B. DES TERRITOIRES PRIVÉS DE LEURS FORCES VIVES

La question de la « fracture territoriale » sera abordée dans le cadre de la première partie du présent rapport.

À ce stade, il s'agit simplement de souligner que la désindustrialisation de la France au cours de ces dernières décennies s'est traduite par une véritable perte de substance économique de nombreux territoires .

En effet, la recomposition de la structure de l'économie française et de ses emplois au cours des dernières décennies a entraîné un très fort écart de dynamisme territorial entre, à grands traits :

- des « métropoles » attractives qui captent une part croissante d'activités dans le secteur tertiaire mais aussi de certaines industries innovantes ;

- des territoires « périphériques » , pour reprendre une expression popularisée par le géographe Christophe Guilluy 3 ( * ) , qui, à l'inverse, ne peuvent compenser le départ d'industries traditionnelles, notamment dans certains « bastions » qui s'étaient construits autour d'une activité dominante désormais en déclin.

Les écarts d'évolution des PIB régionaux entre 1990 et 2015, publiés par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), sont éloquents. Ainsi, la région d'Île-de-France, tirée par la « locomotive » parisienne, a vu sa part dans le PIB passer de 28 % à presque 30,5 %, soit une progression de l'ordre de 8 %. De même, une région comme l'Occitanie a fortement bénéficié du dynamisme des métropoles de Toulouse et de Montpellier, voyant sa part dans le PIB national progresser de quelque 11 % au cours de cette période. À l'inverse, dans la région Grand Est, l'effet de la métropole strasbourgeoise ne suffit pas à compenser les difficultés de la Lorraine et de l'ancienne région Champagne-Ardenne, ce qui se traduit par une diminution d'environ 17 % de la part de la grande région au sein du PIB national au cours de ces vingt-cinq années.

Si le phénomène de « métropolisation » est, dans une certaine mesure, inhérent à l'évolution de l'économie et caractérise de nombreux pays autres que la France, la désindustrialisation des territoires non métropolitains les a fait entrer dans un cercle vicieux en les privant de leurs forces vives (attirées par les métropoles) et de leur capacité de rebond .

Cette perte de substance économique (et souvent démographique) constitue un facteur majeur de précarisation pour les populations de ces territoires, dont Christophe Guilluy a bien montré dans son ouvrage précité qu'elles constituent la majorité des Français.

Toute réponse de long terme à la problématique de la paupérisation et de la précarisation d'une partie des Français doit donc passer par la réimplantation d'activités industrielles susceptibles d'assurer l'avenir économique de nos territoires, qui ne sauraient être condamnées à survivre sous perfusion de transferts sociaux et autres aides publiques.


* 3 « La France périphérique », par Christophe Guilluy (septembre 2014).

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