C. AUDITION DE MME CLAIRE BAZY-MALAURIE, DIRECTEUR DES HÔPITAUX ET M. JACQUES GRISONI, RESPONSABLE DE DIVISION À LA DIRECTION DES HÔPITAUX

M. Charles DESCOURS, président - Madame, nous vous écoutons...

Mme Claire BAZY-MALAURIE - Dans un premier temps, je limiterai mon propos au secteur des dispositifs médicaux, non que la direction des hôpitaux soit le seul intervenant -loin de là- mais c'est en fait cette direction qui coordonne les procédures en ce domaine.

Nous avons d'abord dû gérer la substitution de la procédure de marquage CE à la procédure d'homologation laquelle, je crois, sera achevée en juin 1998.

Nous avons commencé la mise en place du dispositif de matério-vigilance depuis 1994, époque à laquelle il a commencé à prendre une forme et une ampleur significatives.

Enfin, nous sommes en même temps le lieu de coordination de la procédure du TIPS -tarif interministériel des prestations sanitaires- au sein duquel existent des procédures d'évaluation indifférenciées de ces dispositifs médicaux, dans des cadres au demeurant bien déterminés, contrairement à ce qui se passe dans le domaine du médicament.

Nous avons donc un rôle important à jouer dans la chaîne du processus de sécurité, qui a tenté de répondre du mieux possible à la montée des préoccupations de sécurité sanitaire.

Par ailleurs, toute la procédure de contrôle sur le marché repose essentiellement sur la DGCCRF, et sur nos médecins et pharmaciens inspecteurs, qui ont un rôle important à jouer dans les établissements hospitaliers ou au titre de leur mission générale de sécurité et de police sanitaire, puisqu'ils peuvent être en effet amenés à constater des dysfonctionnements et à alerter l'administration.

La difficulté tient en deux mots : tout d'abord, nous avons affaire à des partenaires assez dispersés, et, ensuite, l'ampleur des moyens est trop limitée, bien qu'elle soit très différente de ce qu'elle était encore il y a quelques années.

Les directives de 1994 nous ont amenés à construire un système très différent de celui de l'Agence du médicament. En effet, celles-ci reposent sur la procédure du marquage CE, et l'on applique aux dispositifs médicaux à peu près le même système de sécurité que celui qui a été mis en place pour les jouets.

Cette procédure repose sur les industriels au gré de déclarations mises en place par les organismes notifiés, reposant eux-mêmes sur des procédures d'assurance-qualité de type industriel.

Quelles que soient les exigences qu'on peut avoir en termes de sécurité, on est bien dans une nouvelle approche faite pour les industriels, et qui repose sur un auto-contrôle.

Certes, le contrôle des organismes notifiés doit avoir lieu, mais nous avons mis en place en France, au travers du GMED, un système qui, à ce jour, n'est pas un véritable organisme notifié, puisqu'il n'a pas été notifié en tant que tel à Bruxelles. Il repose sur le laboratoire national d'essais et le laboratoire de contrôle des industries électriques, fédérés dans un GIE dans lequel les ministères de l'industrie et de la santé sont parties prenantes. Ce GIE fait office d'organisme notifié, la France n'en ayant choisi qu'un seul à ce jour.

L'industrie des dispositifs médicaux est très éclatée et essentiellement constituée, à part quelques gros intervenants en équipements matériels lourds, de petites PME travaillant sur la base d'innovations technologiques très intéressantes ou de processus de base anciens. Il existe une tentative de fédération du SNITEM, qui est notre interlocuteur, mais qui ne regroupe pas la totalité des fabricants et des dispositifs médicaux.

Les industriels français occupent une part de marché restreinte, et les étrangers arrivent sur le marché français avec comme seul sésame le marquage CE, seule obligation qui leur est faite. Ce marquage CE n'assure pas non plus un monopole du GMED, puisque les industriels étrangers peuvent recourir à un organisme notifié allemand, britannique, grec ou n'importe quel marquage CE.

Or, si le marquage CE a bien reconnu des classes de dispositifs médicaux en fonction de leur dangerosité potentielle, et si les exigences sont plus fortes en fonction des différentes classes de dispositifs, la procédure demeure toutefois la même, et il suffit que ces dispositifs disposent du marquage CE d'un organisme notifié pour pouvoir être utilisés sur le territoire français.

M. Charles DESCOURS, président - Ce marquage évalue-t-il l'efficacité ?

Mme Claire BAZY-MALAURIE - La notion de bénéfice-risque n'est pas véritablement au coeur de la procédure du marquage CE.

Nous avons institué par les ordonnances l'insertion de la future ANAES dans cette chaîne de décisions. Il est prévu que celle-ci interviendra pour juger du service rendu dans le cadre de l'accès au remboursement par la Sécurité sociale et, in fine , à la tarification, mais certainement pas avant le marquage CE.

D'où les difficultés récemment rencontrées avec les prothèses mammaires, pour lesquelles nous avons été amenés à faire jouer la clause de sauvegarde et à mandater un groupe d'experts qui doivent déterminer les conditions d'évaluation clinique permettant de lever la clause de sauvegarde et de remettre des prothèses en gel de silicone sur le marché.

Il ne faut pas non plus nécessairement crier définitivement haro sur la procédure dite marquage CE, qui présente l'avantage de garantir la démarche d'assurance-qualité dans le processus industriel. Toutefois, on voit bien qu'elle ne répond pas non plus à la totalité des préoccupations. Le problème est donc de savoir si c'est un pur défaut de jeunesse du système, ou si cela va plus loin. Il faut dire que nous nous sentons un peu isolés dans la Communauté face à cette préoccupation de sécurité sanitaire.

M. Claude HURIET, rapporteur - Aucun pays ne devrait être satisfait ni considérer que la procédure de marquage CE répond une fois pour toutes à l'objectif de sécurité.

Y a-t-il, à travers la position française et éventuellement celle d'autres partenaires, une évolution possible ? La France peut-elle y contribuer ou non ? Nos partenaires ne risquent-ils pas d'y voir une distorsion de concurrence ?

Mme Claire BAZY-MALAURIE - Certaines prescriptions de la Commission touchent à la fois à la matério-vigilance et au contrôle du marché. C'est ce système qui doit nous permettre de faire face, peu à peu, aux préoccupations de sécurité sanitaire.

Par ailleurs, la Commission reconnaît qu'il lui faut pousser les feux sur la mise en oeuvre d'une banque de données européenne sur les dispositifs médicaux.

Les directives de 1994 ne se résument donc pas seulement au marquage CE, et il existe toute une politique avec laquelle nous sommes d'accord et sur laquelle nous avions commencé à travailler.

Curieusement, les industriels européens et l'ensemble de la Communauté donnent l'impression de se satisfaire de la démarche industrielle sur les dispositifs médicaux, alors que parallèlement les Américains ont une approche plus conforme à celle que nous imaginons en matière de contrôle.

La Commission, pour l'instant, a répondu aux quelques interrogations que nous lui avions adressées sur les prothèses mammaires, les préservatifs et les produits d'origine bovine.

Jusqu'à présent, cela s'est résumé à des débats d'experts. Nous leur avons également fait part de notre préoccupation vis-à-vis de la lenteur de mise en place des banques de données, dont ils sont en train de s'en occuper...

Par ailleurs, nous leur avons signifié, notamment après l'affaire des prothèses mammaires, que nous nous interrogions sur l'efficacité du dispositif communautaire.

Le soutien des autres pays est pour l'instant minime. C'est un succès d'estime auprès de certains partenaires, notamment latins !

Un récent rapport américain -certains membres du Congrès considérant la FDA comme un système très lourd- soulignait que la politique communautaire était intéressante dans son principe, mais qu'elle souffrait d'un tel défaut de jeunesse qu'il n'était pas possible de la transposer aux Etats-Unis.

D'une certaine manière, c'est un peu l'impression que nous avons, car ce mécanisme ne répond pas à nos exigences par rapport à des produits qui peuvent aller du préservatif aux prothèses mammaires.

M. Bernard SEILLIER - Pensez-vous aujourd'hui pouvoir influencer l'évolution du processus européen ? En avez-vous les moyens et que pourrions-nous faire pour vous aider dans cette démarche ?

Mme Claire BAZY-MALAURIE - La question a été posée très explicitement à la Communauté... Encore une fois, je crois que nous sommes assez isolés.

M. Bernard SEILLIER - C'est aussi un peu le sentiment que l'on a eu lors de notre voyage aux Etats-Unis : le Congrès juge la FDA trop lourde, mais déplore qu'en Europe, rien ne soit encore organisé...

M. Claude HURIET, rapporteur - La raison principale ne réside-t-elle pas dans le fait que l'Union européenne n'a pas compétence dans le domaine de la santé ?

Mme Claire BAZY-MALAURIE - C'est un choix explicite des autorités communautaires. Il faut bien avoir présent à l'esprit que l'on parle de choses extrêmement variées et que, sous le vocable de "dispositifs médicaux", on traite d'éléments qui relèvent parfois de procédures d'assurance-qualité, mais aussi de dispositifs implantables ou de produits d'origine animale.

Il conviendrait donc peut-être d'être plus exigeant vis-à-vis des dispositifs médicaux sensibles, soit avant le marquage CE, soit après.

Les gens de la Commission comprennent ce type d'interrogations, mais sont en même temps les " gardiens du temple ", et tant qu'il n'y aura pas de majorité à l'intérieur de la Communauté pour compléter les directives de 1994, ils auront du mal à évoluer.

M. Bernard SEILLIER - Quelle est l'origine professionnelle de vos interlocuteurs au sein de la Commission ?

M. Jacques GRISONI - Ce sont des gens qui viennent du monde de la fonction publique -on a un Allemand- du monde des ingénieurs médicaux -on a un Français. Au-dessus, on trouve des ingénieurs européens, assistés en tant que de besoin d'experts médicaux travaillant dans le milieu pharmaceutique ou d'experts des hôpitaux ou encore auprès de ministères. Il s'agit d'une palette de compétences d'origine diverse. L'appareil lui-même regroupe des fonctionnaires avec quelques compétences d'expertise.

La Commission de Bruxelles demande aujourd'hui aux Etats membres de marcher davantage au pas. Leur premier souci est l'extension de la nouvelle approche des produits in-vitro aux tissus d'origine humaine et animale. Le second souci est la reconnaissance mutuelle du modèle européen en Australie et en Nouvelle-Zélande.

Les discussions sont plus compliquées avec les Etats-Unis. Le Japon, quant à lui, attend la fin des discussions avec les Etats-Unis pour prendre position.

En tout état de cause, notre sensibilité en matière de sécurité sanitaire n'est pas la même que celle de la Commission, et si nous émettons des doutes, Bruxelles nous demande de prouver que ceux-ci sont avérés. C'est précisément là que réside la difficulté...

Mme Claire BAZY-MALAURIE - C'est bien l'ambiguïté fondamentale : nous pensons que nous ne devons pas courir de risques, alors que la Commission nous demande de prouver qu'il peut y en avoir !

M. Bernard SEILLIER - C'est la culture scientifique contre la culture purement juridique !

Mme Claire BAZY-MALAURIE - ... Et économique !

M. Claude HURIET, rapporteur - Il serait intéressant pour le rapport que puissent figurer la nature et les dates des interventions que la France a pu faire en direction de la Commission ou des instances européennes, afin de montrer notre détermination et, à travers un rapport parlementaire, attirer l'attention sur une politique européenne en retrait par rapport aux préoccupations françaises en matière de sécurité...

Historiquement, pourquoi est-ce à la direction des hôpitaux qu'ont été confiées les attributions relatives aux biomatériaux ?

En effet, lors de nos précédentes auditions, l'un de nos interlocuteurs, Michel Gantois, qui travaille au centre de recherches des biomatériaux de Nancy, et qui est ingénieur de formation, nous a dit crûment que certaines prothèses, sur lesquelles on avait observé des ruptures, auraient dû choquer tous ingénieurs de fabrication, la conception de la pièce étant mécaniquement très mauvaise et les effets de surface prévisibles !

De quels moyens dispose donc la direction des hôpitaux pour faire face à un domaine en expansion soutenue ?

Mme Claire BAZY-MALAURIE - Historiquement, le fait que la direction des hôpitaux soit appelée à intervenir dans le domaine des dispositifs médicaux se conçoit d'autant mieux que ceux-ci sont utilisés majoritairement dans les établissements hospitaliers. La matério-vigilance, du fait de la pyramide des intervenants, se situe donc dans les établissements hospitaliers.

Cela tient aussi au fait que la planification, notamment à travers les équipements en matériels lourds, se situe à la direction des hôpitaux.

Enfin, lorsqu'il a fallu créer un guichet unique, en particulier à travers la procédure du TIPS, notre capacité assez grande à gérer de telles procédures et notre implication ont fini par conduire à créer un pôle à l'intérieur de la direction.

Au demeurant, le problème de la localisation est secondaire, dans la mesure où, pratiquement, aucune de ces procédures n'est gérée par la seule direction des hôpitaux. Ces procédures mettent en oeuvre -notamment concernant les problèmes de sécurité sanitaire- la direction générale de la santé, avec laquelle nous travaillons en binôme de manière permanente, la DGCCRF et le ministère de l'industrie.

Nous jouons un rôle de pivot central, afin d'assurer une continuité en matière de dispositifs médicaux, gérons des procédures et assurons la coordination administrative, mais nous ne sommes jamais seuls face aux industriels.

Par ailleurs, nous ne travaillons qu'avec des experts, et nombreux et divers sont les comités qui collaborent avec nous...

Quant à la description des moyens et des procédures, Jacques Grisoni, qui est responsable de la division des équipements, matériels médicaux et innovations technologiques, va vous expliquer où nous en sommes...

M. Jacques GRISONI - Nous disposons, pour animer l'ensemble des groupes d'experts et suivre les travaux, de deux permanents médecins, l'un chargé de mission auprès de moi, et l'autre qui bénéficie d'une double casquette de médecin et d'ingénieur. Nous avons également un pharmacien et quatre ingénieurs.

Nous avons constitué une panoplie de métiers autour de la matério-vigilance, à partir d'un rapport de l'IGAS de 1994, et également conservé des compétences pour tout ce qui concerne la partie "autorités compétentes", qui s'étend des travaux de suivi de la loi " Huriet " aux travaux de normalisation, en passant par la négociation à Bruxelles.

Les compétences de nos permanents couvrent les besoins qui sont les nôtres, à la seule difficulté près que, l'ensemble du secteur se structurant, de plus en plus de sujets doivent être traités et le volume de dossiers est de plus en plus important. On peut donc se poser la question de savoir si, à un moment donné, cette équipe d'une vingtaine de personnes sera toujours suffisante ou s'il faudra redéfinir les moyens...

Pour ce qui est des biomatériaux, je sais qu'il existe à Nancy un projet de fédération des laboratoires universitaires et que la capacité de propositions et d'innovations y est très forte.

On peut approcher les biomatériaux de deux façons : soit l'on considère qu'il faut des compétences spécifiques, et il faut alors suivre 60 % du total des quelques milliers dispositifs médicaux en Europe, soit l'on considère -et c'est ainsi que travaillent nos partenaires- que tout problème particulier doit être traité en tant que tel lors de l'évaluation du produit. Le débat est le même pour un organisme notifié, qu'il s'agisse du GMED ou de l'un des 55 autres organismes européens.

Quant à la question de la compatibilité des biomatériaux avec le corps humain, il conviendra également de la justifier lorsqu'une autorité compétente en demandera les preuves...

Pour moi, les biomatériaux ne constituent pas un problème en soi : on retrouve la même problématique pour chaque produit...

M. Claude HURIET, rapporteur - Quel était l'objet du rapport de l'IGAS de 1994 ?

M. Jacques GRISONI - Il s'agissait d'une mission d'appui demandée par le ministre de l'époque sur la manière de mettre en place un système français de matério-vigilance, sachant que les directives européennes n'imposent pas de modèle.

L'option choisie consistait à avoir une équipe de permanents au sein du ministère, assistée par une commission nationale de matério-vigilance et un correspondant dans chaque établissement de soins, sauf les plus petits, qui ont été autorisés à se regrouper. L'échelon régional n'a donc pas été retenu comme système de démarrage...

M. Claude HURIET, rapporteur - Michel Gantois nous a dit que les ruptures d'électrodes des stimulateurs implantables étaient prévisibles, et il nous a donné d'autres exemples aussi frappants qui démontrent bien que le problème n'est pas bien résolu. Les fabricants ont d'ailleurs leur part de responsabilités... Existe-t-il quelque chose de comparable, au moins en théorie, à l'étude des conditions de fabrication d'un médicament ou d'une molécule pour la procédure d'homologation ?

Quel est le champ auquel s'intéresse la direction des hôpitaux ? Remonte-t-on très loin en arrière ou, avec la responsabilité du fabricant, le contrôle en vue de l'homologation s'exerce-t-il davantage sur le produit fini ?

Mme Claire BAZY-MALAURIE - La procédure d'homologation -qui n'existe plus, puisqu'elle est remplacée par le marquage CE- s'intéressait aux dispositifs terminés...

M. Claude HURIET, rapporteur - Par rapport à la procédure d'homologation qui n'existe plus, le marquage CE représente-t-il quelque chose de mieux ou de moins bien ?

Mme Claire BAZY-MALAURIE - ... Il représente quelque chose de mieux dans la mesure où il s'adresse à tous les dispositifs médicaux. J'aurais tendance à dire que la procédure de marquage CE apporte le même type de sécurité que celui apporté par la procédure d'homologation.

L'avantage de la procédure d'homologation était que nous en étions complètement maîtres. On pouvait augmenter la liste, la diminuer, être plus sévère ou pas, alors qu'on a maintenant une règle de mise sur le marché communautaire et que nous n'avons plus la même latitude.

En 1994, je pense que le marquage CE a pu être considéré, à juste titre, comme un progrès par rapport à la procédure d'homologation, qui concernait un nombre relativement faible de dispositifs, et qui n'avait peut-être pas les mêmes exigences en matière d'assurance-qualité pour des industriels.

Les sondes dont vous parliez à l'instant avaient reçu le marquage CE et l'agrément de la FDA, ce qui prouve bien que l'on vit dans un monde où la demande de sécurité est plus importante qu'à l'époque !

Par ailleurs, le problème est, en amont du processus industriel, de repérer les produits qui peuvent être néfastes pour la santé ou les techniques qui ne sont pas bonnes compte tenu de leur utilisation dans le corps humain.

C'est un problème extraordinairement compliqué, dans lequel le réseau national de santé publique joue un certain rôle. Dans le fond, on a bien utilisé l'amiante dans les bâtiments durant des années, sans se préoccuper du fait que ce matériau était néfaste pour la santé ! On s'aperçoit que l'aluminium, considéré pendant des années comme parfaitement utilisable dans le corps humain, peut provoquer des méningites en cas de contact avec le liquide céphalo-rachidien. Mais qui l'a dit ? ... Personne !

Il faudrait pratiquement que chaque composant utilisé dans un dispositif implantable fasse l'objet de tests, de façon à cibler les points sur lesquels on pense qu'il existe des risques majeurs. Ceci est très difficile à faire, parce que cela se situe en amont...

M. Claude HURIET, rapporteur - Il y a très longtemps que les néphrologues connaissent l'encéphalopathie à l'aluminium, à travers certains systèmes de traitement des os !

Mme Claire BAZY-MALAURIE - C'est pour cela qu'il existe un travail d'information extrêmement important sur lequel nous avons, tous ensemble, un certain retard...

M. Bernard SEILLIER - C'est un problème de transfert de connaissances !

Mme Claire BAZY-MALAURIE - C'est vraiment tout ce travail d'information, de mise en place des normes européennes et de contrôle des organismes notifiés qui doit être accompli. Il est vrai qu'on en est encore aux balbutiements...

En fait, beaucoup de dispositifs utilisés sont le produit d'un contact entre médecins et industriels. Il faut donc mettre en oeuvre une information entre médecins, industriels et organismes notifiés. C'est une tâche gigantesque, qui porte sur un domaine extrêmement mouvant.

M. Bernard SEILLIER - M. Gantois mettait en cause la connaissance d'industriels qui n'étaient même pas des spécialistes de la mécanique...

Mme Claire BAZY-MALAURIE - Toute la difficulté à laquelle nous allons être confrontés dans le domaine des dispositifs médicaux réside dans la notion de bénéfice-risque, qui est très nouvelle et éminemment subjective. Qui va réaliser la balance bénéfice-risque et déterminer quel est le bon rapport ? Quel nombre d'incidents est-on capable de supporter en regard des progrès en matière de survie, etc. ?

Ce sont des notions qui doivent être prises en compte, mais dans lesquelles l'éthique joue peut-être plus encore que l'appréciation de la qualité d'une technique. Encore faut-il la connaître au départ !

M. Claude HURIET, rapporteur - C'est l'application de la démarche des protocoles et de la nécessité des essais avant la mise sur le marché à un domaine d'une nature différente. Or, actuellement, pour différentes raisons, cette procédure est beaucoup moins rigoureuse pour les dispositifs qu'elle ne l'est pour les médicaments !

Mme Claire BAZY-MALAURIE - Elle est moins répandue : quand elle existe, elle peut être rigoureuse. Elle est probablement moins exigeante...

M. Claude HURIET, rapporteur - ... Pour des raisons qui tiennent à un effet de nombre ! Il n'est d'ailleurs pas possible de faire des essais sans bénéfice individuel direct. De plus, quand il existe un protocole d'essais, celui-ci porte sur un nombre de patients plus restreint. Il est également plus coûteux à l'unité.

La matière est différente, mais ce n'est pas pour autant qu'on doit être moins rigoureux dans la méthodologie. De plus, la notion d'essais doit également s'appliquer aux dispositifs !

Mme Claire BAZY-MALAURIE - S'agissant des essais, nous avons confié à l'ANDEM de nouvelles expertises, afin de pouvoir implanter à nouveau des prothèses en gel de silicone. Les référentiels et les démarches en la matière devraient pouvoir être utilisés pour l'ensemble des autres biomatériaux.

Par ailleurs, la réalisation des normes, notamment européennes, est très en retard, puisqu'au moins une centaine de dossiers sont à l'étude, si ce n'est plus. Or, nous en sortons à peine dix par an ! Il faudra donc vraisemblablement pousser les feux et obliger le monde industriel et le monde de la normalisation à intensifier leur travail !

Enfin, dans le domaine des dispositifs médicaux, nous n'avons pas la possibilité de mesurer l'effet placebo !

M. Claude HURIET, rapporteur - On mesure la difficulté du chantier !

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