2. Un garant : l'Etat

La sécurité sanitaire des produits et la protection de la santé font intervenir plusieurs acteurs, et notamment les producteurs, les distributeurs, les consommateurs, l'Etat.

Les producteurs et les distributeurs ont -et auront de plus en plus -intérêt à ce que la sécurité de leurs produits soit garantie.

Cela est vrai, depuis longtemps, pour l'industrie pharmaceutique. Le retrait du marché d'un médicament qui présenterait des défauts de conception ou de fabrication peut entraîner, pour le laboratoire qui l'exploite, des pertes financières énormes, voire une faillite. Compte tenu de la concentration croissante de cette industrie, la suspicion à l'égard d'un médicament produit par un laboratoire rejaillit aussitôt sur l'ensemble de la gamme de ses produits. En outre, les frais de recherche, de développement et de lancement d'un médicament sont tellement importants qu'aucun doute ne peut être permis en ce qui concerne les conditions de sa fabrication.

Cela est vrai aussi pour les grandes entreprises du secteur agro-alimentaire, qui développent une politique de marque et ne peuvent pas se permettre qu'un de leurs produits soit suspecté.

Cela était peut-être moins vrai, jusqu'à une période récente, pour certains fabricants ou petits producteurs.

Ainsi, non seulement les fabricants de matériel médical sont souvent des PME-PMI, qui fabriquent à une petite échelle, mais aussi aucun système fiable de matério-vigilance ne permettait jusqu'au début de l'année 1996 d'assurer une large diffusion aux informations concernant d'éventuels accidents ou effets indésirables. L'utilisation de certains dispositifs a pu provoquer des accidents, même nombreux, sur le territoire national, sans que personne ne s'en préoccupe, autre que le prescripteur ou le chirurgien directement confronté à l'incident ou à l'accident et qui ont ainsi été incités à changer de marque ou de méthode.

De même, des petits producteurs dans le secteur alimentaire n'ont longtemps pas eu d'incitation économique à la sécurité, leur produit partant dans un circuit de distribution sans qu'aucune traçabilité soit possible.

Cela change, tant pour les dispositifs médicaux que pour le secteur alimentaire. Les exigences de traçabilité se multiplient dans les deux secteurs, et un système de matério-vigilance se met en place pour les dispositifs. Les distributeurs de produits alimentaires, de plus en plus, engagent leur nom et leur réputation sur les produits qu'ils distribuent. Enfin, l'affaire de l'ESB a montré que toute la filière bovine avait intérêt à garantir la qualité, et que les dérives constatées dans quelques exploitations pouvaient compromettre la survie économique de tous les producteurs.

Cet intérêt des producteurs pour la sécurité sanitaire de leurs produits doit être absolument exploité, et il convient donc de développer autant que possible les procédures d'assurance-qualité.

Autre acteur intervenant pour garantir la sécurité sanitaire : le consommateur.

Grâce aux informations dont il dispose, le consommateur peut effectuer des choix qui le conduisent à privilégier ceux des produits dont il estime qu'ils présentent de meilleures garanties de sécurité pour sa santé. Ces informations peuvent émaner des producteurs eux-mêmes, mais aussi d'organismes officiels ou indépendants, de la presse, d'autres consommateurs ou d'associations de consommateurs.

L'intérêt des producteurs que la sécurité de leurs produits soit garantie ou la croyance en la rationalité des choix du consommateur conduit certains à estimer que le rôle de l'Etat dans la protection de la santé n'est qu'accessoire. Ils estiment que l'on peut quasiment se satisfaire des procédures d'assurance-qualité définies par les producteurs, des labels qu'ils mettent en place et de la régulation par le marché, les consommateurs éliminant par eux-mêmes les produits qui ne présenteraient pas toutes les garanties en termes de sécurité sanitaire.

Tel n'est pas le point de vue de votre Commission.

Elle estime en effet que l'existence de procédures d'assurance-qualité au sein de l'industrie ou du secteur agricole ne saurait dispenser les pouvoirs publics de leur travail d'inspection et de contrôle, ni de leur tâche de réglementation . C'est en effet à l'Etat qu'il appartient de définir le contenu des procédures d'assurance-qualité et d'en contrôler le respect. En outre, pour les biens de santé, l'assurance-qualité ne saurait suffire : il faut évaluer le rapport bénéfices/risques pour le patient, et une telle mission ne peut être confiée aux producteurs.

Votre commission estime aussi que la régulation par le marché ne saurait suffire, car, le plus souvent, l'information du consommateur n'est pas complète . En outre, attendre la régulation par le marché, c'est se permettre d'attendre la survenue de l'incident ou de l'accident qui, s'il est connu, est susceptible d'entraîner des réactions des consommateurs. La sécurité sanitaire doit être garantie a priori.

C'est pourquoi votre Commission estime que, si l'Etat ne doit pas se passer du concours des producteurs ou des consommateurs, il demeure garant de la sécurité sanitaire.

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