2. Une part très faible des investissements étrangers en Indonésie

a) Une large ouverture de l'Indonésie aux investissements étrangers

Comme la plupart de ses voisins "pays émergents", l'Indonésie s'ouvre aux investissements étrangers sur un rythme parfois hésitant.

En mai-juin 1994, une nouvelle réglementation a modifié les conditions imposées aux investisseurs étrangers dans le sens d'une libéralisation accrue. Les principales évolutions ont consisté :

- à donner la possibilité à un investisseur étranger de détenir la totalité d'une entreprise, c'est-à-dire d'agir en partenaire indonésien pendant les 15 premières années ;

- à supprimer la condition de retour à la majorité indonésienne après un certain temps si bien que désormais un partenaire étranger pourra rester majoritaire jusqu'à 95 % du capital aussi longtemps qu'il le souhaite ;

- à supprimer la condition du minimum d'investissement fixé autrefois à 1 million de USD et, dans certains cas, à 250.000 USD au profit d'un examen des demandes sur la seule base de critères économiques de faisabilité du projet et de son financement ;

- et à ouvrir à l'investissement étranger des secteurs d'intérêt national tels que les transports maritimes, aériens et ferroviaires, la production, le transport et la distribution d'énergie, la distribution d'eau potable, les télécommunication, les activités portuaires, l'énergie électronucléaire et les mass-média.

L'évolution récente de l'investissement étranger témoigne que les investisseurs étrangers ont su saisir les opportunités nouvelles offertes par l'Indonésie

Les autorisations d'investissement étranger ont connu une très forte croissance en 1994, passant de 8,1 milliards de dollars (pour 329 projets) à 23,7 milliards de dollars (pour 449 projets), soit une progression en valeur de + 192,6 %. C'est le montant le plus élevé jamais enregistré, le précédent record atteint en 1992 n'ayant été que de 10,3 milliards de dollars.

Les principaux secteurs à l'origine de cette évolution ont été :

- la chimie qui a multiplié en l'espace d'un an sa performance par 7 (avec 7,7 milliards de dollars) ;

- l'industrie du papier avec 5,1 milliards de dollars contre seulement 0,2 en 1993 ;

- l'industrie métallurgique de base avec 2,1 milliards de dollars contre 0,2 en 1993 ;

- enfin, la production d'électricité et la distribution d'eau, qui comptent pour 2,4 milliards de dollars en 1994 contre 2,3 en 1993 et n'apparaissaient pas les années précédentes.

Par pays, Hongkong occupait en 1994 le premier rang des investisseurs étrangers avec 6 milliards de dollars, suivi par le Royaume-Uni, (3 milliards) Taiwan (2,4 milliards), la Corée (1,8 milliard), Singapour (1,7 milliard), le Japon (1,6 milliard), et les États-Unis (1 milliard).

A cela, il convient d'ajouter les investissements conjoints émanant d'investisseurs étrangers originaires d'au moins 2 pays différents qui s'élèvent à 5 milliards de dollars.

Les approbations d'investissements étrangers, (hors secteurs de la finance et des hydrocarbures) ont encore fortement progressé en 1995. Ils se sont élevés à 39,9 milliards de dollars (soit 799 projets), soit une croissance de 68,4 % par rapport à 1994.

Caractéristiques des investissements autorisés en 1995

Les principaux secteurs (en milliards USD)

Pétrochimie

Transports

Génération d'électricité et approvisionnement en eau

Industrie du papier

19,3

5,5

3,5

2,5

Les principaux investisseurs en 1995 (en milliards USD)

R.U.

Japon

Australie

U.S.A.

Hongkong

Singapour

Allemagne

6,32

3,79

3,71

2,77

1,76

1,46

1,34

Le tableau ci-dessous récapitule les investissements étrangers autorisés entre 1967 et 1995.

La première place occupée par le Japon s'explique aisément par la proximité du pays et par sa stratégie affirmée de longue date de délocalisations dans la région. Avec les cinq pays qui lui succèdent, 70 % des investissements étrangers en Indonésie trouvent leur provenance. L'investissement étranger en Indonésie est donc fortement concentré même si il est probable qu'un certain nombre d'investissements recensés à partir de Singapour ou de Hongkong sont, en réalité, des investissements réalisés par des entreprises contrôlées en dehors de ces deux Etats.

b) La faiblesse des positions françaises

La part de la France dans l'ensemble des investissements étrangers est plus que modeste : 1,16 % des investissements étrangers en Indonésie.

Avec un peu plus de 60 entreprises implantées et 1 % du stock d'investissements étrangers, la présence française en Indonésie est particulièrement effacée compte tenu du potentiel du marché indonésien. En comparaison, dans les pays voisins de l'ASEAN, la part moyenne de la France dans les investissements directs étrangers, sans être spectaculaire, dépasse le plus souvent 2 %.

En dépit de la continuité et de l'importance de son aide bilatérale (3ème rang, loin derrière le Japon mais juste après l'Allemagne), la France n'occupe que le 14ème rang mondial pour le montant -cumulé- des autorisations données par le BKPM (agence gouvernementale chargée de l'instruction des dossiers d'investissement) depuis 1967. La part de la France doit être comparée à celle de l'Allemagne (3,82 %) ou du Royaume-Uni (15,6 %).

Ces statistiques ne tiennent toutefois pas compte des investissements réalisés dans l'énergie (Total : 1 milliard de dollars) et dans le domaine financier (200 millions de dollars).

Outre ces deux secteurs, la France est surtout représentée par des grands groupes dans des secteurs à forte intensité capitalistique : électricité, chimie, traitement des eaux, BTP... (Alcatel-Alsthom, Schneider, Rhône-Poulenc, l'Oréal, Degrémont, Dumez, SAE, ...)

On observe des implantations nouvelles dans des secteurs diversifiés : BTP (Bouygues), tourisme (Groupe Accor), l'agro-alimentaire (Danone), l'environnement (Lyonnaise des Eaux et Compagnie Générale des Eaux), la chimie (Air Liquide) et le ciment (Lafarge Coppée).

Mais, les entreprises françaises sont encore très peu présentes auprès des grands groupes locaux, financiers et industriels (et notamment les groupes chinois qui constituent plus de 70 % du secteur privé indonésien). Les PME sont également peu nombreuses compte tenu de l'importance des délais nécessaires pour les démarches administratives ou commerciales ainsi que des coûts d'approche rencontrés en Indonésie. Quelques-unes ont cependant bien réussi.

Les perspectives sont pourtant prometteuses : la politique récente de privatisation et l'ouverture aux entreprises étrangères de secteurs-clés comme l'énergie, les télécommunications ou le traitement des eaux constituent autant d'opportunités pour les groupes français, en particulier France Télécom et la Lyonnaise des Eaux qui négocient des investissements représentant plusieurs centaines de millions de francs français.

Quelques réussites acquises

En dépit d'une présence réduite, les investisseurs français occupent des positions significatives dans certains domaines. Il en va ainsi en particulier :

- Du tourisme qui est devenu un secteur particulièrement important pour l'Indonésie, devenant, en 1995, le quatrième poste de recettes extérieures avec 5,2 milliards de dollars de revenu, soit une croissance de 9,4 % par rapport à 1994.

En 1995, 162 projets d'investissements, dont 68 % dans l'hôtellerie ont été approuvés par le Bureau des Investissements.

Dans ce contexte, la présence française en Indonésie se développe principalement par le biais du Groupe ACCOR sous les enseignes Novotel, Mercure, Ibis. Présent dans l'archipel par le biais d'un bureau de représentation en 1993, puis d'une société de droit local en 1995, le développement du groupe a été spectaculaire. En effet, ACCOR, qui a entamé cette année la construction de quatre Novotel et trois Ibis et ouvrira cette année un total de onze hôtels, portera sa présence à 28 hôtels fin 1996, pour un total de 5.297 chambres. Ses objectifs atteignent 33 hôtels et plus de 5.000 chambres en 1998. Leur réalisation pourrait être favorisée par les coopérations conclues en Indonésie avec trois partenaires principaux que sont les importants groupes OMETRACO, PSP/DHARMALA et BRASALI, groupe Metropolitan.

- De l'électricité, avec, en particulier Electricité de France (EDF) présente en Indonésie depuis une vingtaine d'années qui est jusqu'à présent intervenue comme consultant auprès de PLN, la compagnie nationale d'électricité.

EDF a tout d'abord développé de nombreux projets d'études et de gestion des réseaux électriques. Les principaux contrats ont porté sur les études de faisabilité et d'extension du centre national de télécontrôle et de supervision du réseau haute tension de Java-Bali, et le contrat de planification de l'électrification rurale réalisé au cours de ces trois dernières années.

EDF a également développé une coopération dans le domaine du management et de la gestion. A ce titre, la société a assisté PLN pour améliorer et maîtriser son management stratégique et sa planification financière (Corporate and Financial Planning).

L'ouverture, en juillet 1989, d'un Bureau de représentation à Jakarta pour renforcer les actions du groupe a permis de maintenir l'activité dans le domaine des contrats de consultance et d'ingénierie qui, au cours des cinq dernières années, ont représenté 42 millions de francs de chiffre d'affaires.

Mais, EDF recherche désormais activement des projets d'investissement, le marché indonésien s'affirmant comme un enjeu prioritaire compte tenu de :

- l'importance du pays en termes démographiques (195 millions d'habitants), et de ses besoins de développement du réseau électrique,

- l'expérience et des références d'EDF en Indonésie,

- l'évolution engagée récemment dans le secteur électrique avec l'introduction de producteurs indépendants (IPP) et l'ouverture prochaine du capital de PLN à des investisseurs étrangers.

Dans ces perspectives, PLN et EDF sont devenus "partenaires stratégiques", grâce à la signature en mars 1995 d'un protocole par les présidents des deux sociétés prévoyant une étroite collaboration avec PLN en vue de traduire concrètement ce partenariat par des investissements communs.

Dans ce domaine doit évidemment être souligné tout l'intérêt de suivre attentivement l'évolution d'un projet de centrale nucléaire lancé dans les années 1970 sous l'impulsion de M. Bacharuddin Jussuf Habibie, ministre de la Recherche et de la Technologie.

En 1989, l'Agence Nationale de l'Energie Atomique (BATAN) confie au consultant japonais Newjec une nouvelle étude de faisabilité portant d'une part sur l'étude approfondie du site de Muria et, d'autre part, sur le choix de la technologie, du niveau de puissance et du schéma financier.

Les industriels approchés dans le cadre de cette étude sont : Nuclear Power International (NPI-partenariat, Framatome, Siemens), Westinghouse Electric (Etats-Unis), Atomic Energy of Canada Ltd (AECL) et Mistubishi.

Le rapport du consultant a été remis dans le courant de l'année mais ses conclusions ne sont pas encore publiques.

Cette étude doit aboutir à l'émission d'une consultation avec pour objectif une première centrale en fonctionnement avant l'an 2005, et une part de l'électronucléaire de 10 % de la production (12.500 MWe), en 2010.

La consultation des industriels prévue théoriquement en 1996 devrait en fait être reportée. Le projet se situe dans une perspective moyen terme pour les raisons suivantes :

- d'un point de vue politique, le choix du nucléaire n'est pas définitivement arrêté, et cette option défendue pour l'essentiel par M. Bacharuddin Jussuf Habibie, ne fait pas l'unanimité.


La présence française
dans le secteur des télécommunications indonésien

L'Indonésie, avec moins de 4 millions de lignes pour 200 millions d'habitants, soit 1,8 ligne téléphonique pour 100 habitants en 1996, reste, pour ce qui concerne les réseaux fixes, l'un des pays de la zone les moins avancés en matière de télécommunications 23( * ) . La volonté gouvernementale - exprimée au travers du plan quinquennal - de construire 5 millions de lignes à l'horizon 1999 et la vigueur de la croissance indonésienne en font donc un secteur à très fort potentiel, ainsi qu'en atteste l'expansion rapide de la téléphonie mobile (450.000 abonnés en 1996).

Les communications mobiles sont assurées par sept opérateurs. Le réseau international repose sur deux compagnies : PT Indosat (entreprise nationale partiellement privatisée en 1994) et PT Satelindo (entreprise à capitaux majoritairement privés où l'allemand Detemobil est présent pour 25 %), fondée en 1993, détiendrait désormais 10 % du marché.

Les liaisons domestiques sont assurées sous l'égide d'un opérateur national prééminent, Telkom, qui a le monopole des appels longue distance. Par ailleurs, quoique cinq de ses sept divisions régionales aient été mises en concession, il conserve l'exclusivité d'exploitation des deux plus importantes (Jakarta -36 % des lignes du pays- et Surabaya). Sur les autres zones, les contrats de concession sont conçus selon le principe d'une exploitation conjointe devant permettre à Telkom de disposer d'un réseau homogène à leur expiration. Cinq consortiums privés, dénommés KSO, composés de groupes indonésiens et d'opérateurs internationaux, se voient dans leurs zones respectives, confier pour quinze ans l'exploitation et l'extension du réseau de communications locales de Telkom. Sur ces zones les KSO sont tenus de construire 2 millions de lignes à l'horizon 1999.

Dans un consortium où l'actionnaire majoritaire est l'important groupe indonésien Astra, France Télécom s'est vu confier la zone de Sumatra où elle est chargée de la construction de 516.000 lignes et de l'exploitation et de la modernisation d'un réseau existant de 700.000 lignes.

France Télécom est présente en Indonésie depuis 1981. Cette représentation s'est surtout attachée, pendant un certain nombre d'années, à soutenir l'industrie française tout en assistant Telkom dans ses développements. Cela s'est traduit par des accords de coopération dont les principaux thèmes étaient la formation et le transfert de savoir-faire.

Puis l'opérateur français, à travers sa filiale Sofrecom, a remporté en juin 1994 avec System Kable, sur un financement de la Banque Mondiale, face à une forte concurrence, un contrat d'envergure visant à l'informatisation de la gestion d'abonnés, la gestion du réseau téléphonique et la facturation de Telkom. Dans cette affaire, la part de France Télécom atteint 28 millions de dollars. S'agissant d'une opération structurante pour l'entreprise indonésienne, l'opérateur français pourrait être désormais bien placé pour de nouveaux développements. D'ores et déjà une extension sur d'autres zones de Jakarta portant le montant de l'affaire à 40 millions de dollars est envisagée, et à plus long terme, France Télécom se trouverait dans une position favorable pour intervenir sur l'ensemble du réseau dépendant de Telkom.

Dans le cadre des conventions KSO précitées, France Télécom s'est engagée à hauteur de 35 % dans le consortium Pramindo Ikat, pour un montant de 84 millions de dollars, la part de son partenaire principal, Astra s'élevant à 60 %. L'investissement total programmé sur les 4 prochaines années par Pramindo Ikat est de l'ordre de 600 millions de dollars.

France Télécom s'intéresse également au marché de la téléphonie mobile où les autorités indonésiennes doivent accorder prochainement de nouvelles licences dans le domaine des matériels de télécommunication.

Par ailleurs, le groupe Alcatel est présent depuis 25 ans en Indonésie où il intervient dans la pose de câbles terrestres (Alcatel Contracting) et sous-marins (Surbmarcom) et l'équipement en faisceaux hertzien (Alcatel Telspace). Il a notamment participé au développement du système de téléphonie mobile numérique (GSM) de Satelindo et vient de se voir attribuer, en mars 1997, une commande d'un montant total de l'ordre de 1,3 million de francs pour l'extension de ce réseau GSM.

Enfin, TRT est le principal fournisseur du pays en réseaux de téléphonie rurale (faisceaux hertziens à faible rayon de diffusion).

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