IV. UNE TRADITION INDUSTRIELLE PRÉEXISTANTE

À l'époque de la présence britannique, plusieurs foyers industriels avaient connu un grand développement en Inde.

Au 18 e siècle, de nombreuses provinces de l'Inde jouissaient d'une grande prospérité grâce au développement d'activités industrielles. Les châles du Cachemire, les tissus du Coromandel, le salpêtre et le fer du Bihar étaient largement exportés.

Au 19 ème siècle, la région de Calcutta, alors capitale de l'Inde, a bénéficié de l'essor de l'industrie lourde qui s'est développée le long du bassin du Gange. Parallèlement, le Bengale voyait se multiplier les filatures de jute, ce qui permit, à la fin du siècle, à l'Inde de devenir le premier fournisseur mondial de ce textile.

Au Sud, le Tamil Nadu a aussi vu sa vocation industrielle s'affirmer très tôt, grâce à l'importance historique de la ville de Madras, centre mercantile important dès le 17 ème siècle et tourné vers l'exportation. Les infrastructures dont il s'est doté, ont permis à l'État de conserver, aujourd'hui encore, son tissu industriel.

À Bombay et à Ahmedabad, dès le milieu du 19 e siècle, l'industrie cotonnière était prospère. Les tisserands de village pris par Karl Marx, comme archétypes des exploités, étaient devenus quelque vingt ans plus tard 6 ( * ) les principaux acheteurs de la production cotonnière de la région. Contrairement à celle du jute, contrôlée par les Britanniques, l'industrie du coton a permis l'essor d'un capitalisme indigène 7 ( * ) .

Au cours de la seconde moitié du 19 e siècle, les Anglais dans la région de Madras, puis les Indiens, au Bengale installèrent des usines sidérurgiques et tentèrent de développer la métallurgie en exploitant les gisements locaux de minerais et de charbon.

Mais, c'est à un homme d'affaires parsis, J.N. Tata, que l'on doit d'avoir créé, au tournant du 20ème siècle, la première aciérie moderne en Inde. À partir d'une première concession minière au Bihar, il choisit le site de Jamshadpur qui allait devenir la capitale de la sidérurgie. À la veille de la première guerre mondiale, son entreprise produisait 150.000 tonnes de fonte, 78.000 tonnes d'acier, pour dépasser, trois ans plus tard, 180.000 tonnes.

Le développement du chemin de fer, à l'initiative des Anglais, devait aussi contribuer puissamment à l'essor industriel de l'Inde.

Après l'Indépendance, les plans successifs ont consacré cette tradition industrielle, en mettant l'accent sur le développement de l'industrie lourde, principalement confiée au secteur public.

Dans la région de Bombay, les industries légères très diversifiées ont été laissées essentiellement à l'initiative privée et ont pu poursuivre leur essor.

Depuis lors, les régions d'implantation de l'industrie lourde, du fait notamment de conflits sociaux à répétition, des sureffectifs, de l'obsolescence progressive des équipements industriels et du contrecoup de la crise mondiale de la sidérurgie, ont connu un lent déclin.

Il reste que l'héritage industriel de l'Inde lui donne, aujourd'hui, le double avantage de disposer de ressources naturelles abondantes et d'une main-d'oeuvre expérimentée.

* 6 Cf J.A. Bernard : « L'Inde : le pouvoir et la puissance ». p. 113.

* 7 Cf J.A. Bernard : « L'inde : le pouvoir et la puissance », p. 113.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page