C. LE REPOSTAGE : OEUVRE DE PIRATES OU DE CORSAIRES ?

Un certain nombre d'opérateurs postaux ont profité des failles d'un accord postal international tendant à organiser l'interconnexion des réseaux postaux pour organiser un véritable détournement d'une partie du trafic national du courrier, au détriment et aux frais de la poste de certains pays.

Les postes française et allemande sont celles qui souffrent le plus de cette pratique déloyale, qualifiée de " repostage ", qui représente aujourd'hui 22 % du courrier mondial transfrontières.

1. L'accord passé au sein de l'Union postale universelle (UPU)

Les gouvernements signataires des Actes de l'Union Postale Universelle (UPU) s'engagent à participer à la fourniture d'un service postal universel au niveau mondial. A cette fin, les opérateurs postaux publics doivent interconnecter leurs réseaux de manière à garantir la distribution du courrier reçu de l'étranger, assurer sa réexpédition sur une autre adresse et éventuellement son retour à l'expéditeur.

Pendant près d'un siècle, l'UPU ne s'est pas préoccupée du problème posé par la rémunération des prestations fournies par la poste de distribution au profit de la poste d'origine des courriers, qui facture les clients expéditeurs. Le motif invoqué était qu'un équilibre naturel s'établissait dans les relations réciproques entre postes, en se fondant sur la présomption " qu'une lettre expédiée appelle une réponse en retour ".

Cette approche ne s'appuyait, en réalité, sur aucune analyse sérieuse et reposait sur une vision quelque peu idyllique des relations entre postes. Celle-ci résultait d'une conception assez idéaliste, en vertu de laquelle les postes mondiales devaient avoir pour ambition de favoriser les échanges entre les hommes, entre tous les hommes, c'est-à-dire sans désavantager les populations les plus modestes. Dans cette perspective, les flux Sud-Nord étaient censés être rendus possibles par des tarifs internationaux abordables.

Pendant longtemps, cet idéal humaniste généreux a été partagé par tous, mais si certaines postes y sont toujours demeurées fidèles, d'autres au contraire ont, depuis une dizaine d'années, profité des failles que présente un tel système pour poursuivre, souvent de manière clandestine, des objectifs moins louables. Dès lors, les premières ont commencé à faire les frais des pratiques mercantiles des secondes. Pourtant, il fallut attendre le Congrès de Tokyo en 1969 pour voir l'UPU poser le principe des frais terminaux.

Dans une organisation où les évolutions sont lentes à intervenir en raison de la tenue d'un congrès tous les 5 ans et dans un environnement où la coopération entre postes était il y a peu encore exemplaire, les pays de l'UPU ne furent pas suffisamment attentifs aux risques découlant d'un système de frais terminaux artificiel -parce qu'idéaliste- et non lié aux coûts supportés par la poste de distribution.

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