B. UNE POLITIQUE PUBLIQUE QUI EST POURTANT ENCORE INSUFFISAMMENT PILOTÉE

1. Les difficultés rencontrées dans « la prise en charge du dernier kilomètre »

Votre mission d'information s'est longuement interrogée sur la création d'un délit spécifique de harcèlement scolaire comme le proposent plusieurs associations. Elle a toutefois écarté cette idée : en effet, l'arsenal juridique existant est étoffé. Ce qui pose des difficultés, c'est, pour reprendre l'expression de Laurent Bayon, « la prise en charge du dernier kilomètre ».

a) La prise en charge imparfaite du harcèlement scolaire dans les établissements

La première difficulté réside dans la prise en compte du harcèlement scolaire par l'établissement : ou bien parce que le harcèlement n'est pas identifié, ou bien parce que bien qu'identifié la communauté éducative ne sait pas toujours comment réagir. Enfin, le cyberharcèlement, parce qu'il se déroule dans le monde virtuel, et pas dans la cour d'école ou la salle de classe, reste parfois non pris en compte par l'institution scolaire.

b) Les conditions nécessaires pour libérer la parole de l'enfant

Mais surtout, l'une des principales difficultés réside dans la libération de la parole de l'enfant, qu'il soit victime ou témoin. Comme l'a expliqué Gwenaël Le Guevel, conseiller fédéral au SGEN-CFDT « certains élèves ne parlent pas par peur d'être vus comme des « balances » 159 ( * ) ». Consciente de cette problématique, l'institution scolaire mène depuis quelques années un travail sur les témoins . En témoigne la campagne de lutte contre le harcèlement de 2019-2020, centrée sur les témoins, « les petits héros du quotidien ». La libération de cette parole ne pourra pleinement se faire que si au moins deux éléments sont réunis :

- une bonne connaissance de la part de l'enfant de ses droits, de ce qui constitue un harcèlement scolaire ;

- la présence d'un adulte de confiance vers lequel il n'hésitera pas à se tourner en cas de doute sur une situation de harcèlement. Cet adulte de confiance, au sein de l'établissement, est d'autant plus important que l'enfant n'ose pas toujours se confier à ses parents, surtout lorsque cela concerne un harcèlement lié au corps ou à la sexualité. Comme le souligne avec justesse Samuel Comblez, directeur des opérations de l'association e-Enfance, les jeunes victimes « peuvent avoir du mal à dire ce qui leur arrive à leur entourage proche et à leurs parents en particulier - 60 % des appels que nous recevons concernent le corps ou la sexualité, des thèmes que les jeunes n'ont pas souvent envie d'aborder avec leurs parents 160 ( * ) ». Lorsqu'il souhaite faire retirer une photo ou une vidéo de lui, à peine un enfant sur quatre demande à ses parents d'intervenir en ce sens 161 ( * ) .

c) Les obstacles au dépôt effectif de plainte

Par ailleurs, la difficulté pour déposer plainte a été évoquée : plusieurs personnes auditionnées ont ainsi indiqué que les victimes ou leurs parents pouvaient être découragés de porter plainte. En outre, des informations erronées sont parfois transmises : tel est notamment le cas lorsqu'il est indiqué à un mineur qu'il doit être accompagné de ses parents pour déposer plainte. Or, par honte, par peur de la réaction de ses parents - notamment si le harcèlement comporte une connotation sexuelle ou encore a pour origine la diffusion d'une photo intime - l'adolescent peut préférer ne rien faire. Votre mission d'information tient à le souligner : le mineur n'a pas besoin d'être accompagné pour déposer plainte. C'est uniquement s'il souhaite être impliqué dans le reste de la procédure (demander des indemnités, se constituer partie civile) qu'il devra être représenté par ses parents ou ses représentants légaux (ou un administrateur ad hoc lorsque ses parents ne peuvent pas défendre ses intérêts 162 ( * ) ).

Enfin, les difficultés rencontrées rejoignent celle, plus globale, de l'accueil des victimes lors des dépôts de plainte. À cet égard, la formation des agents aux questions du harcèlement et du cyberharcèlement doit être améliorée, tant sur la définition juridique du harcèlement que sur la prise en charge de victimes et d'auteurs, souvent mineurs. Lors de son audition, Nora Fraisse a ainsi alerté sur le délai d'attente parfois long dans les commissariats et gendarmeries pouvant décourager certaines victimes de porter plainte : « La petite [A.] est décédée. Victime de revenge porn , elle a voulu porter plainte : après quatre heures d'attente, elle est partie » 163 ( * ) .

2. Des outils déjà nombreux, mais insuffisamment connus

L'ensemble des auditions menées par votre mission d'information ont permis de dresser un constat : il existe de nombreux outils pour prévenir et lutter contre le harcèlement et le cyberharcèlement, mais ceux-ci demeurent mal connus et trop peu utilisés.

C'est d'ailleurs l'analyse qu'a pu faire Claire Hédon, Défenseure des droits depuis sa prise de poste, à la suite des courriers de familles dont les enfants sont victimes de harcèlement, qui lui sont adressés : « certains établissements et autorités de tutelle ne se saisissent pas encore suffisamment des outils existants pour prévenir et lutter contre le harcèlement en milieu scolaire. L'élaboration de tous ces outils à l'échelle nationale est indéniablement une bonne chose, qui a même été saluée par le Comité des droits de l'enfant de l'ONU en 2016. Ce dernier a néanmoins recommandé à l'État français de redoubler d'efforts en insistant sur l'importance des outils de prévention et de traitement, mais aussi sur la formation des personnels » 164 ( * ) .

a) Les numéros 30 18 et 30 20

Les numéros de téléphone 30 18 et 30 20 sont symptomatiques de cette distorsion entre moyens mis en place et connaissance de leur existence . Lors de leurs auditions, tant les représentants des personnels de direction que des enseignants ont indiqué que ces numéros étaient méconnus de la communauté éducative et que, bien souvent, ils n'étaient pas affichés dans les établissements. D'ailleurs, comme le constate e-Enfance, qui gère le numéro 30 18, « en réalité, nous sommes surpris du nombre de personnes qui nous découvrent trop tard, même des personnels de l'Éducation nationale ne connaissent pas notre numéro ».

Par ailleurs, la différence entre le 30 18 et 30 20 est peu claire ainsi que leurs finalités spécifiques, ce qui ne facilite pas la compréhension surtout quand ce sont des enfants et des familles en détresse qui cherchent à les joindre. Comme le souligne Hugo Martinez, fondateur de l'association HUGO ! « les attentes des parents, de l'enfant vis-à-vis du 30 20 sont énormes. Il en est espéré une solution d'aide d'accompagnement de long terme. Or, le 30 20 c'est ce qu'on va appeler un outil de signalement. Il ne faut pas confondre signalement et accompagnement » 165 ( * ) .

Les numéros d'appel 30 18 et 30 20

30 20 : Créé en 2012, le 30 20 « non au harcèlement » concerne le harcèlement scolaire. Il est porté par l'association École des Parents Éducateurs - Île-de-France et fonctionne de 9 heures à 20 heures du lundi au samedi. Lorsqu'une personne appelle ce numéro, l'interlocuteur recueille notamment des informations sur les familles et les transmet à l'académie. Les services académiques prennent ensuite rapidement contact avec la famille. Le 30 20 reçoit chaque année près de 75 000 appels, la durée moyenne de l'appel durant entre 30 à 40 minutes.

30 18 : Très récemment créé - en 2021 -, le 30 18 concerne plus spécifiquement le cyberharcèlement et la cyberviolence. Il prend la suite du numéro de Net Écoute (0 800 200 000) porté depuis 2009 par l'association e-Enfance , qui gère désormais ce numéro. Ouvert 6 jours sur 7, de 9 heures à 20 heures, par téléphone, mais aussi par tchat, Messenger et WhatsApp. Pendant les heures de fermeture, le relais est pris sous forme de tchats par la brigade numérique de la Gendarmerie nationale. L'association projette d'élargir ses horaires plus tard le soir et le dimanche.

En fonction de la situation, l'association, composée de professionnels psychologues, de juristes et de jeunes, peut orienter vers les référents académiques, accompagner la famille, notamment dans le dépôt de plainte, contacter le 119 (enfance en danger) ou faire un signalement direct au CRIP et, en cas de danger imminent pour la vie de l'enfant, une convention existe avec les pompiers pour une intervention directe chez le jeune. Enfin, elle est en lien avec PHAROS et est partenaire de confiance des réseaux sociaux qu'elle contacte pour faire retirer des contenus de leurs applications à la demande de la famille et du jeune. Le 30 18 reçoit chaque année environ 15 000 appels.

À ces numéros s'ajoutent des numéros de lutte contre le harcèlement dans chaque académie. À titre d'exemple, le numéro académique contre le harcèlement de l'académie de Créteil est le 0 800 600 790, celui de l'académie de Lyon le 0 800 409 409.

b) Les sites internet

Les sites internet de l'Éducation nationale, qu'il s'agisse d'éduscol ou du site « non au harcèlement » 166 ( * ) regroupent de très nombreuses ressources en matière de prévention du harcèlement scolaire. Ce dernier propose notamment une grilles permettant aux enseignants de repérer les signaux faibles. Mais, pour Marie-Rose Rodrigues Martins, représentante du SNUIpp-FSU, à l'occasion de la table ronde des représentants des syndicats des enseignants, « si les ressources et outils existent pour les enseignants - le site web « climat scolaire » est très fréquenté - ils sont peu connus ou développés par l'institution et les moyens pour leur diffusion collaborative insuffisants 167 ( * ) ».

c) Les autres ressources disponibles

De manière générale, force est de constater qu'il existe de nombreuses ressources au-delà même de l'institution scolaire : brochures informatives et sites internet des associations de parents d'élèves, des principales assurances scolaires, mais aussi des réseaux sociaux, qui ont tous indiqué, lors de la table ronde les réunissant, mener des actions de sensibilisation 168 ( * ) .

Exemples d'engagement des associations de parents d'élèves
FCPE, APEL et PEEP

(Magazine de l'APEL de novembre-décembre 2019 consacré au harcèlement, n° 529)

(Cyber)harcèlement : comment protéger nos enfants ?

Dossier du 4 février 2020, La voix des parents (magazine de la PEEP)

Néanmoins, trop d'enfants, de familles, d'enseignants et de personnels de direction n'identifient pas ce qui relève du harcèlement et se sentent démunis lorsqu'ils sont confrontés à une telle situation.

3. Des enseignants et personnels des établissements d'enseignements encore trop peu formés

Le constat paraît sans appel : les enseignants et les personnels de direction, ne sont pas encore assez formés pour détecter des situations des harcèlements, réagir, ni même pour les prévenir.

a) Aucun enseignant épargné au cours de sa carrière

Or, en raison du nombre d'enfants harcelés chaque année - entre 800 000 et 1 000 000 d'enfants - chaque enseignant va nécessairement être confronté au phénomène du harcèlement au cours de sa carrière. D'ailleurs, 62 % des enseignants déclarent être amenés à gérer des cas de harcèlement 169 ( * ) . Il s'agit d'un phénomène national, concernant toutes les académies et potentiellement tous les établissements scolaires, comme le souligne Christophe Kerrero, Recteur de l'académie de Paris : « ce que montrent les enquêtes de victimation et de climat scolaire, c'est un taux de déclaration de 9 % de cyberharcèlement au collège dans l'académie. Cela correspond au taux relevé par la DEPP au niveau national. Ce taux est de 10 % pour le harcèlement présentiel. L'académie de Paris est tristement normale, elle connaît les mêmes proportions que dans le reste de la France. [...] À Paris, on constate que tous les milieux sont concernés [...]. Ce harcèlement porte sur tous les sujets : le vêtement, la religion, l'apparence physique, l'orientation sexuelle, parfois au sein d'un même lycée on constate des clivages entre filières générales et professionnelles. Il n'y a pas de sociologie particulière et on trouve aussi bien du harcèlement dans les lycées favorisés que dans ceux plus difficile s » 170 ( * ) .

b) Des enseignants s'estimant, dans leur majorité, pas assez armés

Or, les enseignants sont trop peu formés pour faire face à ces situations. Ainsi, seuls 35 % d'entre eux se sentent armés pour gérer une situation de harcèlement. La majorité de ceux ne se sentant pas « armés » pour agir l'expliquent par un manque de formation . D'ailleurs, 83 % des enseignants indiquent ne jamais avoir reçu de formation dédiée à la prévention et à la gestion du harcèlement, alors même qu'ils sont autant à considérer que la lutte contre le harcèlement doit être considérée comme un enjeu de santé publique 171 ( * ) .

Les propos de plusieurs des personnes auditionnées ont été particulièrement durs vis-à-vis de l'Éducation nationale, regrettant l'absence de formation obligatoire. En témoignent ceux de Justine Atlan, directrice générale d'e-Enfance : « du côté de l'Éducation nationale, en revanche, je parlerai de défaillance, car depuis dix ans que nous travaillons avec le ministère, aucun programme de formation ni aucune action de prévention n'a été contraignant - cela fait dix ans que le ministère propose des modules qui restent parfaitement facultatifs, ceci au nom du volontariat nécessaire, c'est un discours que j'ai désormais du mal à entendre 172 ( * ) ».

Le programme de lutte contre le harcèlement scolaire (pHARe) comporte un volet visant à renforcer la sensibilisation des personnels aux signes de harcèlement. Expérimenté dans six académies depuis la rentrée 2019, il a été généralisé à l'ensemble du territoire à la rentrée 2021.

Si votre mission d'information se félicite de l'engagement du ministère de l'Éducation nationale dans la prévention du harcèlement scolaire à travers ce nouveau dispositif pHARe, elle espère que chaque établissement se saisira pleinement de ce dispositif.

Les membres de votre mission d'information seront particulièrement attentifs à la mise en oeuvre de ce programme, dans le cadre de sa recommandation visant à renforcer le contrôle parlementaire de la politique de prévention et de lutte contre le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement.

4. La question des moyens humains et financiers

Tant les auditions menées 173 ( * ) que les deux déplacements en Seine-et-Marne et dans le Pas-de-Calais ont montré que la prévention et la lutte contre le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement doivent reposer sur un travail d'équipe, rassemblant l'ensemble de la communauté éducative. Outre la volonté d'agir de la part du chef d'établissement et de l'équipe pédagogique, la prévention et la lutte contre le harcèlement et le cyberharcèlement nécessitent :

a) Du temps pour construire un projet d'établissement et une approche collective afin de lutter contre ce fléau

Plusieurs établissements en REP + ont mis à profit la pondération en temps REP + pour développer - notamment - des projets d'établissement de prévention du harcèlement. Comme le souligne Olivier Ralluy secrétaire national de la FSU , « de même que la formation initiale et continue est fondamentale dans la prise en compte du harcèlement, le temps de concertation laissé à la disposition des équipes est nécessaire. Ce temps doit être institué. La mise en place, dans les établissements d'éducation prioritaire, d'un temps de concertation pour les équipes officiellement prévu le montre. Le choix dans mon établissement a été de banaliser un temps dans la semaine, où toutes les équipes se retrouvent. Cela a permis de solidifier la cellule harcèlement. Sur ce temps institué, cette cellule a pu construire le travail de prévention du climat scolaire - très en amont -, et mettre en place un dispositif en cas d'alerte et de cas avéré 174 ( * ) ».

La pondération du temps de travail dans les établissements REP +

Les personnels effectuant un service d'enseignement dans un établissement en REP + (réseau d'éducation prioritaire) bénéficient d'une réduction de leur service hebdomadaire d'enseignement, « afin de reconnaître le temps de travail en équipe nécessaire à l'organisation de la prise en charge des besoins particuliers des élèves qui y sont scolarisés, aux actions correspondantes ainsi qu'aux relations avec les parents d'élèves »

Dans le primaire, ces personnels bénéficient de 18 demi-journées de remplacement et qu'ils peuvent mettre à profit pour des formations, temps d'échange et concertation entre collègues, ...

Dans le secondaire, un indice de pondération de 1,1 est appliqué aux heures d'enseignement permettant de diminuer le temps de présence devant les élèves.

b) La nécessaire stabilité des équipes en place

Mettre en place une politique de prévention du harcèlement et créer des liens de confiance entre les enfants et les adultes présents dans l'établissement nécessite une certaine stabilité des équipes en place. Lors de son audition, Éric Debarbieux a notamment évoqué ce problème : « stabiliser. Encore une fois, nous avons un problème de gestion des ressources humaines : celui de l'instabilité des équipes éducatives, en particulier dans les lieux les plus difficiles en France » 175 ( * ) . Sylvie Magne, pour sa part, a incité sur la nécessité de cette stabilité pour permettre la libération de la parole de l'enfant : « quand j'entends dire qu'on a plus de mal à parler quand on grandit, je constate qu'avec de la stabilité dans leur poste mes collègues peuvent établir une relation durable de confiance avec les élèves, y compris avec les camarades témoins et même quand ce sont des problématiques ou des faits très personnels, car il peut y avoir du harcèlement mais aussi des éléments autour de la sexualité » 176 ( * ) .

À cela s'ajoute la perte d'expérience , d'animation d'un projet d'établissement en cas de départ de la ou des personnes ressources et plus particulièrement formées à la prévention du harcèlement. À cet égard, la formation en interne par une équipe de 3 à 4 personnes, elle-même formée à la prévention du harcèlement, comme le prévoit le projet pHARe, est une solution intéressante pour éviter de porter un coup d'arrêt à un projet dynamique de lutte contre le harcèlement lors de l'évolution de l'équipe pédagogique.

c) Le rôle et les difficultés récurrentes des personnels médico-sociaux et des psychologues de l'Éducation nationale

Depuis de nombreuses années, la médecine scolaire et les services sociaux de l'Éducation nationale souffrent d'un déficit structurel de moyens. Plusieurs chiffres illustrent ces difficultés : on dénombre en 2020, 935 médecins fonctionnaires de l'Éducation nationale - ils étaient 1 167 en 2015 et 1 313 il y a 10 ans. Quant aux psychologues de l'Éducation nationale, 40 % ne sont pas titulaires. Le turn-over est donc très important, notamment en début d'année .

Or, ces personnels, en raison de leurs formations, de leurs missions, mais aussi parce qu'ils se situent, pour les enfants, un peu en marge de la traditionnelle représentation de l'équipe pédagogique et peuvent ainsi représenter un adulte tiers de confiance, jouent un rôle essentiel dans la prévention, de la détection et de la prise en charge de cas de harcèlement.

Malheureusement, de très nombreux établissements ne disposent pas d'un poste à plein temps, ni même de temps partiel pour ces personnels . À titre d'exemple, en raison de ce manque de moyens, le choix a été fait de ne plus avoir de services sociaux scolaires dans les lycées, sauf dans les lycées professionnels.

Dans certains établissements, la présence simultanée de différents personnels médico-sociaux ou psychologues n'est pas possible puisque ces personnels se partagent, à tour de rôle, un même bureau .

Le ministère de l'Éducation nationale est conscient des difficultés structurelles de la médecine scolaire , qui résultent, en partie, d'un défaut d'attractivité et de problèmes de recrutement. À l'occasion du Grenelle de l'éducation et du Ségur de la santé, la revalorisation des salaires de plusieurs de ces personnels, notamment des infirmiers scolaires a été actée .

Quelques témoignages de personnels médico-sociaux de l'Éducation nationale concernant les difficultés rencontrées pour mettre en place un travail d'équipe - extrait de la table ronde des représentants des personnels médico-sociaux de l'Éducation nationale 177 ( * )

« Nous avons dans le département des collèges de 600 à 700 élèves avec même pas un poste entier d'infirmiers ».

« Dans mon département comme dans beaucoup d'autres, mon souci est que des établissements ne sont pas couverts car il n'y a pas assez de postes voire pas du tout de travailleur social. Or, il suffit parfois de ne venir qu'une fois par semaine dans l'établissement pour faire le point puis continuer à travailler par téléphone, aider à réfléchir et accompagner ».

« Quand, comme dans mon établissement, l'assistante sociale n'est pas remplacée depuis mars , que l'infirmière n'est là que le matin et que la psychologue se partage entre plusieurs activités, le quotidien concret de l'élève fait que, lorsqu'il a besoin de déposer son fardeau, il n'a pas toujours devant lui la personne qu'il faut ».

« Le travail de concertation et d'élaboration en équipe est indispensable dans la prise en charge des situations de harcèlement, et permet de pouvoir s'appuyer sur la richesse des compétences et des formations de chaque professionnel. Mais au regard des moyens disponibles et du temps de présence de chaque professionnel, ce temps d'équipe est relativement restreint . Il est parfois compliqué d'arbitrer entre la nécessité de prendre un temps d'échange en commun et le besoin de pouvoir accueillir les élèves et les familles, et les accompagner. C'est pourtant par cette complémentarité entre différents professionnels qu'on peut avoir une approche globale de la question du harcèlement et du cyberharcèlement ».

« Le temps de présence dans un établissement signifie aussi - et tout simplement - d'avoir le temps de prendre un café dans la salle des professeurs, pour qu'au détour d'une conversation on puisse échanger , - et avec notre formation spécifique - et relever que telle ou telle situation nécessite de s'y intéresser. Mais, pour cela il faut être dans les établissements, il ne suffit pas d'avoir un nom relié à un établissement ».

d) Le coût des programmes de prévention et d'accompagnement des familles

Parmi les initiatives intéressantes existantes pour prévenir le harcèlement ont été évoqués « le jeu des trois figures », où l'enfant prend tour à tour la place de la victime, du harceleur et du témoin, ou encore le théâtre forum qui peut faire intervenir des acteurs professionnels. Or, ces interventions ont un coût difficile à couvrir pour établissements, notamment pour les collèges disposant de moins de moyens que les lycées .

Enfin, la question du coût est aussi particulièrement importante pour les associations dont votre mission d'information reconnaît et salue le rôle essentiel qu'elles jouent dans la prévention du harcèlement, l'accompagnement des familles concernées et la prise en charge des jeunes victimes ou harceleurs. À titre d'exemple, l'association Marion la Main tendue permet aux enfants victimes de harcèlement et à leurs familles de bénéficier de 17 heures, voire 22 heures de prise en charge thérapeutique. L'association HUGO ! pour sa part a mis en place un fonds d'urgence pour la prise en charge de victimes de harcèlement. Enfin, les numéros 30 18 et 30 20 étant gérés par des associations subventionnées par le ministère de l'Éducation nationale, leurs amplitudes horaires d'accueil sont intrinsèquement liées aux moyens dont elles disposent . Lors de son audition, Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire a d'ailleurs précisé l'action du ministère pour élargir les plages d'accueil du 30 20 qui fonctionne désormais de 9 heures à 20 heures du lundi au samedi.


* 159 Audition du mercredi 9 juin 2021.

* 160 Audition du jeudi 10 juin 2021.

* 161 Les comportements digitaux des enfants, regards croisés parents et enfants, sondage IFOP réalisé pour la CNIL, février 2020.

* 162 C'est notamment le cas lorsque les parents sont impliqués dans l'infraction, par exemple lors de maltraitance.

* 163 Audition du jeudi 3 juin 2021.

* 164 Audition du jeudi 1 er juillet 2021.

* 165 Audition du jeudi 3 juin 2021.

* 166 www.nonauharcelement.education.gouv.fr

* 167 Audition du mercredi 9 juin 2021.

* 168 Audition du mercredi 23 juin 2021.

* 169 Harcèlement entre pairs en milieu scolaire : quelle est l'ampleur du phénomène ? sondage de l'IFOP pour la Région Île-de-France et l'association Marion la main tendue, mars 2021.

* 170 Audition du mercredi 2 juin 2021.

* 171 Harcèlement entre pairs en milieu scolaire : quelle est l'ampleur du phénomène ? sondage de l'IFOP pour la Région Île-de-France et l'association Marion la main tendue, mars 2021.

* 172 Audition du jeudi 10 juin 2021.

* 173 Notamment, l'audition du mercredi 16 juin 2021 avec les organisations syndicales des personnels médico-sociaux de l'Éducation nationale.

* 174 Audition du mercredi 9 juin 2021.

* 175 Audition du jeudi 1 er juillet 2021.

* 176 Audition du mercredi 9 juin 2021.

* 177 Audition du mercredi 9 juin 2021.

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