B. MOBILISER EN PRIORITÉ DES RESSOURCES EXISTANTES

1. Dégager des financements pour les AOM via les CEE et le fonds vert

De façon très étrange, deux dispositifs majeurs visant à financer la transition écologique, à savoir le fonds vert (voir encadré en deuxième partie) et les certificats d'économies d'énergie (CEE) ignorent pratiquement le domaine des transports et le financement des mobilités du quotidien. Cette situation est d'autant plus surprenante que le secteur des transports est le premier émetteur de CO2 en France, celui sur lesquels les efforts à fournir pour atteindre nos engagements internationaux sont les plus importants et le domaine où les résultats se font le plus attendre. Il n'y aura pas de vraie transition écologique et la France ne respectera pas ses engagements internationaux si elle ne décarbone pas massivement ses transports, y compris les mobilités du quotidien. Les seuls déplacements entre les métropoles et leurs espaces périurbains et périphériques sont à la source des principales émissions de CO2 des mobilités et représenteraient 7 % des émissions totales en France.

Comme décrit supra, pour le fonds vert, doté de deux milliards d'euros de crédits, en matière de transports, seul un volet extrêmement modeste sur le covoiturage en zone rurale est éligible au dispositif. Pour rappel, à la fin du mois de mars 2023, sur les 150 premiers lauréats du fonds vert, seuls deux projets en faveur du covoiturage ont été retenus, pour un montant total de 130 430 euros. En toute logique, compte tenu du poids des transports dans les émissions totales, 30 % du budget aurait pu leur être consacré dont au moins la moitié (300 millions d'euros) au profit des services de mobilité quotidienne mises en oeuvre par les AOM.

Les certificats d'économie d'énergie (CEE)

Le dispositif des certificats d'économies d'énergie (CEE) a été créé par la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique (loi POPE). Il constitue un outil de la politique de maîtrise de la demande énergétique. Ce dispositif repose sur une obligation triennale de réalisation d'économies d'énergie en CEE (1 CEE = 1 kWh cumac d'énergie finale) imposée par les pouvoirs publics aux fournisseurs d'énergie dits « obligés ». Ces derniers sont incités par ce dispositif à promouvoir l'efficacité énergétique auprès des consommateurs d'énergie (ménages, collectivités territoriales ou professionnels).

Les CEE sont attribués, sous certaines conditions, par les services du ministère chargé de l'énergie, aux acteurs éligibles réalisant des opérations d'économies d'énergie. Ces actions peuvent être menées dans tous les secteurs d'activité (résidentiel, tertiaire, industriel, agricole, transport, etc.), sur le patrimoine des éligibles ou auprès de tiers qu'ils ont incités à réaliser des économies d'énergie. Les obligés ont également la possibilité d'acheter des CEE à d'autres acteurs ayant mené des actions d'économies d'énergie.

Des fiches d'opérations standardisées, définies par arrêtés, sont élaborées pour faciliter le montage d'actions d'économies d'énergie.

Les certificats délivrés sont matérialisés sur un compte individuel ouvert dans le registre national des certificats d'économies d'énergie. En fin de période, les vendeurs d'énergie obligés doivent justifier de l'accomplissement de leurs obligations par la détention d'un montant de certificats équivalent à ces obligations. En cas de non-respect de leurs obligations, les obligés sont tenus de verser une pénalité libératoire pour chaque kWhc manquant.

Des contrôles sont effectués par le Pôle National des certificats d'économies d'énergie (PNCEE) afin de vérifier l'éligibilité des opérations donnant lieu à la délivrance de CEE.

Quatre périodes de CEE se sont déjà déroulées à ce jour :

- période 1 de 2006 à 2010 ;

- période 2 de 2011 à 2014 ;

- période 3 de 2015 à 2017 ;

- période 4 de 2018 à 2021.

La cinquième période des CEE a débutée en 2022 et doit se prolonger jusqu'en 2025.

Source : commission des finances du Sénat.

Actuellement seuls 4 % des financements issus du dispositif des certificats d'économies d'énergie (CEE) sont consacrés aux transports. Là encore, les crédits consacrés à la mobilité devraient être à la hauteur des enjeux qu'elle revêt en matière de décarbonation. Alors que la quatrième période de CEE a représenté des enjeux financiers de 16 milliards d'euros, soit 4 milliards d'euros par an en moyenne, les estimations relatives à la cinquième période de CEE de 2021 à 2025 s'établissent d'avantage autour de 20 milliards d'euros, soit 5 milliards d'euros par an en moyenne. Une affectation de 15 % de ces sommes aux projets d'investissements des AOM pourrait dégager une source de financement annuelle de l'ordre de 750 millions d'euros.

Recommandation n° 5 : allouer aux AOM des crédits du fonds vert et des financements issus des certificats d'économies d'énergie (CEE).

2. Cibler les aides à l'acquisition de véhicules propres vers les zones rurales

Dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2023 le Parlement a adopté des crédits à hauteur de 1,3 milliard d'euros en faveur des aides à l'acquisition de véhicules propres (le bonus écologique et la prime à la conversion) pour l'année 2023. Dans la mesure où la voiture individuelle représente 16 % des émissions de CO2 en France, il apparaît légitime de maintenir une incitation au verdissement du parc automobile.

Toutefois, progressivement, ces aides mériteraient d'être mieux ciblées, notamment sur des critères territoriaux et liés à l'absence d'une alternative suffisante en matière de transports collectifs. Dans les zones les moins denses, il existe des territoires où aucune solution de transport collectif ne pourra trouver sa pertinence économique. Dans ces lieux, la seule façon de décarboner la mobilité quotidienne sera de convertir le parc des véhicules individuels des particuliers, quitte à ce qu'ils les utilisent pour rallier un point d'articulation intermodale leur permettant d'accéder à un réseau de transport collectif.

Dans une logique de maintenir leur fléchage vers la transition écologique des mobilités, la réduction progressive des crédits actuellement consacrés aux aides à l'acquisition de véhicules propres du fait de leur ciblage vers les zones les moins denses, devrait faire l'objet d'une réallocation en faveur du financement des projets d'investissements des AOM dans les mobilités collectives du quotidien.

Recommandation n° 6 : cibler les aides à l'acquisition de véhicules propres vers les zones rurales.

Les thèmes associés à ce dossier