3. La protection radiologique chez COMUF

Il n'existe pas au Gabon de réglementation de radioprotection ; il n'y a donc ni procédure d'autorisation ni dossiers à présenter aux autorités. COMUF m'a indiqué qu'elle suit la réglementation française, dans la mesure du possible. Ainsi elle met en place les politiques et moyens permettant de respecter les recommandations de la CIPR 26 (et textes d'application pour les mines d'uranium) ; pour sa part la protection radiologique de l'environnement s'efforce de répondre aux exigences inscrites dans le décret n°90-222 du 9 mars 1990.

La protection radiologique est organisée selon le schéma suivant :

Des moyens importants sont mis en oeuvre pour la protection radiologique du personnel. Trois types de mesures sont effectués : dosimétrie d'ambiance, dosimétrie de fonction, dosimétrie individuelle. L'utilisation depuis 1990 du Système intégré de dosimétrie, développé par le CRPM, a accru l'efficacité et la pertinence de la dosimétrie individuelle. COMUF mesure elle-même les ambiances physiques (en particulier avec des matériels permettant la détermination de l'énergie a potentielle pour les descendants du radon) et envoie les têtes des dosimètres individuels tous les mois au CRPM.

En matière de protection « à la source », la principale mesure consiste à assurer une bonne aération des galeries. Il y a quelques années, l'aérage primaire restait insuffisant (pas de ventilateurs sur les entrées d'air) ; la situation a été modifiée. Dans les galeries en aérage primaire, les représentants de COMUF m'ont dit que le radon ne pose pas de problème, que la valeur guide pour l'énergie a potentielle était souvent dépassée avant 1991, que les poussières posent toujours des problèmes. Pour les galeries en aérage secondaire, i1 n'y a pas non plus de problème pour le radon, mais il y a encore aujourd'hui quelques dépassements des valeurs guides pour l'énergie a potentielle et les poussières. Les problèmes d'exposition liés aux poussières découlent souvent du fait que les consignes d'arrosage des galeries ne sont pas toujours respectées. Dans l'usine, les principales zones d'exposition sont les postes de concassage et de broyage (poussières).

Dans un tableau comparatif regroupant l'ensemble des sites d'extraction de COGEMA, COMUF vient en avant-dernière position au plan des performances, juste devant COMINAK (Niger). Les travailleurs sont exposés à une dose moyenne inférieure à 30 mSv.

Pour la protection de l'environnement, j'ai mentionné dans le rapport les modalités anciennes et nouvelles de la gestion des résidus. La surveillance est assurée par un réseau de stations et des prélèvements réguliers en des points définis. Lors de ma visite, J.P. PFIFFELMANN a jugé nécessaire de compléter le réseau par un point de mesure en amont de la Mitembe (rivière dans laquelle se jette la Ngamaboungou) et un point directement à l'aval de la retenue derrière laquelle décantent les résidus fins ; J.P. PFIFFELMANN estimait aussi qu'après le recouvrement des résidus, dans l'ancienne carrière de Mounana, il conviendrait d'implanter 2 ou 3 dosimètres de site. ALGADE effectue un audit environnemental tous les ans. L'IPSN a effectué une synthèse relative au rando 222 en 1987 (1 ( * )) .

Les capacités locales d'analyse radiologique sont assez développées : le laboratoire du service de radioprotection peut analyser tous les éléments métalliques ainsi que l'uranium (mesuré à la torche et contrôlé par fluorimétrie).

Dans le cadre des programmes communautaires SYSMIN, des aides ont été demandées à l'Union européenne pour améliorer l'aérage des mines, augmenter le financement accordé à une société de reconversion et modifier l'aménagement des aires de rejet. Plusieurs millions d'Écus auraient été accordés. La protection de l'environnement coûte en propre 100 MF CFA (c'est-à-dire 1 MF français) à COMUF.

Que conclure en définitive ? Le lecteur aura pu être surpris par l'apparente négligence qui entoure le rejet des effluents issus de l'usine de traitement. Est-il bien sérieux de ne pas neutraliser ces effluents, et d'amener ainsi le degré d'acidité de la Ngamaboungou à des valeurs plus que significatives ?

Une fois n'est pas coutume, je me demande si on ne peut pas en quelque sorte « renverser » la question : pourquoi ne pas adopter cette politique minimaliste vis-à-vis de l'environnement si en contrepartie les ressources économisées par COMUF sur la protection de la Ngamaboungou peuvent être utilisées à des emplois plus efficaces pour la santé des populations ? Je ne peux m'empêcher de songer alors au soutien apporté par COMUF au fonctionnement de l'hôpital de Mounana.

Plutôt que d'« hôpital » il vaudrait peut-être mieux parler de « centre de santé » : l'établissement compte 45 lits, du matériel de radiologie et de cardiologie, une salle d'accouchement, deux blocs opératoires, un centre de médecine du travail... Il prépare un projet de coopération avec le centre de recherches médicales de Franceville, sur le paludisme et les maladies sexuellement transmissibles (il y a cependant peu de cas de sida dans la région).

L'hôpital de Mounana soigne certes les personnels de COMUF (20 % des entrées), mais accueille couramment des personnes venant de 120 km à la ronde. Depuis 9 ans près de 1 million d'entrées ont été comptabilisées. Les médicaments sont payés intégralement par COMUF pour le bénéfice de l'ensemble de la population soignée. Le Dr. RAVOLLET, directeur, m'a fait part de l'étonnement qu'il avait ressenti à son arrivée : il se trouvait dans la pharmacie de l'hôpital plus de médicaments qu'il n'en avait manipulés pendant 18 ans d'Afrique !

Pour parler franchement, et au risque de choquer certaines âmes sensibles, je préfère assurément que COMUF affecte des ressources au financement de l'hôpital de Mounana plutôt qu'à la protection d'une rivière, qui est de toute façon assurée par la dilution procurée quelques kilomètres en aval. Bien sûr on peut toujours souhaiter que la qualité des eaux de la rivière soit un jour meilleure. Il s'agit de savoir où il convient de faire porter en priorité les efforts, pour leur plus grande efficacité.

* 1 N. FOURCADE, M.C. ROBE, Synthèse des résultats des mesures de concentration en radon 222 sur le site de Mounana, de 1984 à 1985. Comparaison du site de Mounana avec des sites français. IPSN - Département de Protection technique - Service de Protection des Installations nucléaires - Laboratoire de recherche sur la protection dans les mines, COM/002 (2), 23 février 1987.

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