B. RÉEXAMINER LA POLITIQUE DE COHÉSION

1. L'effort de cohésion doit s'étendre aux PAECO


• L'article B du traité sur l'Union européenne fait du « renforcement de la cohésion économique et sociale » un des buts de l'Union européenne. Les politiques structurelles font l'objet du titre XIV du traité instituant la Communauté européenne (articles 130 A à 130 E). L'article 130 A précise que « la Communauté vise à réduire l'écart entre les niveaux de développement des diverses régions et le retard des régions les moins favorisées, y compris les zones rurales » ; l'article 130 B précise que cet objectif relève à la fois de la responsabilité des États et de la Communauté, laquelle agit « au travers des fonds à finalité structurelle (...), de la Banque européenne d'investissement et des autres instruments financiers existants ». L'article 130 D prévoit la mise en place du fonds de cohésion, destiné à contribuer financièrement « à la réalisation de projets dans le domaine de l'environnement et dans celui des réseaux transeuropéens en matière d'infrastructure ».

Il est à noter que le même article 130 D confie au Conseil statuant à l'unanimité le soin de définir « les missions, les objectifs prioritaires et l'organisation des fonds à finalité structurelle, ce qui peut comporter le regroupement des fonds ». Le traité laisse donc au Conseil la plus grande latitude pour déterminer les modalités de mise en oeuvre de l'effort de cohésion.

Le Conseil européen d'Edimbourg (décembre 1992), qui a défini les perspectives financières pour 1994-1999 (« paquet Delors II), a prévu un doublement en monnaie constante des ressources consacrées aux actions structurelles, après le premier doublement consacré par le « paquet Delors I » pour la période 1987-1993. Les dépenses de la Communauté au titre des actions structurelles atteindront ainsi, pour l'année 1999, un montant de J 30,9 milliards d'Écus (valeur 1992) et représenteront 35,6 % des dépenses inscrites dans les perspectives pluriannuelles.

La cohésion économique et sociale est donc une orientation fondamentale de la Communauté européenne, qui mobilise à cet effet des moyens considérables. Il ne serait pas concevable qu'elle renonce à cet objectif au moment où son hétérogénéité va se trouver fortement accrue par l'adhésion des PAECO ; de plus, il serait irréaliste de demander à ces pays de se plier aux disciplines de l'Union sans prévoir de les aider à combler le retard, compte tenu de l'ampleur de celui-ci. Il convient donc de leur étendre le schéma appliqué aux pays dits « de la cohésion » (Espagne, Grèce, Irlande, Portugal), dont l'écart de développement par rapport à la moyenne communautaire est bien moins grand, et qui bénéficient d'aides de grande ampleur dans une optique de convergence.

Par ailleurs, l'étude de l'OFCE suggère que l'extension des politiques structurelles aux PAECO, en desserrant les contraintes limitant l'investissement productif, et en favorisant d'autres apports de capitaux publics et privés, devrait entraîner chez les bénéficiaires un notable supplément de croissance (près de 1,5 % par an en moyenne), ce qui laisse supposer que la politique de cohésion pourrait être plus efficace dans le cas de ces pays que dans celui des bénéficiaires actuels, dont le retard initial était moindre.


• Le coût budgétaire de l'extension aux PAECO de la politique de cohésion est naturellement fonction de la référence employée.

Une hypothèse extrême est celle présentée au chapitre 2 de l'étude de l'OFCE : les PAECO recevraient, par habitant, un effort non de même montant, mais de même intensité que celui dont bénéficient les « pays de la cohésion » compte tenu de la différence des écarts de développement. On aboutirait alors, uniquement pour les six pays couverts par l'étude, à une dépense supplémentaire de 43,6 milliards d'Écus (voir annexe, p. 36) qui excéderait aussi bien les possibilités budgétaires des États contributeurs que la capacité d'absorption des pays bénéficiaires.

L'hypothèse finalement retenue par l'OFCE (ibid., p. 134,135) prévoit des transferts estimés par référence à ceux actuellement mis en oeuvre dans l'Europe des Quinze et modulés en fonction du PIB par habitant et du taux de chômage. La dépense supplémentaire serait alors de 20,3 milliards d'écus pour les six mêmes pays.

Une estimation simple peut être effectuée en appliquant aux PAECO l'aide moyenne par habitant et par an accordée aux pays bénéficiant du fonds de cohésion (soit 216 Écus) : la dépense supplémentaire serait alors de 20.7 milliards d'Écus pour les six principaux pays candidats, et de 22,8 milliards d'écus pour l'ensemble des PAECO. En prenant pour référence l'aide accordée aux « nouveaux Länder » (ex-RDA), soit 142 écus par habitant et par an, la dépense serait ramenée à 15 milliards d'écus pour les dix PAECO.

Toutefois, l'évaluation des aides structurelles dont pourraient bénéficier les nouveaux adhérents doit également tenir compte des risques de déséquilibre que comporteraient des aides représentant une part trop importante de leur PIB. Dans son « rapport intérimaire » au Conseil européen de Madrid « concernant les effets de l'élargissement » (CSE (95) 605), la Commission européenne souligne à cet égard que : « L'expérience montre que des volumes d'assistance élevés par rapport au PIB des bénéficiaires sont difficiles à utiliser de façon efficace et qu'ils peuvent même altérer leurs structures économiques. Dans le cas des nouveaux États membres, cet aspect peut encore être aggravé par les problèmes liés aux systèmes administratifs, à la capacité d'absorption et à la nécessité de cofinancement national. Ces considérations devront être prises en compte dans le contexte de l'élargissement ».

Compte tenu de ces risques, il serait raisonnable d'envisager de plafonner les aides structurelles à une fraction du PIB de chaque pays. En prenant pour référence le PIB par habitant en standard de pouvoir d'achat -malgré toutes les incertitudes qui s'attachent à cette notion statistique dans le cas des PAECO- un plafonnement à 5 % pour chaque pays limiterait à environ 20 milliards d'écus par an les aides structurelles maximales envisageables pour l'ensemble des PAECO.

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