectorat « papier ». Il s'agit de passer d'une logique de rafistolage à celle d'un accompagnement rationnel.

Le plan de relance constitue à cet égard une première piste de réflexion en vue de mieux tenir compte des questions industrielles, même si sa traduction concrète peine à incarner une inversion de tendance ( cf infra ). .

Dans ces conditions, le rapporteur spécial plaide pour la refonte de l'ensemble des aides (distribution, pluralisme, modernisation) versées actuellement à plusieurs acteurs de la filière en une aide unique au titre, évolutive en fonction de son degré de digitalisation, de sa participation à la connaissance et au savoir ( cf infra ) et de son accès aux ressources publicitaires. Celui-ci doit en particulier prendre en compte le degré d'indépendance des titres.

En effet, au-delà de l'aide à la distribution et à la modernisation, la question des aides au pluralisme doit être posée. Le dispositif profite de fait à quatre quotidiens ( La Croix , L'Humanité , Libération et, dans une moindre mesure L'Opinion ) sans qu'une réflexion ne soit lancée sur la structure même de ces groupes de presse. L'angle de la faiblesse des ressources publicitaires ne peut servir de seul biais à l'attribution d'une subvention . Une analyse des groupes sur lesquels certains de ces titres peuvent s'appuyer par ailleurs ( La Croix appartient à Bayard Presse, Libération est intégré à des degrés divers au sein du groupe Altice) doit également servir de critère en vue de l'attribution d'une dotation publique. Le même raisonnement s'applique aux publications autres que quotidiennes concernées par ces aides. De fait, il pourrait être opportun, dans un contexte de concentration des médias, de procéder à une réorientation des aides au pluralisme, désormais conçues comme un soutien à l'indépendance , visant presse écrite et médias tout en ligne. La notion d'indépendance serait dès lors un critère de majoration de l'aide unique au titre.

Cette nécessaire transparence implique également la publication d'un document détaillant, par titre et par groupe, le montant de l'aide accordée.

Une réforme nécessaire destinée à simplifier
le régime des aides à la presse

Source : commission des finances du Sénat

À côté de cette aide unique au titre, subsisterait un programme d'aide à la modernisation des distributeurs de presse , afin de les aider à maintenir leur activité et s'adapter, une fois encore à l'évolution du lectorat.

Une telle réforme doit intervenir d'ici à 2026 , année régulièrement mise en avant par les acteurs de la filière comme une date charnière (renouvellement de la grille tarifaire de La Poste, fin du plan de soutien aux imprimeries - cf infra -, abandon du papier par certains groupes de presse)

Le rapporteur spécial ne minore pas la difficulté de parvenir à un consensus entre les acteurs de la filière sur les modalités d'octroi de cette nouvelle aide. Les échanges récents menés dans le cadre de la consultation mise en place par l'ARCEP ont, en effet, une nouvelle fois mis en lumière la fragilité du dialogue entre les parties prenantes. Les auditions menées par le rapporteur spécial ont permis en effet de mettre en avant un certain nombre de crispations et de positions parfois inconciliables.

Recommandation n° 5 : Procéder d'ici à 2026 à une révision profonde du régime des aides à la presse écrite en vue de la mise en place d'une aide unique au titre, évolutive en fonction de son niveau de son accessibilité en ligne, de sa participation à la connaissance et au savoir et de son degré d'indépendance. Son versement donnerait lieu à la publication d'un document détaillant, par titre et par groupe, le montant de l'aide accordée.

3. Les aides à l'exportation ont-elles encore un sens ?

Cette refonte du régime des aides induit en outre une réflexion sur les dispositifs mis en oeuvre afin de soutenir l'exportation de la presse française.

Au-delà de l'aide à la distribution des titres IPG à l'étranger et au dispositif prévu au sein du FSDP en faveur du rayonnement de la presse française, les pouvoirs publics financent également UNI-Presse, association dédiée à la promotion des abonnements à l'étranger de la presse française, via l'organisation d'expositions, de salons ou de colloques. UNI-Presse collecte des abonnements lors des manifestations auxquelles elle participe auprès d'une clientèle de particuliers, permettant ainsi la présence de la presse française sur des marchés parfois peu rentables où les éditeurs adhérents n'exporteraient. Elle dispose de 30 représentants répartis au sein de 50 pays.

UNI-Presse compte une centaine d'éditeurs adhérents, représentant 650 titres. Les éditeurs membres acquittent une cotisation annuelle, contribuent au financement des expositions et mettent des exemplaires gratuits à la disposition d'UNI-Presse.

UNI-Presse a bénéficié jusqu'en 2011 d'une subvention de 450 000 euros dans le cadre du fonds d'aide à la promotion et à la distribution de la presse française à l'étranger. En 2012, l'association a été soutenue dans le cadre de la troisième section du FSDP : quatre projets ont été soutenus pour un total de 219 829 euros de subvention. En 2013, le montant de la subvention publique à l'association a été ramené à 200 000 euros. Au plan formel et compte tenu de la mission d'intérêt général qu'accomplit UNI-Presse, il a été désormais convenu de procéder par voie de convention simple avec l'État, hors procédure du FSDP. Cette convention se justifie par les missions d'intérêt général accomplies par UNI-Presse au bénéfice du pluralisme de l'information et du rayonnement de la presse française à l'étranger. La subvention a été majorée en 2019 pour atteindre 230 000 euros , afin de tenir compte d'une cotisation exceptionnelle apportée par les éditeurs à l'association en 2018. En 2020 , afin de tenir compte des circonstances exceptionnelles liées à la pandémie de COVID-19, la subvention a été portée à 300 000 euros .

En 2019, UNI-Presse a permis de souscrire 22 558 nouveaux abonnements . Elle a mis en place à cet effet un « plan Éveil », permettant de baisser le prix de ventes des abonnements dans certains pays. L'aide fournie par l'État s'élève dans ces conditions à 10,20 euros par abonnement .

Au final, en ajoutant les aides à la diffusion et celles versées par le FSDP, les crédits dédiés au soutien à l'export de la presse atteignent en année normale environ 1,6 million d'euros. Si le montant n'est pas élevé en soi (1,5 % environ de la totalité des aides à la presse versées dans le cadre du programme 180), il convient néanmoins de s'interroger sur l'efficacité de cette dépense compte tenu, là encore, de l'évolution du lectorat et de l'accès à l'information. Une aide plus ciblée sur la transition numérique pourrait tout aussi bien faciliter une meilleure audience de la presse française au sein d'autres pays.

Recommandation n°6 : Supprimer les aides à l'exportation qui peuvent apparaître obsolètes eu égard au soutien accordé par ailleurs à la transition numérique des titres.

4. La question de la qualification IPG

La mise en oeuvre d'une aide unique à l'exemplaire pose enfin la question du type de titre ciblé.

Les aides à la presse sont aujourd'hui principalement concentrées sur la presse d'information politique et générale (IPG). La qualification de presse d'IPG ouvre droit au bénéfice des aides indirectes (postales et fiscales) et des aides au pluralisme, au portage et à la modernisation. 99 % des aides seraient ainsi, selon le ministère de la culture, fléchées vers la presse IPG, au risque de faire passer ce critère comme une « fortification » protégeant certains titres.

Les quotidiens sportifs généralistes et les SPEL professionnels, scientifiques et culturels sont, hors IPG, les seuls titres éligibles aux aides au portage et à la modernisation (FSDP, FSEIP). Les aides au transport postal sont, de leur côté, plus favorables à la presse IPG.

Montants des aides à la presse IPG depuis 2014
(hors aide au transport postal)

(en euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

130 247 449

104 583 991

95 231 318

94 675 284

87 957 950

81 164 841

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

La qualification IPG est accordée par la commission paritaire des publications et agences de presse (CPAPP). Cette instance est composée de 22 membres 47 ( * ) : 11 représentants de l'administration de l'État et 11 professionnels.

Depuis l'adoption de la loi du 18 octobre 2019 relative à la modernisation de la distribution de la presse 48 ( * ) , la notion de presse d'information politique et générale fait l'objet d'une définition de rang législatif , reprenant à l'identique les termes de cette même définition issue de divers textes réglementaires. Présentent ainsi le caractère de presse d'information politique et générale les journaux et publications périodiques qui :

- apportent de façon permanente sur l'actualité politique et générale, locale, nationale ou internationale des informations et des commentaires tendant à éclairer le jugement des citoyens ;

- consacrent la majorité de leur surface rédactionnelle à cet objet ;

- présentent un intérêt dépassant d'une façon manifeste les préoccupations d'une catégorie de lecteurs.

La qualification IPG est codifiée à l'article D.19-2 du code des postes et communications électroniques. Elle ouvre le droit aux différents régimes d'aides (tarifs préférentiels de La Poste, aides à la diffusion, au pluralisme et à la modernisation). Les suppléments des publications IPG (télévision, féminins, hors-séries) peuvent également bénéficier de cette qualification (article D.27-2 du code des postes et communications électroniques) 49 ( * ) et accéder au tarif préférentiel de transport postal.

L'article 17 de l'annexe II du code général des impôts précise cette définition en vue de l'application du régime fiscal visant les provisions, défini à l'article 39 bis A du même code. L'entreprise doit :

- éditer une publication de périodicité au maximum mensuelle ou un service de presse en ligne ;

- apporter de façon permanente sur l'actualité politique et générale, locale, nationale ou internationale des informations et commentaires tendant à éclairer le jugement des citoyens ;

- consacrer au moins le tiers de sa surface rédactionnelle à cet objet.

Les critères retenus apparaissent moins restrictifs : la surface dédiée au contenu d'information politique et générale peut être réduite au tiers. La rédaction laisse également la possibilité de s'adresser à un lectorat particulier.

Au 31 juillet 2020, sur un total de 6 175 titres disposant d'un numéro de publication de la CPAPP, 519 publications bénéficient de la qualification d'information politique et générale.

Progression du nombre de titres IPG
entre 2010 et 2019

Années

Nombre de titres IPG créés

Nombre de titres IPG disparus

Solde

2010

14

4

+ 10

2011

2

17

- 15

2012

2

2

0

2013

8

15

- 7

2014

10

15

- 5

2015

44

5

+ 39

2016

46

8

+ 38

2017

29

9

+ 20

2018

22

19

+ 3

2019

21

8

+ 14

Total

198

102

+ 96

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Outre les mensuels Marie-Claire et Vanity Fair , les titres jeunesse Okapi et Phosphore , mais aussi Sélection Reader's Digest ont été reconnus, en février dernier, comme des médias d'information politique et générale (IPG) par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP), ouvrant ainsi un accès aux aides au transport postal ou à la modernisation, mais aussi aux mesures fiscales. L'hebdomadaire Elle bénéficie du statut IPG depuis janvier 2020.

Ce statut bénéficie également au site de presse en ligne FranceSoir , alors même que de nombreux observateurs estiment que le média ne constitue plus qu'un relais aux thèses conspirationnistes, sans travail journalistique propre.

Au regard du lien ténu entre ces publications et la notion d'information politique et générale, il y a lieu de s'interroger sur la validité de ce critère et, in fine , sur le ciblage retenu dans le cadre de l'attribution des aides à la presse. Le rapporteur spécial insiste sur les conséquences financières de cet élargissement, à première vue, de la catégorie IPG : le coût, pour La Poste, du transport du magazine Elle est ainsi estimé à 3 millions d'euros par an, celui de Télérama à 8 millions d'euros annuels.

C'est dans ce contexte, qu'à la demande de la ministre de la culture, Mme Laurence Franceschini, présidente de la CPPAP, a remis, le 20 avril 2021, un rapport sur le renforcement de l'exigence du traitement journalistique pour accéder aux aides à la presse. Ce document préconise un élargissement des critères d'éligibilité à la qualification IPG, celle-ci devant désormais prendre en compte :

- la notion d'originalité des contenus ;

- le traitement journalistique ;

- la présence de journalistes professionnels au sein des rédactions : pourrait ainsi être définies une part minimale de la masse salariale consacrée aux journalistes, une part minimale des effectifs dédiés à la rédaction ou une part minimale de la masse salariale des journalistes et des autres frais éditoriaux par rapport aux coûts globaux de l'entreprise éditrice.

Une concertation avec les organisations professionnelles représentatives des éditeurs de presse et les organisations syndicales représentatives des journalistes doit désormais être organisée afin de déterminer les modalités concrètes de mise en oeuvre de ces recommandations.

S'il partage les précisions apportées par le rapport Franceschini sur la nécessité de renforcer l'appréciation des contenus et d'évaluer la présence des journalistes au sein de l'entreprise 50 ( * ) , le rapporteur spécial souhaite aller plus loin que ces propositions.

Une unification de la définition du contenu IPG apparaît en tout premier lieu souhaitable, tant il existe un écart important entre celle retenue pour l'application de l'article 39 bis A du CGI et celle du code des postes et communications électroniques.

Le rapporteur spécial s'interroge, en outre, sur un élargissement de la catégorie IPG aux publications dites de la connaissance et du savoir en vue de faire bénéficier de l'aide à l'exemplaire unique qu'il appelle de ses voeux. D'après le rapport d'activités 2018 de la CPPAP, 259 publications s'inscrivaient dans la catégorie « science, culture et connaissance ».

Si cette solution peut apparaître séduisante, reste à déterminer quels critères retenir pour déterminer quel titre relève de ce type de presse, ce qui peut susciter le même type de débat qu'aujourd'hui s'agissant de la presse dite IPG. L'article 39 bis B du code général des impôts propose d'ores et déjà des critères permettant de mieux encadrer cette catégorie en ciblant la presse permettant de développer l'information professionnelle ou de favoriser l'accès au savoir et à la formation et la diffusion de la pensée, du débat d'idées, de la culture générale et de la recherche scientifique.

Il ne s'agit pas pour autant de majorer les crédits dédiés aux aides à la presse afin de tenir compte de cet élargissement. La réforme proposée par Emmanuel Giannesini pour l'aide à la distribution table sur des économies à l'horizon 2026. Le rapporteur spécial propose par ailleurs de mieux cibler les aides existantes en tenant compte notamment du degré d'indépendance des titres. Des marges de manoeuvres existent donc aux fins de soutien à ce secteur de la presse.

Recommandation n° 7 : Élargir la catégorie IPG aux publications de la connaissance et du savoir. Cet élargissement s'effectuerait à coût constant pour l'État, dans le cadre de la vaste révision du régime des aides prévue par ailleurs.

C. LE PLAN DE RELANCE DOIT FAVORISER, DANS LE MÊME TEMPS, L'INDISPENSABLE RESTRUCTURATION INDUSTRIELLE DU SECTEUR

Le programme 363 - Compétitivité de la mission Plan de relance -prévoit, en 2021, 140 millions d'euros en AE et 70 millions d'euros en CP pour l'ensemble du secteur. Ces crédits permettent de majorer les aides à la presse versées dans le cadre de la mission « Médias, Livre et industries culturelles » de près de 59,3 % et d'abonder le Plan filière présenté par le président de la République le 27 août 2020.

Le plan filière prévoit un financement de 377 millions d'euros sur deux ans. Cette somme couvre les nouvelles lignes budgétaires créées en loi de finances pour 2021, une partie les crédits dégagés en troisième loi de finances rectificative pour 2020 ( cf infra ) et ceux mis en oeuvre dans le cadre de la mission Plan de relance. Elle intègre également la dépense fiscale liée à la création de l'impôt au titre d'un premier abonnement ( cf supra ).

S'agissant des crédits dédiés à la presse au sein du Plan de relance, trois axes ont été retenus :

- un plan pour accompagner la transition écologique du secteur de la presse et les changements de pratique dans l'imprimerie (47 millions d'euros en AE et 23,5 millions d'euros en CP) ;

- la majoration des crédits alloués au Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) afin d'améliorer la compétitivité et l'attractivité du secteur (45 millions d'euros en AE et 22,5 millions d'euros en CP) ;

- la mise en place d'un fonds pour la résorption de la précarité dans ce secteur d'activité (48 millions d'euros en AE et 24 millions d'euros en CP) : ce dispositif prévoit un soutien aux marchands de journaux (6 millions d'euros en CP en 2021) mais aussi aux acteurs les plus fragiles de la profession à l'instar des pigistes, des photojournalistes ou des dessinateurs de presse (18 millions d'euros en CP en 2021).

Ces dispositifs viennent s'ajouter aux crédits débloqués en urgence en troisième loi de finances rectificative pour 2020. 140 millions d'euros (AE = CP) ont en effet été dégagés pour faciliter la restructuration de Presstalis et le lancement de France Messagerie (cf supra) et soutenir les entreprises du secteur. 3 millions d'euros ont ainsi été spécifiquement versés aux éditeurs de titres ultramarins d'information politique et générale (20 éditeurs ont été concernés par cette aide). 10 millions d'euros ont été fléchés vers la mise en oeuvre du Plan filière. Le Gouvernement entendait notamment soutenir les projets d'investissement contribuant à la transformation du secteur, en veillant notamment à la transition écologique (5 millions d'euros) et consolider l'action du FSDP (renforcement des crédits de 5 millions d'euros).

Enfin, pour répondre aux conséquences de la crise sanitaire et de la distribution, le bénéfice des dispositifs de l'Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) a été ouvert à l'ensemble des titres de presse et des SPEL. L'ensemble des titres, reconnus ou non par la CPPAP, peuvent ainsi dorénavant solliciter une aide. Par ailleurs, afin de proposer des solutions de financement adaptées, l'IFCIC a déployé trois types de prêts :

- les prêts de trésorerie (1,5 %, 6 ans maximum, 12 mois de franchise) ;

- les prêts de relance de l'activité (2,5 %, 10 ans maximum, franchise de 12 mois ou plus) ;

- les prêts participatifs (3,5 %, 10 ans maximum, franchise de 24 mois).

Enfin, l'IFCIC continue de proposer des garanties de prêts à tout type de crédits, à hauteur de 70 % jusqu'à 300 000 euros, et 50 % au-delà. Ce dispositif a, par ailleurs, été étendu aux diffuseurs de presse.

S'il ne remet pas en cause le bien-fondé de l'ensemble de ces mesures, le rapporteur spécial insiste sur le fait que cette aide d'urgence ne saurait être à terme pérennisée, sauf à renforcer l'addiction du secteur aux fonds publics, qui peut placer les titres de presse dans une situation de dépendance excessive à l'égard de l'État.

Crédits dédiés à la filière presse 2020-2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

1. Le défi de l'impression

Les frais d'impression représentaient 7,6 % des coûts supportés par les entreprises de presse en 2018.

Frais d'impression rapportés au chiffre d'affaires

1990

1995

2000

2005

2010

2015

2018 (p)

Presse nationale d'information politique et générale

16,1%

15,7%

11,5%

12,1%

11,3%

9,6%

9,2%

Presse locale d'information politique et générale

22,3%

18,0%

15,1%

16,7%

13,1%

11,0%

9,2%

Presse gratuite d'information

23,1%

10,7%

20,3%

18,4%

Presse magazine grand public

17,5%

14,6%

12,9%

12,2%

11,2%

11,4%

8,7%

Presse magazine technique et professionnelle

17,7%

15,3%

12,0%

11,0%

9,3%

6,3%

6,2%

Presse Gratuite d'annonces

19,1%

15,4%

18,9%

12,9%

18,6%

17,4%

8,9%

Total

18,6%

15,8%

13,5%

13,5%

11,9%

10,5%

7,6%

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Le plan de relance prévoit d'accompagner la transition écologique du secteur de la presse et les changements de pratique dans l'imprimerie à hauteur de 47 millions d'euros en AE et 23,5 millions d'euros en CP en 2021. Cette somme se décompose de la façon suivante :

- 31 millions d'euros dédiés à la réforme industrielle des imprimeries dans le cadre du Plan réseau imprimerie - PRIM (5 millions d'euros ayant déjà été accordés dans le cadre de troisième loi de finances rectificative pour 2020) ;

- 16 millions d'euros destinés à abonder un fonds pour la transition écologique.

La soutenabilité économique de l'impression papier à l'horizon 2025-2026 induirait, selon l'APIG, des investissements à hauteur de 116 millions d'euros. Cette somme serait consacrée à la modernisation des outils, à la transition écologique des imprimeries et à l'installation de centres d'impression numérique.

a) Vers un changement de modèle industriel

Ce soutien de l'État à la modernisation du réseau des imprimeries s'inscrit dans un contexte de réduction importante des tirages papier. L'Alliance de la presse d'information politique et générale (APIG) table sur une chute des deux tiers des tirages papier d'ici à 2025 pour la presse quotidienne nationale (PQN) et d'un tiers pour la presse quotidienne régionale (PQR) . La PQN passerait ainsi de près de 370 millions d'exemplaires en 2019 à 110 millions en 2025. S'agissant de la PQR, le tirage passerait de 1,3 milliard d'exemplaires à 970 millions sur la même période. Cette diminution sévère conduirait à la disparition d'un tiers des 33 centres d'impression actuels répartis sur tout le territoire, tandis que la moitié des 60 rotatives seraient arrêtées. Les éditeurs estiment en effet qu'en dessous de 40 000 exemplaires produits, le coût unitaire est trop élevé et l'impression n'est plus rentable. La PQN, qui a engagé il y a plusieurs années l'externalisation de ses imprimeries internes au profit des cinq centres d'impression du groupe Riccobono, serait moins concernée par ces réductions.

Le coût social n'est, quant à lui, pas anodin. Le plan réseau imprimerie (PRIM), abondé par l'État à hauteur de 36 millions d'euros via la mission « Plan de relance », prévoit ainsi le départ de 1 553 salariés du secteur sur 2 633, soit près de 60 % des effectifs. 77 % des départs prévus concernent des personnes âgées de plus de 50 ans. Ce plan est en cours de discussion entre les organisations représentatives. Dans ces conditions, le PRIM apparaît comme un prolongement de l'aide à la modernisation sociale, réduite ces dernières années à la portion congrue. 22 % des crédits du Plan de relance dédiés à la presse sont donc fléchés vers ce qui relève avant tout d'un gigantesque plan social ciblant les imprimeries et ne correspond pas véritablement à l'objectif de rebond affiché.

Six groupes sont concernés par le PRIM : La Dépêche du Midi, Ouest France, Rossel-La Voix (propriétaire de La Voix du Nord), Centre-France La Montagne, Nice Matin et Ebra (propriétaire de L'Est républicain/Le Pays, des Dernières nouvelles d'Alsace, l'Alsace, Le Bien public, Le Dauphiné libéré, Le Progrès, Vaucluse-Matin, Vosges-Matin, Le Journal de la Haute-Marne).

De nouvelles aides sont également à l'étude pour la période 2023-2025 en vue de poursuivre la rationalisation des imprimeries, 600 postes supplémentaires devant être supprimés dans le même temps.

b) La transition écologique des imprimeries

Les crédits dédiés à la transition écologique viennent s'articuler avec la suppression de la contribution en nature des éditeurs de presse, prévue par la loi du 10 février 2020 relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire 51 ( * ) . Chaque année, les éditeurs de presse déclarent à l'éco-organisme de la filière « papiers graphiques » (Citeo) les tonnages et les caractéristiques des publications qu'ils ont mises sur le marché en N-1. Sur cette base est établi le montant de contribution due par chaque éditeur de presse (application du taux de contribution par tonne, modulée en fonction de bonus/malus éventuels).

Ainsi, en 2020, 496 éditeurs de presse assujettis ont déclaré la mise sur le marché de 354 849 tonnes de papier en 2019 (392 747 tonnes en 2018). Le montant de l'éco-contribution versé en 2020 correspondant à ces mises sur le marché s'est ainsi établi à 24,1 millions d'euros (contre 26,7 millions d'euros versés en 2019), dont 22,2 millions d'euros sous forme de prestation en nature (mise à disposition d'encarts publicitaires). Cependant, aux termes de l'article 72 de la loi du 10 février 2020, cette contribution devrait prendre fin au 1 er janvier 2023 52 ( * ) .

Le fonds à la transition écologique devrait permettre de compenser partiellement les charges financières qui résulteront pour les éditeurs de l'extinction de ce dispositif (20 millions d'euros environ). Les espaces publicitaires vacants pourront par ailleurs être commercialisés.

Les crédits dédiés à la transition écologique devraient en outre permettre d'accompagner la suppression des emballages plastiques pour l'expédition des publications de presse à compter du 1 er janvier 2022 et l'interdiction des huiles minérales à compter du 1 er janvier 2025, ces deux mesures étant également prévues par la loi du 10 février 2020.

Reste à déterminer le rôle de ce fonds à la transition écologique et son articulation avec les dispositifs existants. Le FSDP a ainsi financé début 2021 plusieurs imprimeries de titres d'information politique et générale (IPG) afin de répondre au défi de la suppression des emballages plastiques et développer des flottes de véhicules électriques destinés à la distribution des journaux. Les modalités précises de mise en oeuvre du fonds à la transition écologique font encore l'objet de négociations, en lien avec l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). Son intégration au sein du dispositif d'appel à projets « recherche et développement » du FSEIP est notamment envisagée.

Par ailleurs, s'il partage l'objectif écologique affiché, le rapporteur spécial s'interroge sur l'absence de prise en compte de cet impératif dans la réforme proposée des aides à la distribution. La distribution postale comme le portage ont un coût carbone élevé. En maintenant sous perfusion le transport postal de la presse alors même qu'il ne répond plus aux exigences de la presse IPG, l'État fragilise l'ambition affichée en matière de transition écologique.

Recommandation n° 8 : Clarifier le rôle du fonds à la transition écologique afin d'éviter les doublons avec les structures déjà existantes, à l'image du FSDP et le risque concomitant d'effet d'aubaine.

2. La transition vers le numérique : une évolution balbutiante, aux effets économiques encore insuffisants

La majoration des crédits du FSDP devrait, en principe, favoriser l'accompagnement de la transition vers le numérique des principaux acteurs de la filière, en particulier les éditeurs.

La presse quotidienne nationale apparaît comme le segment le plus en avance en matière de diffusion numérique. Le quotidien Les Échos compte plus d'abonnés numériques - environ 48 000 en mars 2019 - que d'abonnés papier. Les magazines d'information politique et générale et encore plus la presse quotidienne régionale semblent en retrait dans cette transformation.

Diffusion numérique des principales familles de presse

2018

2019

PQN - échantillon

Diffusion payée en moyenne

Versions numériques en moyenne

Versions numériques en pourcentage de la diffusion

Diffusion payée en moyenne

Versions numériques en moyenne

Versions numériques en pourcentage de la diffusion

Aujourd'hui en France

109 458

6 349

5,80%

99 902

9 565

9,69 %

La Croix

87 662

13 676

15,60%

88 039

17 546

20,01 %

Les Echos

130 006

45 491

34,99%

130 899

52 153

40,10 %

L'Humanité

32 017

1 057

3,30%

36 347

6 449

17,78 %

Libération

68 362

17 584

25,72%

72 489

27 117

37,94 %

Le Monde

300 143

138 154

46,03%

334 287

184 898

57,14 %

Le Figaro

313 694

114 638

36,54%

329 646

152 158

48,68 %

2018

2019

Magazines - échantillon

Diffusion payée en moyenne

Versions numériques en moyenne

Versions numériques en pourcentage de la diffusion

Diffusion payée en moyenne

Versions numériques en moyenne

Versions numériques en pourcentage de la diffusion

Paris-Match

552 163

86 354

15,64%

565 189

109 858

21,75 %

Elle

342 453

93 800

27,39%

339 151

105 251

31,88 %

Le Point

299 535

34 398

11,48%

303 412

53 453

18,26 %

L'Obs

255 424

12 164

4,76%

224 294

15 907

7,37 %

L'Express

282 168

65 727

23,29%

251 987

63 094

31,37 %

Challenges

204 738

35 767

17,47%

186 156

33 851

18,24 %

Courrier international

167 330

25 355

15,15%

164 790

31 694

20,44 %

Marianne

123 795

7 420

5,99%

127 235

29 165

23,49 %

Valeurs actuelles

94 347

14 017

14,86%

97 187

23 351

24,36 %

2018

2019

PQR - échantillon

Diffusion payée en moyenne

Versions numériques en moyenne

Versions numériques en pourcentage de la diffusion

Diffusion payée en moyenne

Versions numériques en moyenne

Versions numériques en pourcentage de la diffusion

Le Dauphiné Libéré

189 894

5 335

2,81%

181 085

4 291

2,37 %

Le Progrès - La Tribune

166 605

8 300

4,98%

159 150

9 871

6,20 %

Midi Libre

95 786

8 296

8,66%

87 954

7 685

8,74 %

La Dépêche du Midi

131 286

6 942

5,29%

125 433

7 305

5,83 %

Les Dernières Nouvelles d'Alsace

136 944

2 272

1,66%

131 072

2 852

2,18 %

L'Est Républicain

114 212

4 021

3,52%

110 996

5 140

4,63 %

La Nouvelle République du Centre-Ouest

151 341

4 706

3,11%

147 836

5 206

3,52 %

Ouest France

648 486

30 510

4,70%

634 969

48 529

7,64 %

Le Parisien

193 428

20 925

10,82%

184 555

24 348

13, 19 %

Le Populaire du Centre

31 074

829

2,67%

28 827

872

3,02 %

La Provence

91 613

9 680

10,40%

85 080

10 540

12,39 %

Le Républicain Lorrain

94 291

3 129

3,32%

89 473

4 146

4,66 %

Sud-Ouest

230 309

23 518

10,21%

218 648

25 238

11,55 %

Le Télégramme

188 273

6 051

3,21%

184 581

8 163

4,42 %

La Voix du Nord

201 014

17 225

8,57%

204 492

19 526

9,55 %

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

L'incidence de ce passage au numérique apparaît néanmoins difficile à évaluer s'agissant du chiffre d'affaires. La plupart des entreprises de presse ne distinguent pas, au sein de leur comptabilité, les charges et les produits de leur activité liée à leurs services de presse en ligne. S'agissant des charges, les frais de personnel sont rarement isolés. Enfin, au niveau des revenus, les formules d'abonnements liées à la seule version digitale ne sont pas isolées afin de maximiser les chiffres fournis aux annonceurs.

Plus généralement, la presse ne profite pas de la croissance du display et voit ses recettes dans ce domaine stagner voire baisser. Une part de l'explication provient de la disproportion manifeste, quoique difficile à mesurer, entre les audiences respectives de la presse et des géants du numérique (Google, Facebook, notamment) ainsi que de la captation de la valeur du marché publicitaire par ces derniers. En tout état de cause, les recettes de publicité en ligne ne peuvent pas être considérées comme le seul levier de croissance pour la presse, qui doit envisager d'autres modèles économiques, à l'image des abonnements numériques payants par exemple.

Répartition du marché publicitaire

(en pourcentage)

2016

2017

2018

2019

2019 (en millions d'euros)

Presse

17,16

15,46

15,04

13,75

2 072

Télévision

24,43

24,0

23,75

22,58

3 402

Publicité extérieure

9,05

8,62

8,59

8,63

1 301

Radio

5,35

5,07

4,85

4,74

714

Cinéma

0,68

0,69

0,64

0,66

100

Internet (display + search + autres leviers)

25,93

29,9

31,77

38,91

5 862

Annuaires

5,24

4,69

4,80

4,06

612

Courrier publicitaire + imprimés sans adresse (isa)

12,17

11,55

10,57

9,50

1 432

Total général

100

100

100

100

15 062

Source : IREP, le marché publicitaire en 2019

Cette faiblesse des ressources contraste avec un intérêt accru de la part des lecteurs. La forte demande d'information liée à la crise sanitaire et les mesures de confinement ont ainsi eu un effet accélérateur sur la digitalisation des marques de presse. Selon l'Alliance pour les chiffres de la presse et des médias (ACPM), le recul de la diffusion des titres sur l'ensemble des circuits (physiques et digitaux), reste limité à 1,5 % sur l'année 2020, en raison d'une forte progression de la diffusion en ligne (+ 34,3 %). Les téléchargements des quotidiens ou des magazines ont représenté 18,5 % des ventes des éditeurs l'an dernier. Les supports digitaux ont, de leur côté, enregistré un record historique de leur fréquentation, avec en moyenne 77 millions de visites par jour, soit une hausse de 31 % par rapport à 2019.

La diffusion des huit titres de presse quotidienne (Le Figaro, Le Monde, L'Équipe, Les Échos, La Croix, Aujourd'hui en France, Libération et L'Humanité) a progressé de 3,4 %, enregistrant une hausse de 36 % des ventes numériques. Plus de la moitié de la diffusion moyenne de ces titres l'a été en version numérique (782 000 téléchargements quotidiens sur 1,4 million d'exemplaires quotidiens). La diffusion globale payante de plusieurs quotidiens nationaux a, ainsi, progressé en 2020 (Le Monde, Libération, Les Échos et Le Figaro). Les sites de la presse quotidienne nationale ont, dans le même temps, enregistré 7,5 milliards de visites, soit une progression de près de 17 % par rapport à 2019 53 ( * ) . Cette intérêt accru pour le numérique se retrouve également en matière d'abonnements.

Progression des abonnements numériques en 2020

Titre

Nombre d'abonnements numériques supplémentaires en 2020

Le Monde

108 000

Le Figaro

50 000

Libération

23 000

L'Équipe

22 000

Le Parisien / Aujourd'hui en France

14 000

Les Échos

11 000

La Croix

4 500

Source : Commission des finances du Sénat d'après les chiffres fournis par l'APCM

La part numérique des ventes de la presse quotidienne régionale a également enregistré une progression de 39,2 %. Cette diffusion ne concerne cependant que 10 % (353 000 exemplaires) des ventes tous supports confondus.

Les crédits dédiés au sein du programme 180 et du Plan de relance devraient donc permettre d'accompagner une tendance. Reste que si l'État peut inciter les éditeurs à moderniser leur offre, cette incitation doit être ciblée. Il n'appartient pas à l'État de se substituer aux éditeurs dans la définition d'une offre numérique ou du choix d'un support et de financer ainsi l'intégralité du processus de digitalisation de la presse, sauf à créer une distorsion de concurrence avec d'autres secteurs. L'accompagnement doit donc prendre en compte le degré de digitalisation déjà existant pour chaque titre et être modulé en fonction de celui-ci. Il pourrait viser en particulier les publications de la connaissance et du savoir qui ne disposent pas des ressources d'une grande partie de la presse IPG pour accélérer leur digitalisation.

Recommandation n° 9 : Cibler l'aide à la digitalisation en tenant compte des stratégies déjà menées par les titres et en favorisant les publications ne disposant pas encore des infrastructures ou des revenus publicitaires nécessaires.

Par ailleurs, l'ouverture de nouvelles lignes de crédit en faveur de la transition numérique ne saurait occulter la mise en place d'autres instruments juridiques en vue de renforcer les ressources des médias de presse écrite présents sur internet. L'aide budgétaire ne peut constituer la seule réponse au défi de la digitalisation.

a) Les droits voisins

Via la loi n° 2019-775 du 24 juillet 2019 tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse 54 ( * ) , la France a transposé la directive européenne sur le droit d'auteur et les droits voisins du 17 avril 2019 55 ( * ) . Le texte est censé mettre en place les conditions d'une négociation équilibrée entre, d'une part, les éditeurs et agences de presse et, d'autre part, les plateformes numériques , afin de redéfinir, en faveur des éditeurs et agences de presse, le partage de la valeur entre ces acteurs. Il convient de rappeler à ce stade que les moteurs de recherche - Google pour une large part - sont à l'origine de 26 % à 90 % du trafic redirigé vers les pages de 32 journaux disposant d'un site en ligne.

Il confère aux éditeurs et agences de presse le droit d'autoriser ou d'interdire la reproduction de leurs publications par les plateformes numériques. Les actes d'hyperlien et l'utilisation de mots isolés ou de très courts extraits d'une publication de presse sont exclus de l'application du droit voisin et n'ouvrent pas droit à rémunération, conformément aux dispositions de la directive européenne.

Au-delà de ce texte et face aux réticences de Google à mettre en place une rémunération 56 ( * ) , l'Autorité de la concurrence a jugé que cette société détenait une position dominante sur le marché français des services de recherche généraliste et que ses pratiques pouvaient être qualifiées d'anticoncurrentielles 57 ( * ) .

b) L'enjeu de la publicité numérique

La concentration des recettes publicitaires entre les mains d'un nombre réduit d'acteurs numériques pourrait, à terme, menacer la pérennité des médias traditionnels et, par voie de conséquence, l'accès à l'information.

Le Gouvernement a mis en oeuvre une mission afin d'analyser et mettre en lumière les impacts des évolutions majeures en cours dans le secteur de la publicité numérique. L'objectif est d'aboutir à une révision de la la régulation de ce secteur, tant au niveau national qu'au niveau européen.

c) Les kiosques numériques

Les kiosques numériques sont des services permettant à leurs utilisateurs d'accéder et de consulter des titres de presse en ligne. Certains kiosques sont adossés à des opérateurs téléphoniques depuis 2016, démultipliant ainsi leur audience à l'instar de Cafeyn (SFR, Bouygues Telecom) ou ePresse (Orange).

Les kiosques numériques constituent ainsi un nouveau canal de diffusion de leurs contenus à destination des clients des opérateurs de télécommunications, favorisant l'essor de certains titres : la diffusion de L'Express par kiosque numérique représente 32 % de sa diffusion payée en France en 2019 contre 9 % en 2016 et celle de Paris Match 22 % de sa diffusion payée en France, contre moins de 5 % en 2016. La diffusion par les kiosques numériques permet donc une exposition forte et l'atteinte de nouveaux lecteurs.

Les éditeurs sont rémunérés par les kiosques pour la diffusion de leurs titres. Le détail des modalités de rémunération n'est pas connu de l'administration. La rentabilité des ventes par les kiosques numériques reste moins élevée que celle des ventes imprimées au numéro, la notoriété des titres jouant bien évidemment dans le niveau de rémunération..

La révision de la loi Bichet prévoit une application aux kiosques numériques des grands principes qui ne s'appliquaient jusqu'alors qu'aux seuls kiosques physiques. Le texte accorde ainsi un droit d'accès aux kiosques aux titres d'information politique et générale. Il a instauré, par ailleurs, des obligations de transparence renforcées aux agrégateurs d'informations en ligne à propos de leurs choix de « mise en avant » de contenus d'information :

- l'obligation de diffuser un SPEL d'IPG ou la version numérisée d'un titre IPG ne s'applique qu'aux kiosques numériques qui proposent l'accès à des titres édités par au moins deux entreprises de presse distinctes ;

- cette obligation ne s'impose que si le kiosque numérique propose déjà l'accès à au moins un titre IPG. ;

- seuls les kiosques numériques les plus importants auront l'obligation de donner accès à un titre IPG.

Les kiosques numériques ont pu profiter d'une incertitude relative au calcul du taux de taxe sur la valeur ajoutée dans le cadre d'offres composites jusqu'en 2018. La loi de finances pour 2018 encadre en effet les règles d'application du taux super-réduit de TVA dont bénéficient les ventes de la presse 58 ( * ) .Par ailleurs, seul un abonnement à un kiosque numérique exclusivement réservé à la presse IPG peut entrer dans le périmètre du crédit d'impôt sur le revenu au titre du premier abonnement à un journal, à une publication périodique ou à un service en ligne de presse d'information politique et générale.

Recommandation n° 10 : Favoriser la transition numérique en dépassant la simple logique budgétaire via la mise en place d'autres instruments juridiques destinés à améliorer les ressources des titres (kiosques numériques, publicité numériques, droits voisins).

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 16 juin 2021 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a examiné le rapport de M. Roger Karoutchi sur l'avenir des aides à la presse

M. Claude Raynal , président . - Nous poursuivons la restitution des travaux de contrôle de notre commission avec la présentation du contrôle budgétaire sur les aides à la presse écrite mené par le rapporteur spécial Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi , rapporteur spécial . - Le système actuel des aides à la presse date pour l'essentiel des lendemains de la seconde guerre mondiale. Le secteur était alors complètement déstabilisé, une partie de la presse ayant fait le choix de la collaboration alors qu'émergeaient de nouveaux titres, issus de la Résistance. Le soutien à ces journaux comme la mise en place d'une réponse au manque de papier ont constitué les bases d'un subventionnement de la presse.

La situation n'est bien évidemment plus la même aujourd'hui et le principal enjeu tient à la numérisation de la presse papier. Celle-ci doit permettre d'assigner un nouveau rôle aux aides à la presse. C'est le sens du titre volontiers polémique que j'ai retenu pour mon rapport. Elles pourraient constituer de la vitamine pour des entreprises de presse enclines à accélérer leur modernisation. Faute d'adaptation, elles ne pourraient cependant constituer qu'un soin palliatif pour des titres qui n'auraient pas su répondre à cette modernisation impérative.

Le secteur est en effet sous perfusion. Les aides à la presse écrite, budgétaires et fiscales, s'élèvent à environ 400 millions d'euros en 2021. Ce montant n'intègre pas le dispositif de soutien mis en place pour accompagner la liquidation de Presstalis et le lancement de France Messagerie. Il ne comprend pas non plus les aides exceptionnelles accordées dans le cadre du plan de relance pour 2021 et 2022.

S'agissant des aides budgétaires stricto sensu, elles sont de trois types.

Les aides à la distribution, 39,4 millions d'euros, sont fléchées vers le portage des titres.

Les aides au pluralisme - 23,2 millions d'euros - visent les publications nationales et locales d'information politique et générale et plus spécifiquement, depuis 2021, la presse en ligne, même si c'est encore très faible, et les titres ultra-marins.

Les aides à la modernisation, soit 55,5 millions d'euros, sont en principe dédiées à aider les différents acteurs du secteur - distributeurs, diffuseurs- à faire face aux nouveaux enjeux. Plus de la moitié de ces crédits était orientée jusqu'en 2020 vers le financement de Presstalis. Son remplacement par France Messagerie ne modifie pas cette affectation.

A ces aides budgétaires, s'ajoutent le soutien financier à La Poste pour la distribution des journaux et à l'Institut de financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) en vue d'accorder des prêts et garanties aux entreprises de presse.

La dépense fiscale en faveur du secteur s'élève quant à elle à environ 160 millions d'euros. Ses effets apparaissent incertains.

Nous disposons donc d'un système d'aide coûteux pour les finances publiques, sans qu'il apparaisse pourtant forcément adapté. La commission des finances comme la Cour des comptes ont déjà par le passé pointé son absence de contrôle et surtout son inefficacité, dans un contexte de crise pour l'ensemble du secteur.

La crise sanitaire est en effet venue exacerber une crise du lectorat. La presse papier est de moins en moins lue. Entre 2000 et 2010, 7 milliards d'exemplaires de journaux étaient distribués chaque année. Ce chiffre a depuis été divisé par deux, 3,2 milliards d'exemplaire étant distribués en 2018.

La crise sanitaire semble accélérer tout à la fois la transition vers le numérique et les difficultés du secteur. La perte de chiffre d'affaires pour l'ensemble du secteur est ainsi estimée à 1,9 milliard d'euros en 2020 par le ministère de la culture. La presse papier a perdu 23 % de ses recettes publicitaires. Les magasins spécialisés ont vu, de leur côté, leur activité chuter de 5 %.

Face à cette crise, le régime des aides n'a pas substantiellement évolué. La dépendance du secteur aux fonds publics justifie pour partie cette permanence. Sans prendre en compte les mesures contenues dans le Plan de relance, les aides publiques représentent en effet 21,4 % du chiffre d'affaires du secteur, soit une progression de 6 points sur les dix dernières années.

Deux évolutions sont cependant à relever.

La première concerne l'appui budgétaire apporté à la transition entre Presstalis et France Messagerie. En additionnant dispositifs de soutien et abandons de créance, l'impact budgétaire peut être estimé à 300 millions d'euros pour la seule année 2020.

La seconde vise le soutien à La Poste. En dépit de sa relative inadaptation à la vitesse de la circulation de l'information et malgré la réduction des volumes postés ; - 35 % entre 2013 et 2018, la distribution postale demeure encore privilégiée par rapport au portage. Reste que le dispositif n'est pas rentable pour La Poste, dont cette activité reste déficitaire en dépit de la compensation versée par l'État. Dans le cadre d'une mission confiée à Emmanuel Giannesini, une réforme de la grille des tarifs, une aide concomitante aux entreprises de presse afin de limiter son impact et une aide au développement du portage sont désormais envisagées. Reste que cette réforme devrait encore être coûteuse...

Mon sentiment tient à ce que lorsque la crise sanitaire sera passée, il faudra parvenir à une refonte de l'ensemble du dispositif d'aide pour le concentrer sur le soutien à la transition numérique et l'ouvrir aux titres de presse de la connaissance et du savoir. C'est le sens de la proposition d'aide unique au titre que je développe dans le rapport. Il s'agit de dépasser un système coûteux et peu efficace. Je ne mésestime pas les difficultés pour aboutir à une telle réforme tant la logique de perfusion actuelle est jugée par de nombreux acteurs comme un des gages de la liberté d'informer. On peut cependant s'interroger sur le maintien d'un régime daté alors que le nombre d'exemplaires papier pourrait être ramené à 1 milliard d'ici 10 ans. Chaque journal distribué va de fait devenir de plus en plus cher pour la collectivité.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Je ne l'ai pas senti Roger Karoutchi, que je remercie pour son intervention, d'un enthousiasme débordant sur le sujet. Nous voyons bien que le modèle économique de la presse ne fonctionne pas, et ce problème ne date pas d'aujourd'hui. Je partage dans tous les cas le questionnement, à défaut de dire l'inquiétude, à la fois sur le montant des aides et sur le nombre de lecteurs.

La distinction doit être faite entre presse numérique et presse écrite. Il serait intéressant d'avoir le bilan carbone de la presse numérique. Parce que l'on commence à s'apercevoir que derrière le digital, il n y a pas forcément les vertus que l'on pourrait lui prêter au premier abord.

Enfin, je souhaiterais aborder un point plus précis. Dans le troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020, il était prévu un crédit d'impôt pour le premier abonnement, avec une prise en charge possible à hauteur de 30 % de l'abonnement par foyer fiscal. La mise en place de ce crédit d'impôt dépendait d'une validation de la Commission européenne. Savez-vous où l'on en est ?

M. Roger Karoutchi , rapporteur spécial . - Le volet « soutien à la presse » du Plan de relance comprend un dispositif de soutien à la transition écologique. Il semble cependant cibler en premier lieu les imprimeries.

En ce qui concerne le crédit d'impôt « Premier abonnement », il n'est entré en vigueur que le 6 mai dernier. Nous ne disposons donc pas du recul nécessaire pour l'évaluer. Pour l'heure, le Gouvernement table sur un coût en année pleine de 60 millions d'euros par an.

M. Gérard Longuet . - Je me demandais quel était le jugement du rapporteur spécial sur la presse spécialisée. Autant, nous avons le témoignage du déclin de la presse quotidienne et générale, autant je suis impressionné par la multiplication de la presse spécialisée, sur laquelle il est possible de porter un jugement nuancé, eu égard à son caractère commercial. La presse spécialisée bénéficie-t-elle de l'aide que vous mentionnez ?

M. Michel Canévet . - Merci, monsieur le rapporteur spécial, pour votre éclairage sur ce sujet important. Ne serait-il pas opportun de confier à la presse une mission de sensibilisation des français aux questions mathématiques ? Je fais ici le lien avec le rapport présenté précédemment par notre collègue Gérard Longuet. Une telle mission pourrait accroitre l'appétence de nos concitoyens pour cette discipline essentielle pour l'avenir.

Je sais qu'en Bretagne, la presse régionale se porte plutôt bien, notamment grâce à des systèmes de portage. L'existence de tels systèmes est-elle limitée à la Bretagne, ou sont-ils répliqués au niveau national ?

Enfin, ma question porte surtout sur la proposition n° 5 de votre rapport, qui vise à modifier le dispositif des aides à la presse. Peut-on imaginer un dispositif pertinent, c'est-à-dire qui puisse mesurer le degré de diffusion de la connaissance et d'indépendance des médias ? La mise en place d'un tel dispositif serait-elle possible sans susciter de fortes controverses ?

M. Vincent Segouin . - J'ai l'impression, au fur et à mesure des rapports, que l'on réclame systématiquement de l'aide financière. C'est très à la mode, puisque le « quoi qu'il en coute » porte ses fruits. Ma question est la suivante : est-ce qu'il faut continuer à verser des aides ? La presse écrite ne doit-elle pas plutôt être réformée en profondeur, en associant l'éducation nationale et le secteur de la presse ? Il me semble que c'est plutôt un problème de fond que de financement.

M. Philippe Dallier . - Mon collègue Roger Karoutchi est pessimiste, et c'est faible de le dire. Je me demande si nous ne sommes pas dans le regret d'une époque et d'un modèle passé, celui du temps des lampes à huile et de la marine à voile, comme disait le Général De Gaulle sur un autre sujet. Ne sommes-nous pas en train de nous accrocher à un modèle qui est condamné ? Le passage au numérique est devenu une évidence, y compris pour la presse. Je comprends que des gens d'un certain âge soient attachés à la presse écrite, mais sa disparition me paraît inéluctable. Moi-même, à titre d'exemple, je constate que le canard enchainé est passé au numérique, et ne lis plus de version papier.

Roger Karoutchi nous a dit qu'il y avait encore des aides pour soutenir la transformation numérique de la presse. J'ai pourtant le sentiment que tous les journaux sont désormais passés au numérique. Dans ce contexte, qu'est-ce que la presse attend de plus, dans ce domaine-là, qui puisse l'aider à conserver un nombre satisfaisant de lecteurs ?

M. Claude Nougein . - Je m'interroge sur l'existence de limites aux aides pour certains organes de presse, notamment pour les journaux d'opinion. Certains périodiques ne sont plus lus par personne, vont de redressement en dépôt de bilan, mais sont toujours là malgré le déclin de leur lectorat. Toute entreprise privée aurait disparu dans de telles conditions. Je pense en particulier à un journal lié à un parti né au congrès de Tours de 1920. Est-ce que l'on va continuer à financer des titres que personne ne lit ?

M. Claude Raynal , président . - Finalement nous sommes forcés de reconnaitre, monsieur le rapporteur spécial, que votre exposé était plutôt optimiste lorsque l'on entend les questions qui l'ont suivi.

J'avais une interrogation sur le modèle économique de la presse numérique. Je suis sans doute resté sur des idées anciennes, mais il me semblait que la publicité ne suivait pas sur la presse numérique dans des proportions similaires à la presse papier, et que cette carence introduisait un déséquilibre économique pour la presse numérique. Est-ce toujours le cas ?

M. Roger Karoutchi , rapporteur spécial . - Comme le relève Gérard Longuet, il existe effectivement deux mondes, la presse IPG d'un côté qui concentre 99 % des aides et les revues spécialisées qui semblent tout à la fois moins fragilisées par la crise mais insuffisamment soutenues. Il faut sans doute arriver à mieux équilibrer les aides, même si un consensus entre les représentants de ces familles de presse apparaît difficile à obtenir.

Les aides au pluralisme mises en avant par Claude Nougein constituent un fondement de notre système et elles apparaissent difficiles à remettre en perspective, en dépit des questions que ce type de soutien peut poser.

Pour répondre à Michel Canévet, le système de portage n'existe pas uniquement en Bretagne et concerne l'ensemble du territoire. Il reste cependant coûteux et insuffisamment ouvert, puisque dépendant de certains acteurs de la presse régionale, réticents à accepter le portage d'autres titres. Des pistes de réforme sont à l'étude dans le cadre de la mission Giannesini, en vue de parvenir à un meilleur équilibre avec la distribution postale, elle aussi très coûteuse et pas toujours adaptée. L'idée serait de développer le portage, en favorisant l'ouverture des réseaux à d'autres titres mais aussi à la livraison de petits colis, afin de favoriser leur rentabilité et de parvenir, pourquoi pas, à la fin de la distribution postale.

Je suis d'accord avec Vincent Segouin, les aides à la presse concernent aujourd'hui des volumes de presse en baisse. Dans ces conditions, il faut effectivement réformer le régime des aides et même s'interroger sur sa raison d'être. L'héritage de la seconde guerre mondiale ne peut plus servir de justification. On peut sans doute passer à autre chose et cibler la modernisation et la numérisation. Dans un système libéral classique, un journal ne vit que par ses lecteurs et trouve son équilibre financier grâce à eux et pas par un autre biais.

Pour répondre à Philippe Dallier, je pense que la priorité concerne le soutien à la numérisation, via notamment l'aide unique que je développe dans le rapport. Il s'agit d'abandonner une logique de bricolage et de sauvetages en tout genre - je pense notamment à Presstalis et France Messagerie - alors que progressivement le nombre d'exemplaires papier tend à diminuer de façon substantielle. On ne peut donc plus concentrer les aides sur ce type de presse.

Le président Raynal s'interroge sur les recettes publicitaires pour les médias en ligne. Il est vrai qu'au lancement des premières formules numériques, les recettes n'étaient pas forcément au rendez-vous. On constate cependant un déport progressif de recettes publicitaires traditionnellement fléchées vers les médias audiovisuels ou la presse papier en direction des éditions numériques, au point que certains journaux se transforment en bi-médias afin de bénéficier de ce type de ressources. La presse quotidienne régionale a ainsi vu ses revenus publicitaires en ligne progresser de 9 % en 2020. Ces revenus supplémentaires ne couvrent pas cependant les pertes enregistrées dans le domaine de la publicité imprimée.

La commission a autorisé la publication de la communication du rapporteur spécial sous la forme d'un rapport d'information.

- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction générale des médias et des industries culturelles du ministère de la culture - Sous-direction de la presse écrite et des métiers de l'information

- M. Alexandre KOUTCHOUK, sous-directeur ;

- M. Amos REICHMAN, chef du bureau du régime économique de la presse ;

- M. Florian JARRY, adjoint au chef du bureau du régime économique de la presse ;

- M. Sacha CAPELIER, chargé de mission auprès du du bureau du régime économique de la presse.

Mission de réflexion sur l'évolution des tarifs postaux de transport de la presse

- M. Emmanuel GIANNESINI, conseiller maître à la Cour des comptes.

Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP)

- Mme Cécile DUBARRY, directrice générale.

Direction générale des entreprises du ministère de l'économie, des finances et de la relance

- M. Clément BECK, directeur de projets Postes et presse, sous-direction des communications électroniques et des postes ;

- M. Marc LEBRETON, adjoint au chef du bureau des activités postales.

Alliance de la presse d'information générale (APIG)

- M. Vincent DAVID, vice-président ;

- M. Samir OUACHTATI, directeur général adjoint.

Fédération nationale de la presse spécialisée (FNPS)

- M. Laurent BERARD-QUELIN, président ;

- Mme Catherine CHAGNIOT, directrice générale.

Syndicat de l'association des éditeurs de presse (SAEP)

- M. Jean-Martial LEFRANC, président.

Association des éditeurs de presse culturelle

- M. Alain BENHAMOU, vice-président.

Syndicat de la presse indépendante d'information en ligne (SPPIL)

- M. Loïc LEBRUN, vice-président ;

- M. François MERESSE, directeur général.

Coopérative de distribution des quotidiens

- M. Louis DREYFUS, président.

Coopérative de distribution des magazines

- M. Frederick CASSEGRAIN, président.

Culture Presse

- M. Daniel PANETTO, président ;

- M. Philippe di MARZIO, directeur général.

Syndicat national des dépositaires de presse

- M. Dominique GIL, président ;

- M. Dominique AUSSANT, vice-président.

Le rapporteur spécial a également reçu des contributions écrites du groupe La Poste et du Syndicat des éditeurs de la presse magazine.


* 1 Quelle réforme des aides à la presse ? Rapport d'information n° 853 (2012-2013) de M. Claude Belot, fait au nom de la commission des finances.

* 2 Sont qualifiées d'aides directes, les aides lorsqu'elles sont versées directement aux titres. Elles regroupent les dispositifs d'aides suivants :

- le fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) ;

- les aides au pluralisme (aides aux publications à faibles ressources publicitaires, aides à la presse périodique régionale et locale) ;

- l'aide au portage de la presse ;

- le fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse qui s'appuie sur trois dispositifs d'intervention (FSEIP).

Sont qualifiées d'aides à des tiers les aides à la distribution et les aides à la modernisation.

* 3 Les aides à la presse écrite : des choix nécessaires, Rapport public annuel, février 2018.

* 4 Décret n° 2016-511 du 26 avril 2016.

* 5 Le montant total des aides notifiées en 2020 s'élève à 1 581 665 euros, le solde correspondant au non-versement d'aides sur l'exercice qui fera l'objet d'un report sur 2021.

* 6 Décret n°2017-1332 du 11 septembre 2017.

* 7 Décret n°2019-1291 du 4 décembre 2019

* 8 France Messageries a repris les activités de Presstalis au 1 er juillet 2020.

* 9 Décret n° 2015-1440 du 6 novembre 2015 relatif au soutien de l'État au pluralisme de la presse.

* 10 Décret n° 89 528 du 28 juillet 1989.

* 11 Décret n° 96-410 du 10 mai 1996.

* 12 Article 135 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004.

* 13 Décret n° 2005-1096 du 2 septembre 2005

* 14 Décret n° 2006-657 du 2 juin 2006.

* 15 Décret n° 2012-484 du 13 avril 2012 relatif à la réforme des aides à la presse et au fonds stratégique pour le développement de la presse.

* 16 Décret n° 2014-659 du 23 juin 2014 portant réforme des aides à la presse.

* 17 Décret n° 2020-814 du 30 juin 2020.

* 18 Les points de vente thématiques assurent la vente de titres sélectionnés selon la thématique du magasin dans lequel ils sont situés (bricolage, décoration, jardinage, sport...)

* 19 Les PVC assurent la vente des quotidiens et des publications de grande diffusion.

* 20 Décision n° 2020-0180 du 6 février 2020.

* 21 Décret n° 2012-484 du 13 avril 2012.

* 22 Les pays concernés sont les suivants : Albanie, Arménie, Macédoine, Moldavie, Haïti, Sainte-Lucie, Cambodge, Laos, Vanuatu, Vietnam, Algérie, Égypte, Liban, Maroc, Tunisie, Mauritanie, Burundi, Cameroun, Centrafrique, Congo, République démocratique du Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Rwanda, Tchad, Comores, Djibouti, Madagascar, Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée, Guinée Bissau, Mali, Sénégal, Togo

* 23 Les conventions-cadres ont été instituées par le décret n° 2012-484 du 13 avril 2012. Après une première génération en application du décret fondateur, le dispositif des conventions-cadres a été modifié par le décret n° 2014-659 du 23 juin 2014.

* 24 Loi n°2014-237 du 27 février 2014 harmonisant les taux de la taxe sur la valeur ajoutée applicables à la presse imprimée et à la presse en ligne

* 25 Annexe au projet de loi de finances 2021, Évaluation des voies et moyens, tome II - Les dépenses fiscales.

* 26 Article 10 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

* 27 Article 157 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

* 28 Article 114 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

* 29 Article 14 de loi de n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007.

* 30 Article 147 de la loi n° 2020-1721 de finances pour 2021.

* 31 Conformément à l'article 4 de la loi n° 47-585 du 2 avril 1947 relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques dite loi « Bichet » et à l'article 1 er de la loi n° 86-897 du 1 er août portant réforme du régime juridique de la presse.

* 32 Au sens de l'article 39 bis A du code général des impôts.

* 33 Ce montant inclut la collecte réalisée au profit de Charlie Hebdo : plus de 40 000 dons ont été versés en 2015 au seul bénéfice de Charlie Hebdo pour un montant total de 2,7 millions d'euros.

* 34 Ce montant inclut les collectes exceptionnelles réalisées en fin d'année pour Mediapart et Arrêt sur image, à l'occasion de leur redressement fiscal. Hors ces collectes, le montant des dons versés est de 120 750 euros.

* 35 Arrêté du 4 décembre 2019 relatif au bénéfice de la réduction prévue à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale pour les employeurs entrant dans le champ de la déduction forfaitaire spécifique.

* 36 Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

* 37 Décision n°SA59065.

* 38 Décret n° 2021-560 du 7 mai 2021 fixant la date d'entrée en vigueur du crédit d''impôt sur le revenu pour le premier abonnement à un journal, à une publication périodique ou à un service de presse en ligne d'information politique et générale instauré par l'article 2 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

* 39 Analyse de l'impact de la crise du Covid-19 sur les secteurs culturels - Secteur de la presse, Département des études, des prospectives et des statistiques (DEPS) du ministère de la Culture.

* 40 Décret n° 2020-814 du 30 juin 2020.

* 41 Décret n° 2021-440 du 13 avril 2021 portant cahier des charges des sociétés agréées de distribution de la presse.

* 42 Loi n° 2019-1063 du 18 octobre 2019.

* 43 Loi n° 47-585 du 2 avril 1947.

* 44 Loi n° 90-568 du 2 juillet 1990.

* 45 Articles D.18 à D.28.

* 46 Ce montant équivaut à la différence entre le chiffre d'affaires qui résulterait de l'application des tarifs du service universel et celui qu'elle réalise en appliquant les tarifs de service public.

* 47 16 membres lorsqu'elle statue sur les agences de presse.

* 48 Loi n° 2019-1063 du 18 octobre 2019.

* 49 Décret n° 2016-2013 du 30 décembre 2016 relatif au transport postal des suppléments et hors-série.

* 50 Ce critère pourrait ne pas s'avérer suffisant pour une meilleure approche : sollicitée par le ministère de la culture, la CPPAP a, en effet, confirmé, le 24 mars 2021, le statut IPG de FranceSoir en s'appuyant sur la présence au sein de l'équipe du site de deux journalistes et quatre pigistes.

* 51 Loi n° 2020-105 du 10 février 2020.

* 52 Cet arrêt trouve sa source dans la transposition de l'article 8 bis de la directive 2008/98/CE relative aux déchets, dans sa rédaction issue de la directive 2018/851 du 30 mai 2018, qui prévoit que les producteurs soumis à un principe de responsabilité élargie du producteur (REP) couvrent au moins 50 % des coûts de prévention et gestion des déchets issus de leurs produits au travers d'une contribution nécessairement financière. Ces dispositions doivent entrer en vigueur au plus tard le 5 janvier 2023.

* 53 Le Figaro enregistre 160,5 millions de visites mensuelles et Le Monde 150,3 millions de visites mensuelles. Le troisième site du secteur le plus consulté est celui de Ouest-France (149,9 millions de visites mensuelles, soit une progression de 62 millions de visites par rapport à 2019).

* 54 Loi n° 2019-775 du 24 juillet 2019.

* 55 Directive (UE) 2019/790 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur le droit d'auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique et modifiant les directives 96/9/CE et 2001/29/CE.

* 56 Google souhaitait mettre en place un référencement « enrichi », comprenant une image ou une vidéo ainsi qu'un extrait dont la taille maximale est définie par l'éditeur, à condition que l'éditeur l'accepte, mais sans que Google propose en contrepartie une quelconque rémunération.

* 57 Décision n° 20-MC-01 du 9 avril 2020. L'Autorité de la concurrence était saisie par l'Alliance de la presse d'information générale (APIG), le Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM), la Fédération nationale de la presse spécialisée (FNPS) le groupe Les Échos-Le Parisien, et l'Agence France-Presse (AFP).

* 58 Article 8 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

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